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Date : 20080228

Dossier : A-368-07

 

Référence : 2008 CAF 78

 

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

LESLIE DANIELSON

défendeur

 

 

 

 

Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le 28 février 2008

Jugement rendu à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 28 février 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                LE JUGE LÉTOURNEAU

Y A SOUSCRIT :                                                                                LE JUGE DÉCARY

MOTIFS DISSIDENTS :                                                                     LA JUGE SHARLOW

 


Date : 20080228

Dossier : A-368-07

 

Référence : 2008 CAF 78

 

CORAM :      LE JUGE DÉCARY

                        LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LA JUGE SHARLOW

 

ENTRE :

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

LESLIE DANIELSON

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 28 février 2008)

 

LE JUGE LÉTOURNEAU

[1]               Le juge Décary et moi sommes d’avis que la présente demande de contrôle judiciaire doit être accueillie.

 

[2]               La Commission d’appel des pensions (CAP) a statué que le défendeur avait établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité entre juillet 1997 et la date de l’audience devant le tribunal de révision, le 21 novembre 2006.

 

[3]               La Commission est parvenue à cette conclusion sur le fondement de la preuve médicale et du témoignage du défendeur. Toutefois, selon le demandeur, la Commission a mal appliqué le critère juridique lorsqu’elle a examiné la question de savoir si le défendeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation d’invalidité au sens des paragraphes 60(8) et 60(9) du Régime de pensions du Canada, L.R.C 1985, ch. C-8 (le Régime).

 

[4]               Selon le demandeur, l’erreur de droit serait l’omission de la Commission de tenir compte des activités du défendeur pendant la prétendue période d’invalidité, lesquelles activités étaient, à ses dires, pertinentes pour trancher la question de sa capacité de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de prestation.

 

[5]               L’article 60 du Régime a déjà été examiné par la Commission dans Morrison c. Le ministre du Développement des ressources humaines, Appel CP 04182, 7 mars 1997. Dans cette décision, la Commission a écrit que l’article 60 « est précis et circonscrit ». Nous dirions plutôt qu’il est précis et ciblé en ce sens que, comme la Commission l’affirme dans Morrison, « [i]l n’exige pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invalidité, mais seulement et tout simplement "la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande" ».

 

[6]               Pour parvenir à une conclusion à cet égard, la Commission a ensuite exprimé, aux pages 5 et 6 de Morrison, le besoin d’examiner la preuve médicale ainsi que « les activités pertinentes de la personne en cause entre la date prétendue de début de l’invalidité et la date de la demande, ce qui nous informe sur la capacité de cette personne pendant la période en question "de former et d’exprimer" l’intention de faire une demande ».

 

[7]               Nous sommes d’accord avec la Commission dans Morrison pour dire que les activités de la personne en cause pendant cette période peuvent être pertinentes pour nous éclairer sur son incapacité permanente de former ou d’exprimer l’intention requise, et devraient donc être examinées.

 

[8]               En l’espèce, après avoir lu attentivement la décision de la Commission, nous partageons l’avis du demandeur selon lequel les activités du défendeur, qui pourraient aider à déterminer si le critère juridique de l’article 60 a été convenablement appliqué, n’ont pas été examinées par la Commission.

 

[9]               Le demandeur a énuméré, aux paragraphes 63 et 75 de son mémoire des faits et du droit, un certain nombre de ces activités qui sont, selon lui, pertinentes et dont on aurait dû tenir compte.

 

[10]           Contentons-nous des exemples suivants. Le défendeur :

 

a)         a participé à un programme de traitement de la toxicomanie au Minnesota en février 1996;

 

b)         a liquidé et consolidé son actif en 1996;

 

c)         a fait une demande de prestations d’invalidité à la suite d’un accident;

 

d)         s’est battu pendant plusieurs années contre les compagnies d’assurance pour obtenir ces prestations;

 

e)         a engagé et mandaté un avocat pour s’occuper de ses demandes de règlement dès le 16 octobre 1998;

 

f)          a autorisé la préparation d’évaluations médicales indépendantes dans ce contexte;

 

g)         a, de son propre chef, cherché à obtenir des rapports médicaux à partir de 1997 pour appuyer ses demandes de prestations;

 

h)         a lancé une entreprise franchisée en 2001;

 

i)          a déclaré faillite personnelle en septembre 2001.

 

 

[11]           Ces faits ont été présentés à la Commission et au tribunal de révision. La Commission en a mentionné quelques-uns, mais elle n’a procédé à aucune analyse de ces faits ou d’autres activités pertinentes du défendeur dans sa décision. En fait, le défendeur a été interrogé sur les événements dont la Commission fait état aux paragraphes 20 à 24 de la décision. La Commission a conclu qu’il avait  un souvenir vague ou mauvais de ces événements, mais l’interrogatoire a eu lieu en 2007. Ce que la Commission aurait dû examiner, c’est la question de savoir si ces événements, au moment où ils se sont produits, prouvaient une capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation. En toute déférence, nous estimons que l’omission par la Commission de le faire et de tenir compte d’autres activités pertinentes du défendeur a entraîné une mauvaise application du critère juridique.

 

[12]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision de la Commission rendue le 28 juin 2007 sera annulée et l’affaire sera renvoyée à la Commission pour qu’une formation différente rende une nouvelle décision.

 

« Gilles Létourneau »

j.c.a.

 

 

MOTIFS DISSIDENTS DE LA JUGE SHARLOW

 

[13]           En toute déférence, je ne peux pas souscrire à l’opinion de mes collègues. Après avoir examiné le dossier, je ne puis conclure que la Commission a mal appliqué le critère juridique parce qu’elle aurait omis d’examiner des éléments de preuve pertinents. Bien que l’analyse de la Commission ne traite pas expressément de certaines allégations factuelles que le demandeur présente maintenant, la preuve de ces allégations factuelles repose principalement sur les inférences que le demandeur tire des déclarations figurant dans les rapports d’experts – les mêmes rapports que la Commission décrit dans ses motifs. Il me semble improbable que la Commission ait pu lire ces rapports sans remarquer les éléments factuels cités par le demandeur.

 

[14]           Je ne suis pas convaincue que la décision de la Commission comporte une erreur de droit ou toute autre erreur justifiant l’intervention de la Cour. Je rejetterais la demande avec dépens.

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                                            A-368-07

 

(CONTRÔLE JUDICIAIRE D’UNE DÉCISION DE LA COMMISSION D’APPEL DES PENSIONS EN DATE DU 28 JUIN 2007)

 

INTITULÉ :                                                                           PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c.

                                                                                                LESLIE DANIELSON

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Winnipeg (Manitoba)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   le 28 février 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :                                        le juge Létourneau

 

Y A SOUSCRIT :                                                                   le juge Décary

 

MOTIFS DISSIDENTS :                                                      la juge Sharlow

 

 

COMPARUTIONS :

 

James Gray

Carole Vary

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Madeline Low

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Hill Dewar Vincent

Winnipeg (Manitoba)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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