Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20150224


Dossier : A-367-14

Référence : 2015 CAF 53

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

 

ENTRE :

 

V.I. FABRIKANT

 

appelant

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

DU CHEF DU CANADA,

SERVICE CORRECTIONNEL CANADA

 

intimés

 

Audience tenue par vidéoconférence

entre Montréal (Québec) et Sainte-Anne-des-Plaines (Québec), le 17 février 2015.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 24 février 2015.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN


Date : 20150224


Dossier : A-367-14

Référence : 2015 CAF 53

CORAM :

LE JUGE EN CHEF NOËL

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

 

ENTRE :

 

V.I. FABRIKANT

 

appelant

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

DU CHEF DU CANADA,

SERVICE CORRECTIONNEL CANADA

 

intimés

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE EN CHEF NOËL

[1]               Le ou vers le 23 juin 2014, M. Fabrikant, qui a été déclaré plaideur quérulent en application du paragraphe 40(1) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7 (la Loi), a saisi la Cour fédérale, en vertu du paragraphe 40(3) de la Loi, d’une requête visant à obtenir l’autorisation de déposer une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision du commissaire du Service correctionnel du Canada. Il a joint à cette requête une autre requête en vue d’être dispensé du paiement des droits de dépôt se rapportant à la première requête.

[2]               Le 26 juin 2014, la juge Gagné (la juge de la Cour fédérale) a établi la directive suivante à l’égard des requêtes de M. Fabrikant : [traduction] « Le dossier de requête ne doit pas être accepté par le greffe, et aucune dispense n’est accordée quant au paiement des droits de dépôt ».

[3]               Le 11 août 2014, la juge Dawson a ordonné au greffe de la Cour d’accepter l’avis d’appel de M. Fabrikant concernant la directive susmentionnée. Le 3 septembre 2014, les parties se sont entendues sur le contenu du dossier d’appel conformément à l’article 343 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106. Bien que le dossier d’appel ait été certifié par M. Fabrikant, des communications subséquentes entre les parties ont révélé que l’affidavit de M. Fabrikant relatif à sa requête en vue d’être dispensé du paiement des droits de dépôt avait été omis.

[4]               En raison de cette omission, les intimés se sont opposés à la fixation d’une date d’audience pour l’appel devant la Cour, faisant valoir devant la juge Dawson qu’il leur faudrait du temps pour compléter le dossier d’appel, ainsi que pour modifier leur mémoire des faits et du droit, qui était fondé sur l’hypothèse erroné que la requête de M. Fabrikant visant à être dispensé du paiement des droits de dépôt n’était pas étayée par un affidavit. La juge Dawson a rejeté cet argument et a ordonné, le 9 janvier 2014, que les intimés disposassent de 14 jours pour déposer, notamment, un dossier d’appel modifié, et de 21 jours pour déposer un mémoire des faits et du droit modifié afin de supprimer les inexactitudes. Toute autre modification nécessiterait l’autorisation de la Cour.

[5]               Les intimés ont ensuite présenté un dossier d’appel modifié, mais le greffe a refusé de le déposer, car cela avait été fait après la date fixée par la juge Dawson. Le 30 janvier 2015, les intimés ont présenté une autre requête en vue de déposer un mémoire des faits et du droit modifié qui contiendrait des observations additionnelles, et de présenter de nouveaux éléments de preuve au moyen de documents de requêtes déposés dans une autre instance devant la Cour fédérale.

[6]               Au cours de l’audience, M. Fabrikant a consenti à cette requête ainsi qu’au dépôt du dossier d’appel modifié. Par conséquent, les seules questions en litige devant la Cour sont celles soulevées dans l’appel de M. Fabrikant. Dans son avis d’appel, M. Fabrikant demande à la Cour [traduction] « d’annuler la décision » de la juge de la Cour fédérale, et d’ordonner que sa requête en autorisation de dépôt soit accueillie, de même que sa requête en vue d’être dispensé du paiement des droits se rapportant à cette requête.

[7]               Dans leur mémoire des faits et du droit modifié, les intimés ont reconnu que l’affidavit du 28 décembre 2013 inclus dans le dossier d’appel modifié a été soumis à la juge de la Cour fédérale (dossier d’appel modifié, onglet 9), mais ils font valoir que M. Fabrikant avait soumis un affidavit semblable à la protonotaire Tabib (la protonotaire) dans une autre instance où il avait également déposé une requête en vue d’être dispensé du paiement des droits de dépôt. Étant donné qu’elle a rejeté sa requête et que cet exercice de son pouvoir discrétionnaire a été confirmé par la Cour (Fabrikant c. Canada, 2014 CAF 273 [Fabrikant 1]), les intimés soutiennent que nous devrions une fois encore confirmer la décision identique de la Cour fédérale portant sur un ensemble de faits semblables.

[8]               En réponse, M. Fabrikant a fait valoir que la preuve présentée à la protonotaire n’était pas utile pour trancher la présente affaire, car elle était différente de celle qui avait été présentée à la juge de la Cour fédérale. Il a affirmé qu’une preuve identique, par contre, avait été présentée au juge Stratas, et que la requête visant à le dispenser du paiement des droits de dépôt déposée dans cette affaire avait été accueillie (Fabrikant c. Canada, 2014 CAF 89 [Fabrikant 2]).

[9]               Avant d’aborder les observations des parties, j’estime nécessaire de qualifier brièvement la décision contestée. Lorsqu’une cour statue sur une requête, elle doit le faire au moyen d’une ordonnance (voir Fabrikant 1, au paragraphe 23). S’il arrive que des directives soient données au greffe relativement à une ordonnance, la directive ne constitue pas en soi le moyen approprié pour statuer sur une requête. Lorsque, comme en l’espèce, une directive a pour effet concret de statuer sur une requête, la Cour peut l’examiner comme s’il s’agissait d’une ordonnance, à condition que le libellé soit suffisamment clair pour permettre de comprendre ce qu’aurait été cette ordonnance (ibidem, au paragraphe 21).

[10]           Il ressort clairement du libellé de la directive que la juge de la Cour fédérale entendait rejeter la requête de M. Fabrikant visant à le dispenser du paiement des droits de dépôt. Il y a lieu de se demander, cependant, si elle entendait rejeter sa requête visant à déposer sa demande de contrôle judiciaire, ou si elle a simplement ordonné au greffe de ne pas déposer son dossier de requête à la suite de son refus de le dispenser du paiement des droits de dépôt. Il vaut mieux considérer qu’elle a opté pour la deuxième solution, étant donné que sa décision de ne pas le dispenser du paiement des droits de dépôt tranchait l’affaire dont elle était saisie.

[11]           La Cour doit donc se demander si la juge de la Cour fédérale a commis une erreur en rejetant la requête de M. Fabrikant visant à le dispenser du paiement des droits de dépôt. Il s’agit d’une décision de nature discrétionnaire qui doit, de ce fait, être maintenue, à moins que le juge de première instance ait agi sur la base d’un principe erroné ou n’ait pas accordé une importance appropriée à des considérations pertinentes (Jensen c. Canada (Procureur général), 2000 CanLII 15614 (CAF), au paragraphe 2). Lorsqu’une décision est rendue sans motifs, la Cour doit « examiner le dossier pour déterminer si on a porté à la connaissance [de la juge de la Cour fédérale] des documents qui pouvaient servir de fondement à l’exercice de son pouvoir discrétionnaire conformément aux règles de droit et aux exigences de la justice » (ibidem, au paragraphe 3).

[12]           Étant donné que la juge de la Cour fédérale n’a exposé aucun motif, le critère susmentionné oblige la Cour à examiner le dossier. Après avoir examiné le contenu sur lequel les parties se sont entendues, y compris l’affidavit de M. Fabrikant sur ses finances, je conclus qu’il était loisible à la juge de la Cour fédérale, compte tenu du dossier dont elle disposait, d’exercer son pouvoir discrétionnaire comme elle l’a fait. Compte tenu de la nature de cet exercice, le fait qu’un autre juge ait décidé d’exercer différemment son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur un dossier semblable dans une autre instance introduite par M. Fabrikant ne constitue pas un motif valable pour infirmer la décision de la juge de la Cour fédérale.

[13]           Je rejetterais l’appel avec dépens.

« Marc Noël »

Juge en chef

« Je suis d’accord.

Johanne Gauthier, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Richard Boivin, j.c.a. »

Traduction


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-367-14

 

INTITULÉ :

V.I. FABRIKANT c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, SERVICE CORRECTIONNEL CANADA

 

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE MONTRÉAL (QUÉBEC) ET SAINTE-ANNE-DES-PLAINES (QUÉBEC) AVEC COMPARUTION DES PARTIES

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 FÉVRIER 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE EN CHEF NOËL

 

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 24 FÉVRIER 2015

 

COMPARUTIONS :

Valery Fabrikant

 

POUR L’Appelant

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Éric Lafrenière

 

POUR LES INTIMÉS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LES INTIMÉS

 

 

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