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Date : 20021002

Dossier : A-516-00

Référence neutre : 2002 CAF 356

CORAM :       LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LINDEN

LE JUGE LÉTOURNEAU

ENTRE :

                                                               THOMAS WIHKSNE

                                                                                                                                                         appelant

                                                                                   et

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                            intimé

                  Audience entendue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 30 septembre 2002.

                              Jugement rendu à l'audience à Vancouver (Colombie-Britannique),

                                                    le 30 septembre 2002, motifs à suivre.

                      Motifs prononcés à Vancouver (Colombie-Britannique), le 2 octobre 2002.

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :                                                                              LE JUGE DÉCARY

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                                    LE JUGE LINDEN

                                                                                                                            LE JUGE LÉTOURNEAU


Date : 20021002

Dossier : A-516-00

Référence neutre : 2002 CAF 356

CORAM :       LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LINDEN

LE JUGE LÉTOURNEAU

ENTRE :

                                                               THOMAS WIHKSNE

                                                                                                                                                         appelant

                                                                                   et

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                            intimé

                                                           MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DÉCARY


[1]                 Le 10 juin 1995, l'appelant a présenté une demande de prestations d'invalidité en vertu du paragraphe 42(2) du Régime de pensions du Canada (le Régime), L.R.C. (1985), ch. C-8. Développement des ressources humaines Canada l'a informé, dans une lettre datée du 6 février 1997, que sa demande était rejetée. Le 19 février 1997, l'appelant a déposé une demande de révision par le ministre. Dans une lettre en date du 27 novembre 1997, l'appelant a été informé que sa demande de révision était rejetée.

[2]                 Le 15 décembre 1997, l'appelant a interjeté appel de cette décision devant le tribunal de révision. L'appel a été rejeté le 28 août 1998. Le 26 octobre 1998, l'appelant a déposé une demande d'autorisation d'interjeter appel en vertu de l'article 83 du Régime. La demande a été rejetée le 24 juin 1999 par le commissaire désigné par le président de la Commission d'appel des pensions. Le 13 août 1999, l'appelant a sollicité le contrôle judiciaire de la décision du commissaire. Cette demande a été rejetée le 21 juillet 2000 par le juge McKeown, dans une décision publiée à 186 F.T.R. 124. D'où le présent appel.

[3]                 La Cour a accueilli l'appel à l'audience, motifs à suivre. Voici ces motifs.

[4]                 En août 2001, dans l'arrêt Villani c. Canada (Procureur général), [2002] 1 C.F. 130, la Cour d'appel fédérale a conclu que l'interprétation donnée par la Commission ces dernières années des termes « détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice » , que l'on trouve au paragraphe 82(1) du Régime, était trop stricte et elle lui a substitué une approche plus libérale.


[5]                 Il est admis que le tribunal de révision, le commissaire et le juge des requêtes, qui n'avaient pas encore l'arrêt Villani, ont appliqué un critère inapproprié. Ceci a mené le procureur général à admettre que le présent appel devait être accueilli, la question étant renvoyée à un commissaire pour nouvel examen de la demande d'autorisation d'en appeler. Suite à cette concession, l'avocat de l'appelant a suggéré que la question soit renvoyée au commissaire avec la directive d'accueillir la demande d'autorisation d'appel.

[6]                 Par conséquent, sauf la question des dépens, la seule question qui demeure en litige consiste à savoir si la Cour doit renvoyer l'affaire avec la directive d'accueillir la demande d'autorisation d'appel.

[7]                 Tout récemment, notre Cour a eu l'occasion d'examiner sa compétence de délivrer une telle directive, dans une affaire qui impliquait la Commission d'appel des pensions. Dans l'arrêt Rafuse c. Canada (Commission d'appel des pensions), (2002) 286 N.R. 385, 2002 CAF 31, la Cour a conclu, au paragraphe 14, qu' « il s'agit d'un pouvoir exceptionnel ne devant être exercé que dans les cas les plus clairs » . Dans les circonstances de cette dernière affaire, la Cour a décidé de ne pas exercer ce pouvoir.


[8]                 Je veux ouvrir une brève parenthèse pour indiquer que dans l'affaire Rafuse, l'erreur de droit portait sur le fait que le commissaire n'avait pas appliqué le critère approprié pour accorder la demande d'autorisation d'appel et non, comme c'est le cas ici, qu'il n'avait pas appliqué le critère juridique approprié pour déterminer s'il existait une invalidité grave au sens du Régime. De plus, dans l'affaire Rafuse le demandeur avait déjà obtenu un constat d'invalidité grave et la seule question à trancher portait sur la date à laquelle cette invalidité avait commencé, ce qui est essentiellement une question de fait.

[9]                 En l'instance, nous savons, et le procureur général du Canada l'admet, que la réclamation de l'appelant a été examinée par tous les décideurs à tous les niveaux du processus en utilisant un critère inapproprié. On peut donc dire qu'en l'instance, l'appelant n'a jamais vraiment eu l'occasion de présenter son point de vue, que ce soit devant le tribunal de révision, le commissaire ou le juge des requêtes. Si la question était renvoyée au commissaire pour nouvel examen de la demande d'autorisation d'en appeler, il arriverait inévitablement à la conclusion qu'au vu de l'application d'un critère inapproprié par le tribunal de révision, l'existence d'une cause défendable est démontrée, quels que soient les faits qui fondent l'affaire (voir Callihoo c. Procureur général du Canada, (2000) 190 F.T.R. 114 (le juge MacKay, 1re inst.)) et il n'aurait d'autre option que d'accorder l'autorisation d'appel.

[10]            Selon moi, il n'y a pas lieu dans cette affaire, qui traîne depuis si longtemps, de retarder encore l'inévitable résultat de la demande d'autorisation d'appel et d'imposer à l'appelant et à la Commission des coûts additionnels qui en bout de ligne ne sont pas nécessaires. Il s'agit ici d'un cas très clair où l'intérêt de la justice exige qu'on délivre une directive de mettre fin à la procédure.


[11]            L'appelant cherche à obtenir le remboursement complet de ses dépens à ce jour en Cour fédérale. On ne m'a pas convaincu qu'il y avait des raisons valables de déroger à l'article 407 des Règles, qui porte qu'en général les dépens sont taxés en conformité avec la colonne III du tarif B. Comme le juge Wetston l'affirme dans Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd. (1998) 159 F.T.R. 233, « [u]n principe important sous-tend les dépens : l'allocation de dépens représente un compromis entre l'indemnisation de la partie qui a gain de cause et la non-imposition d'une charge excessive à la partie qui succombe » . Cette décision a été confirmée à (2001) 199 F.T.R. 320 (C.A.F.). Il est clair que le tarif B est maintenant dépassé dans bien des cas, mais en l'absence de facteurs particuliers (voir le paragraphe 400(3) des Règles) la Cour doit être très prudente lorsqu'il s'agit de récrire le tarif B - une tâche qui incombe au Comité des règles - et d'essayer de déterminer les faits relatifs aux dépens, tâche qui doit être laissée aux officiers taxateurs spécialisés en ces matières. J'adopte ici les mots du juge Nadon, alors à la Section de première instance, dans Hamilton Marine & Engineering Ltd. c. CSC Group Inc. (1995) 99 F.T.R. 285 :

J'ai indiqué aux avocats pendant l'audience qu'il ne faisait aucun doute que, dans la plupart des cas, les frais prévus au tarif B ne sont pas suffisants pour dédommager entièrement la partie qui a gain de cause. Je leur ai également indiqué qu'à mon avis le tarif doit nécessairement demeurer la règle et qu'une augmentation des frais prévus au tarif doit être l'exception. Je voulais dire que le pouvoir discrétionnaire conféré à la Cour d'augmenter les sommes prévues au tarif, aux termes des paragraphes 344(1) et (6) des Règles de la Cour fédérale, ne doit pas être exercé à la légère. Autrement dit, le fait que les frais juridiques de la partie qui obtient gain de cause soient de beaucoup supérieurs aux sommes auxquelles cette partie a droit en vertu du tarif n'est pas en soi un facteur justifiant la majoration des frais prévus.


[12]            Comme il n'y a pas de facteurs particuliers en l'instance, l'appelant a droit à ses dépens, en notre Cour et devant la section de première instance, taxés de la façon habituelle, savoir par un officier taxateur appliquant la colonne III du tarif B.

[13]            L'appel est accueilli, la décision du juge des requêtes est annulée et la question est renvoyée au président ou au vice-président de la Commission d'appel des pensions, ou à un commissaire qu'ils désigneront, pour nouvelle décision fondée sur notre avis que la demande d'autorisation d'appel doit être accordée.

[14]            L'appelant a droit à ses dépens devant nous et en première instance, à taxer conformément à la colonne III du tarif B.

« Robert Décary »

ligne

                                                                                                             Juge                              

                                                                                                                   

« Je souscris à ces motifs

     Allen M. Linden, juge »

« Je souscris à ces motifs

     Gilles Létourneau, juge »

    

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                               COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

    

DOSSIER :                              A-516-00

INTITULÉ :                              Thomas Wihksne c. Le procureur général du Canada

  

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Vancouver (C.-B.)

  

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 30 septembre 2002

  

MOTIFS DU JUGEMENT PAR : LE JUGE DÉCARY

ONT SOUSCRIT À CES MOTIFS :            LE JUGE LINDEN

LE JUGE LÉTOURNEAU

DATE DES MOTIFS :                       Le 2 octobre 2002

COMPARUTIONS :

M. Craig Paterson                                                             POUR L'APPELANT

M. John Vaissi Nagy                                                         POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Paterson & Associates                                                                  POUR L'APPELANT

Vancouver

Morris Rosenberg                                                              POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

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