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Date : 20150121


Dossier : A-91-14

Référence : 2015 CAF 16

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

SASKATCHEWAN POLYTECHNIC INSTITUTE

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

(ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

défendeur

et

AGRITEAM CANADA CONSULTING LTD.

COLLEGE OF THE NORTH ATLANTIC

défendeurs

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 21 janvier 2015.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 21 janvier 2015.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20150121


Dossier : A-91-14

Référence : 2015 CAF 16

CORAM :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

 

SASKATCHEWAN POLYTECHNIC INSTITUTE

 

demandeur

 

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

(ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement)

 

défendeur

 

et

 

AGRITEAM CANADA CONSULTING LTD.

 

COLLEGE OF THE NORTH ATLANTIC

 

défendeurs

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 21 janvier 2015).

LA JUGE TRUDEL

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire par laquelle le Saskatchewan Polytechnic Institute, autrefois le Saskatchewan Institute of Applied Science and Technology (SIAST), conteste une décision rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 9 janvier 2014 (numéro de dossier PR-2013-013). Le Tribunal a conclu que la plainte déposée par le SIAST à l’égard de la demande de propositions (DP) publiée par l’Agence canadienne du développement international, maintenant le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD), était fondée en partie, mais que, dans les circonstances, il n’était pas nécessaire de recommander une mesure corrective. Le SIAST demande que la décision du Tribunal soit annulée au motif que le Tribunal a omis de conclure à bon droit que la proposition du SIAST n’avait pas été évaluée conformément aux critères énoncés dans les documents de la DP.

[2]               Pour les motifs qui suivent, nous sommes tous d’avis que la demande doit être rejetée.

[3]               La DP a été publiée en août 2012. Elle sollicitait des propositions pour la prestation de services professionnels liés au projet intitulé « Projet de compétences pour l’emploi au Vietnam ». Le SIAST a soumis une proposition en réponse à la DP et, le 15 juillet 2013, il a été informé que sa proposition n’avait pas été retenue. Le soumissionnaire retenu était le consortium constitué d’Agriteam Canada Consulting Ltd. et du College of the North Atlantic (Agriteam), qui a comparu à titre d’intervenant devant le Tribunal et qui est un défendeur dans la présente demande. Le 4 septembre 2013, le SIAST a déposé sa plainte auprès du Tribunal, alléguant que le MAECD n’avait pas évalué sa proposition en fonction des critères décrits dans la DP. Le SIAST a soulevé quatre motifs de plainte précis à l’égard de l’évaluation que le MAECD a faite de quatre des exigences de la DP.

[4]               Le Tribunal a d’abord conclu, à titre préliminaire, qu’il avait compétence pour examiner la plainte du SIAST. Cette conclusion n’est pas contestée en l’espèce. Il a ensuite rejeté trois des quatre motifs de plainte, estimant que les points attribués par les évaluateurs étaient raisonnables, compte tenu du libellé des critères et du contenu de la proposition du SIAST. Il a accepté la plainte du SIAST à l’égard de l’exigence no 6, qui exigeait des soumissionnaires qu’ils dressent la liste d’un certain nombre d’acteurs pertinents. Le Tribunal a conclu que l’évaluation de ce sous‑critère avait été faite en fonction de facteurs non divulgués dans la DP et était donc déraisonnable. Cependant, le Tribunal a refusé de recommander une mesure corrective au motif que l’évaluation déraisonnable de l’exigence no 6 « n’[était] pas significative par rapport à l’issue de la procédure de passation du marché public » (motifs du Tribunal, au paragraphe 113). Même si le SIAST avait obtenu le nombre maximal de points pour cet élément, sa proposition n’aurait quand même pas été retenue. Étant donné que le SIAST n’a pas subi de préjudice important et qu’aucune allégation de mauvaise foi n’a été formulée, le Tribunal a conclu qu’il n’y avait aucune raison de recommander une mesure corrective.

[5]               Le SIAST soutient que le Tribunal a commis plusieurs erreurs qui lui ont fait rendre une décision déraisonnable. La proposition du SIAST n’a obtenu aucun point pour l’exigence no 9, qui décrit les compétences minimales du directeur canadien du projet sur le terrain. Le SIAST fait valoir que le Tribunal n’a pas bien appliqué l’expression [traduction] « fonction associée à l’enseignement » à la lumière des exigences et du contexte de sa proposition. S’il l’avait fait, il aurait conclu que la proposition satisfaisait aux critères et que le SIAST aurait dû obtenir le nombre maximal de points. Quant aux évaluations des exigences nos 1 et 5, le Tribunal a fait preuve de retenue à l’égard des points attribués par les évaluateurs, affirmant qu’ils se situaient à l’intérieur d’une marge discrétionnaire acceptable. Le SIAST soutient que, étant donné que la proposition satisfaisait en fait aux critères nécessaires, le Tribunal aurait dû conclure que les évaluateurs avaient exercé leur pouvoir discrétionnaire de manière déraisonnable et que leurs explications quant aux points accordés au SIAST étaient insuffisantes.

[6]               Les parties s’entendent pour dire que la norme de contrôle qui s’applique à la décision du Tribunal est celle de la décision raisonnable. Cela est exact : Canada (Procureur général) c. Almon Equipment Limited, 2010 CAF 193, aux paragraphes 4 et 33, [2011] 4 R.C.F. 203. En outre, les conclusions du Tribunal en matière de passation de marchés public commandent une grande retenue en raison de son expertise dans ce domaine : Defence Construction (1951) Limited c. Zenix Engineering Ltd., 2008 CAF 109, au paragraphe 20, 377 N.R. 47; Ready John Inc. c. Canada (Travaux publics et Services gouvernementaux), 2004 CAF 222, au paragraphe 29, 324 N.R. 54. Il convient également de souligner que, dans le cadre de la présente demande, la Cour examine la décision du Tribunal, et non les points que les évaluateurs ont attribués à la proposition du demandeur. La Cour ne peut substituer son propre jugement à celui du Tribunal ou des évaluateurs, et ne peut qu’annuler la décision du Tribunal si elle n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47, [2008] 1 R.C.S. 190).

[7]               Après avoir examiné attentivement le dossier et les observations orales et écrites du demandeur, nous ne sommes pas convaincus que le Tribunal a commis une erreur susceptible de révision. Le demandeur soutient essentiellement que le Tribunal n’a pas soupesé correctement l’ensemble des renseignements contenus dans la proposition. Or, il n’appartenait pas au Tribunal de le faire dans le cadre de l’enquête relative à la plainte. Dans ce type d’enquête, son rôle est de décider si l’évaluation est étayée pas une explication raisonnable, et non de se mettre à la place des évaluateurs et de réévaluer la proposition non retenue. Le Tribunal a abordé la plainte de la bonne façon et s’est demandé si les conclusions des évaluateurs pouvaient se défendre au regard des critères publiés. Il a fait preuve de la retenue nécessaire à l’égard des évaluateurs et ses conclusions relatives à chacune des plaintes appartiennent aux issues acceptables. Bien que le demandeur soit clairement insatisfait des conclusions du Tribunal concernant trois des quatre motifs de plainte, il lui incombait, dans le cadre de la présente demande, de démontrer que la décision était déraisonnable compte tenu du dossier dont disposait le Tribunal, ce qu’il n’a pas réussi à faire.

[8]               Par conséquent, la demande sera rejetée avec dépens, taxés à la somme globale de 2 500 $, pour chaque défendeur.

« Johanne Trudel »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-91-14

 

 

INTITULÉ :

SASKATCHEWAN POLYTECHNIC INSTITUTE c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement) ET AGRITEAM CANADA CONSULTING LTD., COLLEGE OF THE NORTH ATLANTIC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 JANVIER 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE PELLETIER

LA JUGE GAUTHIER

LA JUGE TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE TRUDEL

COMPARUTIONS :

David R. Elliott

Corey Villeneuve

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Jennifer Francis

 

POUR LE DÉFENDEUR

(Procureur général du Canada)

 

Karen Gainer, c.r.

 

POUR LE DÉFENDEUR

(Agriteam Canada Consulting Ltd. College of the North Atlantic)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dentons Canada LLP

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

(Procureur général du Canada)

Agriteam Canada Consulting Ltd.

Gatineau (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

(Agriteam Canada Consulting Ltd. College of the North Atlantic)

 

 

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