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Date : 20050217

Dossier : A-255-04

Référence : 2005 CAF 66

CORAM :       LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                                 SAID CHAOUI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                                     LE PROCUREUR GÉNÉRAL

                                                                  DU CANADA

                                                                             

                                                                                                                                           défendeur

                                   Audience tenue à Montréal (Québec), le 15 février 2005.

                                   Jugement rendu à Montréal (Québec), le 17 février 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                  LE JUGE DÉCARY

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                  LE JUGE LÉTOURNEAU

                                                                                                                         LE JUGE PELLETIER


Date : 20050217

Dossier : A-255-04

Référence : 2005 CAF 66

CORAM :       LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                                 SAID CHAOUI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                                     LE PROCUREUR GÉNÉRAL

                                                                  DU CANADA

                                                                             

                                                                                                                                           défendeur

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DÉCARY

[1]                Le demandeur (le prestataire) a quitté volontairement son emploi pour le motif que la nature des fonctions qui lui ont été confiées n'était pas celle dont son employeur et lui-même avaient convenu au départ. Il prétend que c'était là « la seule solution raisonnable dans son cas » au sens de l'alinéa 29c) de la Loi sur l'assurance-emploi (la Loi) et il se fonde particulièrement sur le sous-alinéa (ix), soit la « modification importante des fonctions. »


[2]                La Commission a rejeté sa demande de prestations, mais le Conseil arbitral a accueilli l'appel du prestataire. Après avoir relaté brièvement les versions des événements du prestataire et de l'employeur, le conseil a conclu en ces termes :

« Devant ces faits, le Conseil arbitral se trouve devant deux témoignages contradictoires et donne le bénéfice du doute à l'appelant. »

[3]                La Commission en a appelé de cette décision devant le juge-arbitre, lequel a accueilli l'appel, au motif, notamment, que le Conseil arbitral avait omis de se prononcer sur la question véritablement en litige, savoir : le départ volontaire était-il la seule solution raisonnable compte tenu de toutes les circonstances? Répondant ensuite lui-même à la question, il a conclu ce qui suit :

La preuve démontrait que le prestataire n'avait travaillé que huit jours avant de quitter son emploi parce qu'il n'était pas satisfait du cheminement que l'employeur lui imposait avant de travailler comme opérateur de machines. Il est établi dans la jurisprudence qu'un employé peut être justifié de quitter un emploi qui est fondamentalement différent de celui pour lequel il avait été engagé, mais dans le cas de M. Chaoui, la preuve démontre qu'il s'agissait d'étapes dans le processus d'apprentissage menant au poste voulu par le prestataire. L'employeur lui avait indiqué qu'il devait attendre, non pas qu'il travaillerait en permanence dans des fonctions d'emballeur. De plus, le prestataire aurait pu s'enquérir de la durée de la période où il devrait travailler comme emballeur. Il aurait aussi pu continuer de travailler jusqu'à ce qu'il se trouve un travail qui répondait mieux à ses aspirations plutôt que d'avoir à dépendre du système d'assurance emploi. Il n'avait travaillé que huit jours. Il n'y avait aucune preuve que les conditions de travail étaient intolérables.


[4]                Je crois comprendre qu'en donnant au prestataire « le bénéfice du doute » , le Conseil arbitral se disait d'avis qu'il privilégiait la version des faits du prestataire et qu'il la préférait à celle de l'employeur. Le Conseil arbitral ne se référait sûrement pas au « bénéfice du doute » dont fait état le paragraphe 49(2) de la Loi, ce paragraphe ne visant que les décisions de la Commission et ne s'appliquant de toute évidence pas au niveau du Conseil arbitral. Ceci dit, on ne sait pas vraiment ce que le Conseil arbitral a décidé en accordant le bénéfice du doute au prestataire.

[5]                Non seulement le Conseil arbitral ne s'est-il pas posé la question pertinente, celle de savoir si le départ volontaire était la seule solution raisonnable compte tenu de toutes les circonstances, mais il a également omis de se demander s'il y avait une « modification importante des fonctions » au sens de la Loi.

[6]                Le juge-arbitre a donc eu raison d'intervenir. Ce faisant, cependant, il ne lui était pas loisible de retenir la version des faits qu'avait donnée l'employeur puisqu'elle avait été écartée par le Conseil arbitral et il lui appartenait plutôt de se demander si la version des faits donnée par le prestataire permettait de conclure qu'il s'agissait là d'une « modification importante des fonctions » , ce qu'il n'a pas fait. Le dossier doit donc être retourné à un juge-arbitre pour qu'il se prononce là-dessus.

[7]                Qui plus est, en affirmant que le prestataire aurait dû « continuer de travailler jusqu'à ce qu'il se trouve un travail qui répondait mieux à ses aspirations » et qu'il n'y avait « aucune preuve que les conditions de travail étaient intolérables » , le juge-arbitre est allé au-delà des exigences de l'alinéa 29c) et il impose un fardeau qui, à la limite, vide ledit alinéa de tout son sens.


[8]                La demande de contrôle judiciaire devrait donc être accueillie avec dépens et la décision du juge-arbitre infirmée. Le dossier devrait être retourné au juge-arbitre en chef ou au juge-arbitre qu'il désignera pour qu'il en décide de nouveau en répondant aux questions suivantes : la version des faits donnée par le prestataire permet-elle de conclure qu'il s'agirait là d'une « modification importante des fonctions » au sens du sous-alinéa 29c)(ix) et, le cas échéant, le départ volontaire était-il la seule solution raisonnable au sens de l'alinéa 29c)?

                                                                              « Robert Décary »            

            j.c.a.

"Je suis d'accord.

Le juge Létourneau"

"Je suis d'accord.

Le juge Pelletier-"


                             COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                                           

DOSSIER :                                                      A-255-04

APPEL D'UN JUGEMENT DU JUGE-ARBITRE, DATÉ DU 24 FÉVRIER 2004 DANS LE DOSSIER NO CUB 60135.

INTITULÉ :               SAID CHAOUI

demandeur

c.

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                    le 15 février 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LE JUGE DÉCARY

Y ONT SOUSCRIT :                                                  LÉTOURNEAU, PELLETIER, j.c.a.

DATE DES MOTIFS :                                               le 17 février 2005

COMPARUTIONS :

Me Roch Guertin

POUR LE DEMANDEUR

Me Pauline Leroux

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Roch Guertin, Avocat

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR


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