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Date : 20110624

Dossier : A‑462‑10

Référence : 2011 CAF 212

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

ENTRE :

MANUELA MASIC

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

 

Audience tenue à Halifax (Nouvelle‑Écosse), le 30 mai 2011.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 24 juin 2011.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                            LE JUGE NADON

                                                                                                                               LE JUGE EVANS

 


Date : 20110624

Dossier : A‑462‑10

Référence : 2011 CAF 212

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

ENTRE :

MANUELA MASIC

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

[1]        La Commission de l’assurance‑emploi (la Commission) a, suivant le paragraphe 30(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi, L.C. 1996, ch. 23 (la Loi), rejeté la demande de prestations d’assurance‑emploi présentée par Manuela Masic. Le conseil arbitral (le conseil) a rejeté l’appel de la décision de la Commission et a conclu que Mme Masic avait été congédiée en raison de son inconduite. Le juge‑arbitre Seniuk a rejeté l’appel de la décision du conseil arbitral et a conclu que celui‑ci « n’a commis aucune erreur de fait ou de droit donnant lieu à révision. Par conséquent, rien ne justifie que le juge‑arbitre modifie sa décision ».

 

[2]        Mme Masic s’adresse maintenant à notre Cour pour obtenir le contrôle judiciaire de la décision par laquelle le juge‑arbitre a rejeté son appel. Lors de l’audience relative à la présente demande, Mme Masic a agi pour son propre compte; le défendeur était représenté par un avocat. Les parties ont présenté oralement leurs arguments respectifs. À l’audience, il est devenu évident que la Cour ne disposait pas du dossier complet du Bureau du juge‑arbitre. Par conséquent, la Cour a donné une directive demandant à l’avocat du défendeur d’obtenir le dossier et de le présenter à la Cour et à Mme Masic. La Cour dispose maintenant du dossier. Rien dans le dossier n’exige des observations supplémentaires des parties. Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la demande de Mme Masic doit être rejetée. Par souci de commodité, Mme Masic est désignée ici comme une « prestataire ».

 

Contexte

[3]        Mme Masic travaillait comme opératrice de la salle du numéraire pour G4S Cash Services Limited. Son travail consistait à recevoir et à compter des dépôts en espèces, provenant des clients de son employeur, et de saisir les montants respectifs dans un système informatisé. Le 5 mai 2009, on a enregistré un écart de 3 000 $ entre le montant déposé par un client et le chiffre final saisi dans l’ordinateur de Mme Masic. À la suite d’une enquête de sécurité, le 14 mai 2009, l’employeur a mis fin à son emploi.

 

L’inconduite au sens de la Loi

[4]        Le paragraphe 30(1) de la Loi prévoit que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd son emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification. L’inconduite exige un acte délibéré : Canada (Procureur généralc. Tucker, [1986] 2 C.F. 329 (C.A.). L’inconduite a un caractère délibéré lorsque les actes qui ont mené au congédiement étaient conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’elle soit congédiée : Mishibinijima c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 36. Il faut une relation causale entre l’inconduite et le congédiement. L’inconduite ne doit pas servir d’excuse ou prétexte pour le renvoi; il faut qu’elle cause la perte d’emploi : Canada (Procureur généralc. Brissette (1993), [1994] 1 C.F. 684 (C.A.). Pour qu’il y ait inconduite, il n’est pas nécessaire qu’il y ait déclaration de culpabilité au criminel : Canada (Procureur généralc. Granstrom, 2003 CAF 485.

 

La norme de contrôle

[5]        Dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour doit déterminer si le juge‑arbitre a commis une erreur dans le choix de la norme de contrôle à appliquer à la décision du conseil arbitral et dans l’application de cette norme. Avant de s’en remettre à l’appréciation de la preuve faite par le conseil arbitral, le juge‑arbitre doit être convaincu que celui‑ci a interprété correctement le critère juridique applicable à l’inconduite. En l’absence d’une erreur dans son interprétation du critère juridique, l’application par le conseil arbitral du droit aux faits est une question de droit et de fait susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité : Budhai c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 298; Mac c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 184.

 

Analyse

[6]        Compte tenu de son résumé de la jurisprudence pertinente, j’estime que le juge‑arbitre a adopté et appliqué le bon critère juridique à l’inconduite lorsqu’il a examiné la décision du conseil arbitral. En concluant que le conseil arbitral n’a commis aucune erreur de fait ou de droit, le juge‑arbitre a estimé que le conseil arbitral a interprété correctement le critère juridique applicable. Je suis du même avis que l’arbitre à ce sujet.

 

[7]        De plus, Mme Masic n’a relevé aucune erreur précise dans la décision du juge‑arbitre. Elle affirme plutôt, de façon générale, que le conseil arbitral et le juge‑arbitre ont commis une erreur en concluant à l’inconduite. Une grande partie de sa thèse repose sur le refus de son employeur de fournir l’enregistrement vidéo de ses actes, le soir qui a donné lieu à son congédiement. Les autres arguments portent sur diverses allégations de mauvaise foi de la part de son ancien employeur.

 

[8]        Le conseil arbitral a conclu que Mme Masic a omis d’informer et de consulter son superviseur comme il était requis, qu’elle n’a pas suivi la procédure établie en inscrivant les montants, et qu’elle a omis de signaler qu’elle avait « retranché » les 3 000 $ du dépôt total. Le conseil a estimé que l’anomalie concernant l’inscription des 3 000 $ « était une infraction d’une telle gravité et dénotant une telle insouciance qu’elle équivalait à de l’inconduite ».

 

[9]        Le dossier dont disposait le conseil arbitral renfermait les commentaires détaillés de l’employeur au sujet des procédures spécifiques relatives au milieu de travail que Mme Masic n’aurait pas respectées. Après avoir pris connaissance des détails relatifs au processus à suivre, le conseil a entendu les témoignages de l’employeur, de la Commission et de Mme Masic. Comme il a déjà été indiqué, le conseil a retenu le bon critère pour apprécier l’inconduite et a tiré des conclusions de fait. Il était raisonnablement loisible au conseil d’arriver aux conclusions qu’il a tirées à la lumière de la preuve qui lui était soumise. J’estime que l’enregistrement vidéo n’aurait pas influé sur ses conclusions.

 

[10]      Contrairement à l’affirmation de Mme Masic, la lettre de congédiement de l’employeur n’était pas fondée sur un vol présumé, mais sur la responsabilité de Mme Masic par rapport à la somme manquante, sur l’omission de fournir une explication raisonnable quant à l’argent manquant, et sur sa malhonnêteté. La conclusion du conseil arbitral sur l’anomalie concernant l’inscription de la somme en question correspond aux motifs de congédiement invoqués par l’employeur.

 

[11]      En ce qui concerne l’allégation de mauvaise foi, rien dans le dossier n’indique l’existence d’antécédents de relations hostiles entre Mme Masic et son employeur. En fait, rien ne permet de conclure que la décision de congédier Mme Masic était fondée sur d’autres faits que ceux qui se rapportent aux actes de celle‑ci le soir en question.

 


[12]      Puisqu’il était raisonnablement loisible au conseil d’arriver aux conclusions qu’il a tirées, le juge‑arbitre n’a pas commis d’erreur en refusant d’intervenir. En conséquence, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire. Le défendeur n’a pas demandé de dépens. Par conséquent, je n’accorderais pas de dépens.

 

 

« Carolyn Layden‑Stevenson »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

M. Nadon, j.c.a. »

 

 

« Je suis d’accord

John M. Evans, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑462‑10

 

 

INTITUTÉ :                                                   MASIC c. PGC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 30 mai 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     LE JUGE NADON

                                                                        LE JUGE EVANS

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 24 juin 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pour son propre compte

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Jonathan Shapiro

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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