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Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

 

Date : 20091022

Dossier : A‑75‑09

Référence : 2009 CAF 306

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

HAROLD MACNEIL

demandeur

et

LA COMMISSION DE L'ASSURANCE‑EMPLOI DU CANADA

défenderesse

 

 

 

Audience tenue à St. John's (Terre‑Neuve‑et‑Labrador), le 17 septembre 2009.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 22 octobre 2009.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                      LE JUGE RYER

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                       LA JUGE SHARLOW

                                                                                                                             LA JUGE TRUDEL

 

 

 


Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

Date : 20091022

Dossier : A‑75‑09

Référence : 2009 CAF 306

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE RYER                   

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

HAROLD MACNEIL

demandeur

et

LA COMMISSION DE L'ASSURANCE‑EMPLOI DU CANADA

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE RYER

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision (CUB 71590) rendue par le juge David G. Riche, agissant à titre de juge‑arbitre, dans laquelle il a fait droit à l’appel de la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (la « Commission ») interjetée relativement à une décision du Conseil arbitral, datée du 8 mai 2008.

 

[2]               La question principale dans la présente demande est de savoir si les paiements mensuels que M. Harold MacNeil a reçus du régime de pension de la United Association of Plumbers, Pipefitters and Welders, Local 682 (le « régime de pension ») constituent une rémunération au sens et aux fins des articles 35 et 36 du Règlement sur l’assurance‑emploi, DORS/96‑332 (le « Règlement »), qui doit être déduite des prestations payables à M. MacNeil conformément aux exigences de l’article 19 de la Loi sur l’assurance‑emploi, L.R. 1996, ch. 23 (la « Loi »).

 

[3]               Compte tenu des circonstances de la présente demande, la résolution de cette question dépend de la question de savoir si la pension à laquelle M. MacNeil a droit en vertu du régime de pension est une pension de retraite découlant de l’emploi de M. MacNeil, comme le prévoit la définition de pension au paragraphe 35(1) du Règlement.

 

[4]               Les dispositions pertinentes de la Loi et du Règlement sont reproduites dans l’annexe des présents motifs.

 

CONTEXTE

Situation de M. MacNeil

[5]               M. MacNeil a été membre de la United Association of Plumbers, Pipefitters and Welders, Local 682 (le « syndicat ») du 1er novembre 1966 au 1er septembre 2007. Il a adhéré au régime de pension le 1er janvier 1982.

 

[6]               M. MacNeil a quitté l’emploi qu’il détenait auprès de Lockerbie and Hole Industrial Inc. (« l’employeur ») le 7 juillet 2007 et a établi que sa période de prestations débutait le 18 novembre 2007.

 

[7]               Dans sa demande de prestations, M. MacNeil a informé la Commission de l’assurance‑emploi (la « Commission ») qu’il recevait une pension mensuelle de 995,53 $ du régime de pension. Dans sa réponse, la Commission a déterminé que ces paiements mensuels constituaient une rémunération qui réduirait les prestations qui lui étaient payables en vertu de la Loi. N’étant pas d’accord avec cette détermination, M. MacNeil a interjeté appel auprès du Conseil arbitral.

 

La convention collective et le régime de pension

[8]               Le régime de pension a été établi en 1979, à la suite de négociations entre un certain nombre de syndicats du Cap‑Breton, notamment le syndicat, et les employeurs du jour. Le régime de pension est enregistré conformément à la Pension Benefits Act de Nouvelle Écosse, R.S.N.S. ch. 340, sous le numéro d’enregistrement 0925834 (dossier du demandeur, page 75).

 

[9]               L’entente précise ayant autorisé l’établissement du régime de pension ne figure pas au dossier. Toutefois, des extraits des ententes stipulant les conditions d’emploi de M. MacNeil pendant diverses années (chacune constituant une « convention collective ») ont été déposés en preuve devant le Conseil arbitral.

 

[10]           Les versions de la convention collective au dossier contiennent les dispositions approuvées par l’employeur et le syndicat relativement au régime de pension. Plus particulièrement, ces dispositions stipulent :

a)         que le régime de pension doit être régi par une convention de fiducie aux termes de laquelle il doit être contrôlé par les fiduciaires, dont la moitié sont nommés par le syndicat et l’autre, par les employeurs;

b)         que les cotisations au régime de pension aux termes de la convention collective couvrant les projets industriels, en vigueur du 1er juillet 2005 au 30 juin 2008, s’appliquant à M. MacNeil, selon son avocat, sont les suivantes :

(b)        L’employeur verse des cotisations pour les compagnons au taux horaire suivant :

 

                        ●  cinq dollars et vingt‑cinq cents (5,25 $) pour les compagnons

                        ●  trois dollars et soixante‑quinze cinq cents (3,75 $) pour les apprentis

                            (dossier du demandeur, pages 52 et 53)

 

c)         et que, si le régime de pension prend fin, les cotisations futures qui auraient autrement été versées au régime de pension doivent être ajoutées au salaire horaire des employés et devenir ensuite partie intégrante de leur rémunération globale.

 

[11]           Une lettre du représentant des employés, datée du 8 février 2008 (la « lettre du 8 février 2008 ») fait état d’une pratique selon laquelle certaines sommes payables par les employeurs peuvent être réparties par le syndicat entre les divers ensembles d'avantages sociaux offerts aux employés, notamment le régime de pension. C'est ce qui ressort du paragraphe 2 de cette lettre (dossier du demandeur, page 63) qui se lit comme suit :


[traduction] Dans chaque ronde de négociation, il y a eu entente sur la hausse de l’offre monétaire globale, et les employeurs ont constamment affirmé aux syndicats qu’ils pouvaient répartir, comme ils le jugeaient approprié, ladite hausse entre les diverses composantes de la rémunération horaire globale, à condition seulement que le total de la rémunération horaire globale négociée ne soit pas accrue d’une somme supérieure à celle convenue dans le processus de négociation. Par exemple, si les parties s’entendent pour que la rémunération globale augmente d’un dollar (1,00 $), les syndicats pourraient alors répartir le dollar comme ils l’entendent entre les diverses composantes de leur rémunération globale. Il pourrait placer quatre‑vingt‑onze cents (0,91 $) dans l’enveloppe taux horaire de salaire et neuf cents (0,09 $) dans celle des congés fériés et payes de vacances. Par ailleurs, il pourrait placer le dollar en entier dans l’enveloppe santé et bien‑être ou celle de la pension. Ou encore, ils pourraient le répartir, à leur convenance, en tranches diverses entre les enveloppes taux horaire, indemnité de congés fériés et annuel, santé et bien‑être, pension et/ou fonds de formation assortis que divers syndicats ont intégrés à leur convention collective.

(dossier du demandeur, page 64 – Je souligne)

 

Le dossier ne contient aucun extrait de convention collective qui sanctionne cette pratique apparente.

 

[12]           Le régime de pension est résumé dans un livret intitulé « U.A. Local 682 Cape Breton Plumbers & Pipefitters Pension Plan Members’ Booklet, January 2001 » (le « livret sur la pension »). Dans l’introduction du livret sur la pension, il est indiqué que le but du régime de pension est le suivant :

[traduction]

Il a été établi dans le but de vous offrir une certaine sécurité financière à votre retraite.

(dossier du demandeur, p. 84)

(dossier du demandeur, page 84)

 

[13]           Le livret sur la pension stipule qu’un membre du syndicat adhère automatiquement au régime de retraite après 1 000 heures de travail. Toutefois, si l’employé quitte le syndicat avant d’avoir terminé deux années de service continu, aucune prestation de pension ne lui sera payable. En outre, le livret sur la pension précise que les prestations auxquelles le retraité a droit sont les suivantes :

●          0,0015 $ par mois pour chaque heure travaillée du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982,

 

plus

 

●          0,0252 $ par mois pour chaque heure travaillée du 1er janvier 1983 au 30 juin 1990,

 

plus

 

●          0,0186 $ par mois pour chaque 1,00 $ cotisé par votre employeur en votre nom du 1er juillet 1990 au 31 décembre 1996,

 

plus

 

●          0,0169 $ par mois pour chaque dollar 1,00 $ cotisé votre employeur en votre nom à compter du 1er janvier 1997 et par la suite.

(dossier du demandeur, page 87)

 

 

LA DÉCISION DU CONSEIL ARBITRAL

[14]           La majorité du Conseil arbitral a établi que le régime de pension est un fonds de pension privé et que, pour cette raison, il ne cadre pas avec la définition de pension figurant au paragraphe 35(1) du Règlement. Bien que la majorité n’ait pas précisé ce qu’elle entendait par l’expression régime de pension privé, elle a fait référence à deux décisions rendues par des juges‑arbitres (CUB 15310 et CUB 16101) dans lesquelles il est indiqué qu’un régime de pension privé est un régime établi volontairement par un employé, qui a la nature d’un compte d’épargne pouvant être ou ne pas être financé à même la rémunération découlant d’un emploi. La majorité du Conseil arbitral a fondé sa conclusion sur les constatations suivantes :

[traduction]

À la lecture de la pièce 9‑19, nous comprenons que le syndicat a signé une entente avec l’employeur. Les renseignements issus de la pièce 9‑19 indiquent que, de 1979 jusqu’au dépôt des prestations visant à Harold MacNeil, la politique était la suivante : les cotisations au régime de pension syndical étaient versées dans les enveloppes salariales et il incombait au syndicat de répartir l’argent comme il le jugeait approprié. Le syndicat a placé l’argent dans un régime de pension et l’a administré de la même façon de 1979 à 2008 jusqu’à ce qu’appel interjeté par Harold MacNeil soit reçu. Le syndicat a administré le régime de façon uniforme au cours des années, et il n’y en a eu qu’un seul.

(dossier du demandeur, p. 104)

 

 

[15]           Dans ces conclusions, la référence à la pièce 9 – 19 concerne la lettre d’un représentant syndical faisant mention d’« une entente avec l’employeur ». Dans ladite lettre, le représentant fait référence à la « convention collective » (dossier du demandeur, page 66), indiquant ainsi que certaines des conclusions du Conseil sont des interprétations de la convention collective. Ces conclusions font également référence à la « pension » et au « régime » et peuvent être considérées comme des interprétations du régime de pension.

 

LA DÉCISION DU JUGE‑ARBITRE

[16]           Le juge‑arbitre a fait droit à l’appel de la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, en déclarant :

[traduction]  [...] À mon avis, ce régime de pension n’est pas un régime privé; il découle plutôt de l’emploi du prestataire et l’argent devrait donc être réparti, S’il n’y avait pas d’emploi, il n’y aurait pas de pension. La pension découle de l’emploi, car elle a été négociée par le syndicat, qui a prévu qu’une partie de la rémunération du prestataire serait placée dans un fonds de pension financé par l’employeur. Cet argent serait mis à la disposition du prestataire seulement si le fonds de pension prenait fin. Dans ce cas, le prestataire serait probablement rémunéré à un taux horaire plus élevé. Toutefois, le prestataire ne peut pas toucher le montant exact qu’il a déposé dans le fonds. Le fonds de pension est vraisemblablement destiné à tous les employés et il résulte d’une entente conclue entre le syndicat et tous les employés.

(dossier du demandeur, onglet 2, p. 3)

[17]           Cet extrait tiré de la décision du juge‑arbitre indique qu’il a conclu que les montants reçus par M. MacNeil constituaient une rémunération qui devait être répartie conformément aux articles 35 et 36 du Règlement, parce que ces montants lui ont été payés à même un régime de pension qui cadre avec la définition de pension figurant au paragraphe 35(1) du Règlement. En faisant droit à l’appel de la Commission, le juge‑arbitre n’est pas d’accord avec les conclusions du Conseil arbitral, citées au paragraphe 14 de ces motifs, et il a conclu que le régime de retraite n’est pas un régime privé. En concluant que le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil, le juge‑arbitre a déterminé que le régime de pension a été mis en place à la suite de négociations entreprises entre le syndicat et les employeurs qui établissent les conditions d’emploi de M. MacNeil. Il a poursuivi en concluant que si M. MacNeil n’avait pas été employé comme il l’a été, il n’aurait pas été en mesure de participer au régime de pension. En outre, le juge‑arbitre a conclu qu’à la différence d’un REER ou d’un compte d’épargne, M. MacNeil ne possédait pas les montants précis qui ont été versés dans le régime de pension en son nom et qu’il n’exerçait pas de contrôle à leur égard.

 

QUESTION EN LITIGE

[18]           La question à trancher dans la présente demande est celle de savoir si le juge‑arbitre a commis une erreur en renversant la décision du Conseil arbitral en concluant que le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil et qu’il cadrait, par conséquent, avec la définition de pension figurant au paragraphe 35(1) du Règlement.


ANALYSE

1. Le juge‑arbitre a‑t‑il choisi la norme de contrôle appropriée?

Norme de contrôle utilisée par notre Cour

[19]           La présente Cour doit déterminer si, dans sa révision de la décision du Conseil arbitral, le juge‑arbitre a commis une erreur dans le choix de la norme de contrôle appropriée et son application à cette décision. (Voir Stone c. Canada (Procureur général), 2006 CAF 27, [2006] 4 F.C.R. 120; Meechan c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 368, 126 A.C.W.S. (3d) 267.

 

[20]           Il est bien établi que le choix de la norme de contrôle est une question de droit (voir Dr. Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226, 2003 CSC 19). Il est également bien établi que cette Cour examinera les conclusions des juges‑arbitres relativement aux questions de droit, en utilisant la norme de la décision correcte (voir Canada (Procureur général) c. Sveinson (C.A.), 2001 CAF 315, [2002] 2 C.F. 205; Canada (Procureur général) c. Kos, 2005 C.A.F. 319, [2005] A.C.F. No 1650 (QL)).

 

Le choix de la norme de contrôle par le juge‑arbitre

[21]           Le juge‑arbitre n’a pas indiqué sur quelle norme de contrôle il s’est fondé pour réviser la décision du Conseil arbitral relativement à la question de classification du régime de pension. S’il l’avait fait, cela aurait été utile.

 

[22]           Je suis d’avis que le juge‑arbitre a révisé la question selon la norme de la décision correcte, comme l’a fait valoir l’avocat de M. MacNeil. Il n’y a rien dans les motifs invoqués par le juge‑arbitre qui indique qu’il a montré un degré de déférence quelconque envers le Conseil arbitral dans l’examen de sa conclusion, selon laquelle le régime de pension ne découlait pas de l’emploi de M. MacNeil et les constatations sur lesquelles cette conclusion était fondée.

 

Le juge‑arbitre a‑t‑il commis une erreur en choisissant la norme de contrôle de la décision correcte?

[23]           L’avocat de M. MacNeil fait valoir que le juge‑arbitre aurait dû appliquer la norme de la raisonnabilité, étant donné que la question que le juge‑arbitre examinait – celle de savoir si le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil – est une question mixte de fait et de droit. Je ne suis pas de cet avis.

 

[24]           L’application d’une norme juridique à un ensemble de conclusions factuelles est habituellement considérée comme une question mixte de fait et de droit, laquelle est examinée en se fondant sur une norme de la décision raisonnable, sauf s’il existe une question de droit facilement isolable (voir Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, 2008 CSC 9, au par. 52).

 

[25]           Dans la présente demande, il est incontestable que la norme juridique est la définition de pension figurant au paragraphe 35(1) du Règlement. Il est également évident que les paiements mensuels que la Commission a considérés comme une rémunération aux fins des articles 35 et 36 du Règlement ont été reçus par M. MacNeil en vertu du régime de retraite, une entente contractuelle mise en place à la suite d’une autre entente contractuelle, la convention collective, liant toutes deux M. MacNeil et l’employeur. En conséquence, l’application de la définition statutaire dans les circonstances est essentiellement déterminée par les interprétations de la convention collective et du régime de pension.

 

[26]           À mon avis, les interprétations de contrats comme ceux‑ci sont des questions de droit (voir Signature Plaza Sport Inc. c. Canada (C.A.F.), [1994] A.C.F. no 253, 169 N.R. 321, au par. 14; Alberta Giftwares Ltd. c. La Reine, [1974] R.C.S. 584, à la p. 588, 36 D.L.R. (3d) 321, à la p. 324; et dans le contexte d’une convention collective Voice Construction Ltd. c. Construction & General Workers' Union, Local 92, [2004] 1 S.C.R. 609, 2004 CSC 23, aux par. 27 et 29).

 

[27]           En conséquence, il s’ensuit que le juge‑arbitre a été tenu d’examiner la décision du Conseil arbitral quant à la question de savoir si le régime de retraite découlait de l’emploi de M. MacNeil en se fondant sur la norme de la décision correcte et qu’en choisissant cette norme, il n’a fait aucune erreur.

 

2.  Le juge‑arbitre a‑t‑il correctement appliqué la norme de la décision correcte?

Norme de contrôle appliqué par cette Cour

[28]           Ayant déterminé que le juge‑arbitre a correctement choisi la norme de la décision correcte comme fondement de sa révision de la décision du Conseil arbitral, il m’incombe maintenant de déterminer si le juge‑arbitre a correctement appliqué cette norme de contrôle. En conséquence, la question est de savoir si c’est avec raison que le juge‑arbitre a décidé que le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil.

 

[29]           Dans les circonstances à l’étude, le juge‑arbitre a essentiellement substitué son point de vue à celui du Conseil arbitral sur des questions d’interprétation des deux contrats, la convention collective et le régime de pension. Comme il a précédemment été indiqué, les interprétations de contrats sont des questions de droit. En conséquence, lorsque j’examine la demande visant la détermination de ces questions de droit par le juge‑arbitre, je suis d’avis que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte.

 

[30]           En interprétant les dispositions de la convention collective et du régime de pension, le juge‑arbitre a conclu que le régime de pension n’était pas un régime privé de même nature qu’un  régime d’épargne ou d’un REER et que M. MacNeil n’avait aucun droit légal d’exercer un contrôle sur les cotisations versées au régime de pension en son nom. Je suis d’accord avec ces conclusions de droit et pour dire qu’elles appuient la conclusion du juge‑arbitre selon laquelle le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil.

 

[31]           À mon avis, la conclusion du juge‑arbitre selon laquelle le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil est en outre appuyée par d'autres dispositions de la convention collective et le régime de pension.

 

[32]           Premièrement, la disposition de la convention collective qui est reproduite au paragraphe 10 de ces motifs prévoit que l’employeur doit cotiser un montant précis au régime de pension pour chaque heure travaillée par M. MacNeil. Cette disposition n’admet aucune discrétion ou contrôle de la part de M. MacNeil ou du syndicat quant à la question de savoir si les montants précisés vont réellement dans le régime de pension ou sont autrement répartis. Même si la lettre du 8 février 2008 peut être interprétée comme indiquant une pratique contraire, cette lettre n’est qu’une tentative pour démontrer que la convention collective a été par la pratique suggérée. Selon moi, on ne peut affirmer que cette lettre contredit la substance juridique ou le libellé précis de la convention collective. En outre, la « pratique » mentionnée dans la lettre du 8 février 2008 fait simplement référence aux hausses négociées de l’offre monétaire globale. Par conséquent, même si cette lettre devait être prise en considération, elle ne va pas à l’encontre de l’obligation contractuelle spécifique de l’employeur de verser un montant précis dans le régime de pension pour chaque heure travaillée de M. MacNeil. L’obligation contractuelle spécifique montre que les cotisations versées par l’employeur au nom de M. MacNeil dans le régime de retraite varient directement selon la quantité de ses heures de travail. Je suis d’avis que cette obligation contractuelle établit un rapport de cause à effet évident entre l’emploi de M. MacNeil et le régime de pension à partir duquel il reçoit les paiements mensuels en question.

 

[33]           Deuxièmement, tel qu’il est indiqué dans l’extrait du régime de pension, reproduit au paragraphe 13 de ces motifs, le montant de la pension de M. MacNeil varie en fonction du nombre d’heures de travail qu’il a effectuées pendant les années qu’il participait au régime de pension. Cela établit également un lien clair et direct entre l’emploi de M. MacNeil et le régime de pension.

 

[34]           L’interprétation juridique de la convention collective et du régime de pension faite par le juge‑arbitre ainsi que mes propres interprétations de ces contrats m’amènent à conclure que le juge‑arbitre n’a commis aucune erreur en appliquant la norme de la décision correcte lorsqu’il a examiné la décision du Conseil arbitral et qu’il a agi correctement en renversant cette décision.

 

[35]           J’ajouterais que même si la norme de contrôle applicable à la question de savoir si le régime de pension découlait de l’emploi de M. MacNeil était la raisonnabilité, comme le soutient l’avocat de M. MacNeil, les conclusions du juge‑arbitre ainsi que mes conclusions additionnelles sont, à mon avis, plus que suffisantes pour démontrer que le Conseil arbitral a rendu une décision déraisonnable en concluant que le régime de pension ne découlait pas de l’emploi de M. MacNeil.

 

DÉCISION

[36]           Pour les motifs qui précèdent, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire avec dépens.

 

 

« C. Michael Ryer »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

     K. Sharlow, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord

     Johanne Trudel, j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Danielle Benoit

 


ANNEXE

 

Loi sur l’assurance‑emploi, L.R. 1996, ch. 23

 

Rémunération au cours de périodes de chômage

 

19. (2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), si le prestataire reçoit une rémunération durant toute autre semaine de chômage, il est déduit des prestations qui lui sont payables un montant correspondant à la fraction de la rémunération reçue au cours de cette semaine qui dépasse 50 $, ou vingt‑cinq pour cent de son taux de prestations hebdomadaires si celui‑ci est de 200 $ ou plus.

 

[…]

Earnings in periods of unemployment

 

 

19. (2) Subject to subsections (3) and (4), if the claimant has earnings during any other week of unemployment, there shall be deducted from benefits payable in that week the amount, if any, of the earnings that exceeds:

 

(a) $50, if the claimant’s rate of weekly benefits is less than $200; or

 

(b) 25% of the claimant’s rate of weekly benefits, if that rate is $200 or more.

 

 

 

Règlements

 

54. La Commission peut, avec l’agrément du gouverneur en conseil, prendre des règlements:

 

[…]

 

(s) définissant et déterminant la rémunération aux fins du bénéfice des prestations, déterminant le montant de cette rémunération et prévoyant sa répartition par semaine ou autre période;

 

[…]

 

Regulations

 

54. The Commission may, with the approval of the Governor in Council, make regulations

 

 

(s) defining and determining earnings for benefit purposes, determining the amount of those earnings and providing for the allocation of those earnings to weeks or other periods;

 

 

 

Règlement sur l’assurance‑emploi, DORS/96‑332

 

 

Détermination de la rémunération aux fins du bénéfice des prestations

 

35. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

 

[…]

 

« pension » Pension de retraite provenant de l’une des sources suivantes : 

 

(a) un emploi ou un emploi à titre de membre des forces armées ou de toute force policière;

 

[…]

 

(2) Sous réserve des autres dispositions du présent article, la rémunération qu’il faut prendre en compte pour déterminer s’il y a eu un arrêt de rémunération et fixer le montant à déduire des prestations à payer en vertu de l’article 19 ou des paragraphes 21(3) ou 22(5) de la Loi, ainsi que pour l’application des articles 45 et 46 de la Loi, est le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi, notamment :

 

[…]

 

(e) les sommes payées ou payables au prestataire, par versements périodiques ou sous forme de montant forfaitaire, au titre ou au lieu d’une pension;

 

[…]

 

Determination of Earnings for Benefit Purposes

 

 

35. (1) The definitions in this subsection apply in this section.

 

 

"pension" means a retirement pension 

 

(a) arising out of employment or out of service in any armed forces or in a police force;

 

 

(2) Subject to the other provisions of this section, the earnings to be taken into account for the purpose of determining whether an interruption of earnings has occurred and the amount to be deducted from benefits payable under section 19 or subsection 21(3) or 22(5) of the Act, and to be taken into account for the purposes of sections 45 and 46 of the Act, are the entire income of a claimant arising out of any employment, including

 

 

 

(e) the moneys paid or payable to a claimant on a periodic basis or in a lump sum on account of or in lieu of a pension;

 

 

 

Répartition de la rémunération aux fins du bénéfice des prestations

 

36. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la rémunération du prestataire, déterminée conformément à l’article 35, est répartie sur un nombre donné de semaines de la manière prévue au présent article et elle constitue, aux fins mentionnées au paragraphe 35(2), la rémunération du prestataire pour ces semaines.

 

(2) Pour l’application du présent article, la rémunération du prestataire ne peut être répartie sur les semaines durant lesquelles elle n’avait pas valeur de rémunération ou n’avait pas été comptée comme rémunération selon l’article 35.

 

[...]

 

(14) Les sommes visées à l’alinéa 35(2)(e) qui sont payées ou payables au prestataire par versements périodiques sont réparties sur la période pour laquelle elles sont payées ou payables.

 

[...]

 

Allocation of Earnings for Benefit Purposes

 

 

36. (1) Subject to subsection (2), the earnings of a claimant as determined under section 35 shall be allocated to weeks in the manner described in this section and, for the purposes referred to in subsection 35(2), shall be the earnings of the claimant for those weeks.

 

 

(2) For the purposes of this section, the earnings of a claimant shall not be allocated to weeks during which they did not constitute earnings or were not taken into account as earnings under section 35.

 

 

...

 

(14) The moneys referred to in paragraph 35(2)(e) that are paid or payable to a claimant on a periodic basis shall be allocated to the period for which they are paid or payable.

 

 

 


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                            A‑75‑09

 

INTITULÉ :                                                                           Harold MacNeil c. Commission de l’assurance‑emploi du Canada

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                                                   Le 17 septembre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                Le juge RYER

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LA JUGE SHARLOW

                                                                                                LA JUGE TRUDEL

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 22 octobre 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Ronald R. Pink, c.r.

POUR LE DEMANDEUR

 

Julien Matte

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pink Larkin

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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