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Date : 20170425


Dossier : A‑308‑16

Référence : 2017 CAF 81

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

BRIAN ALLEN, DAVID DUNCAN,

JOLANTA MALGORZATA KANABUS-KAMINSKA, DAVID O’NEIL, DARWIN REED

 et L’ASSOCIATION DES EMPLOYÉS

DU CONSEIL DE RECHERCHES

demandeurs

et

LE CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES

DU CANADA

défendeur

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 25 avril 2017.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 25 avril 2017.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20170425


Dossier : A‑308‑16

Référence : 2017 CAF 81

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE WOODS

 

 

ENTRE :

BRIAN ALLEN, DAVID DUNCAN,

JOLANTA MALGORZATA KANABUS-KAMINSKA, DAVID O’NEIL, DARWIN REED

et L’ASSOCIATION DES EMPLOYÉS

DU CONSEIL DE RECHERCHES

demandeurs

et

LE CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES

DU CANADA

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 25 avril 2017.)

LA JUGE GAUTHIER

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision (2016 CRTEFP 76) par laquelle un arbitre de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la Commission) a rejeté divers griefs déposés par les demandeurs.

[2]  L’Association des employés du Conseil de recherches (l’AECR) est l’agent négociateur qui représente la majorité des employés du Conseil national de recherches du Canada (le CNRC). Elle a présenté un grief de principe concernant une pratique adoptée par le CNRC dans le calcul des indemnités de départ pour mise en disponibilité qui sont versées aux membres de l’unité de négociation de la catégorie Technique (AT).

[3]  Les cinq demandeurs étaient tous des membres de l’AERC appartenant à l’unité de négociation AT jusqu’à leur mise en disponibilité par le CNRC en 2013. Leurs griefs individuels, que l’arbitre a instruits en même temps que le grief de l’AECR, concernent tous les sommes qu’on aurait dû selon eux leur verser, en application de la convention collective, au moment de leur mise en disponibilité. Ces cinq demandeurs avaient choisi de se prévaloir de la clause 56.10a de la convention collective en question, clause qui leur permettait d’encaisser leur indemnité de départ accumulée (jusqu’à un maximum de 30 semaines) après la suppression des dispositions relatives aux indemnités de départ volontaire de la convention.

[4]  Les demandeurs ont soulevé devant notre Cour les deux questions en litige suivantes :

  1. L’arbitre a-t-il interprété déraisonnablement la convention collective applicable?

  2. L’arbitre a-t-il commis une erreur en omettant d’appliquer la doctrine de la préclusion pour question déjà tranchée, du fait que la Commission avait déjà tranché la même question dans une instance sur le mandat qui avait opposé essentiellement les mêmes parties en 2012 (2012 CRTFP 115)?

[5]  Les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle applicable à la seconde question. Nous sommes d’avis que l’application par l’arbitre de la doctrine de common law de la préclusion pour question déjà tranchée aux faits particuliers portés devant lui doit être contrôlée suivant la norme de la décision raisonnable (Nor‑Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals, 2011 CSC 59, [2011] 3 R.C.S. 616 (Nor‑Man), et Loewen c. Manitoba Teachers’ Society, 2015 MBCA 13).

[6]  L’arbitre a conclu que, pour appliquer le plafond (c’est‑à‑dire l’indemnité maximale à laquelle un employé a droit) que fixe à 70 semaines l’article 3.6.13.1 de la Politique sur le réaménagement des effectifs (la Politique sur le RE), incorporée à la convention collective par la clause 55.1 de celle‑ci, il faut prendre en considération ce à quoi l’employé a droit au titre de la clause 56.1.3, qui porte expressément sur cette question dans le contexte des mises en disponibilité. Nous croyons comprendre, d’après les motifs de l’arbitre et l’annexe 1 de ces motifs, que c’est seulement après avoir calculé l’effet du plafond de l’indemnité maximale à laquelle un employé a droit, plafond fixé par la Politique sur le RE, que la clause 56.7.1 entre en jeu pour établir la somme à payer au moment du départ, en raison des autres prestations de départ déjà versées. Par exemple, tout montant versé par anticipation à un employé qui a choisi l’encaissement prévu à la clause 56.10a serait déduit de la somme à lui payer au titre de la mise en disponibilité, et ce, dans le but de donner effet à cette disposition et d’éviter l’accumulation pyramidale des prestations.

[7]  Les demandeurs soutiennent qu’il y avait une manière plus appropriée d’interpréter l’article 3.6.13.1 de la Politique sur le RE, afin de donner effet à toutes les clauses applicables de l’article 56, lequel traite des indemnités de départ. Plus précisément, ils font valoir que, d’après le sens ordinaire de la clause 56.7.1, les semaines d’emploi continu pour lesquelles l’employé a reçu une autre forme d’indemnité de départ au titre des clauses 56.9 et 56.10a devraient être déduites du maximum auquel la clause 56.1.3 lui donne droit avant l’application du plafond de 70 semaines fixé par l’article 3.6.13.1 de la Politique sur le RE. Cette méthode entraînerait, relativement à tous les griefs individuels dont l’arbitre était saisi, le paiement à leurs auteurs d’une somme supérieure à celle que ces employés auraient touchée s’ils avaient choisi de se prévaloir de la clause 56.10b et de recevoir toutes les prestations de départ en un paiement unique au moment de la cessation d’emploi.

[8]  S’il est évident que les motifs de l’arbitre auraient pu être formulés plus clairement, nous sommes convaincus, après examen de la décision dans son ensemble et dans son contexte, que les motifs sont suffisants pour nous permettre d’exercer notre compétence et de faire les rapprochements nécessaires (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708.

[9]  L’interprétation des conventions collectives est au cœur même de l’expertise de l’arbitre de griefs. Il est certes concevable que l’arbitre ou notre Cour ait pu adopter l’interprétation proposée par les demandeurs, mais ce n’est pas la question dont nous sommes saisis. La question que nous devons trancher est celle de savoir si l’interprétation retenue par l’arbitre appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[10]  Nous estimons que l’arbitre s’est montré réceptif et attentif à tous les arguments avancés par les demandeurs, y compris ceux se rapportant au poids à accorder et à l’effet à donner à la décision de 2012 de la Commission. Nous n’avons pas été convaincus que l’arbitre a commis, dans l’interprétation de la convention collective, une erreur justifiant notre intervention. Sa conclusion était raisonnable.

[11]  En ce qui concerne la préclusion pour question déjà tranchée, les parties conviennent que l’arbitre n’était pas d’avis que la Commission a eu à interpréter en 2012 les dispositions sur lesquelles il devait lui-même se prononcer, notamment la clause 56.7.1. C’est là en fait la raison pour laquelle le CNRC a prétendu qu’il n’était pas nécessaire pour lui de décider si la décision de 2012 était manifestement erronée. Les demandeurs soutiennent que l’arbitre a commis une erreur en arrivant à cette conclusion. Mais ils ne nous ont pas convaincus que la décision de l’arbitre de ne pas appliquer la préclusion pour question déjà tranchée était déraisonnable dans les circonstances de l’espèce et eu égard aux principes qui sous-tendent l’arbitrage des conflits du travail au Canada (Nor‑Man).

[12]  Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée, avec dépens.

« Johanne Gauthier »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DoSSIER :

A‑308‑16

DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE DE LA DÉCISION DE LA COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DANS LA FONCTION PUBLIQUE EN DATE DU 17 AOÛT 2016, RÉFÉRENCÉE 2016 CRTEFP 76

DOSSIER :

A‑308‑16

 

 

INTITULÉ :

BRIAN ALLEN, DAVID DUNCAN, JOLANTA MALGORZATA KANABUS‑KAMINSKA, DAVID O’NEIL, DARWIN REED et L’ASSOCIATION DES EMPLOYÉS DU CONSEIL DE RECHERCHES c. LE CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 25 AVRIL 2017

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE BOIVIN

LA JUGE WOODS

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE GAUTHIER

COMPARUTIONS :

Christopher Rootham

Karine Dion

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Michel Girard

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nelligan O’Brien Payne, s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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