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Date : 20090113

Dossier : A-197-08

Référence : 2009 CAF 2

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF RICHARD

                        LA JUGE DESJARDINS

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

YVES LAMOTHE, CLAUDE FAVREAU, KATIE BERNARD

SONJA LAURENDEAU, NORMAND BÉLAIR, PAQUETTE DUFOUR

CARL GAGNON, KARINE NADEAU, JOCELYNE GAUTHIER, HÉLÈNE GAGNON

 

Appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Intimé

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 13 janvier 2009.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 13 janvier 2009.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                     LE JUGE EN CHEF RICHARD

 


Date : 20090113

Dossier : A-197-08

Référence : 2009 CAF 2

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF RICHARD

                        LA JUGE DESJARDINS

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

YVES LAMOTHE, CLAUDE FAVREAU, KATIE BERNARD

SONJA LAURENDEAU, NORMAND BÉLAIR, PAQUETTE DUFOUR

CARL GAGNON, KARINE NADEAU, JOCELYNE GAUTHIER, HÉLÈNE GAGNON

 

Appelants

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Intimé

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 13 janvier 2009)

LE JUGE EN CHEF RICHARD

[1]               Il s’agit d’un appel d’un jugement de la Cour fédérale, 2008 CF 411, qui a accueilli la demande de contrôle judiciaire présentée par l’intimé visant une décision d’une arbitre de grief, membre de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, rendue le 7 juin 2007, dans laquelle l’arbitre a déterminé que les appelants avaient droit à la rémunération pour le temps de leur déplacement lorsqu’il assistaient à des cours de formation.

 

[2]               Les parties ont présenté un énoncé conjoint des faits à l’arbitre.

 

[3]               Brièvement, les appelants ont été requis de participer à des sessions de formation reliées à leurs fonctions de vétérinaire dispensées à l’extérieur de la région de leur lieu d’affectation. Ils ont fait une demande de rémunération pour le temps supplémentaire dépassant leurs heures normales de travail pour le temps de formation, pour le temps de déplacement entre le lieu de résidence et le lieu de la formation et/ou pour le temps de déplacement entre le lieu de séjour et le lieu de formation. L’employeur a rémunéré le temps de formation dépassant les heures normales de travail. Les appelants ont également tous été rémunérés pour les frais encourus durant leur déplacement selon la Directive sur les voyages émise par le Secrétariat du Conseil du trésor du Canada. Cependant, le temps de déplacement entre le lieu de résidence et le lieu de formation et le temps de déplacement entre l’hôtel et le lieu de formation a été refusé, d’où la raison pour le dépôt des griefs.

 

[4]               Dans sa décision, l’arbitre a fait droit aux griefs des appelants en concluant ce qui suit :

Compte tenu des dispositions de la convention collective de 2003 des représentations des parties et de la preuve, je suis d’avis que les griefs doivent être accueillis pour les motifs suivants.

 

La stipulation B7.08 de la convention collective prévoit ce qui suit :

 

 

Aux termes du présent article, la rémunération n’est pas versée pour le temps que met l’employé à se rendre à des cours, à des séances de formation, à des conférences et à des colloques, sauf indication contraires à l’article « Promotion professionnelle ».

 

À prime abord, cette clause est sans équivoque. Les fonctionnaires qui se déplacent pour des cours ou des séances de formation n’ont pas droit au temps de déplacement. Toutefois, je suis d’avis que dans le contexte des griefs sous étude l’employeur a créé une exception dans le cas où il oblige ses employés à suivre une formation.

 

 

 

[5]               En ce qui concerne le déplacement entre l’hôtel où résidaient les appelants une fois arrivés à destination et le lieu de formation, l’arbitre a également conclu qu’il devait être accordé et elle s’est exprimée de la façon suivante :

Quant au déplacement des fonctionnaires entre leur lieu de séjour et le centre de formation, lorsque l’employeur impose le mode de transport, les heures de départ et de retour, je suis également d’avis que ce temps doit être rémunéré. Le temps d’un employé qui se déplace de son domicile à son travail n’est pas la même chose que le temps que met un employé à se déplacer pour se rendre à une activité de formation selon un horaire dicté par l’employeur. Dans le premier cas, l’employé est libre de son temps et peut choisir de se déplacer à sa guise, selon ses propres contraintes. Dans le deuxième, il est contraint par l’employeur quant au moment et à la durée du transport et ne peut choisir de faire autre chose. Il est à la complète disposition de l’employeur pendant cette période.

 

 

[6]               Le juge des requêtes a conclu que l’arbitre a « […] ignoré le libellé évident de la convention collective et n’a pas procédé à une analyse suffisante afin de démontrer l’existence d’une pratique antérieure ».

 

[7]               Après avoir analysé la preuve présentée devant l’arbitre, le juge a déterminé que la preuve est loin d’établir l’existence d’une pratique antérieure, encore moins, une pratique antérieure bien établie. En effet, une simple déclaration à cet effet dans l’affidavit de M. Gingras attestant de ce fait et un seul exemple sont loin d’être convaincants et suffisants.

 

[8]               Le juge des requêtes a décidé que la norme de contrôle de la décision correcte s’appliquait à la présente affaire en se remettant à la décision de Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9.

 

[9]               Les appelants prennent position que c’est la norme de la décision raisonnable qui s’applique en l’espèce.

 

[10]           L’intimé est d’avis que la norme de contrôle de la décision correcte s’applique dans la présente affaire suivant les principes établis dans Dunsmuir.

 

[11]           Que ce soit la norme de contrôle de la décision correcte ou de la décision raisonnable qui s’applique, l’arbitre en est arrivée à une décision incorrecte et déraisonnable.

 

[12]           Pour plus de précision, même si le degré de déférence nous permet de conclure qu’il y a lieu de déférer à la décision de l’arbitre et d’appliquer la norme de la raisonnabilité, nous ne pouvons conclure que, considérée dans son ensemble, la décision de l’arbitre était raisonnable.

 

[13]           Concernant le temps de déplacement lorsqu’un fonctionnaire se rend à des cours de formation, l’arbitre a ignoré les règles concernant l’interprétation des conventions collectives en donnant un sens différent à l’énoncé clair, ordinaire et sans ambiguïté de la clause B7.08 qui prévoit :

Aux termes du présent article, la rémunération n’est pas versée pour le temps que met l’employé à se rendre à des cours, à des séances de formation, à des conférences et à des colloques, sauf indications contraires à l’article « Promotion professionnelle ».

 

 

 

[14]           Cette clause est claire; l’employé qui se déplace pour les fins d’une formation ne sera pas rémunéré pour le temps qu’il met  à se rendre à des séances de formation.

 

[15]           Concernant le temps de déplacement entre le lieu de séjour une fois à destination et le centre de formation, l’arbitre a omis de tenir compte des clauses de la convention collective qui précisent, sans équivoque, les circonstances dans lesquelles le temps de déplacement est rémunéré. En particulier, l’arbitre a omis de ternir compte de l’article B7.02 de la convention collective qui prévoit la rémunération lorsqu’un employé voyage entre son domicile (en anglais : residence) et son lieu de travail, de l’article B7.01 qui traite de la rémunération seulement lorsque l’employé voyage pour exécuter ses fonctions hors de sa région du lieu d’affectation et aussi de l’article B7.07 qui inclut comme du temps de déplacement le temps obligatoirement passé à chaque halte, d’une durée maximale de trois heures.

 

[16]           Le juge des requêtes a donc conclu que l’article B7.08 est clair et non équivoque. Cette disposition ne prévoit aucune rémunération pour le temps de déplacement lorsque l’employé voyage pour assister à un cours de formation.

 

[17]           Quant à l’argument avancé par les appelants qu’il existait une pratique antérieure bien établie, l’arbitre, dans sa décision, a affirmé que l’argument d’estoppel (préclusion) ne s’applique pas dans les circonstances de cette affaire.

[45] Quant à l’argument d’estoppel mis de l’avant par l’agent négociateur, je suis d’avis que ce principe ne s’applique pas à cette affaire puisqu’il n’y a aucune preuve que les fonctionnaires ont accepté de se rendre à la formation en raison des représentations de l’employeur qu’il allait rembourser leur temps de déplacement.

 

[18]           Le juge des requêtes a statué que la conduite ou la promesse sur laquelle la doctrine d’estoppel repose doit être sans équivoque et l’existence de cette conduite ou promesse est une question de faits.

 

[19]           Le juge a conclu que la preuve est loin d’établir l’existence d’une pratique antérieure et encore moins d’une pratique antérieure bien établie et que par conséquent, l’absence d’une preuve de conduite ou de promesse exclut l’application de cette doctrine dans les présentes circonstances.

 

[20]           Dans ces circonstances,  l’appel sera rejeté avec dépens.

 

 

 

« J. Richard »

Juge en chef

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                            A-197-08

 

(APPEL D’UN JUGEMENT DE LA COUR FÉDÉRALE, 2008 CF 411, DU 2 AVRIL 2008, NO. DU DOSSIER T-1244-07.)

 

INTITULÉ :                                                                           YVES LAMOTHE et al. c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Ottawa (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 13 janvier 2009

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       LE JUGE EN CHEF RICHARD, LA JUGE DESJARDINS et LA JUGE TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :                                        LE JUGE EN CHEF RICHARD

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Sean T. McGee

POUR LES APPELANTS

 

Karl Chemsi

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Nelligan O'Brien Payne s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES APPELANTS

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

 

 

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