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Date : 20050217

Dossier : A-400-04

Référence : 2005 CAF 73

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LÉTOURNEAU

ENTRE :

                                           PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                         Demandeur

                                                                             et

                                                       DOMINIQUE CLOUTIER

                                                                                                                                     Défenderesse

                                   Audience tenue à Montréal (Québec), le 17 février 2005.

                         Jugement rendu à l'audience à Montréal (Québec), le 17 février 2005.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                LE JUGE LÉTOURNEAU


Date : 20050217

Dossier : A-400-04

Référence : 2005 CAF 73

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LÉTOURNEAU

ENTRE :

                                           PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                         Demandeur

                                                                             et

                                                       DOMINIQUE CLOUTIER

                                                                                                                                     Défenderesse

                                           MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                        (Prononcés à l'audience à Montréal (Québec), le 17 février 2005)

LE JUGE LÉTOURNEAU

[1]                La défenderesse a réclamé des prestations d'assurance-chômage après avoir volontairement quitté son emploi pour accompagner son conjoint vers un autre lieu de résidence. Normalement, un abandon volontaire d'emploi sans justification entraîne une exclusion du bénéfice des prestations.


[2]                Toutefois, le sous-alinéa 29c)(ii) de la Loi sur l'assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 (Loi), ci-après reproduit, apporte une exception au concept d'exclusion des bénéfices prévu à l'article 30 lorsque la personne qui quitte son emploi le fait par nécessité d'accompagner son époux ou conjoint de fait :

29. Pour l'application des articles 30 à 33 :

[...]

c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :

[...]

(ii) nécessité d'accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,

30. (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s'il perd un emploi en raison de son inconduite ou s'il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

[...]

29. For the purposes of sections 30 to 33,

[...]

(c) just cause for voluntarily leaving an employment or taking leave from an employment exists if the claimant had no reasonable alternative to leaving or taking leave, having regard to all the circumstances, including any of the following:

[...]

(ii) obligation to accompany a spouse, common-law partner or dependent child to another residence,

30. (1) A claimant is disqualified from receiving any benefits if the claimant lost any employment because of their misconduct or voluntarily left any employment without just cause, unless

[...]


La Loi établit qu'un départ dans de telles circonstances est un départ justifié aux fins du droit à l'obtention de prestations si, évidemment, les autres conditions de la Loi sont respectées, notamment, les conditions d'admissibilité. Sur ce point, la jurisprudence de notre Cour est claire : voir Canada (Attorney General) v. Faltermeier, 128 D.L.R. (4th) 481 (C.A.F.); Canada (Attorney General v. White, 137 D.L.R. (4th) 566 (C.A.F.); et Donohue c. Canada (Procureur général), [1998] A.C.F. no. 935 (C.A.F.).

[3]                En l'espèce, la défenderesse s'est, à juste titre, prévalue de cette exception. Cependant, elle a admis devant le conseil arbitral qu'elle n'était pas disponible pour travailler du 29 septembre 2003 au 7 novembre 2003, cette dernière date correspondant à celle de son déménagement : voir la décision du conseil arbitral, dossier du demandeur, à la page 46. En conséquence, la Commission lui a refusé le paiement de prestations pour cette période.

[4]                En appel de la décision de la Commission, le conseil arbitral, à la majorité, s'est fondé sur la décision du juge-arbitre Goulard dans CUB 57793 pour conclure que la défenderesse avait droit à des prestations pour cette période. Plus précisément, la majorité s'est appuyée sur l'énoncé suivant du juge-arbitre Goulard :

La Loi sur l'assurance-emploi prévoit qu'une prestataire a droit à des prestations d'assurance-emploi si elle doit quitter son travail pour accompagner son conjoint. Cette disposition doit inclure une période durant laquelle la prestataire devra prendre les arrangements nécessaires aux fins des déménagements incluant une recherche d'emploi et d'école pour les enfants.

Dans le présent appel, le juge-arbitre Gobeil s'est dit prêt à suivre cet énoncé du juge-arbitre Goulard. Il a, en conséquence, maintenu la décision du conseil arbitral prise à la majorité.


[5]                Avec respect et malgré la sympathie que nous éprouvons pour la défenderesse à cause des conséquences qui découlent du déplacement de son conjoint, nous sommes d'avis que cette demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

[6]                Les membres majoritaires du conseil arbitral, le juge-arbitre en la présente instance et le juge-arbitre dans le CUB 57793 ont confondu les concepts d'exclusion et d'inadmissibilité véhiculés par la Loi.

[7]                L'article 18 de la Loi détermine les conditions d'admissibilité au bénéfice des prestations :

Inadmissibilité aux prestations

18. Le prestataire n'est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d'une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu'il était, ce jour-là :

a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d'obtenir un emploi convenable;

b) soit incapable de travailler par suite d'une maladie, d'une blessure ou d'une mise en quarantaine prévue par règlement et aurait été sans cela disponible pour travailler;

c) soit en train d'exercer les fonctions de juré.

     Disentitlement to Benefits

18. A claimant is not entitled to be paid benefits for a working day in a benefit period for which the claimant fails to prove that on that day the claimant was

(a) capable of and available for work and unable to obtain suitable employment;

(b) unable to work because of a prescribed illness, injury or quarantine, and that the claimant would otherwise be available for work; or

(c) engaged in jury service.


Selon cet article, la disponibilité s'apprécie par jour ouvrable d'une période de prestations où le prestataire peut prouver qu'il était, ce jour-là, capable de travailler, disponible à cette fin et incapable d'obtenir un emploi convenable.

[8]                Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie sans frais dans les circonstances puisque la défenderesse n'a pas contesté la demande et que la confusion des concepts ne lui est pas imputable. La décision du juge-arbitre sera annulée et l'affaire retournée au juge-arbitre en chef, ou à la personne qu'il désigne, pour qu'elle soit décidée à nouveau en tenant pour acquis que l'appel de la Commission, à l'encontre de la décision du conseil arbitral, doit être accueilli et que la défenderesse n'est pas admissible au bénéfice des prestations pour la période du 29 septembre au 7 novembre 2003.

                                                                                                                            « Gilles Létourneau »               

                                                                                                                                                     j.c.a.


                                                     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                                                                                           

DOSSIER :                                              A-400-04

DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE CONCERNANT LA DÉCISION CUB 61010 RENDUE PAR MONSIEUR LE JUGE ALBERT GOBEIL, EN SA QUALITÉ DE JUGE-ARBITRE, LE 23 AVRIL 2004

INTITULÉ :                                             PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. DOMINIQUE CLOUTIER

LIEU DE L'AUDIENCE :                       Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                     le 17 février 2005

MOTIFS DU JUGEMENT                   LE JUGE EN CHEF RICHARD

DE LA COUR :                                      LE JUGE DÉCARY

LE JUGE LÉTOURNEAU

PRONONCÉS À L'AUDIENCE

PAR :                                                        LE JUGE LÉTOURNEAU

COMPARUTIONS :

Me Carole Bureau

POUR LE DEMANDEUR

Mme Dominique Cloutier

POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:                                                                                          

Ministère de la Justice Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

Mirabel (Québec)

POUR LA DÉFENDERESSE


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