Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20080307

 

Dossiers : A‑516‑06

A‑517‑06

 

Référence : 2008 CAF 91

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF RICHARD

                        LE JUGE NOËL                   

                        LA JUGE SHARLOW

 

A‑516‑06

ENTRE :

BELL CANADA

 

appelante

et

 

LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION

ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

LA BC OLD AGE PENSIONERS ORGANIZATION

L’ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA

MTS ALLSTREAM INC.

L’ORGANISATION NATIONALE ANTI-PAUVRETÉ

LE CENTRE POUR LA DÉFENSE DE L’INTÉRÊT PUBLIC

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

LA SOCIÉTÉ EN COMMANDITE TÉLÉBEC

TELUS COMMUNICATIONS INC.

L’UNION DES CONSOMMATEURS

et L’ARCH DISABILITY LAW CENTRE

 

intimés

 

 

A‑517‑06

ENTRE :

L’ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA

et L’ORGANISATION NATIONALE ANTI-PAUVRETÉ

appelantes

et

 

LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION

ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

intimé

et

 

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

BELL CANADA

L’ARCH DISABILITY LAW CENTRE

L’ASSOCIATION DES SOURDS DU CANADA

MTS ALLSTREAM INC.

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

TÉLÉBEC, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

et TELUS COMMUNICATIONS (QUÉBEC) INC.

 

intimés

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), les 23 et 24 janvier 2008

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 7 mars 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                             LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                                        LE JUGE EN CHEF RICHARD

                                                                                                                                  LE JUGE NOËL

 


 

Date : 20080307

 

Dossiers : A‑516‑06

A‑517‑06

 

Référence : 2008 CAF 91

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF RICHARD

                        LE JUGE NOËL                   

                        LA JUGE SHARLOW

 

A‑516‑06

ENTRE :

BELL CANADA

 

appelante

et

 

LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION

ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

LA BC OLD AGE PENSIONERS ORGANIZATION

L’ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA

MTS ALLSTREAM INC.

L’ORGANISATION NATIONALE ANTI-PAUVRETÉ

LE CENTRE POUR LA DÉFENSE DE L’INTÉRÊT PUBLIC

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

LA SOCIÉTÉ EN COMMANDITE TÉLÉBEC

TELUS COMMUNICATIONS INC.

L’UNION DES CONSOMMATEURS

et L’ARCH DISABILITY LAW CENTRE

 

intimés

 

 

A‑517‑06

ENTRE :

L’ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA

et L’ORGANISATION NATIONALE ANTI-PAUVRETÉ

appelantes

et

 

LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION

ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

intimé

et

 

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

BELL CANADA

L’ARCH DISABILITY LAW CENTRE

L’ASSOCIATION DES SOURDS DU CANADA

MTS ALLSTREAM INC.

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

TÉLÉBEC, SOCIÉTÉ EN COMMANDITE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

et TELUS COMMUNICATIONS (QUÉBEC) INC.

 

intimés

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW

[1]               Il s’agit de deux appels interjetés contre une décision du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (le CRTC) en date du 16 février 2006, soit la Décision de télécom CRTC 2006‑9, intitulée Utilisation des fonds des comptes de report (la décision sur les comptes de report).

 

[2]               Les deux appels soulèvent des questions concernant l’étendue du pouvoir du CRTC de prescrire la manière d’employer le solde d’un compte de report créé en application d’une ordonnance antérieure de cet organisme. Bell Canada soutient que le CRTC ne peut lui ordonner d’utiliser le solde de ce compte pour offrir des rabais aux abonnés. L’Association des consommateurs du Canada et l’Organisation nationale anti-pauvreté (ci‑après désignées collectivement les groupes de défense des consommateurs) soutiennent de leur côté que le CRTC doit ordonner que ce solde soit utilisé pour attribuer des rabais aux abonnés (ou pour rendre les services de télécommunication plus accessibles aux personnes handicapées).

 

[3]               Pour les motifs dont l’exposé suit, j’ai conclu que les deux appels devraient être rejetés.

 

[4]               Pour la commodité du lecteur, le présent exposé a été divisé en sections dont voici la table :

 

Paragraphe

1. Les dispositions législatives applicables

2. Les faits

3. La norme de contrôle

4. Analyse

a) L’appel des groupes de défense des consommateurs

(i) Question préjudicielle : l’appel des groupes de défense des consommateurs a‑t‑il été interjeté trop tard?

(ii) Les prétentions et moyens des groupes de défense des consommateurs

b) L’appel de Bell Canada

5. Les dépens

6. Conclusion

5

9

28

30

31

32

34

42

56

57

 

1. Les dispositions législatives applicables

[5]               La décision sur les comptes de report fait partie d’une série de décisions du CRTC touchant l’approbation de tarifications de services de télécommunication pour la période du 1er juin 2002 au 31 mai 2007. Le CRTC est investi du pouvoir d’approuver de telles tarifications par l’application conjointe des articles 23, 24, 25, 27 et 32 de la Loi sur les télécommunications, L.C. 1993, ch. 38. Les passages pertinents de ces dispositions sont libellés comme suit :

23. Pour l’application de la présente partie et de la partie IV, «service de télécommunication » s’entend du service de télécommunication défini à l’article 2, ainsi que de tout service accessoire à la fourniture de services de télécommunication.

23. For the purposes of this Part and Part IV, "telecommunications service" has the same meaning as in section 2 and includes any service that is incidental to the business of providing telecommunications services.

24. L’offre et la fourniture des services de télécommunication par l’entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci.

24. The offering and provision of any telecommunications service by a Canadian carrier are subject to any conditions imposed by the Commission or included in a tariff approved by the Commission.

25. (1) L’entreprise canadienne doit fournir les services de télécommunication en conformité avec la tarification déposée auprès du Conseil et approuvée par celui-ci fixant — notamment sous forme de maximum, de minimum ou des deux — les tarifs à imposer ou à percevoir.

25. (1) No Canadian carrier shall provide a telecommunications service except in accordance with a tariff filed with and approved by the Commission that specifies the rate or the maximum or minimum rate, or both, to be charged for the service.

[…]

[…]

27. (1) Tous les tarifs doivent être justes et raisonnables.

27. (1) Every rate charged by a Canadian carrier for a telecommunications service shall be just and reasonable.

[…]

[…]

32. Le Conseil peut, pour l’application de la présente partie :

32. The Commission may, for the purposes of this Part,

[…]

[…]

g) en l’absence de disposition applicable dans la présente partie, trancher toute question touchant les tarifs et tarifications des entreprises canadiennes ou les services de télécommunication qu’elles fournissent.

(g) in the absence of any applicable provision in this Part, determine any matter and make any order relating to the rates, tariffs or telecommunications services of Canadian carriers.

 

[6]               L’article 47 de la Loi sur les télécommunications est lui aussi pertinent pour les questions en litige dans le présent appel. Voici le texte de cet article :

47. Le Conseil doit, en se conformant aux décrets que lui adresse le gouverneur en conseil au titre de l’article 8 ou aux normes prescrites par arrêté du ministre au titre de l’article 15, exercer les pouvoirs et fonctions que lui confèrent la présente loi et toute loi spéciale de manière à réaliser les objectifs de la politique canadienne de télécommunication et à assurer la conformité des services et tarifs des entreprises canadiennes avec les dispositions de l’article 27.

[Non souligné dans l’original.]

47. The Commission shall exercise its powers and perform its duties under this Act and any special Act

(a) with a view to implementing the Canadian telecommunications policy objectives and ensuring that Canadian carriers provide telecommunications services and charge rates in accordance with section 27; and

(b) in accordance with any orders made by the Governor in Council under section 8 or any standards prescribed by the Minister under section 15.

 

[7]               Les objectifs de la politique canadienne de télécommunication visés à l’article 47 de la Loi sur les télécommunications sont énoncés à son article 7, dont le texte est le suivant :

 

7. La présente loi affirme le caractère essentiel des télécommunications pour l’identité et la souveraineté canadiennes; la politique canadienne de télécommunication vise à :

a) favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions;

b) permettre l’accès aux Canadiens dans toutes les régions — rurales ou urbaines — du Canada à des services de télécommunication sûrs, abordables et de qualité;

c) accroître l’efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;

d) promouvoir l’accession à la propriété des entreprises canadiennes, et à leur contrôle, par des Canadiens;

e) promouvoir l’utilisation d’installations de transmission canadiennes pour les télécommunications à l’intérieur du Canada et à destination ou en provenance de l’étranger;

f) favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l’efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire;

g) stimuler la recherche et le développement au Canada dans le domaine des télécommunications ainsi que l’innovation en ce qui touche la fourniture de services dans ce domaine;

h) satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication;

i) contribuer à la protection de la vie privée des personnes.

7. It is hereby affirmed that telecommunications performs an essential role in the maintenance of Canada’s identity and sovereignty and that the Canadian telecommunications policy has as its objectives

(a) to facilitate the orderly development throughout Canada of a telecommunications system that serves to safeguard, enrich and strengthen the social and economic fabric of Canada and its regions;

(b) to render reliable and affordable telecommunications services of high quality accessible to Canadians in both urban and rural areas in all regions of Canada;

(c) to enhance the efficiency and competitiveness, at the national and international levels, of Canadian telecommunications;

(d) to promote the ownership and control of Canadian carriers by Canadians;

(e) to promote the use of Canadian transmission facilities for telecommunications within Canada and between Canada and points outside Canada;

(f) to foster increased reliance on market forces for the provision of telecommunications services and to ensure that regulation, where required, is efficient and effective;

(g) to stimulate research and development in Canada in the field of telecommunications and to encourage innovation in the provision of telecommunications services;

(h) to respond to the economic and social requirements of users of telecommunications services; and

(i) to contribute to the protection of the privacy of persons.

 

[8]               Les dispositions de la Loi sur les télécommunications qui s’appliquent expressément aux ordonnances du CRTC se trouvent aux articles 60, 61 et 62, dont je reproduis ici les passages pertinents :

60. Le Conseil peut soit faire droit à une demande de réparation, en tout ou en partie, soit accorder, en plus ou à la place de celle qui est demandée, la réparation qui lui semble justifiée, l’effet étant alors le même que si celle-ci avait fait l’objet de la demande.

60. The Commission may grant the whole or any portion of the relief applied for in any case, and may grant any other relief in addition to or in substitution for the relief applied for as if the application had been for that other relief.

61. (1) Le Conseil peut, dans ses décisions, prévoir une date déterminée pour leur mise à exécution ou cessation d’effet — totale ou partielle — ou subordonner celle-ci à la survenance d’un événement, à la réalisation d’une condition ou à la bonne exécution, appréciée par lui-même ou son délégué, d’obligations qu’il aura imposées à l’intéressé.

61. (1) The Commission may, in any decision, provide that the whole or any portion of the decision shall come into force on, or remain in force until, a specified day, the occurrence of a specified event, the fulfilment of a specified condition, or the performance to the satisfaction of the Commission, or of a person named by it, of a requirement imposed on any interested person.

(2) Le Conseil peut rendre une décision provisoire et rendre effective, à compter de la prise d’effet de celle-ci, la décision définitive.

(2) The Commission may make an interim decision and may make its final decision effective from the day on which the interim decision came into effect.

 (3) La décision peut également être rendue ex parte si le Conseil estime que les circonstances le justifient.

(3) The Commission may make an ex parte decision where it considers that the circumstances of the case justify it.

62. Le Conseil peut, sur demande ou de sa propre initiative, réviser, annuler ou modifier ses décisions, ou entendre à nouveau une demande avant d’en décider.

62. The Commission may, on application or on its own motion, review and rescind or vary any decision made by it or re-hear a matter before rendering a decision.

 

2. Les faits

[9]               La décision sur les comptes de report a été précédée de la Décision de télécom CRTC 2002‑34 (la décision sur le plafonnement des prix), en date du 30 mai 2002. La décision sur le plafonnement des prix établissait diverses contraintes et formules de fixation des prix des services réglementés de Bell Canada et d’autres entreprises de services locaux titulaires (ESLT) pour la période de quatre ans allant du 1er juin 2002 au 31 mai 2006. Par la Décision de télécom CRTC 2005‑69, en date du 16 décembre 2005, le CRTC a prolongé d’un an l’application du régime de plafonnement des prix, soit jusqu’au 31 mai 2007.

 

[10]           L’application de la formule particulière de tarification que la décision sur le plafonnement des prix a établie pour les services téléphoniques résidentiels dans les zones de desserte autres que celles à coût élevé (les zones autres que les ZDCE) – lesquelles, à ce que je crois comprendre, correspondent en général aux zones urbaines— aurait entraîné une baisse des tarifs sur toute année où le taux d’inflation aurait été inférieur à 3,5 %. Cependant, le CRTC n’a pas ordonné de réduction des tarifs pour cette catégorie d’abonnés parce qu’il s’inquiétait de l’effet qu’aurait eu une telle réduction sur la concurrence locale naissante dans les zones urbaines (se fondant sur l’hypothèse que l’application de tarifs trop bas constitue un obstacle à l’entrée de nouveaux concurrents sur le marché). Le CRTC a plutôt prescrit aux ESLT de comptabiliser les réductions tarifaires qu’aurait exigées la formule et de verser ces montants sur un compte de report. L’alinéa 37(1)a) de la Loi sur les télécommunications autorise en effet le CRTC à prescrire aux fournisseurs de services de télécommunication l’adoption d’une méthode comptable déterminée.

 

[11]           Le CRTC n’a pas ordonné aux ESLT de donner aux comptes de report la forme de comptes en fiducie ou de fonds distincts. Il n’est pas contesté que chaque ESLT est le propriétaire en common law des sommes portées au crédit de son compte de report. Un compte de report est simplement une accumulation d’écritures comptables. Le solde du compte de report d’une ESLT constitue une valeur active de cette entreprise, grevée d’une obligation éventuelle à exécuter de la manière que le CRTC prescrira légalement.

 

[12]           Au paragraphe 412 de la décision sur le plafonnement des prix, dont le texte suit, le CRTC a donné des exemples de la manière dont pourrait être utilisé le solde du compte de report d’une ESLT, sans exclure d’autres possibilités :

412. Le Conseil prévoit qu’un rajustement du compte de report serait fait chaque fois qu’il approuverait des réductions tarifaires pour les services locaux de résidence qui sont proposées par les ESLT en raison de pressions concurrentielles. Le Conseil prévoit également que le compte de report serait utilisé pour atténuer les augmentations de tarifs des services de résidence qui pourraient faire suite à l’approbation de facteurs exogènes ou lorsque l’inflation excède la productivité. Cela pourrait aussi se faire par exemple au moyen de rabais aux abonnés ou par le financement d’initiatives à l’avantage des abonnés du service résidentiel d’autres façons.

 

[13]           La décision sur le plafonnement des prix a laissé en suspens certaines questions relatives à la tarification des services des ESLT pour la période pertinente. Le CRTC prévoyait de recueillir des observations complémentaires sur ces questions non réglées. Afin de faire en sorte que tout changement de tarification découlant d’événements postérieurs au 1er juin 2002 pût être mis en œuvre rétroactivement à partir de cette date, le CRTC a défini tous les tarifs des ESLT comme provisoires à compter de ladite date.

 

[14]           Personne n’a demandé l’autorisation d’interjeter appel contre la décision sur le plafonnement des prix.

 

[15]           Le CRTC a examiné dans la Décision de télécom CRTC 2003‑15, en date du 18 mars 2003, certaines des questions de tarification qui étaient restées en suspens après la décision sur le plafonnement des prix. Il a ainsi réglé toutes les questions en suspens concernant les abonnés au service local résidentiel des zones de desserte autres que celles à coût élevé et a déclaré définitifs les tarifs correspondants. Je reproduis ci‑dessous le passage pertinent du paragraphe 65 de la Décision de télécom CRTC 2003‑15 :

65. Compte tenu de ce qui précède,

· le Conseil ordonne à Bell Canada 

d’inclure dans le compte de report des prix plafond les 29,1 millions de dollars d’économies attribués aux services locaux de résidence dans les zones autres que les [zones de desserte à coût élevé];

[…]

· le Conseil approuve de manière définitive le reste des tarifs de Bell Canada autres que [ceux de deux catégories qui ne sont pas en litige dans le présent appel];

· le Conseil ordonne que les tarifs proposés, autres que ceux associés aux options contractuelles pour les liaisons ARN, entrent en vigueur le 1er juin 2002 […]

[Non souligné dans l’original.]

 

[16]           Si je comprends bien la Décision de télécom CRTC 2003‑15, la conclusion finale du CRTC est que les tarifs qui y sont approuvés pour les services locaux résidentiels des zones de desserte autres que celles à coût élevé étaient justes et raisonnables; cependant, ces tarifs définitifs restaient soumis à l’obligation pour les ESLT de tenir les comptes de report prescrits par la décision sur le plafonnement des prix, en attendant que le CRTC rende une décision définitive sur l’utilisation du solde de ces comptes.

[17]           Le 2 décembre 2003, Bell Canada a déposé auprès du CRTC une demande tendant à faire approuver l’utilisation du solde de son compte de report pour étendre aux collectivités rurales et éloignées le bénéfice du service à large bande, qui permet l’accès Internet haute vitesse. Le 24 mars 2004, le CRTC a publié l’Avis public de télécom CRTC 2004‑1, intitulé Examen et utilisation des comptes de report pour la deuxième période de plafonnement des prix. Cet avis mettait en branle une instance publique dans le cadre de laquelle les intéressés étaient invités à présenter des propositions relatives à l’utilisation des comptes de report des ESLT. La proposition d’extension du service à large bande formulée par Bell Canada a été incorporée dans cette instance, qui s’est conclue par la publication de la décision sur les comptes de report – la décision qui fait l’objet de cet appel – le 16 février 2006.

 

[18]           Par la décision sur les comptes de report, le CRTC ordonnait aux ESLT, y compris Bell Canada, d’affecter un minimum de 5 % du solde de leurs comptes de report à l’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées. Pour ce qui concerne les 95 % restants du solde des comptes de report des ESLT, le CRTC a formulé les observations et prescriptions suivantes :

112. Le Conseil fait remarquer que dans les décisions relatives au plafonnement des prix, l’attribution de rabais aux clients des zones autres que les [zones de desserte à coût élevé] avait été présentée comme une utilisation possible des fonds des comptes de report. Le Conseil estime que l’offre de rabais aux abonnés serait conforme à l’article 7 de la Loi et aux objectifs énoncés dans les décisions relatives au plafonnement des prix.

113. Selon le Conseil, des rabais uniques aux abonnés n’équivaudraient pas à une réduction tarifaire du service local de base des ESLT ou n’iraient pas à l’encontre de l’objectif sous-jacent à la création des comptes de report. Il estime qu’un rabais unique n’aura pas une incidence continue sur le développement de la concurrence au sein du marché des services locaux de résidence.

114. Le Conseil a toutefois des réserves face à l’application de rabais au moyen des comptes de report et à l’inégalité que cette initiative pourrait entraîner entre les générations d’abonnés. Il estime qu’il serait beaucoup trop complexe et coûteux de tenter d’estimer le montant d’un rabais proportionnel au montant qu’un abonné particulier avait cotisé aux comptes de report. Le Conseil estime également que le coût à payer pour tenter de trouver les abonnés du service de résidence qui étaient des clients durant la période actuelle de plafonnement des prix, mais qui ne le sont plus maintenant, l’emporterait probablement sur les avantages susceptibles de découler de cet exercice.

115. Tel qu’indiqué précédemment, le Conseil a l’intention d’utiliser les fonds des comptes de report de façon à atteindre les objectifs du cadre actuel de réglementation des prix, notamment concilier les intérêts des trois principaux intervenants dans les marchés des télécommunications. Le Conseil estime que les initiatives visant à élargir les services à large bande et à améliorer l’accessibilité des personnes handicapées aux services de télécommunication seront, à long terme, plus profitables que l’offre d’un rabais unique.

116. Le Conseil conclut donc que chaque ESLT devrait, dans la plus grande mesure possible, consacrer les fonds de son compte de report à l’expansion des services à large bande dans les collectivités rurales et éloignées et à l’amélioration de l’accessibilité des personnes handicapées aux services de télécommunication. Le Conseil conclut également que si les comptes de report des ESLT comportent toujours des fonds une fois qu’il aura approuvé ces initiatives, les soldes en question seront remis sous forme de rabais aux abonnés du service local de résidence des ESLT dans les zones autres que les [zones de desserte à coût élevé].

 

[19]           En outre, au paragraphe 117 de la décision sur les comptes de report, le CRTC ordonnait aux ESLT souhaitant étendre le service à large bande sur leurs territoires de desserte de déposer, au plus tard  le 30 juin 2006, des propositions détaillées conformes à des conditions déterminées.

 

[20]           Dans la Décision de télécom CRTC 2008‑1, datée du 17 janvier 2008, le CRTC a examiné la proposition où Bell Canada exposait son projet d’utilisation du solde de son compte de report pour l’extension du service à large bande, mais ne l’a approuvée qu’en partie. Par suite, le CRTC a ordonné à Bell Canada de lui présenter, au plus tard le 25 mars 2008, un plan de distribution du solde de son compte de report sous forme de rabais aux abonnés résidentiels, inscrits au 17 janvier 2008, des zones de desserte autres que celles à coût élevé.

 

[21]           On peut se représenter concrètement le solde du compte de report d’une ESLT comme le montant de son obligation éventuelle d’utiliser une fraction déterminée des sommes payées par les abonnés au service local résidentiel des zones de desserte autres que celles à coût élevé de la manière à prescrire par le CRTC. J’insiste sur le fait qu’il n’y a pas ici de trop-perçu, en fait ou en droit. Les ESLT ont agi légalement en fixant et en percevant les tarifs autorisés par le CRTC. Cependant, n’eût été la nécessité, perçue par le CRTC, d’encourager l’entrée de nouveaux concurrents sur le marché des services locaux résidentiels des zones de desserte autres que celles à coût élevé, les tarifs autorisés auraient été plus bas.

 

[22]           La décision sur les comptes de report a pour effet d’obliger chaque ESLT à affecter 5 % du solde de son compte de report à l’amélioration de l’accessibilité aux services pour les personnes handicapées. Chaque ESLT pourrait décider d’investir ou non les 95 % restants dans l’extension du service à large bande aux collectivités rurales et éloignées. L’ESLT souhaitant investir dans cette extension serait tenue de soumettre une proposition d’investissement au CRTC. Si les travaux d’extension du service à large bande, selon le projet définitivement approuvé, devaient coûter au moins 95 % du solde du compte de report, aucun rabais ne serait offert aux abonnés. Si ces travaux, selon le projet définitivement approuvé, devaient coûter moins de 95 % du solde du compte de report, un rabais égal à la différence serait consenti aux abonnés au service local résidentiel des zones de desserte autres que celles à coût élevé. L’ESLT qui déciderait de ne pas investir dans l’extension du service à large bande serait obligée d’offrir auxdits abonnés un rabais égal à 95 % du solde de son compte de report.

 

[23]           Le terme rebate (rabais) signifie normalement le remboursement d’une somme d’argent à la personne qui l’a payée. Cependant, ce terme revêt un sens légèrement différent dans la décision sur les comptes de report, où il désigne la manière, encore à déterminer, dont le montant en question sera utilisé au profit de la catégorie d’abonnés visée telle qu’elle sera constituée à une date déterminée postérieure au 31 mai 2007 (dans le cas de Bell Canada, la date choisie est le 17 janvier 2008; voir la Décision de télécom CRTC 2008‑1). Par exemple, le « rabais » peut consister en un crédit de facturation forfaitaire, postérieur au 31 mai 2007, sur les comptes des personnes qui, à telle date future, seront des abonnés au service local résidentiel de zones de desserte autres que celles à coût élevé. Ou bien ce « rabais » peut prendre la forme d’une réduction des tarifs pour ces abonnés sur une période future déterminée.

 

[24]           Même si la présente affaire atteint l’étape où le CRTC approuverait l’application par Bell Canada d’une forme particulière de rabais, les personnes qui étaient des abonnés au service local résidentiel de zones de desserte autres que celles à coût élevé entre le 1er juin 2002 et le 31 mai 2007, mais qui ne l’étaient pas au 17 janvier 2008, ne bénéficieront pas de ce « rabais ». Autrement dit, la mesure dans laquelle un abonné pris isolément profitera du rabais, si même il en profite, pourrait ne pas être proportionnée à sa contribution au solde du compte de report.

 

[25]           Dans l’appel no A‑516‑06, Bell Canada (appuyée par les intimés Bell Aliant Communications régionales, société en commandite, et Arch Disability Law Centre) demande une ordonnance annulant la partie de la décision sur les comptes de report qui lui prescrit de distribuer sous forme de rabais une fraction de son compte de report aux abonnés locaux des zones de desserte autres que celles à coût élevé. Bell Canada n’a jamais contesté la partie de la décision sur les comptes de report qui lui ordonne d’affecter une partie de son compte de report à l’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées. S’opposent à Bell Canada dans cet appel, le CRTC, l’Organisation nationale anti‑pauvreté, l’Association des consommateurs du Canada et le Centre pour la défense de l’intérêt public.

 

[26]           Dans l’appel no A‑517‑06, les groupes de défense des consommateurs demandent une ordonnance annulant la partie de la décision sur les comptes de report qui prescrit l’utilisation d’une fraction des comptes de report pour l’extension du service à large bande aux collectivités rurales et éloignées. Les groupes de défense des consommateurs demandent aussi une ordonnance enjoignant au CRTC d’ordonner la distribution sous forme de rabais du solde des comptes de report (exception faite des 5 % dont le CRTC a ordonné l’utilisation aux fins d’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées). S’opposent aux groupes de défense des consommateurs dans cet appel, le CRTC, Bell Canada, Telus Communications Inc., Telus Communications (Québec) Inc. et MTS Allstream Inc.

 

[27]           Les groupes de défense des consommateurs avaient d’abord demandé une ordonnance prescrivant la distribution sous forme de rabais de la totalité du solde des comptes de report, y compris les 5 % que le CRTC avait ordonné d’affecter à l’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées. Cependant, à l’audience de leur appel, les groupes de défense des consommateurs ont abandonné leur contestation de l’aptitude légale du CRTC à ordonner l’utilisation d’une fraction des comptes de report à des fins d’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées. Toutes les parties sont maintenant convenues que le CRTC avait compétence pour rendre une telle ordonnance.

 

3. La norme de contrôle

[28]           Les deux appels soulèvent des questions d’interprétation des lois relativement à la compétence du CRTC pour rendre la décision sur les comptes de report. Toutes les parties soutiennent que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte, invoquant de nombreux précédents, notamment : ATCO Gas and Pipelines Ltd. c. Alberta (Energy and Utilities Board), [2006] 1 R.C.S. 140, au paragraphe 32 (le juge Bastarache, s’exprimant au nom de la majorité); et Barrie Public Utilities c. Association canadienne de télévision par câble, [2003] 1 R.C.S. 476, aux paragraphes 9 à 19 (le juge Gonthier, s’exprimant au nom de la majorité). La Cour suprême du Canada a décidé les affaires ATCO Gas et Barrie Public Utilities suivant l’arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982. En l’occurrence, je suis disposée à accepter l’opinion unanime des parties selon laquelle la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte.

 

[29]           Il est cependant à noter que, pour ce qui concerne la détermination de la norme de contrôle applicable aux questions d’interprétation des lois telles que celles que soulève la présente espèce, il est possible que celle‑ci ne puisse être distinguée de l’affaire qui a donné lieu à un arrêt plus récent de la Cour suprême du Canada, à savoir Conseil des Canadiens avec déficiences c. Via Rail Canada Inc., [2007] 1 R.C.S. 650. Dans cette affaire, qui concernait un recours contre une décision de l’Office des transports du Canada fondé sur l’interprétation de la loi régissant cet organisme, la juge Abella, s’exprimant au nom de la majorité, a établi que la norme de contrôle applicable était celle de la décision raisonnable; voir les paragraphes 98 à 100 de cet arrêt, ainsi que Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c. Office des transports du Canada, 2008 CAF 42.

 

4. Analyse

[30]           Dans l’analyse qui suit, j’examinerai d’abord l’appel des groupes de défense des consommateurs, puis celui de Bell Canada.

 

a) L’appel des groupes de défense des consommateurs

[31]           Les groupes de défense des consommateurs soutiennent que le CRTC n’avait pas légalement le pouvoir d’ordonner même l’ouverture de comptes de report et que, l’ayant ordonnée, il n’avait le droit de prescrire l’utilisation du solde de ces comptes à aucune autre fin que l’attribution de rabais aux abonnés du service local résidentiel des zones de desserte autres que celles à coût élevé (et, étant donné la concession faite à l’audience de l’appel, l’amélioration de l’accessibilité aux services de télécommunication pour les personnes handicapées).

 

(i) Question préjudicielle : l’appel des groupes de défense des consommateurs a‑t‑il été interjeté trop tard?

[32]           Le CRTC soutient qu’il n’est plus permis aux groupes de défense des consommateurs de faire valoir qu’il n’avait pas légalement le pouvoir d’ordonner l’ouverture des comptes de report, au motif que ce point a fait l’objet d’une conclusion définitive dans la décision sur le plafonnement des prix. Cet argument est d’un grand poids. Cependant, pour les motifs dont l’exposé suit, je ne puis l’accepter.

 

[33]           Les groupes de défense des consommateurs ont interjeté appel contre une parmi plusieurs décisions du CRTC liées entre elles. Le CRTC a adopté cette méthode de travail pour des raisons pratiques évidentes, mais elle a pour effet de créer une difficulté pour les appelants éventuels, qui peuvent ne pas être lésés par la décision d’une question déterminée, mais l’être par une décision ultérieure de la même série, fondée sur la première. À mon sens, étant donné les circonstances inhabituelles de la présente affaire, les groupes de défense des consommateurs n’ont pas agi de manière déraisonnable en attendant la décision sur les comptes de report pour demander l’autorisation d’interjeter appel et en faisant ensuite valoir leurs moyens touchant la régularité de la création de ces comptes. La raison en est que, avant la décision sur les comptes de report, on ne pouvait savoir avec certitude la manière dont le CRTC ordonnerait d’en utiliser le solde.

 

(ii) Les prétentions et moyens des groupes de défense des consommateurs

[34]           Je résumerais comme suit les prétentions et moyens des groupes de défense des consommateurs. Aux fins de la fixation de tarifs « justes et raisonnables » sous le régime du paragraphe 27(1) de la Loi sur les télécommunications, le CRTC doit tenir compte de ce qui est nécessaire, et seulement de ce qui est nécessaire, pour faire en sorte que les tarifs soient équitables pour le consommateur et donnent lieu à un rendement équitable aussi pour le fournisseur de services de télécommunication. Dans la décision sur le plafonnement des prix, le CRTC a établi que, pour les services téléphoniques résidentiels offerts dans les zones de desserte autres que celles à coût élevé, la formule de tarification instituée par cette décision entraînerait une diminution des prix dans toute année où le taux de l’inflation serait inférieur à 3,5 %. Or, cela équivalait à conclure que cette formule donnait lieu à la fixation de tarifs qui n’étaient pas justes et raisonnables pour les abonnés visés. En n’ordonnant pas que les tarifs diminuent en conséquence et en prescrivant plutôt l’ouverture de comptes de report où serait versé l’excédent des sommes perçues, le CRTC a commis une erreur de droit puisque, se fondant sur une considération dénuée de pertinence pour la tarification (la stimulation de la concurrence), il a fixé des tarifs supérieurs à ceux qui, selon ses conclusions, étaient « justes et raisonnables ». Ensuite, en permettant l’utilisation de l’excédent pour l’extension du service à large bande aux collectivités rurales et éloignées plutôt que d’exiger l’attribution de cet excédent sous forme de rabais à la catégorie d’abonnés qui avait payé les tarifs trop élevés, le CRTC a commis une autre erreur de droit du fait qu’il a pris en considération un facteur non pertinent pour une décision de tarification.

[35]           À mon sens, l’argumentation des groupes de défense des consommateurs se révèle défectueuse dès l’abord. Étant donné l’application conjointe des articles 47 et 7 de la Loi sur les télécommunications (reproduits plus haut), la compétence de tarification du CRTC ne se limite pas à la prise en compte des facteurs traditionnellement considérés comme pertinents pour assurer un prix équitable aux consommateurs et un rendement équitable aux fournisseurs de services de télécommunication. L’article 47 de la Loi sur les télécommunications prescrit expressément au CRTC de prendre en considération, entre autres, les objectifs de la politique canadienne de télécommunication énumérés à l’article 7 de la même loi. Il s’ensuit à mon avis que le CRTC a le droit, aux fins des décisions de tarification qu’il rend sous le régime de la Loi sur les télécommunications, de prendre en considération tous les objectifs de ladite politique énoncés à l’article 7.

[36]           Dans la décision sur le plafonnement des prix, le CRTC a justifié son choix de ne pas ordonner la réduction proposée de 3,5 % et de prescrire plutôt la création de comptes de report en notant que celle‑ci accroîtrait la compétitivité [alinéa 7c) de la Loi sur les télécommunications] et favoriserait le libre jeu du marché [alinéa 7f) de la même loi]. Dans la décision, ultérieure, sur les comptes de report, le CRTC a autorisé l’utilisation du solde de ces comptes pour l’extension du service à large bande aux communautés rurales et éloignées au motif qu’elle aurait pour effet d’accroître l’accessibilité à des services de télécommunication de haute qualité dans les régions rurales [alinéa 7b) de la Loi sur les télécommunications]. On voit donc que, dans les deux cas, le CRTC a fondé sa décision sur des facteurs que l’article 7 l’autorisait à prendre en considération.

[37]           À mon avis, aucun des précédents cités par les groupes de défense des consommateurs ne met en question mes conclusions sur l’étendue de la compétence du CRTC en matière de tarification. J’illustrerai ce point en examinant les deux principaux arrêts invoqués par ces groupes.

 

[38]           Le premier de ces arrêts est Northwestern Utilities Ltd. c. City of Edmonton, [1929] R.C.S. 186. La question en litige dans cette affaire était celle de savoir si l’organisme de tarification de services publics avait établi un taux de rendement trop élevé pour s’être fondé sur des éléments de preuve qu’il n’aurait pas dû admettre ou sur une preuve insuffisante. Cet arrêt est en général cité relativement aux observations suivantes formulées par le juge Lamont aux pages 192 et 193 :

[traduction]

Le devoir de la Commission était de fixer des tarifs justes et raisonnables – des tarifs qui, étant donné les circonstances, seraient d’une part équitables pour le consommateur et assureraient d’autre part à la société un rendement équitable de son investissement. On entend par « rendement équitable » un rendement net pour la société du capital qu’elle a investi dans son entreprise, qui soit aussi élevé que celui qu’elle tirerait d’un investissement égal dans d’autres valeurs présentant une attractivité, une stabilité et une certitude égales à celles de ladite entreprise.

 

Ce passage confirme la définition classique des termes « justes et raisonnables » dans le contexte d’une forme commune de régime de tarification.

 

[39]           Le deuxième arrêt est ATCO Gas, précité, que les groupes de défense des consommateurs présentent comme exemple de tentative infructueuse, de la part d’un organisme de tarification, de prendre en considération un facteur non pertinent dans l’établissement de tarifs. Le juge Bastarache écrivait ce qui suit au nom de la majorité au paragraphe 71 de cet arrêt :

La Commission a tenté de remédier à une supposée rétribution excessive de l’entreprise de services publics par ses clients. Or, aucune des lois applicables ne lui confère le pouvoir d’effectuer un tel remboursement à partir d’une telle perception erronée.

 

[40]           L’affaire ATCO Gas portait sur une ordonnance par laquelle l’Alberta Energy and Utilities Board (la Commission albertaine de l’énergie et des services publics) avait approuvé la vente de biens d’une entreprise de distribution de gaz naturel, à condition que celle‑ci utilise en partie le produit de cette vente au bénéfice des abonnés en leur consentant ultérieurement une réduction de la base tarifaire. Il était clair que le paragraphe 26(2) du Gas Utilities Act, R.S.A. 2000, ch. G‑5, conférait à la Commission le pouvoir d’approuver ou non la vente des biens en question. Cependant, l’entreprise de distribution soutenait que la Commission n’avait pas compétence pour subordonner son approbation, comme elle l’avait fait, à la condition d’un emploi déterminé du produit de la vente. La Commission faisait valoir de son côté que, bien que le Gas Utilities Act ne contienne aucune disposition l’autorisant explicitement à assortir de conditions une ordonnance approuvant la vente de biens sous le régime de son paragraphe 26(2), le pouvoir nécessaire lui était conféré implicitement par l’alinéa 15(3)d) de l’Alberta Energy and Utilities Board Act, R.S.A. 2000, ch. A‑17, qui disposait que, à l’égard d’une ordonnance rendue par elle, il était permis à la Commission de [TRADUCTION] « rendre toute ordonnance et [d’] imposer les conditions supplémentaires qu’elle [jugerait] nécessaires dans l’intérêt public ». Le juge Bastarache a conclu que la Commission s’était trompée en posant que l’alinéa 15(3)d) de l’Alberta Energy and Utilities Board Act introduisait dans le paragraphe 26(2) du Gas Utilities Act le pouvoir d’assortir de conditions une ordonnance approuvant une vente.

 

[41]           Les affaires Northwestern Utilities et ATCO Gas me paraissent pouvoir être distinguées de la présente espèce au motif qu’elles se rapportent à des régimes qui ne contiennent pas de dispositions analogues à celles des articles 7 et 47 de la Loi sur les télécommunications. Comme je l’expliquais plus haut, par l’article 47, le législateur prescrit expressément au CRTC de prendre en considération, dans l’exercice de son pouvoir d’approuver les tarifs des services de télécommunication, les objectifs de la politique canadienne de télécommunication qui sont énumérés à l’article 7. La gamme des facteurs pertinents pour les décisions de tarification du CRTC est considérablement plus large que celle des facteurs que prévoient expressément ou implicitement les régimes examinés dans Northwestern Utilities ou ATCO Gas. Il s’ensuit que l’appel des groupes de défense des consommateurs doit être rejeté.

 

b) L’appel de Bell Canada

[42]           L’appel de Bell Canada se fonde sur l’arrêt Bell Canada c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), [1989] 1 R.C.S. 1722 [Bell Canada (1989)]. Bell Canada invoque cet arrêt de la Cour suprême du Canada à l’appui de la prétention que le CRTC n’a pas compétence pour fixer rétrospectivement des tarifs définitifs et soutient que la décision sur les comptes de report relève de la tarification rétrospective.

 

[43]           Le CRTC soutient de son côté que la décision sur les comptes de report n’établit pas de tarification rétrospective parce qu’elle ne révise ni ne réexamine des tarifs antérieurement approuvés. Le CRTC définit la décision sur les comptes de report comme étant de nature et d’effet prospectifs, et y voit l’achèvement du processus prévu dans la décision sur le plafonnement des prix, où il avait prescrit l’ouverture des comptes de report et annoncé une décision ultérieure où il préciserait l’emploi à leur donner.

 

[44]           Si la définition de la décision sur les comptes de report proposée par le CRTC est juste, cette décision ne peut être contestée sur le fondement de Bell Canada (1989), et le présent appel de Bell Canada devra être rejeté. Il s’avère donc nécessaire d’examiner Bell Canada (1989) de manière assez détaillée.

 

[45]           Au moment où l’arrêt Bell Canada (1989) a été prononcé, le régime de la tarification des services de télécommunication consistait en deux lois : la Loi sur les chemins de fer, L.R.C. 1985, ch. R‑3; et la Loi sur les transports nationaux, L.R.C. 1985, ch. N‑20. Ce régime comprenait des dispositions analogues à celles des articles 24, 25, 27, 61 et 62 de la Loi sur les télécommunications, mais rien de semblable aux articles 47 et 7 de celle‑ci.

 

[46]           En 1984, Bell Canada a demandé au CRTC une augmentation générale des tarifs afin de prévenir une grave détérioration de sa situation financière. Le 19 décembre 1984, le CRTC lui a accordé sur une base provisoire une augmentation de 2 % devant prendre effet le 1er janvier 1985, augmentation qui lui assurait un taux de rendement de 13,7 %. Le CRTC a alors déclaré aussi qu’il réexaminerait les tarifs lorsqu’il disposerait d’une information financière complète pour 1985 et 1986. En 1985, Bell Canada a vu sa situation financière s’améliorer. Elle a néanmoins demandé au CRTC d’approuver immédiatement de manière définitive l’augmentation consentie de 2 %. Le CRTC a refusé de donner son approbation définitive et a déclaré qu’il procéderait à un supplément d’enquête. 

 

[47]           En fin de compte, Bell Canada n’a pu convaincre le CRTC que l’augmentation de 2 % se justifiait, et celui‑ci, par décision en date du 14 août 1985, lui a ordonné de déposer des tarifs révisés applicables à compter du 1er septembre 1985 de manière à suspendre les augmentations. À ce stade, les tarifs du 1er janvier au 31 août 1985 et ceux du 1er septembre 1985 au 31 décembre 1986 étaient provisoires.

 

[48]           En octobre 1985, Bell Canada a renoncé à sa demande d’augmentation générale des tarifs. Cependant, le CRTC a décidé de poursuivre quand même son examen des taux de 1985 et de 1986 et d’examiner notamment le coût des fonds propres de Bell Canada pour ces années et 1987. Ces questions ont fait l’objet d’audiences en 1986, puis d’une décision en date du 14 octobre 1986 (la Décision 86‑17), où le CRTC établissait que Bell Canada avait, pour 1985 et 1986, un excédent de produits d’exploitation totalisant 206 millions de dollars et qu’elle afficherait encore un excédent de cette nature en 1987. Le CRTC a aussi décidé que Bell Canada ne pourrait conserver son excédent de 206 millions et a rendu une ordonnance (ci‑après désignée « l’ordonnance de rabais ») lui prescrivant de porter les excédents de 1985 et 1986 au crédit des abonnés inscrits au 14 octobre 1986. Quant à l’excédent estimé de 1987, il a donné lieu à une réduction générale des tarifs pour cette année. 

 

[49]           La Cour suprême du Canada a conclu à la légalité de l’ordonnance de rabais au motif qu’elle avait été rendue au moment où les tarifs de 1985 et 1986 étaient de nature provisoire. Le juge Gonthier, au nom de la majorité, a défini comme suit (à la page 1749) la question en litige devant la Cour suprême :

Comme je l’ai déjà indiqué, [le CRTC] a examiné la période pendant laquelle les taux provisoires étaient en vigueur, c’est‑à‑dire la période s’étendant du 1er janvier 1985 au 14 octobre 1986, afin de vérifier si ces taux provisoires étaient effectivement justes et raisonnables. Après avoir tiré la conclusion de fait que ces taux n’étaient pas justes et raisonnables, l’ordonnance de crédit forfaitaire maintenant contestée devant cette Cour a été rendue pour remédier à cette situation. Ainsi, la décision 86‑17 n’a pas eu d’effet rétroactif puisqu’elle n’avait pas pour but de fixer des taux qui remplaceraient ceux imposés au cours de cette période. L’ordonnance de crédit forfaitaire est cependant rétroactive en ce sens qu’elle vise à remédier à l’imposition des taux approuvés antérieurement qui ont été jugés excessifs en dernier ressort. Par conséquent, la question dont est saisie cette Cour est de déterminer si l’appelant a compétence pour rendre des ordonnances visant à remédier, dans la mesure où ils se sont avérés injustifiés, à des taux qu’il a approuvés dans une décision provisoire antérieure.

[Non souligné dans l’original.]

 

[50]           Il y a une distinction cruciale entre les faits de la présente espèce et ceux que la Cour suprême a examinés dans Bell Canada (1989). Dans cette dernière affaire, le CRTC avait rendu l’ordonnance de rabais pour remédier à une situation découlant du fait que les tarifs fixés pour 1985 et 1986 avaient plus tard été déclarés supérieurs aux niveaux justes et raisonnables. En théorie, si ces tarifs avaient été qualifiés de « définitifs » avant l’ordonnance de rabais, Bell Canada aurait pu soutenir que le CRTC avait rempli son mandat consistant à établir les tarifs justes et raisonnables pour 1985 et 1986 et ne pouvait les changer rétroactivement ou atteindre le même résultat en ordonnant de consentir un rabais aux abonnés. Cependant, tels n’étaient pas les faits du litige porté devant la Cour. En fait, lorsque le CRTC a établi sur une base définitive le caractère excessif des tarifs, ceux‑ci étaient encore provisoires, et il n’avait pas été décidé qu’ils étaient justes et raisonnables. C’est pourquoi il était loisible au CRTC de retirer l’excédent à Bell Canada au moyen d’une ordonnance de rabais.

 

[51]           Bell Canada (1989) ne porte pas sur la même situation que celle qui nous occupe ici. L’ordonnance qui fait l’objet de la présente espèce a pour but de prescrire la manière d’utiliser le solde de comptes de report dont la création était obligatoire. Ces comptes représentent une partie de tarifs déclarés définitifs (voir la Décision de télécom CRTC 2003‑15), c’est‑à‑dire dont il a été décidé de manière définitive qu’ils étaient justes et raisonnables. Cependant, le fait que ces tarifs aient été déclarés définitifs ne mettait pas en cause, ni ne pouvait mettre en cause, la décision sur le plafonnement des prix, qui est restée en vigueur.

 

[52]           La décision sur le plafonnement des prix prescrivait à Bell Canada de porter une fraction de ses tarifs définitifs au crédit d’un compte de report, lequel – le CRTC l’a clairement indiqué – serait utilisé en temps voulu de la manière qu’il prescrirait. Il n’est pas contesté que le CRTC ait le droit d’imposer à un fournisseur de services de télécommunication, en lui prescrivant l’ouverture d’un compte de report, l’obligation éventuelle d’effectuer des dépenses qu’il se réserve de lui ordonner ultérieurement. Il s’ensuit par voie de conséquence nécessaire que le CRTC a le droit de rendre une ordonnance actualisant cette obligation et prescrivant des dépenses déterminées, à condition que l’on puisse plausiblement justifier celles‑ci par un ou plusieurs des objectifs de la politique de télécommunication énumérés à l’article 7 de la Loi sur les télécommunications.

 

[53]           Il était établi dès le départ que Bell Canada serait tenue d’utiliser le solde de son compte de report selon les prescriptions ultérieures du CRTC, lesquelles pourraient prévoir un ou plusieurs usages des sommes en question, y compris un rabais aux abonnés. Selon le dernier état du régime applicable, Bell Canada avait la possibilité de proposer, pour le solde de son compte de report, un usage concordant avec un objectif d’intérêt public fixé par le CRTC (l’extension du service à large bande aux collectivités rurales et éloignées), à défaut de quoi elle serait obligée de consentir un rabais aux abonnés.

[54]           Selon mon interprétation de la décision sur les comptes de report, le rabais pour les abonnés était une formule de rechange à envisager au cas où Bell Canada ne présenterait pas une proposition acceptable de dépenses aux fins de l’extension du service à large bande. Le CRTC a déclaré que, dans ce cas, l’offre d’un rabais aux abonnés serait compatible avec l’article 7 de la Loi sur les télécommunications et les objectifs formulés dans la décision sur le plafonnement des prix (paragraphe 112 de la décision sur les comptes de report). Il n’a pas été soutenu que le CRTC aurait mal interprété ou mal appliqué l’article 7.

 

[55]           On pourrait avancer qu’une ordonnance définissant un tarif comme provisoire, et une ordonnance établissant le caractère définitif d’un tarif mais imposant l’obligation de tenir un compte de report de la nature dont il s’agit ici, ont en pratique le même effet si le compte de report finit par servir au financement d’un rabais pour les abonnés. D’un point de vue général, ces méthodes peuvent l’une et l’autre comporter une décision touchant le point de savoir s’il convient de permettre au fournisseur de services de télécommunication d’utiliser une partie de ses propres fonds à son gré. Cependant, elles sont différentes du point de vue formel. Bell Canada (1989) met en lumière la légalité de l’utilisation d’une décision fixant des tarifs provisoires comme fondement d’une réduction rétrospective de tarifs. À mon sens, la présente espèce illustre quant à elle la légalité de l’utilisation d’un compte de report comme fondement d’une ordonnance ultérieure prescrivant ou approuvant des dépenses déterminées. Dans la présente affaire, le rabais aux abonnés n’avait ni pour objet ni pour effet de réduire rétrospectivement des tarifs qui auraient été déclarés justes et raisonnables. Il était donc de nature entièrement prospective. En conséquence, l’appel de Bell Canada doit être rejeté.

5. Les dépens

[56]           Toutes les parties ont déclaré à l’audience des appels qu’elles ne demandaient pas de dépens.

6. Conclusion

[57]           Je rejetterais les deux appels sans dépens.

 

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

          J. Richard, j.c.c.a. »

 

« Je suis d’accord

          Marc Noël, j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                       A‑516‑06

 

INTITULÉ :                                                      BELL CANADA

                                                                           c.

                                                                           LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES ET AL.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                OTTAWA (ONTARIO)

 

DATES DE L’AUDIENCE :                            LES 23 ET 24 JANVIER 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                           LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                        LE JUGE EN CHEF RICHARD

                                                                           LE JUGE NOËL

 

DATE DES MOTIFS :                                     LE 7 MARS 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Neil Finkelstein

Catherine Beagan Flood

POUR L’APPELANTE

BELL CANADA

 

John Laskin

Afshan Ali

 

 

 

Daniel M. Campbell, c.r.

 

 

 

Michael Janigan

John Lawford

 

 

 

 

 

Michael Koch

 

 

 

Debra McAllister

Lana Kerzner

 

 

John Lowe

Michael Ryan

Stephen Schmidt

 

POUR L’INTIMÉ

CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

POUR L’INTIMÉE

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES

 

POUR LES INTIMÉS

ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA ET AL.

 

 

 

POUR L’INTIMÉE

MTS ALLSTREAM INC.

 

 

POUR L’INTIMÉ

ARCH DISABILITY LAW CENTRE (ARCH)

 

POUR L’INTIMÉE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Blake Cassels & Graydon LLP

Toronto (Ontario)

POUR L’APPELANTE

BELL CANADA

 

Torys LLP

Toronto (Ontario)

 

 

 

Cox Hanson O’Reilly Matheson

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

 

a/s Centre pour la défense de l’intérêt public

Ottawa (Ontario)

 

 

 

Goodmans LLP

Toronto (Ontario)

 

Arch Disability Law Centre

Toronto (Ontario)

 

 

Burnet, Duckworth & Palmer LLP

Calgary (Alberta)

 

Allan P. Seckel, c.r.

Procureur général de la Colombie-Britannique

Victoria (Colombie‑Britannique)

 

Saskatchewan Telecommunications

Regina (Saskatchewan)

 

 

Association des sourds du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉ

CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

POUR L’INTIMÉE

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES

 

POUR LES INTIMÉS

ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA ET AL.

 

POUR L’INTIMÉE

MTS ALLSTREAM INC.

 

POUR L’INTIMÉ

ARCH DISABILITY LAW CENTRE (ARCH)

 

POUR L’INTIMÉE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

POUR L’INTIMÉE

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

 

POUR L’INTIMÉE

ASSOCIATION DES SOURDS DU CANADA

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                       A‑517‑06

 

 

INTITULÉ :                                                      L’ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA ET AL.

                                                                           c.

                                                                           LE CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES ET AL.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                OTTAWA (ONTARIO)

 

DATES DE L’AUDIENCE :                            LES 23 ET 24 JANVIER 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                           LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                        LE JUGE EN CHEF RICHARD

                                                                           LE JUGE NOËL

 

DATE DES MOTIFS :                                     LE 7 MARS 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Michael Janigan

John Lawford

 

 

 

Neil Finkelstein

Catherine Beagan Flood

POUR LES APPELANTES

ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA ET AL.

 

POUR L’INTIMÉE

BELL CANADA

 

John Laskin

Afshan Ali

 

 

 

 

 

Daniel M. Campbell, c.r.

 

 

 

Debra McAllister

Lana Kerzner

 

 

 

Michael Koch

 

 

John Lowe

Michael Ryan

Stephen Schmidt

POUR L’INTIMÉ

CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

 

 

POUR L’INTIMÉE

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES

 

POUR L’INTIMÉ

ARCH DISABILITY LAW CENTRE (ARCH)

 

 

POUR L’INTIMÉE

MTS ALLSTREAM INC.

 

POUR L’INTIMÉE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

a/s Centre pour la défense de l’intérêt public

Ottawa (Ontario)

 

 

 

Blake Cassels & Graydon LLP

Toronto (Ontario)

 

Torys LLP

Toronto (Ontario)

 

 

 

Cox Hanson O’Reilly Matheson

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

 

Arch Disability Law Centre

Toronto (Ontario)

 

 

Goodmans LLP

Toronto (Ontario)

 

 

Burnet, Duckworth & Palmer LLP

Calgary (Alberta)

 

Allan P. Seckel, c.r.

Procureur général de la Colombie-Britannique

Victoria (Colombie‑Britannique)

 

Saskatchewan Telecommunications

Regina (Saskatchewan)

 

 

Association des sourds du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LES APPELANTES

ASSOCIATION DES CONSOMMATEURS DU CANADA ET AL.

 

POUR L’INTIMÉE

BELL CANADA

 

POUR L’INTIMÉ

CONSEIL DE LA RADIODIFFUSION ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS CANADIENNES

 

POUR L’INTIMÉE

BELL ALIANT COMMUNICATIONS RÉGIONALES

 

POUR L’INTIMÉ

ARCH DISABILITY LAW CENTRE (ARCH)

 

POUR L’INTIMÉE

MTS ALLSTREAM INC.

 

 

POUR L’INTIMÉE

TELUS COMMUNICATIONS INC.

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

POUR L’INTIMÉE

SASKATCHEWAN TELECOMMUNICATIONS

 

POUR L’INTIMÉE

ASSOCIATION DES SOURDS DU CANADA

 

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