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Date : 20070727

Dossier : A-471-05

Référence : 2007 CAF 262

 

CORAM :      LE JUGE SEXTON

                        LE JUGE MALONE

                        LE JUGE RYER

 

ENTRE :

1346687 ONTARIO INC. AU NOM DU RÉGIME DE RETRAITE

DES PRÉSIDENTS DE 1346687 ONTARIO INC.

 

appelante

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 25 avril 2007

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 27 juillet 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                               LE JUGE RYER

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                        LE JUGE SEXTON

                                                                                                                         LE JUGE MALONE

 

 


Date : 20070727

Dossier : A-471-05

Référence : 2007 CAF 262

 

CORAM :      LE JUGE SEXTON

                        LE JUGE MALONE

                        LE JUGE RYER

 

ENTRE :

1346687 ONTARIO INC. AU NOM DU RÉGIME DE RETRAITE

DES PRÉSIDENTS DE 1346687 ONTARIO INC.

 

appelante

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE RYER

INTRODUCTION

[1]               Mme Susan Greenhalgh a été enseignante pendant plus de 30 ans avant de prendre sa retraite. Ses efforts lui ont valu le droit à une pension provenant du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (le Régime de retraite des enseignants). Au moment de sa retraite, diverses possibilités s’offraient à Mme Greenhalgh quant à sa pension. Elle a décidé de faire transférer la valeur de rachat de sa pension totalisant 564 478,56 $ du Régime de retraite des enseignants à un régime de retraite nouvellement créé (le régime) mis sur pied par 1346687 Ontario Inc. (la société), elle‑même une nouvelle société.

 

[2]               Il s’agit du régime de retraite des présidents de 1346687 Ontario Inc. et, depuis sa création, Mme Greenhalgh, en sa qualité de présidente de la société, en était l’unique participante.

 

[3]               M. Brian Jenkins, actuaire d’expérience et directeur de ActuBen Consulting Inc. (ActuBen), a joué un rôle important dans la création du régime et son agrément auprès des organismes de réglementation des pensions de l’Ontario et de l’Agence du revenu du Canada (l’ARC). M. Jenkins a eu de nombreuses fois affaire à la Direction des régimes enregistrés (la DRE) de l’ARC. Avant même la création du régime, M. Jenkins a participé à des discussions poussées avec la DRE relativement aux conséquences fiscales qui découleraient de l’agrément et du fonctionnement d’un régime de retraite individuel (un RRI) tel que le régime.

 

[4]               Peu de temps après l’agrément du régime, l’ARC a confié à M. Jenkins et à Mme Greenhalgh, puisqu’elle en était la personne‑ressource, ses inquiétudes au sujet de la validité du régime. Un échange de correspondance entre l’ARC et chacun d’entre eux ainsi qu’une vérification du régime ont suivi. Ce processus a atteint son point culminant le 8 septembre 2005 lorsque l’ARC a envoyé un avis (l’avis d’intention) suivant l’alinéa 147.1(11)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e Suppl.), ch.1 (la LIR), selon lequel le ministre du Revenu national (le ministre) entendait retirer l’agrément du régime. Le retrait de l’agrément du régime pourrait avoir des conséquences fiscales défavorables pour Mme Greenhalgh. Le présent appel porte sur la décision du ministre d’envoyer un avis d’intention.

 

[5]               Le ministre a déclaré que l’avis d’intention avait été envoyé parce que le régime ne respecte pas l’une des conditions essentielles de l’agrément, à savoir que le principal objet du régime est de fournir des prestations viagères aux employés relativement à leurs services accomplis à titre d’employés. La Cour a statué dans l’arrêt Loba Limited c. Ministre du Revenu national, 2004 CAF 342, que la question de savoir si cette condition essentielle a été remplie est une question de fait. Par conséquent, il convient de procéder à un examen détaillé des faits.

 

CONTEXTE FACTUEL

La société

[6]               La société a été constituée le 30 juillet 1999 et sa fin d’exercice, aux fins de la LIR, est le 31 juillet. Dans ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2000, 2001, 2002 et 2003, la société n’a déclaré aucun actif matériel ni revenu. Le 4 septembre 2003, la société a ouvert un compte de paye à l’ARC. Pendant la période pertinente pour les fins de la présente affaire, Mme Brenda Hookings était la seule actionnaire de la société et Mme Greenhalgh en était la présidente. Le dossier ne divulgue pas la nature de la relation, s’il en existe une, entre Mme Hookings et Mme Greenhalgh ni les circonstances qui ont menée celle-ci à la présidence de la société.

 

 

 

L’agrément du régime

[7]               Le 6 octobre 1999, ActuBen a présenté une demande d’agrément pour le compte de la société conformément à l’article 147.1 de la LIR. Dans les documents relatifs à la demande d’agrément, la société était inscrite en tant que promotrice et administratrice du régime et Mme Greenhalgh était inscrite comme personne-ressource tant pour le compte de la société que pour celui du régime. Les documents mentionnaient également que la société était nouvellement constituée, qu’elle n’avait jamais déclaré de revenus et que sa capacité de verser des salaires dépendrait des recettes qu’elle percevrait et dont la provenance était alors incertaine. Néanmoins, ces documents indiquaient que Mme Greenhalgh, en tant qu’unique participante du régime, s’attendait à ce que la société lui verse un salaire annuel de 65 000 $. Aucune explication n’a été fournie quant à la façon dont ce montant a été déterminé.

 

[8]               Le 15 novembre 1999, l’ARC a accepté d’agréer ce régime et le régime a pris effet en date du 1er août 1999.

 

Modification du régime

[9]               Le 21 mars 2000, ActuBen a présenté à la DRE des documents ayant trait à la modification du régime. La modification avait pour objet de permettre au régime de reconnaître les prestations pour services passés de Mme Greenhalgh et de recevoir le transfert de la valeur de rachat admissible de sa pension en vertu du Régime de retraite des enseignants. Dans la lettre de présentation accompagnant les documents, M. Jenkins a déclaré :

[traduction] L’ADRC a mentionné qu’elle désirait obtenir les niveaux de rémunération actuels avant d’apporter des modifications. À cette fin, nous avons annexé une déclaration de la société qui révèle le salaire de la participante après son retour d’un congé sans solde.

 

 

Une déclaration jointe à la lettre indiquait que Mme Greenhalgh avait touché un salaire brut de 6 000 $ pour chacun des mois de décembre 1999, janvier 2000 et février 2000. Il n’y a, dans le dossier dont nous sommes saisis, aucun élément de preuve démontrant que l’un ou l’autre de ces montants a été versé par la société ou que celle-ci a officiellement approuvé un quelconque congé sans solde.

 

Mises en garde de l’ARC

[10]           Le 16 mai 2000, le directeur de la DRE a écrit à l’administrateur du Régime de retraite du Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario, se disant préoccupé que les RRI, dont le principal objet consistait à accepter des transferts de fonds de régimes de retraite existants, puissent ne pas respecter l’exigence concernant l’agrément énoncée à l’alinéa 8502a) du Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C., ch. 945 (le RIR). Suivant cette disposition, un régime n’est pas agréé à moins que son principal objet consiste à prévoir le versement de prestations de retraite à des particuliers pour les services qu’ils ont accomplis à titre d’employés. L’ARC a formulé une mise en garde selon laquelle l’incapacité de démontrer que cette condition a été remplie pourrait entraîner le retrait rétroactif de l’agrément avec de possibles conséquences fiscales défavorables.

 

[11]           Le 29 mai 2000, une lettre similaire a été envoyée à la Commission des services financiers de l’Ontario.

 

[12]           Le 28 juin 2000, l’ARC a écrit à la société en sa qualité d’administrateur du régime, accusant réception des modifications du régime autorisant les prestations acquises pour services passés. Cette lettre, dont une copie a été envoyée à ActuBen, exposait clairement les préoccupations de l’ARC relativement à la création de RRI ayant pour objet la réception des transferts de la valeur de rachat des prestations pour services antérieurs. Bien que la lettre soit assez longue, il est utile d’en reproduire les passages pertinents.

[traduction]  Nous avons observé une tendance selon laquelle les particuliers approchant l’âge normal de la retraite quittent leur emploi auprès d’un important employeur du secteur public et fondent leur propre société. La personne est embauchée par la société et la société parraine un régime de retraite individuel (RRI), lequel reconnaît les états de service dans le cadre du régime antérieur du secteur public. Une fois que le RRI est établi, la pleine valeur de rachat du régime antérieur de la personne est transférée au RRI, puisque les règles relatives au transfert énoncées dans la Loi de l’impôt sur le revenu ne limitent pas les transferts d’un régime de prestation donné à un autre. Nous nous inquiétons de ce que bon nombre de ces RRI ne soient pas acceptables. D’autres ne satisfont peut-être pas aux exigences d’agrément prévues dans la Loi.

 

Un régime de pension agréé a principalement pour objet de prévoir des prestations de retraite pour des personnes relativement à leurs états de service auprès de l’employeur ayant établi le régime. Dans la Loi, cette exigence prend la forme d’une condition à remplir pour l’agrément du régime. S’il est par la suite déterminé que le régime est établi pour une raison autre que pour répondre à ce critère d’objet principal, le régime ne pourra être agréé aux termes de la Loi.

 

La première question que nous soulevons relativement à ces mécanismes est la légitimité de la relation employé-employeur. Nous nous inquiétons de ce que certains accords n’aient été conclus que dans le but de contourner les règles énoncées dans la Loi en matière de transferts. S’il n’y a pas de véritable relation selon laquelle l’employé dispense des services légitimes à l’employeur, le régime ne répondra pas au critère d’objet principal. 

Même si une telle relation est établie et que des gains nominaux sont réalisés, on peut encore soulever la question de savoir si le critère d’objet principal est rempli. La Loi ne fait que permettre qu’un régime de pension se fonde sur les prestations de retraite d’après les revenus reçus d’un employeur participant au régime. Dans la plupart des cas, les revenus gagnés auprès de la nouvelle société sont beaucoup plus faibles que ceux qui ont été reçus d’un employeur antérieur; les prestations reçues en vertu du RRI sont donc beaucoup plus faibles que les prestations que le particulier aurait reçues dans le cadre du régime antérieur. Cela crée un important surplus dans le RRI. 

Lorsqu’un particulier renonce à une importante prestation de retraite en transférant les fonds associés dans un nouveau RRI, lequel lui garantit une prestation de retraite beaucoup plus modeste, on peut soutenir que le critère d’objet principal n’est pas rempli. Dans ces situations, il est permis de conclure que la création du RRI avait pour objet principal de faciliter le transfert de fonds d’un régime antérieur dont la Loi aurait limité le transfert dans un régime enregistré d’épargne-retraite. La conclusion selon laquelle la condition de l’objet principal n’a pas été remplie est aussi étayée par le fait qu’à la suite du transfert, plutôt que de fournir des prestations de retraite d’un niveau comparable à celles qui auraient été versées dans le cadre du régime antérieur, le RRI conserve des actifs excédentaires importants. Comme il a été mentionné précédemment, si le régime a pour autre principal objet, pour une raison ou une autre, le versement de prestations de retraite aux particuliers qui fournissent des services, en tant qu’employés, à l’employeur actuel, le régime ne répondra pas aux exigences de l’agrément.

 

S’il appert qu’au moment de la présentation de la modification touchant les services passés, le RRI ne répond pas au critère du principal objet, nous n’accepterons pas la modification. Malheureusement, dans de nombreux cas, il faudra attendre un an ou deux pour constater que le critère du principal objet n’a pas été rempli. Cette situation est encore plus problématique pour les personnes qui auraient déjà transféré des fonds dans le RRI.

 

S’il est déterminé qu’un régime agréé ne répond pas et n’a jamais répondu au critère d’objet principal, on peut alors révoquer le statut de régime agréé à partir de la date de prise d’effet initiale. Pour le participant au régime, les conséquences seraient plus graves si l’ADRC avait retiré l’agrément du régime au moment où elle se serait rendu compte qu’une entité avait été constituée en société aux seules fins d’établissement d’un régime de retraite afin de transférer la pension d’un participant donné. Une telle mesure a pour conséquence de rendre tous les actifs du régime imposables.

 

C’est la raison pour laquelle nous souhaitons vous mettre au courant de ces préoccupations. Bien qu’il ne soit pas évident à première vue que ce régime ne répond pas au critère du principal objet, nous vous demandons de confirmer les renseignements suivants dans les 30 prochains jours :

 

·                     la société a été constituée pour un motif autre que l’établissement d’un régime de retraite dont l’objet est le transfert des prestations d’un régime antérieur;

 

·                     il existe une relation employeur-employé de bonne foi entre le participant inscrit au régime et la société;

 

·                     le participant inscrit au régime s’attend à recevoir des revenus d’un niveau comparable à ceux qu’il a reçus d’un employeur antérieur.

 

Si vous ne pouvez pas confirmer ces renseignements, nous considérerons que le régime ne remplit pas le critère du principal objet et son agrément pourra être révoqué.

 

 

[13]           Le 22 août 2001, la DRE a écrit à la société, en envoyant encore une fois une copie conforme à ActuBen, pour lui indiquer qu’elle n’avait toujours pas reçu de réponse à sa lettre du 28 juin 2000. Cette lettre mentionnait que l’ARC envisageait le retrait de l’agrément du régime et invitait la société à fournir des renseignements supplémentaires ou à présenter des observations pouvant être pertinentes dans le cadre d’un retrait éventuel.

 

[14]           Dans une lettre datée du 22 juin 2001 (mais, selon le ministre, portant la date d’oblitération du 4 décembre 2001), la société a répondu à la lettre de l’ARC du 28 juin 2000. Le texte de la lettre est le suivant :

[traduction]

 

Objet : Régime de retraite des présidents de 1346687 Ontario Inc. – Reg. no 1051923

 

Monsieur,

 

Je regrette de vous informer que nous n’avons pas reçu votre lettre datée du 28 juin 2000.

 

La société a été établie pour entretenir diverses relations d’affaires dans l’intention de réaliser un bénéfice. Elle n’a pas été constituée « aux seules fins d’établissement d’un régime de retraite afin de transférer la pension d’un participant donné ».

 

Je suis une employée de la société et je m’attends à être rémunérée par mon employeur. En date du 28 juin 2000, je ne détenais pas, directement ou indirectement, d’actions de la société.

 

Je m’attends à recevoir de la société des revenus comparables à ceux que mon ancien employeur m’a versés et à ce que ma rétribution moyenne la plus élevée soit au moins égale à celle-ci.

 

Recevez mes salutations distinguées.

 

Susanne Greenhalgh

Présidente

 

 

Vérification

[15]           Le 29 janvier 2003, l’ARC a commencé une vérification du régime qui a pris fin environ un an plus tard. Au cours de la vérification, l’ARC s’est entretenue, à maintes reprises, verbalement et par écrit, avec Mme Greenhalgh et M. Jenkins.

 

[16]           Le 14 mai 2003, le vérificateur de l’ARC a avisé la société que des renseignements supplémentaires étaient requis, notamment :

a)         le nom de tous les participants au régime;

b)         le nom de tous les actionnaires de la société;

c)         les montants et les dates des transferts de fonds dans le régime;

d)         le détail des prestations de retraite accumulées, pour chacun des participants au régime, au 31 décembre 2002;

 e)        le détail de tout versement effectué dans le cadre du régime.

 

[17]           Pendant l’été 2003, l’ARC a eu de nombreuses conversations téléphoniques avec Mme Greenhalgh en sa qualité de personne responsable du régime. Au cours de ces conversations, Mme Greenhalgh a déclaré souffrir d’anxiété et de dépression et être séparée de son mari, lequel avait aussi de graves problèmes de santé. Elle a également mentionné que le régime était « l’idée » de son mari et que M. Jenkins, qui avait en sa possession la plupart des renseignements exigés par l’ARC, allait les rassembler et les faire parvenir à l’ARC.

 

[18]           La vérification a permis de constater que le 20 janvier 2000 le Régime de retraite des enseignants avait transféré 564 478,56 $ au régime. De ce montant, Mme Greenhalgh avait reçu des versements totalisant 90 271,83 $ et constituant des retraits « excédentaires », le premier versement ayant eu lieu dans les jours qui ont suivi le transfert des fonds par le Régime de retraite des enseignants.

 

[19]           Une évaluation actuarielle du régime effectuée par ActuBen au 1er janvier 2002, et signée par Mme Greenhalgh, indiquait que celle-ci avait tiré des [traduction] « revenus dont la valeur annuelle pour 2002 était estimée » à 65 000 $. Toutefois, en réponse aux questions de l’ARC, Mme Greenhalgh a déclaré qu’elle n’avait reçu aucun revenu de la société. De plus, dans une lettre adressée à l’ARC en date du 13 novembre 2003, elle a déclaré qu’elle avait pris un congé sans solde de son emploi à la société pour permettre à celle-ci d’accumuler suffisamment de capital pour soutenir le niveau de salaire que l’ARC aurait apparemment exigé. Aucune explication n’a été fournie relativement aux modalités de ce processus d’accumulation du capital. De plus, les déclarations d’impôt sur le revenu des sociétés T2 pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003 indiquaient que la société avait des actifs totalisant environ 1 045 $ et des dettes dont le montant était légèrement plus élevé.

 

[20]           Dans une lettre à l’ARC en date du 12 septembre 2003, la société a signalé qu’elle avait commencé à verser des revenus d’emploi à Mme Greenhalgh en 2003.

 

[21]           Dans une lettre à la société en date du 23 septembre 2003, l’ARC a demandé qu’on lui explique pourquoi Mme Greenhalgh n’avait « travaillé aucun mois  » pour la société depuis le 1er août 1999 (la date de prise d’effet du régime) et a exigé une preuve de revenu d’emploi pour l’année 2003. L’ARC a aussi demandé qu’on lui explique comment la société a satisfait à l’exigence relative au « principal objet » énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR.

 

[22]           Dans une lettre à l’ARC en date du 13 novembre 2003, la société a indiqué que, contrairement aux renseignements contenus dans sa lettre du 12 septembre 2003, Mme Greenhalgh ne recevait pas dans les faits de revenus d’emploi en 2003, mais qu’il était prévu qu’elle commencerait à travailler pour la société en 2003. Relativement à la question de savoir pourquoi elle n’avait « travaillé aucun mois  » pour la société depuis le 1er août 1999, la société a répondu :

[traduction]  La participante n’a travaillé aucun mois pour la société parce qu’il n’y avait aucun poste disponible où elle aurait pu se qualifier. Bien entendu, du travail ne peut être offert au participant que lorsque celui‑ci satisfait aux règles spéciales imposées par les régimes agréés.

 

En ce qui concerne l’explication relative à la façon dont elle a satisfait à l’exigence relative au « principal objet » énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR, la société a répondu :

[traduction]  Le principal objet du régime de retraite est énoncé à l’alinéa 8502a) du Règlement de l’impôt sur le revenu. Il consiste à prévoir des prestations de retraite à des particuliers, après leur retraite et jusqu’à leur décès, pour les services qu’ils ont accomplis à titre d’employés. Ce principal objet, au sens de la loi, était le principal motif pour lequel le régime de retraite des présidents de 1346687 Ontario Inc. a été établi, et il demeure toujours le principal objet du régime. Nous croyons respecter la loi.

 

[23]           La vérification a aussi permis de constater qu’entre 1999 et 2003, Mme Greenhalgh a déclaré des revenus d’emploi de la Niagara South Board of Education, de la LCBO, du District School Board of Niagara et du Lincoln County Board of Education. L’entrée en fonction à la société à la fin de l’année 2003 ne s’est pas réalisée.

 

Correspondance postérieure à la vérification

[24]           Dans une lettre datée du 2 novembre 2004, la DRE a informé la société qu’elle envisageait la révocation de l’agrément du régime, lequel prend effet à la date initiale d’agrément, au motif que le régime n’a pas satisfait à l’exigence du « principal objet » énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR. En tirant cette conclusion préliminaire, la DRE a précisé que les facteurs suivants étaient pertinents :

[traduction]

·         La demande d’agrément du régime déposée le 6 octobre1999 demandait que le régime soit agréé au 1er août 1999;

 

·         Le régime est présumé avoir été agréé le 10 novembre1999;

 

·         Le régime a été agréé le 15 novembre1999, avec prise d’effet le 1er août 1999;

 

·         Le 28 juin 2000, nous vous avons envoyé une lettre d’avertissement, laquelle précisait notamment  ce qui suit :

 

 

Conformément aux conditions selon lesquelles le régime de retraite a été agréé, les participants inscrits au régime ne peuvent accumuler de prestations de retraite que relativement aux services accomplis à partir du 1er août 1999. À l’heure actuelle, le régime de retraite ne prévoit aucune prestation de retraite relativement aux services accomplis avant le 1er août 1999. Pour qu’une telle prestation de retraite puisse être versée, il faudra modifier le régime de retraite afin de permettre aux participants inscrits au régime d’accumuler une prestation de retraite relativement aux services accomplis avant le 1er août 1999. De plus, jusqu’à ce que le régime de retraite soit modifié, les fonds provenant d’un autre régime de retraite agréé ne peuvent être transférés à ce régime. 

 

Nous constatons que le 3 avril 1999, nous avons reçu une modification du régime de retraite autorisant les participants inscrits à accumuler des prestations de retraite pour les services accomplis avant le 1er août 1999. Nous désirons nous assurer que vous avez pris connaissance de notre préoccupation quant aux circonstances entourant l’établissement de ce régime et les conséquences éventuelles qui peuvent en découler [...]

 

C’est la raison pour laquelle nous souhaitons vous mettre au courant de ces préoccupations. Bien qu’il ne soit pas évident à première vue que ce régime ne répond pas au critère du principal objet, nous vous demandons de confirmer les renseignements suivants dans les 30 prochains jours :

 

·      la société a été constituée pour un motif autre que l’établissement d’un régime de retraite dont l’objet est le transfert des prestations d’un régime antérieur;

 

·      il existe une relation employeur-employé de bonne foi entre le participant inscrit au régime et la société;

 

·      le participant inscrit au régime s’attend à recevoir des revenus d’un niveau comparable à ceux qu’il a reçus d’un employeur antérieur.

 

Si vous ne pouvez pas confirmer ces renseignements, nous considérerons que le régime ne remplit pas le critère du principal objet et son agrément pourra être révoqué.

 

·         Vous nous avez fait parvenir une lettre datée du 22 juin 2001 (portant la date d’oblitération du 4 décembre 2001) par laquelle vous nous avez informés des faits suivants :

 

Je regrette de vous informer que nous n’avons pas reçu votre lettre datée du 28 juin 2000.

 

La société a été établie pour entretenir diverses relations d’affaires dans l’intention de réaliser un bénéfice. Elle n’a pas été constituée « aux seules fins d’établissement d’un régime de retraite afin de transférer la pension d’un participant donné ».

 

Je suis employée de la société et je m’attends à être rémunérée par mon employeur. En date du 28 juin 2000, je ne détenais pas, directement ou indirectement, d’actions de la société.

 

Je m’attends à recevoir de la société des revenus comparables à ceux que mon ancien employeur m’a versés et à ce que ma rétribution moyenne la plus élevée soit au moins égale à celle-ci.

 

 

·         Nous constatons à la lecture de votre lettre du 12 septembre 2003 que, le 20 janvier 2000, le Régime de retraite des enseignants a transféré au régime un montant de 564 478,56 $. Il ressort également de la lettre du 12 septembre 2003 qu’entre le 24 janvier 2000 et le 12 octobre 2002, cinq paiements vous ont été versés à titre de « montant excédentaire » pour un total de 90 271,83 $. De plus, nous constatons que le premier versement du « montant excédentaire » que vous avez reçu a été effectué le 24 janvier 2000, dans les jours qui ont suivi le transfert du 20 janvier 2000.

 

·         Dans notre lettre du 14 mai 2003, nous avons demandé «... le détail des prestations de retraite accumulées, pour chaque participant, au 31 décembre 2002 ». Il ressort de votre lettre du 12 septembre 2003 que vous avez inscrit 0 année de service auprès de 1346687 Ontario Inc. à compter de la date de prise d’effet du régime (le 1er août 1999). Nous constatons aussi que « 30,57 » années de services antérieurs auprès de l’employeur antérieur, à la date d’entrée en vigueur, ont été reconnues.

 

·         Dans notre lettre du 14 mai 2003, nous avons également demandé, à l’égard de chaque participant, « ... un calcul détaillé de tous les facteurs d’équivalence (FE) et de tout facteur d’équivalence pour services passés (FESP) relativement à leur participation au régime de retraite. »

 

Dans votre lettre du 12 septembre 2003, vous nous informez que vous n’avez travaillé aucun mois, que vous n’avez aucun « revenu d’emploi » de 1346687 Ontario Inc. et aucun « facteur d’équivalence ». Nous savons aussi que « Susanne Greenhalgh reçoit des revenus d’emploi en 2003. Aucun feuillet T4 n’a été produit, donc aucun facteur d’équivalence n’a encore été calculé ».

 

·         Votre lettre du 13 novembre 2003 nous informe notamment que « ... À ce jour, Mme Greenhalgh n’a pas commencé à toucher un salaire de 1346687 Ontario Inc. Pour le moment, nous prévoyons qu’elle commencera à travailler en décembre 2003. »

 

·         Votre lettre du 13 novembre 2003 nous informe notamment que « …La participante n’était pas effectivement au travail pendant toute la période et était en congé sans solde. Selon les termes du régime, aucune prestation ne s’accumule au cours de cette période et il ne serait pas opportun qu’un participant contribue au régime […] ».

 

·         Nous fondant sur les conclusions du vérificateur, nous constatons que vous n’aviez aucun revenu d’emploi de 1346687 Ontario Inc. entre 1999 (la date de prise d’effet du régime étant le 1er août 1999) et 2003.

 

 

Enfin, la lettre invite la société à présenter toutes les observations qu’elle estime pertinentes.

 

[25]           Dans des lettres datées des 18 et 28 novembre 2004, M. Jenkins a répondu à cette lettre au nom de la société. Il y a posé diverses questions générales relativement à la façon dont la DRE interprète la LIR et le RIR et a demandé que la DRE motive son point de vue sur des questions de fond, dont le retrait rétroactif de l’agrément de régimes, son exigence suivant laquelle les revenus reçus d’un employeur actuel doivent être comparables aux revenus reçus d’un employeur antérieur et sa politique manifestement nouvelle selon laquelle un régime devait établir l’existence d’une relation employeur-employé plutôt que de simplement démontrer que les participants étaient des employés.

 

[26]           Dans une première réponse à ces lettres, la DRE a mentionné le 10 décembre 2004 que la lettre du 18 novembre 2004 était trop générale et qu’elle ne répondait à aucune des préoccupations exposées dans la lettre du 2 novembre 2004. La DRE a ajouté que M. Jenkins devrait s’assurer que toutes les réponses s’appliquent essentiellement au régime et qu’elles répondent expressément aux préoccupations dont il est fait état dans la lettre du 2 novembre 2004.

 

[27]           Par lettre datée du 21 décembre 2004, la DRE a informé M. Jenkins que sa lettre du 28 novembre 2004 avait été acheminée à la Direction des décisions de l’impôt de l’ARC pour examen.

 

[28]           Par lettre datée du 22 décembre 2004, la DRE a répondu aux demandes de renseignements de M. Jenkins dans ses lettres des 18 et 28 novembre 2004. Après avoir abordé ses préoccupations, la DRE a conclu qu’elle était toujours d’avis que le régime ne satisfaisait pas à l’exigence du « principal objet » énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR.

 

[29]           Par lettre finale datée du 5 janvier 2005, M. Jenkins a répondu à la lettre de la DRE du 22 décembre 2004. Il y a déploré les délais injustes imposés par la DRE, a mentionné qu’il n’adhérait pas à plusieurs des positions de la DRE et a demandé d’autres précisions à l’égard de certaines de ses réponses.

 

[30]           Le 8 septembre 2005, l’ARC a envoyé un avis d’intention contenant ce qui suit :

[traduction]   Le ministre entend retirer l’agrément du régime à compter du 1er août 1999 pour la raison suivante :

 

Il appert que le régime n’est pas conforme à l’alinéa 8502a) du Règlement, l’une des conditions d’agrément prévues à l’alinéa 8501(1)a) du Règlement, laquelle condition ― le critère du « principal objet » ― exige que le régime prévoit le versement de prestations viagères aux employés pour les services qu’ils ont accomplis à titre d’employés.

 

Les faits et les documents pertinents qui nous ont permis d’arriver à notre conclusion sont énoncés dans notre lettre du 2 novembre 2004.

 

Conséquences du retrait de l’agrément d’un régime

[31]           La Cour d’appel fédérale a récemment examiné la question du retrait de l’agrément de régimes de pension agréés dans les arrêts Loba et Boudreau c. Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.), [2005] A.C.F. no 1551, 2005 CAF 304. Il s’agissait dans ces affaires de régimes de pension agréés maintenus au profit de nombreux employés, par opposition au régime qui était un RRI mis sur pied uniquement au profit de Mme Greenhalgh. Indépendamment de cette importante distinction factuelle, l’arrêt Boudreau, particulièrement, jette un certain éclairage sur le contexte global en matière de retrait de l’agrément de régimes de pension agréés. Aux paragraphes 5, 6 et 7, la juge Sharlow s’exprime ainsi :

[5] Règle générale, tout paiement versé dans le cadre d’un régime de pension, agréé ou non agréé, est assujetti à l’impôt s’il est versé à un participant ou au profit d’un participant. Cette règle s’applique systématiquement, peu importe que le paiement soit versé sous forme de rentes périodiques ou d’une somme forfaitaire (alinéa 56(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu).

[6] Certains avantages fiscaux sont liés à l’agrément d’un régime de pension en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu. Premièrement, toute cotisation versée par un participant à un régime de pension agréé peut être déduite, sous réserve de certaines restrictions, du revenu de ce participant pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Deuxièmement, les revenus découlant des investissements détenus dans un régime de pension sont exemptés de l’impôt, à condition que l’investissement soit conservé dans le régime (sous réserve de certaines conditions). Troisièmement, dans certaines circonstances, l’argent peut être transféré d’un régime de pension agréé vers un autre régime de pension agréé (ou dans un autre régime à impôt différé reconnu) au profit d’un participant, sans que le participant ne soit pénalisé pour ce transfert sur le plan fiscal.

[7] Le retrait d’agrément d’un régime de pension ne met pas fin au régime en tant que tel. Celui-ci continue d’exister mais sans les avantages fiscaux liés à l’agrément. Ainsi, les participants ne peuvent plus verser de contributions déductibles dans ce régime. Les revenus liés aux investissements détenus dans le régime deviennent imposables. Les participants ne peuvent plus procéder à un transfert d’argent non imposable dans un autre régime de pension. Un tel transfert de fonds deviendrait sans doute imposable entre les mains du participant, soit à titre de rente en vertu de l’alinéa 56(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu, soit à titre de versement d’une fiducie en vertu de l’alinéa 12(1)m) de la Loi de l’impôt sur le revenu, selon les circonstances. Si les fonds sont transférés d’un régime de pension non agréé à un régime agréé, le participant s’expose à une double imposition; en effet, non seulement le montant transféré est assujetti à l’impôt mais les rentes subséquemment versées dans le cadre du régime de pension sont elles aussi imposables.

 

 

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[32]      Les dispositions législatives pertinentes sont les alinéas 147.1(11)a) et 172(3)f) et l’article 180 de la LIR ainsi que l’alinéa 8502a) du RIR; elles sont reproduites à l’annexe « A ».

 

ANALYSE

Nature de l’appel

[33]      Un appel interjeté en vertu du paragraphe 172(3) et de l’article 180 de la LIR sera tranché à partir du dossier dont la Cour est saisie. Le dossier doit rendre compte non seulement de la position du ministre mais aussi de celle de la partie concernée. À cette fin, le ministre doit respecter les règles de justice naturelle et d’équité procédurale en s’assurant que la partie concernée a la possibilité raisonnable de répondre à ses préoccupations. (Voir Renaissance International c. Ministre du Revenu national, [1983] 1 C.F. 860 (C.A.).)

 

[34]      Dans un tel appel, il incombe à l’appelant de démontrer que le ministre a commis une erreur en tirant les conclusions sur lesquelles repose la décision d’envoyer un avis de retrait de l’agrément d’un régime de retraite. (Voir Human Life International in Canada Inc. c. M.R.N., [1998] 3 C.F. 202, et Canadian Committee for the Tel Aviv Foundation c. Canada, 2002 CAF 72, [2002] A.C.F. no 315.)

 

Équité procédurale

[35]      Dans la présente affaire, l’avis d’intention s’appuie sur l’alinéa 147.1(11)a), qui autorise le retrait de l’agrément d’un régime de retraite qui ne satisfait pas aux conditions d’agrément réglementaires prévues à l’article 8502 du RIR. Plus particulièrement, l’ARC a fait valoir que le principal objet du régime ne consistait pas à prévoir le versement périodique de montants à des particuliers, après leur retraite et jusqu’à leur décès, pour les services qu’ils ont accomplis à titre d’employés, comme l’exige l’alinéa 8502a) du RIR. L’ARC a exposé cette préoccupation dans trois lettres (28 juin 2000, 22 août 2001 et 2 novembre 2004) qu’elle a envoyées à la société et à M. Jenkins entre la date de l’agrément du régime et celle de l’avis d’intention. De plus, chacune de ces lettres invitait la société et M. Jenkins à présenter de nouvelles observations. Manifestement, la société a eu de multiples possibilités de fournir des renseignements supplémentaires à l’ARC.

 

[36]      L’avocat de l’appelante a fait valoir que l’ARC aurait dû demander une description de l’emploi de Mme Greenhalgh à la société, ce que le plan d’affaires de la société comportait et la raison pour laquelle le développement commercial n’a pas permis à la société d’accomplir quoi que ce soit.

 

[37]      Selon moi, la prétention de l’appelante selon laquelle elle ignorait la nature des préoccupations de l’ARC et n’a eu aucune possibilité de répondre à ces préoccupations est dénuée de fondement. À cet égard, si on prend en considération les négociations de l’ARC avec l’appelante et ses représentants pendant une période d’environ six ans depuis que le régime a été agréé, on ne peut pas dire qu’elle n’a pas respecté les règles de justice naturelle et d’équité procédurale lorsqu’elle a envoyé l’avis d’intention.

 

[38]      L’appelante savait qu’elle n’avait pas respecté l’exigence énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR et il lui était loisible de présenter des observations qui auraient pu être utiles en l’espèce. Elle savait également, au plus tard depuis le 22 août 2001, qu’un avis d’intention pouvait lui être envoyé. Ainsi qu’il a été décidé dans Human Life International in Canada Inc., il incombe à l’appelante de démontrer que l’ARC a commis une erreur en décidant d’envoyer l’avis d’intention. Si elle l’avait voulu, l’appelante aurait pu aisément fournir des réponses aux questions que l’ARC a « négligé de lui poser » et ces réponses auraient fait partie du dossier sur lequel l’ARC a fondé sa décision d’envoyer l’avis d’intention.

 

Décision du ministre

[39]      L’alinéa 147.1(11)a) de la LIR autorise le ministre à envoyer un avis d’intention de retirer

l’agrément d’un régime de retraite lorsque celui-ci n’est pas conforme aux conditions d’agrément réglementaires énoncées à l’article 8502 du RIR. L’alinéa 8502a) du RIR prévoit une telle condition. Par conséquent, le ministre a correctement appliqué la loi lorsqu’il a décidé d’envoyer l’avis d’intention prévu à l’alinéa 147.1(11)a) de la LIR au motif que le régime n’était pas conforme à la condition relative à l’agrément énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR.

 

[40]      Ainsi qu’il est indiqué dans Loba, la question de savoir si les dispositions de l’alinéa 8502a) du RIR ont été respectées constitue essentiellement une question de fait.

 

[41]      Le ministre a fourni deux motifs établissant que la condition énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR – à savoir que le principal objet du régime ne consistait pas à prévoir le versement à Mme Greenhalgh de prestations viagères pour les services qu’elle avait accomplis à titre d’employée – n’avait pas été remplie. Premièrement, le ministre a fait valoir qu’il n’y a pas de véritable relation d’emploi entre Mme Greenhalgh et la société. Pour le ministre, cela ressort de plusieurs éléments : Mme Greenhalgh n’a reçu aucun rétribution de la société et ne lui a fourni aucun service de la création du régime jusqu’à la fin de 2003 au moins; au cours de cette période, elle était employée et rétribuée par des tiers; enfin, elle a fourni de nombreuses déclarations incompatibles au sujet de son emploi à la société et des revenus qu’elle y a gagnés.

 

[42]      Le deuxième motif sur lequel s’est fondé le ministre pour conclure que le critère du principal objet n’avait pas été respecté était que le régime avait d’abord été établi aux fins de recevoir un transfert de fonds du Régime de retraite des enseignants plutôt qu’aux fins du versement de prestations viagères à Mme Greenhalgh pour les services qu’elle avait accomplis à titre d’employée de la société. Selon le ministre, c’est ce qui ressort clairement du fait que, dans les jours suivant le transfert des fonds du Régime de retraite des enseignants au régime, Mme Greenhalgh a obtenu qu’une partie des fonds transférés lui soient versés à titre d’« excédent » du régime apparemment crée en raison de ses revenus relativement bas, voire inexistants, provenant de la société. Selon le ministre, en conséquence de la structure du régime, seule Mme  Greenhalgh avait la possibilité de retirer l’excédent. En revanche, aucun de ces retraits « excédentaires » n’aurait été possible si les fonds étaient demeurés dans le Régime de retraite des enseignants. Le retrait immédiat de l’excédent a prouvé au ministre que le principal objet du régime n’était pas prévoir le versement de prestations viagères.

 

[43]      Je suis d’avis que l’appelante n’a pas réussi à démontrer que l’un ou l’autre de ces motifs est mal fondé ou n’est pas étayé par le dossier dont la Cour est saisie. Il s’ensuit que l’appelante n’a pas non plus réussi à démontrer qu’il était déraisonnable de la part du ministre de conclure que la condition énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR n’avait pas été remplie.

 


DÉCISION

[44]      La conclusion de l’ARC selon laquelle la condition énoncée à l’alinéa 8502a) du RIR n’a pas été remplie est maintenue, de sorte qu’il a été démontré que le régime n’est pas conforme à une condition réglementaire ainsi que le prévoit l’alinéa 147.1(11)a) de la LIR. Par conséquent, le présent appel devrait être rejeté avec dépens.

 

« C. Michael Ryer »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord

J. Edgar Sexton, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

B. Malone, j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


ANNEXE « A »

 

147.1 (11) Lorsque l’une des situations suivantes se produit après que le ministre a agréé un régime de pension:

 

a) le régime n’est pas conforme aux conditions d’agrément réglementaires [...]

 

le ministre peut informer l’administrateur du régime par avis -- appelé « avis d’intention » au présent paragraphe et au paragraphe (12) --, envoyé en recommandé, qu’il entend retirer l’agrément du régime à la date précisée dans l’avis d’intention, qui ne peut être antérieure aux dates suivantes:

147.1 (11) Where, at any time after a pension plan has been registered by the Minister,

 

 

(a) the plan does not comply with the prescribed conditions for registration ...

 

the Minister may give notice (in this subsection and subsection 147.1(12) referred to as a "notice of intent") by registered mail to the plan administrator that the Minister proposes to revoke the registration of the plan as of a date specified in the notice of intent,

 

172(3) Lorsque le ministre:

               […]

f) refuse d’agréer un régime de pension, pour l’application de la présente loi, ou envoie à l’administrateur d’un régime de pension agréé l’avis d’intention prévu au paragraphe 147.1(11), selon lequel il entend retirer l’agrément du régime;

               […]

l’administrateur du régime ou l’employeur qui participe au régime, dans une situation visée aux alinéas f) […] peuvent interjeter appel à la Cour d’appel fédérale de cette décision ou de la signification de cet avis.

172(3) Where the Minister

                      …

(f) refuses to register for the purposes of this Act any pension plan or gives notice under subsection 147.1(11) to the administrator of a registered pension plan that the Minister proposes to revoke its registration,

                       …

the administrator of the plan or an employer who participates in the plan, in a case described in paragraph 172(3)(f) …, may appeal from the Minister’s decision, or from the giving of the notice by the Minister, to the Federal Court of Appeal.

 

180. (1) Un appel à la Cour d’appel fédérale prévu au paragraphe 172(3) est introduit en déposant un avis d’appel à la cour dans les 30 jours suivant, selon le cas:

               […]

c) la date de mise à la poste de l’avis à l’administrateur du régime de pension agréé, en application du paragraphe 147.1(11);

               […]

ou dans un autre délai que peut fixer ou accorder la Cour d’appel ou l’un de ses juges, avant ou après l’expiration de ce délai de 30 jours.

(2) La Cour canadienne de l’impôt et la Cour fédérale n’ont, ni l’une ni l’autre, compétence pour connaître de toute affaire relative à une décision du ministre contre laquelle il peut être interjeté appel en vertu du présent article.

 

(3) Un appel dont est saisie la Cour d’appel fédérale, en vertu du présent article, doit être entendu et jugé selon une procédure sommaire.

180. (1) An appeal to the Federal Court of Appeal pursuant to subsection 172(3) may be instituted by filing a notice of appeal in the Court within 30 days from

                …

(c) the mailing of notice to the administrator of the registered pension plan under subsection 147.1(11),

                …

as the case may be, or within such further time as the Court of Appeal or a judge thereof may, either before or after the expiration of those 30 days, fix or allow.

(2) Neither the Tax Court of Canada nor the Federal Court has jurisdiction to entertain any proceeding in respect of a decision of the Minister from which an appeal may be instituted under this section.

(3) An appeal to the Federal Court of Appeal instituted under this section shall be heard and determined in a summary way.

 

8502. Pour l’application de l’article 8501, les conditions suivantes s’appliquent aux régimes de pension :

a) le principal objet du régime consiste à prévoir le versement périodique de montants à des particuliers, après leur retraite et jusqu’à leur décès, pour les services qu’ils ont accomplis à titre d’employés;

8502. For the purposes of section 8501, the following conditions are applicable in respect of a pension plan:

(a) the primary purpose of the plan is to provide periodic payments to individuals after retirement and until death in respect of their service as employees;


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

(Appel d’un avis d’intention de retirer l’agrément du régime de retraite des présidents de 1346687 Ontario Inc. émis par Annelisa Gillespie au nom du ministre, par voie d’une lettre non datée reçue le 12 septembre 2005.)

 

DOSSIER :                                                    A-471-05

 

INTITULÉ :                                                   1346687 ONTARIO INC. AU NOM DU RÉGIME DE RETRAIT DES PRÉSIDENTS DE 1346687 ONTARIO INC.

                                                                        c.

                                                                        LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 25 AVRIL 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE RYER

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LE JUGE SEXTON

                                                                        LE JUGE MALONE

 

DATE DE MOTIFS :                                                LE 27 JUILLET 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Eric Fournie                                                     Pour l’appelante

                                                                                   

Roger LeClaire                                     Pour l’intimé

Justine Malone

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Fournie Mickleborough LLP                             Pour l’appelante

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                             Pour l’intimé

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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