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Date : 20060727

Dossier : A-535-05

Référence : 2006 CAF 266

 

 

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE LINDEN

                        LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

JULIUS ROITMAN

intimé

 

 

 

 

Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 27 juin 2006.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 27 juillet 2006.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                           LE JUGE DÉCARY

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                        LE JUGE LINDEN

                                                                                                                      LA JUGE SHARLOW


Date : 20060727

Dossier : A-535-05

Référence : 2006 CAF 266

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE LINDEN

                        LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

JULIUS ROITMAN

intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DÉCARY

 

[1]               Le présent appel soulève encore une fois la question des compétences respectives de la Cour fédérale et de la Cour canadienne de l’impôt dans des demandes se rapportant à des cotisations d’impôt.

 

Les faits

 

[2]               L’intimé, M. Roitman, est un homme d’affaires qui, pendant la période pertinente, était administrateur, président, gestionnaire et unique actionnaire de Gold Seal Motors Ltd. (Gold Seal). Gold Seal achetait et vendait des automobiles. Ses stocks étaient en partie vendus dans le cadre d’enchères publiques, auquel cas Gold Seal déduisait, aux fins de l’impôt sur le revenu, les montants qu’elle avait versés à des particuliers pour que ceux‑ci conduisent le véhicule jusqu’au site de la vente.

 

[3]               Le ministre du Revenu national (le ministre) a refusé certaines demandes de déduction de dépenses. M. Roitman et Gold Seal se sont opposés aux nouvelles cotisations établies pour leurs années d’imposition 2000, 2001 et 2002 et ont soumis au ministre des observations à l’appui de leur position.

 

[4]               Le ministre a accepté les observations en partie et il a répondu en présentant une proposition de règlement. Le ministre a informé M. Roitman que s’il ne consentait pas à la proposition de règlement, il ratifierait la cotisation et que M. Roitman pourrait ensuite saisir la Cour canadienne de l’impôt de l’affaire. Pendant la période pertinente, M. Roitman et Gold Seal étaient représentés par un comptable agréé lors des négociations en vue du règlement.

 

[5]               Le 23 décembre 2004, M. Roitman et Gold Seal ont tous deux accepté la proposition de règlement que le ministre avait faite. Ils ont signé un règlement en vertu duquel le ministre devait établir de nouvelles cotisations à l’égard de M. Roitman et de Gold Seal conformément à son projet de règlement.

 

[6]               En signant le règlement, M. Roitman et Gold Seal ont reconnu qu’ils [Traduction] « connaiss[aient] les paragraphes 165(1.2) et 169(2.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu » et qu’ils comprenaient qu’en acceptant la proposition, ils [Traduction] « ser[aient] empêchés de déposer une opposition ou un appel en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu » (dossier d’appel, page 81).

 

[7]               Le 24 janvier 2005, M. Roitman a fait l’objet d’une nouvelle cotisation selon les conditions du règlement. Conformément à ces conditions, M. Roitman n’a pas fait opposition à la nouvelle cotisation.

 

[8]               Le 15 juin 2005, M. Roitman a déposé la déclaration en cause en l’espèce.

 

[9]               La déclaration désigne la demande comme un recours collectif envisagé. M. Roitman [Traduction] « pour son propre compte et pour le compte de tous les membres du groupe » sollicite des dommages‑intérêts contre Sa Majesté la Reine [Traduction] « constituée partie aux présentes à titre de représentante du gouvernement fédéral du Canada et, plus précisément, de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’Agence) ». M. Roitman allègue que l’établissement d’une nouvelle cotisation à son égard par la Couronne constituait [Traduction] « une conduite délibérée [...] en vue d’empêcher [...] le demandeur de se prévaloir de la loi ». Les dommages‑intérêts sollicités sont [Traduction] « des dommages‑intérêts pour l’exercice fautif d’une charge publique », « des dommages‑intérêts spéciaux, y inclus les dépenses afférentes à la défense contre les nouvelles cotisations envisagées et ceux de la poursuite de l’appel au civil en matière d’impôt sur le revenu » ainsi que « des dommages‑intérêts punitifs, dommages‑intérêts exemplaires et dommages‑intérêts majorés ».

 

[10]           Le 2 août 2005, la Couronne a déposé une défense.

 

[11]           Le 26 août 2005, la Couronne a présenté une requête conformément à l’article 221 des Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles) au motif que la déclaration n’était pas pertinente, qu’elle était redondante, scandaleuse, frivole et vexatoire, et qu’elle constituait par ailleurs un abus de procédure. La Couronne a essentiellement soutenu que la déclaration devait être radiée parce qu’elle visait en fait à contester la légalité des cotisations d’impôt établies par le ministre, question qui relève exclusivement de la compétence de la Cour canadienne de l’impôt et à l’égard de laquelle, de toute façon, M. Roitman avait renoncé au droit de s’opposer et d’interjeter appel.

 

[12]           Subsidiairement, la Couronne a demandé la tenue d’une audience en vue de la détermination préliminaire d’une question de droit se rapportant à l’interprétation de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans La Reine c. Franklin, 2002 DTC 6803 (C.A.F.).

 

[13]           La requête a été entendue le 23 septembre 2005. Les motifs ont été prononcés le 14 octobre 2005 et l’ordonnance a été rendue le 8 novembre 2005 (2005 CF 1385). Le juge de la Cour fédérale a rejeté la requête en radiation de la déclaration. Se fondant exclusivement sur l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Swift c. Sa Majesté la Reine, 2004 DTC 6651 (C.A.F.), le juge a implicitement conclu que la demande ne visait pas à obtenir l’annulation de la cotisation, mais qu’il s’agissait essentiellement d’une demande de dommages‑intérêts fondée sur les mesures frauduleuses de l’Agence. Il a ensuite ordonné que la question de droit suivante soit tranchée avant l’instruction :

L'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Franklin c. Ministre du Revenu national [2002 DTC 6803], oblige‑t‑il le ministre à effectuer une compensation entre un avantage conféré au titre du paragraphe 15(1) et tout prêt de l'actionnaire consigné par le contribuable, quelles que soient les circonstances, et empêche‑t‑il le ministre d'examiner les cas visés au paragraphe 15(1) en fonction des faits particuliers de chacun, dans tous les cas et quelles que soient les circonstances?

 

[14]           La Couronne a déposé un avis d’appel le 9 novembre 2005.

 

Traitement d’une requête en radiation

 

[15]           La présente requête en radiation est fondée sur les motifs suivants : [Traduction] « [L]a déclaration n’est pas pertinente, elle est redondante, scandaleuse, frivole et vexatoire et elle constitue par ailleurs un abus de procédure ». On peut dire qu’une demande est frivole lorsque, à supposer que les faits exposés dans une déclaration soient exacts, il est évident et manifeste ou au‑delà de tout doute raisonnable qu’elle ne saurait aboutir (Hunt c. Carey Canada Inc., [1990] 2 R.C.S. 959, juge Wilson, page 980). Lorsqu’il est jugé qu’une demande ne relève pas de la compétence du tribunal devant lequel elle est présentée, la demande sera radiée pour le motif qu’elle est frivole, étant donné qu’il n’existe aucune cause d’action valable ou qu’elle constitue un abus de procédure.

 

[16]           Une déclaration ne doit pas être prise au pied de la lettre. Le juge doit aller au‑delà des termes employés, des faits allégués et de la réparation demandée, et il doit s’assurer que la déclaration ne constitue pas une tentative déguisée visant à obtenir devant la Cour fédérale un résultat qui ne peut par ailleurs pas être obtenu de cette cour. Pour reprendre les remarques que la Cour suprême du Canada a faites récemment dans l’arrêt Vaughan c. Canada, [2005] 1 R.C.S. 146, au paragraphe 11, lesquelles ont été appliquées par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Prentice c. Canada (Gendarmerie royale du Canada), 2005 CAF 395, au paragraphe 24, autorisation de pourvoi refusée par la Cour suprême du Canada, 19 mai 2006, CSC 31295, le demandeur n’est pas autorisé à présenter son action de façon un peu artificielle, quant au délit fondé sur la négligence, afin de contourner l’application d’une loi.

 

La déclaration

 

[17]           La déclaration est un document soigneusement rédigé par des avocats chevronnés. Elle met carrément en question la validité et le bien‑fondé de la nouvelle cotisation. Les paragraphes 21 à 26 montrent que la demande est fondée sur l’assertion selon laquelle le ministre n’est pas légalement autorisé à établir la nouvelle cotisation. L’essentiel de la cause d’action est énoncé aux paragraphes 25 et 26 :

[traduction]

25. Le demandeur déclare que les mesures que prend l'ADRC par l'entremise de ses dirigeants de la Division des appels et de la Division de la vérification du Bureau principal et par l'entremise de ses agents et employés dans tous les BSF, équivalent à une erreur délibérée dans l'application de la loi, comme l'a établi l'arrêt Franklin, et que, de ce fait, l'ADRC adopte une conduite illicite et délibérée à titre de titulaire d'une charge publique. Le demandeur estime de plus que l'ADRC était consciente du caractère illicite de sa ligne de conduite et savait que cette conduite était susceptible de causer préjudice au demandeur.


26. Le demandeur déclare que la conduite délibérée de l'ADRC décrite ci‑dessus, en vue d'empêcher les contribuables, notamment le demandeur, de se prévaloir de la loi constitue une violation d'un pouvoir conféré par la loi, l'exercice fautif d'une charge publique, une administration négligente de la loi, un abus de pouvoir et un mépris des principes de justice fondamentale qui ont occasionné au demandeur des pertes et préjudices et donné lieu à l'enrichissement sans cause de la défenderesse.

 

 

[18]           À l’audience, l’avocat de M. Roitman a presque reconnu que la demande ne pouvait mener à rien à moins qu’il ne soit conclu que l’avis de nouvelle cotisation était erroné en droit et qu’il résultait de l’exercice illicite du pouvoir conféré au ministre par la loi. Il soutient que le ministre n’a pas le droit d’interpréter sciemment la loi d’une façon erronée, ce qui est précisément, selon son argument, ce que le ministre a fait en n’appliquant pas les enseignements donnés par la Cour dans l’arrêt Franklin. L’avocat a également confirmé qu’aucune fraude n’était alléguée et que la déclaration ne fait pas mention, ou ne vise pas l’annulation, du règlement ou de la renonciation au droit du contribuable de soulever une opposition ou d’interjeter appel.

 

Compétence de la Cour fédérale et de la Cour canadienne de l’impôt

 

[19]           Selon le paragraphe 152(8) de la Loi de l’impôt sur le revenu, une cotisation est réputée être valide et exécutoire à moins d’être modifiée ou annulée conformément à la procédure d’appel prévue par la Loi. La Cour de l’impôt a compétence exclusive pour déterminer le bien‑fondé des cotisations d’impôt. Cette compétence exclusive est établie par une combinaison du paragraphe 152(8) et de l’article 169 de la Loi de l’impôt sur le revenu, de l’article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt ainsi que des articles 18, 18.1 et 18.5 de la Loi sur les Cours fédérales.

 

[20]           Il est établi en droit que la Cour fédérale n’a pas compétence pour attribuer des dommages‑intérêts ou pour accorder toute autre réparation sollicitée sur la base d’une nouvelle cotisation d’impôt non valide, à moins que la nouvelle cotisation n’ait été annulée par la Cour de l’impôt. Si elle attribuait de tels dommages‑intérêts ou accordait une telle réparation, elle se trouverait à permettre de contester accessoirement le bien‑fondé de la cotisation. (Voir M.R.N. c. Parsons, 84 DTC 6345 (C.A.F.), page 6346; Khan c. M.R.N., 85 DTC 5140 (C.A.F.); Optical Recordings Corp. c. Canada, [1991] 1 C.F. 309 (C.A.), pages 320 et 321; Bechtold Resources Limited c. M.R.N., 86 DTC 6065 (C.F. 1re inst.), page 6067; P.G. Canada c. Webster (2003), 57 DTC 5701 (C.A.F.); Walker c. Canada, 2005 CAF 393; Sokolowska c. La Reine, 2005 CAF 29; Walsh c. Canada (M.R.N.), 2006 CF 56; Henckendorn c. Canada, 2005 CF 802; Angell c. Canada (M.R.N.), 2005 CF 782.)

 

[21]           Il est également établi en droit que la Cour canadienne de l’impôt n’a pas compétence pour annuler une cotisation parce qu’elle constitue un abus de procédure ou un abus de pouvoir (voir Main Rehabilitation Co. Ltd. c. La Reine, 2004 CAF 403, paragraphe 6; Obonsawin c. La Reine, 2004 G.T.C. 131 (C.C.I.); Burrows c. Canada, 2005 CCI 761; Hardtke c. Canada, 2005 CCI 263).

 

[22]           Dans l’arrêt Walker, précité, la Cour, en décidant que la « validité juridique » d’un avis de nouvelle cotisation ne pouvait pas être contestée devant la Cour canadienne de l’impôt, a dit ce qui suit au paragraphe 13 :

L’article 18.5 de la Loi [Loi sur les Cours fédérales] doit être interprété, dans la mesure du possible, de manière à éviter les procédures parallèles devant la Cour fédérale et la Cour canadienne de l’impôt, à l’égard de deux questions essentiellement identiques.

 

[23]           Dans l’arrêt Addison & Leyen Ltd. c. Canada, 2006 CAF 107, la juge Sharlow, au nom de la majorité, a statué que l’exercice par le ministre du Revenu national du pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l’article 160 de la Loi de l’impôt sur le revenu de rendre un tiers solidairement responsable du paiement de l’obligation fiscale primaire du contribuable pouvait être contesté devant la Cour fédérale. Pour tirer cette conclusion, elle s’est essentiellement fondée sur le fait que le recours à l’article 160 est discrétionnaire et « que l’article 160 est essentiellement un outil de recouvrement et non de cotisation » (paragraphe 71). Elle a pris soin d’ajouter au paragraphe 74 :

Il va sans dire qu’une réparation aussi extrême ne serait pas accordée à la légère, et ne le serait que dans les cas d’abus les plus flagrants.

 

[24]           En l’espèce, la cotisation d’impôt en litige est une cotisation se rapportant à l’obligation fiscale de M. Roitman lui‑même. Le véritable motif invoqué à l’appui de la réparation demandée est l’allégation selon laquelle la cotisation va à l’encontre du présumé enseignement donné par la Cour dans l’arrêt Franklin. Les dommages‑intérêts sont en réalité demandés en fonction du fait qu’une nouvelle cotisation non valide a été établie sur la base d’une interprétation erronée du droit. À toutes fins utiles, c’est donc la légalité ou le bien‑fondé en droit de l’avis de nouvelle cotisation qui est en litige. Cette question relève manifestement de la compétence exclusive de la Cour canadienne de l’impôt.

 

[25]           L’avocat de M. Roitman allègue que le ministre a commis un abus de procédure en établissant l’avis de cotisation. Le présumé abus serait une interprétation inexacte délibérée de la loi. L’allégation laisse supposer que la loi a été interprétée d’une façon inexacte, ce qui de son côté laisse supposer que la nouvelle cotisation n’est pas valide, une décision qui peut uniquement être rendue par la Cour canadienne de l’impôt. Pour reprendre les remarques que le juge Hugessen a faites dans l’arrêt Walsh (précité, paragraphe 5), la réparation fondée sur les présumées actions délibérées du ministre ou de l’Agence « perdrait tout son sens si elle était dissociée, comme il se doit, de la question de fond que constitue la validité de la cotisation elle‑même ». Il y a lieu de souligner que la question même au sujet de laquelle le juge a ordonné qu’une détermination soit faite avant l’instruction devant la Cour fédérale est précisément le type de question juridique qui relèverait normalement de l’expertise et du ressort de la Cour canadienne de l’impôt. En fin de compte, il est clair que la demande de dommages‑intérêts peut uniquement être accueillie si la nouvelle cotisation est d’abord jugée non valide. La déclaration est au mieux prématurée.

 

[26]           En outre, étant donné que l’avis de nouvelle de cotisation a été établi le 24 janvier 2005 et que la déclaration a été déposée le 15 juin 2005, on ne peut même pas dire que M. Roitman n’était pas au courant de la présumée conduite irrégulière du ministre dans le délai, prévu au paragraphe 166.1(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu, pendant lequel le contribuable peut demander au ministre de proroger le délai pour contester une nouvelle cotisation. Il va sans dire que la Cour fédérale n’acquiert pas compétence sur des questions de cotisations d’impôt simplement parce que le contribuable a omis, en temps opportun, de se prévaloir des mesures que la Loi de l’impôt sur le revenu l’autorise à prendre.

 

[27]           Le juge de la Cour fédérale s’est exclusivement fondé sur l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Swift. Avec égards, l’arrêt Swift, qui a été rendu dans de brefs motifs prononcés à l’audience, ne peut pas s’appliquer à des faits autres que ceux qui avaient été portés à la connaissance de la Cour. Le contribuable alléguait notamment que l’Agence avait [Traduction] « sciemment fait de fausses déclarations à l’égard de la TPS », que le ministre avait établi [Traduction] « des cotisations frauduleuses imaginaires » et que l’Agence avait [Traduction] « pris des dispositions » avec les syndics de faillite en vue de l’abandon des appels qu’il avait interjetés à l’encontre des cotisations. La Cour a simplement laissé au contribuable le bénéfice du doute en exerçant son pouvoir discrétionnaire au stade d’une requête en radiation. De l’avis de la Cour, bien que la déclaration fût « un récit plutôt décousu qui se rattach[ait] aux mesures prises par l’ADRC » et qu’elle « manqu[ait] de détails concernant les allégations de fraude », il « n’[était] pas si (non souligné dans l’original) évident qu’elle [fût] frivole et vexatoire » (paragraphe 9). En l’espèce, l’avocat a reconnu qu’aucune fraude n’était alléguée.

 

[28]           La conclusion que j’ai tirée est semblable à celle à laquelle est arrivée la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’arrêt Smith et al. c. Canada (Attorney General) et al., 2006 BCCA 237, où un contribuable avait exercé un recours collectif devant la Cour suprême de la Colombie‑Britannique contre la Reine du chef du Canada, le ministre du Revenu national, l’Agence des douanes et du revenu du Canada et d’autres personnes. Il était essentiellement allégué dans la demande que des conducteurs de camion devaient être autorisés à déduire les frais de repas aux taux que le gouvernement fédéral accorde à ses employés lorsque ceux‑ci font des voyages d’affaires. En rejetant la demande au motif qu’elle ne révélait aucune cause d’action valable, le juge Donald a dit ce qui suit :

[Traduction

[10]         Les appelants plaident également d’autres causes d’action : négligence; violation de l’obligation fiduciaire; enrichissement sans cause; abus de confiance; et, comme l’avocat des appelants l’a dit dans son argumentation en appel, l’abus dans l’exercice d’une charge publique, moyen qui n’est toutefois pas invoqué dans les actes de procédure.

 

[11]         Les causes d’action ont toutes un élément commun : il est allégué que les intimés ont agi d’une façon illicite envers les appelants en établissant les règles et en administrant le régime fiscal tel qu’il s’applique aux frais de repas. Il s’agit en réalité d’une contestation des cotisations établies par l’Agence du revenu du Canada. Étant donné que la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit des recours administratifs pour les cotisations d’impôt contestées, les questions en litige ne relèvent pas de la compétence de la Cour suprême.

 

[29]           De plus, je conclus que la déclaration en cause constitue un abus de procédure. M. Roitman a expressément renoncé à sa capacité de faire opposition et d’exercer ses droits d’appel à l’égard des cotisations d’impôt comme la loi l’autorise à le faire. Pourtant, il n’est pas fait mention, dans la déclaration, du règlement intervenu et de la renonciation, il n’est pas allégué que le consentement n’a pas été accordé de façon régulière et on ne tente pas de les faire annuler. À mon avis, cela constitue clairement un abus de procédure qui, en soi, exige la radiation de la déclaration. Le juge de la Cour fédérale n’a pas abordé cette question.

 

Dispositif

 

[30]           J’accueillerais l’appel, j’annulerais la décision de la Cour fédérale, j’accueillerais la requête de la Couronne et je radierais la déclaration, les dépens étant adjugés en appel et en première instance.

 

 

« Robert Décary »

Juge

 

 

« Je souscris aux présents motifs.

            A.M. Linden, juge »

 

« Je souscris aux présents  motifs.

            K. Sharlow, juge »

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    A-535-05

 

APPEL D’UNE ORDONNANCE DU JUGE GIBSON, DE LA COUR FÉDÉRALE, EN DATE DU 8 NOVEMBRE 2005 DANS LE DOSSIER T‑1040‑05

 

INTITULÉ :                                                   SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                        c.

                                                                        JULIUS ROITMAN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             VANCOUVER (C.-B.)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 27 JUIN 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE DÉCARY

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LES JUGE LINDEN ET SHARLOW

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 27 JUILLET 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

David Jacyk

Lisa M. Macdonell

POUR L’APPELANTE

 

James M. Poyner

Craig C. Sturrock, c.r.

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

POUR L’APPELANTE

 

Poyner Baxter LLP

North Vancouver (C.-B.)

 

Thorsteinssons LLP

Vancouver (C.-B.)

 

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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