Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20110527

Dossier : A‑198‑09

Référence : 2011 CAF 182

 

CORAM :      le juge en chef BLAIS

                        La juge DAWSON

                        La juge TRUDEL

 

ENTRE :

AMIR ATTARAN

appelant

et

 

ministre des affaires étrangères

 

intimé

 

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 8 décembre 2010

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 27 mai 2011

 

Motifs du jugement :                                                                              la juge DAWSON

Y ONT SOUSCRIT :                                                                              le juge en chef BLAIS

                                                                                                                             LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20110527

Dossier : A‑198‑09

Référence : 2011 CAF 182

 

CORAM :      le juge en chef BLAIS

                        La juge DAWSON

                        La juge TRUDEL

 

ENTRE :

AMIR ATTARAN

appelant

et

 

ministre des affaires étrangères

 

intimé

 

 

Motifs du jugement

LA JUGE DAWSON

[1]        L’appelant, le professeur Amir Attaran, a demandé au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (le MAECI) de lui donner des copies des rapports annuels sur la situation des droits de la personne en Afghanistan pour les années 2001 à 2006. On lui a répondu qu’il n’existait pas de rapport pour 2001. Il a reçu des rapports expurgés pour les années 2002 à 2006. Le professeur Attaran a alors déposé une plainte auprès du Commissaire à l’information (le commissaire) en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, ch. A‑1 (la Loi), portant que les expurgations des rapports étaient excessives. Il a plus tard reçu du MAECI des versions moins expurgées des rapports. Toujours insatisfait, le professeur Attaran a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire de la décision du MAECI d’expurger des parties des rapports.

 

[2]        Dans des motifs publiés sous la référence 2009 CF 339, un juge de la Cour fédérale a ordonné la communication d’un extrait qui se trouve à la page 117 du rapport de 2005 et également à la page 140 du rapport de 2006. Cette communication a été ordonnée parce que l’extrait avait été divulgué dans l’édition du journal The Globe and Mail du 25 avril 2007 ainsi que dans d’autres instances devant la Cour fédérale. Outre l’ordonnance de cette communication, le juge a rejeté la demande de contrôle judiciaire, sans adjudication des dépens à l’une ou l’autre partie. Le professeur Attaran interjette maintenant appel de la décision de la Cour fédérale.

 

[3]        À l’audition du présent appel, les avocats du professeur Attaran ont informé la Cour qu’un seul des moyens d’appel invoqués dans le mémoire des faits et du droit de l’appelant serait débattu. La seule question dont notre Cour est saisie est celle de savoir si la Cour fédérale a commis une erreur en concluant que le pouvoir discrétionnaire de l’intimé en vertu du paragraphe 15(1) de la Loi a été exercé et, dans l’affirmative, s’il l’a été de façon raisonnable.

 

[4]        Pour les motifs qui suivent, j’accueillerais l’appel avec dépens tant devant notre Cour que devant la Cour fédérale en raison de l’omission de l’intimé d’exercer le pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 15(1) de la Loi. Je renverrais l’affaire à l’intimé pour lui permettre d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 15(1) de la Loi.

 

1.         Contexte factuel

[5]        Pour les besoins du présent appel, il suffit d’énoncer les faits suivants pour compléter ceux que contient l’introduction qui précède :

 

1.                  Le professeur Attaran a présenté sa demande d’accès le 24 janvier 2007. Le MAECI a répondu à la demande d’accès du professeur Attaran le 23 avril 2007 en lui transmettant des copies expurgées des rapports sur les droits de la personne en Afghanistan pour les années 2002 à 2006. Les premières versions expurgées des rapports se fondaient sur les dispositions de l’article 17, des paragraphes 13(1) et 15(1) et des alinéas 21(1)a) et b) de la Loi. Ces dispositions sont reproduites à l’annexe jointe aux présents motifs.

2.                  Le professeur Attaran a déposé une plainte auprès du commissaire le 24 avril 2007.

3.                  Le 15 novembre 2007, le MAECI a transmis au professeur Attaran des versions moins expurgées des rapports. Selon l’explication du MAECI, cette transmission découlait de [traduction] « la production de documents dans une instance en application de l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada. » Plus précisément, le MAECI a indiqué ce qui suit :

[traduction] […] le 14 novembre 2007, [il] a rendu publics plus de renseignements issus de ces rapports dans le cadre de procédures judiciaires et même si le critère de l’exception est plus large en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, il a été jugé que, dans le respect de l’esprit et de l’objet de la Loi sur l’accès à l’information, ces rapports que mon bureau avait antérieurement traités devraient maintenant correspondre le plus possible aux autres versions.

 

            En d’autres mots, aucun renseignement rendu public hier par suite des procédures judiciaires n’est maintenant refusé en vertu d’une disposition visant une exception de la Loi sur l’accès à l’information.

 

4.                  Dans une lettre datée du 19 novembre 2007, le Commissariat à l’information a communiqué au professeur Attaran les conclusions de son enquête concernant sa plainte. Le Commissariat l’a informé de ce qui suit :

a.       Aucun rapport sur l’Afghanistan n’avait été produit pour 2001.

b.      Le commissaire avait demandé au MAECI d’examiner de nouveau des expurgations dans certaines pages des rapports. En conséquence, le MAECI avait communiqué des renseignements supplémentaires dans sa lettre du 15 novembre 2007.

c.       Le MAECI n’invoquait plus les alinéas 21(1)a) et b) de la Loi pour refuser de communiquer des renseignements.

d.      Tous les renseignements non communiqués en application du paragraphe 13(1) de la Loi ne pouvaient pas non plus être communiqués aux termes du paragraphe 15(1) de la Loi. Par conséquent, les conclusions du commissaire se limitaient au paragraphe 15(1) de la Loi.

e.       Le commissaire était d’avis que tous les renseignements non communiqués en vertu du paragraphe 15(1) de la Loi [traduction] « risqueraient vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales s’ils étaient publiés ». De l’avis du commissaire, la disposition était invoquée à bon droit et il était convaincu que le MAECI avait bien exercé son pouvoir discrétionnaire relativement à l’application de l’exception.

f.        En ce qui a trait aux exceptions fondées sur l’article 17 de la Loi, le commissaire a souligné que cette exception était rarement utilisée. Le commissaire était d’avis qu’il existait suffisamment de motifs pour justifier le recours à cette disposition et que l’exception avait été invoquée à juste titre.

g.       En conclusion, le commissaire indiquerait que la plainte avait été résolue.

5.                  Devant la Cour fédérale, le professeur Attaran a précisé qu’il ne cherchait qu’à obtenir la divulgation des passages des rapports portant sur la torture. Il acceptait qu’il y ait des exceptions aux termes de la Loi dans le cas des mentions de particuliers, d’organismes ou d’alliés en Afghanistan, parce que de telles divulgations risqueraient vraisemblablement de porter préjudice aux relations internationales du Canada relativement à ces particuliers ou organismes.

6.                  Le 25 novembre 2010, l’avocat de l’intimé a fourni aux avocats de l’appelant et à notre Cour des copies révisées de quatre pages des rapports en cause sur les droits de la personne. Chaque page contenait moins de passages expurgés. L’intimé a également communiqué une version moins expurgée d’un document pertinent intitulé « Afghanistan 2006 : Bonne gouvernance, démocratie et droits de la personne ». Le sous‑ministre des Affaires étrangères avait communiqué ce document moins expurgé à la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire dans le cadre d’une instance devant cet organisme.

7.                  Étant donné la limitation de la portée de la divulgation demandée par l’appelant et la communication du 25 novembre 2010, seuls trois passages expurgés figurant dans deux pages des documents pertinents sont en cause dans le présent appel.

8.                  Le paragraphe 15(1) de la Loi permet au responsable d’une institution fédérale de refuser la communication de documents contenant « des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales », mais ne l’y oblige pas. Dans le présent appel, le professeur Attaran ne conteste pas la question de savoir si les renseignements expurgés sont visés par cette description. La question en cause est celle de savoir si le MAECI a légalement exercé son pouvoir discrétionnaire de ne pas communiquer les renseignements.

 

2.         La décision de la Cour fédérale

[6]        Après avoir examiné les faits et décrit la preuve par affidavit, le juge a énoncé les questions dont la Cour était saisie ainsi que le cadre législatif.

 

[7]        Le juge a ensuite examiné la norme de contrôle applicable à la décision d’expurger des passages des rapports et le fardeau de la preuve. S’appuyant sur l’arrêt de notre Cour 3430901 Canada Inc. c. Canada (Ministre de l’Industrie), 2001 CAF 254, [2002] 1 C.F. 421 (Telezone), il a conclu que la Cour devait appliquer la norme de la décision correcte à la question de savoir si un document demandé est visé par une disposition de la Loi qui prévoit une exception à la communication. Lorsqu’un pouvoir discrétionnaire est conféré pour refuser la communication d’un document, la norme de la décision raisonnable s’applique au contrôle de la légalité de l’exercice du pouvoir discrétionnaire.

 

[8]        En ce qui a trait au fardeau de la preuve, le juge a cité le passage suivant tiré du paragraphe 89 de l’arrêt Telezone de notre Cour :

[…] lorsque dans un recours en révision exercé en vertu des articles 41 ou 42, le ministre a démontré comme il le lui incombait qu’un document est visé par une exception, le recours doit être rejeté à moins que le demandeur ne convainque la Cour que le ministre n’a pas exercé légalement son pouvoir discrétionnaire de refuser la communication d’un document visé par une exception.

 

[9]        S’appuyant sur cet arrêt, le juge a écrit ce qui suit au paragraphe 31 de ses motifs :

31.       Ainsi, dans un premier temps, c’est au défendeur qu’il incombe de prouver que le document est visé par l’exception. Si le défendeur, avec sa preuve, s’acquitte de cette charge, l’obligation retombe sur le demandeur, qui doit réfuter cette preuve avec la démonstration que l’exercice par le ministre de son pouvoir discrétionnaire était déraisonnable.

 

[10]      Dans son analyse des questions en litige, le juge a indiqué qu’outre la preuve publique, la Cour avait reçu une preuve par affidavit confidentielle présentée en l’absence de l’autre partie, comme l’autorisait l’article 52 de la Loi (cet article est également reproduit dans l’annexe jointe aux présents motifs). Le juge a fourni un bref résumé de la nature de cette preuve. Il a indiqué que les renseignements confidentiels démontraient que le commissaire avait effectué une enquête minutieuse relativement à la plainte de l’appelant et dans le cadre de laquelle il avait posé plusieurs questions d’approfondissement au MAECI.

 

[11]      En ce qui concerne les expurgations en cause, exception faite de l’extrait dont le juge a ordonné la communication au motif qu’il était déjà du domaine public, le juge a écrit qu’il était convaincu qu’« aux termes du paragraphe 15(1) de la [Loi], il était raisonnable que le décideur prenne la décision de ne pas divulguer des parties des rapports, de sorte que la Cour ne peut pas annuler cette décision » (paragraphe 46 des motifs). Il a poursuivi comme suit, aux paragraphes 47 à 49 de ses motifs :

47.       Il y a des éléments de preuve clairs et directs présentés par un officier supérieur des Forces canadiennes et un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international selon lesquels la divulgation des parties expurgées des documents mettant en cause l’armée, le service de renseignement et les services de police de l’Afghanistan risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales du Canada avec ces organismes du gouvernement afghan. La preuve confidentielle fait ressortir des exemples précis de cas où les critiques publiques de la part d’un représentant du Canada ont mis à rude épreuve la capacité du Canada à collaborer avec les autorités afghanes pendant quelque temps par la suite. Par conséquent, il existe des éléments de preuve de répercussions ou de réactions de la part des Afghans lorsque le Canada a critiqué publiquement, et de manière officielle, un fonctionnaire ou un organisme afghan.

48.       La Cour ne peut écarter la preuve claire et l’opinion d’un capitaine de frégate dans les Forces armées canadiennes ainsi que d’un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, selon lesquelles la divulgation publique des expurgations faites dans les documents en cause risque vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales du Canada avec l’Afghanistan, ni en faire abstraction, ni y substituer sa propre opinion. […]

49.       Le fait que les rapports sur la torture en Afghanistan produits par les É.‑U., les Nations Unies et la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan ont été rendus publics ne signifie pas que de tels commentaires de la part du Canada dans un rapport officiel ne porteraient pas préjudice aux relations du Canada en Afghanistan.

 

[12]      Bien que le juge ait noté l’existence du pouvoir discrétionnaire de refuser la communication et qu’il ait appliqué la norme de contrôle de la décision raisonnable, il n’a pas expressément examiné la question de savoir si l’intimé avait pris en compte à la fois l’applicabilité du paragraphe 15(1) de la Loi aux renseignements expurgés et l’exercice du pouvoir discrétionnaire quant à l’application de l’exception.

 

3.         Le cadre législatif

[13]      La présente affaire repose sur l’application correcte du paragraphe 15(1) de la Loi. Même si le paragraphe est reproduit au complet à l’annexe jointe aux présents motifs, la partie pertinente du paragraphe 15(1) est également reproduite ci‑dessous pour la commodité du lecteur :

15. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales, à la défense du Canada ou d’États alliés ou associés avec le Canada ou à la détection, à la prévention ou à la répression d’activités hostiles ou subversives, notamment :     [Non souligné dans l’original.]

15. (1) The head of a government institution may refuse to disclose any record requested under this Act that contains information the disclosure of which could reasonably be expected to be injurious to the conduct of international affairs, the defence of Canada or any state allied or associated with Canada or the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities, including, without restricting the generality of the foregoing, any such information          [emphasis added]

 

4.         Analyse

            i)          La norme de contrôle

[14]      Je commence par rappeler qu’il est important de comprendre l’exercice qu’impose le paragraphe 15(1) de la Loi. Le paragraphe prévoit que le responsable d’une institution gouvernementale « peut refuser » la communication de documents. Cela exige un exercice en deux étapes. Dans la première étape, le responsable doit déterminer si la communication risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales. S’il arrive à cette conclusion, la deuxième étape consiste à décider si la communication devrait être effectuée ou refusée compte tenu de l’importance du risque et d’autres facteurs pertinents. Voir un raisonnement similaire dans l’arrêt Ontario (Sûreté et Sécurité publique) c. Criminal Lawyers’ Association, 2010 CSC 23, [2010] 1 R.C.S. 815 (Criminal Lawyers’ Association), au paragraphe 48.

 

[15]      En l’espèce, il n’y a pas de contestation de la conclusion que la communication risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales. L’appelant soutient cependant que le dossier public ne contient aucune preuve que l’intimé a porté son attention sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 15(1) de la Loi.

 

[16]      Par conséquent, la première question dont notre Cour est saisie est celle de savoir si, compte tenu de l’ensemble du dossier (à la fois public et ex parte), la Cour peut être convaincue que l’intimé a porté son attention sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Comme nous l’avons déjà indiqué, le juge n’a pas examiné cette question.

 

[17]      Pour reprendre les termes de la Cour suprême dans l’arrêt Criminal Lawyers’ Association, au paragraphe 46, un pouvoir discrétionnaire conféré par une loi doit être exercé en conformité avec les objectifs sous‑jacents à son octroi. Cette affirmation est compatible avec l’arrêt Telezone dans lequel notre Cour a déclaré, au paragraphe 47, « lorsque la Loi confère au responsable d’une institution fédérale le pouvoir discrétionnaire de refuser de communiquer un document visé par une exception, la légalité de l’exercice de ce pouvoir doit faire l’objet d’un examen s’appuyant sur les motifs qui permettent normalement, en droit administratif, de revoir l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire administratif, notamment le caractère déraisonnable ». Un des motifs de révision d’une décision administrative vise le pouvoir discrétionnaire, qui doit être exercé conformément aux limites imposées dans la loi (voir l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 56). Ainsi, les parties ne contestent pas que notre Cour peut intervenir si l’intimé n’a pas pris en compte l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

 

[18]      Si la Cour est convaincue que le pouvoir discrétionnaire a été exercé, la deuxième question consiste à voir si le pouvoir discrétionnaire a été exercé de façon raisonnable.

 

            ii)         Le fardeau de la preuve

[19]      Les parties n’ont pas abordé en détail la conclusion du juge concernant le fardeau de la preuve. En conséquence, la Cour a demandé et reçu des observations écrites supplémentaires sur le fardeau de la preuve. S’appuyant sur l’arrêt Ruby c. Canada (Solliciteur général), [2000] 3 C.F. 589, l’appelant a soutenu qu’il incombait à l’intimé de démontrer que l’article 15 de la Loi s’appliquait aux documents en cause et que le pouvoir discrétionnaire avait été exercé de façon raisonnable. L’intimé a fait valoir que le juge a eu raison de déclarer qu’une fois que l’application de l’article 15 est établie, le fardeau de la preuve incombe alors au professeur Attaran, qui doit démontrer que l’exercice du pouvoir discrétionnaire était déraisonnable. L’intimé a cependant attiré l’attention de la Cour sur les remarques incidentes de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Lavigne c. Canada (Commissariat aux langues officielles), [2002] 2 R.C.S. 773, aux paragraphes 60 et 65. Le juge Gonthier, qui a rédigé l’arrêt de la Cour, a parlé de l’exigence selon laquelle une institution gouvernementale est tenue de justifier l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de refuser la divulgation de documents.

 

[20]      À mon humble avis, le juge a commis une erreur de droit en s’appuyant sur le paragraphe 89 de l’arrêt Telezone de notre Cour pour imposer le fardeau de la preuve à l’appelant. Quand on lit les motifs de notre Cour dans l’arrêt Telezone dans leur intégralité, il en ressort que le fardeau de la preuve est fonction des circonstances de l’espèce portées à la connaissance de la Cour. Je m’explique.

 

[21]      L’examen du fardeau de la preuve doit commencer avec l’arrêt Ruby rendu par notre Cour. Même si l’arrêt a été modifié en appel par la Cour suprême, 2002 CSC 75, [2002] 4 R.C.S. 3, l’analyse de notre Cour concernant le fardeau de la preuve n’a fait l’objet d’aucun commentaire défavorable en Cour suprême.

 

[22]      L’arrêt Ruby concernait une demande d’accès à des renseignements personnels en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1985, ch. P‑21. Les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels sont étroitement liées aux dispositions de la Loi. Comme en l’espèce, M. Ruby n’avait pas reçu communication de toute la preuve présentée à la Cour dans le cadre de la demande et une audience ex parte à huis clos a été tenue. Cela était pertinent pour la conclusion de la Cour à l’égard du fardeau de la preuve et a amené celle‑ci à conclure que le fardeau de la preuve ne devait pas incomber à M. Ruby parce qu’il n’avait pas eu accès au dossier complet. La Cour a écrit ce qui suit aux paragraphes 36 à 39 :

36.       […] Même si une personne est mise au courant du fait qu’un fichier contient de fait des renseignements personnels la concernant, comment peut‑elle, puisqu’elle ne sait pas quels renseignements sont en cause, satisfaire à la charge de la preuve si elle veut contester l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’autorité fédérale qui refuse de communiquer les renseignements?

 

37.       La situation de l’appelant ou d’une personne qui se trouve dans la même situation que l’appelant est d’autant plus grave que le contrôle judiciaire a posteriori exercé par la Cour fédérale conformément à l’article 41 de la Loi, qui vise à permettre d’examiner le pouvoir discrétionnaire exercé par les autorités, peut prendre la forme d’une audience ex parte à huis clos au cours de laquelle une preuve par affidavit secrète peut être présentée par le responsable de l’institution fédérale. Un demandeur comme l’appelant ne sait pas et ne peut pas savoir si les nouveaux éléments de preuve qui sont fournis à l’appui de l’allégation selon laquelle l’institution en cause a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une façon régulière se rapportent à des considérations non pertinentes ou si l’institution omet de divulguer des considérations pertinentes qui auraient pu influer sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire en question.

 

38.       À notre avis, eu égard aux circonstances de l’espèce – où l’accessibilité à des renseignements personnels est la règle et la confidentialité l’exception, où le demandeur ne sait pas quels renseignements personnels ne sont pas communiqués, où le demandeur n’a pas accès au dossier dont dispose la Cour et où il n’a pas de moyens adéquats lui permettant de vérifier la façon dont le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication a été exercé par les autorités, et où l’article 47 de la Loi impose clairement au responsable de l’institution fédérale la charge d’établir le bien‑fondé du refus de communication de renseignements personnels et, par conséquent, d’établir qu’elle a exercé d’une façon régulière son pouvoir discrétionnaire à l’égard d’une exception précise invoquée – on ne saurait imposer la charge de la preuve au demandeur. Comme cette Cour l’a dit dans l’arrêt Rubin c. Canada (Société canadienne d’hypothèque et de logement)9, au sujet d’une loi connexe, la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. (1985), ch. A‑1, qui renferme une disposition similaire sinon identique10 à l’article 47 de la Loi :

En vertu de cet article, le fardeau de la preuve d’une exemption incombe à l’institution fédérale qui y prétend.

La communication est la règle générale et l’exemption, l’exception, et c’est à ceux qui réclament l’exemption de prouver leur droit à cet égard.

 

39.       Il incombe à la Cour, dans un recours en révision fondé sur l’article 41 de la Loi, de s’assurer que le pouvoir discrétionnaire conféré aux autorités administratives « a été exercé dans les limites appropriées et selon les principes appropriés »11. C’est pourquoi la Cour qui exerce le contrôle a accès aux documents en question en vertu de l’article 45 de la Loi. À notre avis, le demandeur qui, conformément à l’article 41 de la Loi, exerce un recours en révision du refus de communication des renseignements personnels, remet par définition en question le bien‑fondé de l’exercice du pouvoir discrétionnaire en question; il n’a pas à en faire plus. Dans ces conditions, le demandeur ne peut pas faire mieux et on ne peut lui demander d’en faire plus.

                                    [Non souligné dans l’original et notes de bas de page omises.]

 

[23]      L’arrêt Telezone a examiné l’arrêt Ruby et a fait une distinction. La Cour a écrit ce qui suit aux paragraphes 93 à 96 :

93.       Dans des motifs auxquels a souscrit le juge Sexton, les juges Létourneau et Robertson ont expliqué (au paragraphe 30) pourquoi la règle imposant normalement la charge de la preuve à la partie demandant le contrôle judiciaire ne s’appliquait pas dans l’affaire dont ils avaient été saisis :

Toutefois, la situation est différente dans des affaires de communication de renseignements confidentiels étant donné que l’article 47 de la Loi impose au responsable de l’institution fédérale la charge de prouver l’existence d’une exception. Nous reviendrons ci‑dessous sur la portée de cette obligation. Il suffit pour le moment de dire que, à notre avis, cela comprend tant la charge de prouver que les conditions applicables à l’exception sont remplies que la charge de prouver que le pouvoir discrétionnaire conféré au responsable de l’institution a été exercé d’une façon régulière.

Les articles 47 et 48 de la Loi sur la protection des renseignements personnels ne diffèrent pas sensiblement des articles 48 et 49 de la Loi sur l’accès à l’information.

 

94.       Après avoir souligné qu’on n’avait pas dit à l’appelant dans cette affaire si les fichiers auxquels l’accès était demandé contenaient des renseignements personnels le concernant, la Cour a énoncé (au paragraphe 36) les motifs de sa conclusion sur la charge de la preuve :

Même si une personne est mise au courant du fait qu’un fichier contient de fait des renseignements personnels la concernant, comment peut‑elle, puisqu’elle ne sait pas quels renseignements sont en cause, satisfaire à la charge de la preuve si elle veut contester l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’autorité fédérale qui refuse de communiquer les renseignements?

95.       À mon avis toutefois, il faut examiner les remarques faites dans l’arrêt Ruby, précité, sur la charge de la preuve à la lumière de ce que la Cour a considéré (au paragraphe 38) comme les « circonstances de l’espèce » , savoir :

[. . .] où l’accessibilité à des renseignements personnels est la règle et la confidentialité l’exception, où le demandeur ne sait pas quels renseignements personnels ne sont pas communiqués, où le demandeur n’a pas accès au dossier dont dispose la Cour et où il n’a pas de moyens adéquats lui permettant de vérifier la façon dont le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication a été exercé par les autorités, et où l’article 47 de la Loi [Loi sur la protection des renseignements personnels] impose clairement au responsable de l’institution fédérale la charge d’établir le bien‑fondé du refus de communication de renseignements personnels et, par conséquent, d’établir qu’elle a exercé d’une façon régulière son pouvoir discrétionnaire à l’égard d’une exception précise invoquée [. . .]

 

96.       Certaines de ces circonstances ne sont pas présentes en l’espèce. Notamment, le Commissaire et Telezone étaient parfaitement au courant de la nature des renseignements concernant le processus décisionnel qu’Industrie Canada a refusé de communiquer. De plus, le Commissaire et l’avocat de Telezone connaissaient le contenu des documents déposés confidentiellement devant la Cour, notamment les explications par les fonctionnaires d’Industrie Canada des facteurs examinés dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de communiquer. La plainte des appelants porte essentiellement qu’en l’absence d’un affidavit du délégué du ministre, qui a décidé de refuser de communiquer les documents demandés, ils ont été effectivement privés de l’occasion de faire un contre‑interrogatoire.                   [Non souligné dans l’original.]

 

[24]      L’arrêt Telezone n’entendait pas infirmer l’arrêt Ruby. Dans l’arrêt Telezone, la Cour a plutôt reconnu que le fardeau de la preuve dépendait des circonstances portées à sa connaissance.

 

[25]      L’intimé soutient qu’il y a lieu d’établir une distinction entre la présente affaire et l’arrêt Ruby parce que l’appelant connaît [traduction] « la nature générale des renseignements en cause » et la majorité des rapports en cause a été publiée, et parce qu’il a été en mesure de contrer‑interroger deux fonctionnaires de l’institution gouvernementale responsable sur leurs affidavits publics.

 

[26]      L’appelant ne connaît cependant ni le contenu précis du document expurgé, ni la preuve ex parte déposée par l’intimé, ni les observations ex parte présentées par l’intimé lors de l’audience à huis clos. Les affidavits publics étaient muets sur les facteurs, s’il en est, qui ont été pris en compte pour l’exercice du pouvoir discrétionnaire. La Cour fédérale n’a fourni aucune explication concernant sa conclusion selon laquelle l’intimé s’était penché sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. L’appelant fait valoir que le dossier public ne contient aucune preuve montrant que l’exercice du pouvoir discrétionnaire a été pris en compte. Il n’a aucun moyen de vérifier dans le dossier ex parte si le pouvoir discrétionnaire a été exercé.

 

[27]      À mon avis, les circonstances en l’espèce sont analogues à celles portées à la connaissance de notre Cour dans l’affaire Ruby. L’appelant ne peut être tenu en l’espèce de prouver, à partir d’un dossier confidentiel auquel il n’a pas accès, que l’intimé a omis de prendre en considération l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Il incombe à l’intimé d’établir que son pouvoir discrétionnaire a été exercé de façon raisonnable.

 

            iii)         L’intimé a‑t‑il porté son attention sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire?

[28]      L’intimé soutient que la Cour devrait inférer des éléments de preuve qui suivent que le décideur a tenu compte de son pouvoir discrétionnaire de communiquer des renseignements :

 

a)                  La preuve par affidavit de Monique McCulloch selon laquelle il y a eu une discussion entre la Direction de l’accès et la Direction des droits de la personne du MAECI entre le 5 mars et le 13 avril 2007. Ce dialogue avait pour but [traduction] « de veiller à ce que le plus de renseignements possible soient transmis à l’auteur de la demande tout en faisant en sorte que les exceptions prévues à la Loi sur l’accès soient correctement appliquées. »

b)                  Le processus d’enquête du commissaire. Le commissaire a pour rôle de veiller à ce que le plus de renseignements possible soient communiqués.

c)                  La communication continue de renseignements.

Chaque élément sera examiné un à un.

 

[29]      Premièrement, la déclaration de Mme McCulloch est de nature générale et elle ne peut en soi convaincre la Cour que le pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 15(1) de la Loi a été exercé. De plus, sa déclaration selon laquelle les discussions internes du MAECI avaient pour objet de veiller à ce que [traduction] « les exceptions prévues à la Loi sur l’accès soient correctement appliquées » est compatible avec un exercice où la préoccupation était la question de savoir si des renseignements particuliers étaient visés par une exception. Une telle recherche est insuffisante en l’absence de la prise en compte de la question de savoir si les renseignements visés par l’exception peuvent néanmoins être divulgués.

 

[30]      Deuxièmement, je conviens que le rôle du commissaire consiste à promouvoir l’objet de la Loi. Ainsi, le commissaire a entre autres pour rôle de veiller à ce qu’il y ait un droit d’accès aux documents de l’administration fédérale en consacrant le principe du droit du public à leur communication, les exceptions à ce droit étant précises et limitées (voir le paragraphe 2(1) de la Loi). Cela dit, comme notre Cour l’a souligné au paragraphe 42 de l’arrêt Telezone, la Cour peut être en désaccord avec le commissaire sur des questions de droit ou des questions mixtes de fait et de droit sans avoir à être tout d’abord convaincue que la conclusion du commissaire était déraisonnable, étant donné que la Cour est chargée d’examiner les refus des responsables des institutions fédérales. Elle n’examine pas la décision du commissaire. En effet, les renseignements présentés à la Cour peuvent être moins complets que ceux obtenus par le commissaire dans le cadre de son enquête. En l’espèce, les renseignements ont été fournis au commissaire non seulement par écrit, mais également par téléphone et lors d’une réunion.

 

[31]      Enfin, en ce qui a trait à l’inférence mentionnée au paragraphe 28, au point c., que l’intimé demande à la Cour de tirer, je conviens que l’élément de preuve le plus convaincant du dossier produit à la Cour est la conduite de l’intimé qui a continué de communiquer, ou de ne pas communiquer, des renseignements à l’appelant. En effet, contrairement au dossier dans l’arrêt Telezone, il n’y a pas en l’espèce de notes de service internes contenant des explications ou des recommandations précises concernant la communication des documents demandés. Rien n’indique que l’existence de facteurs qui auraient pu militer en faveur de la communication a été prise en compte. Ainsi, la question est de savoir si la Cour peut inférer de la communication ou de la non-communication ultérieure de renseignements que le décideur a tenu compte de son pouvoir discrétionnaire de communiquer les renseignements, nonobstant le fait que les renseignements étaient par ailleurs visés par le paragraphe 15(1) de la Loi.

 

[32]      Avant de passer au dossier de preuve, il est utile d’examiner la nature d’une inférence. Tirer une inférence est une question de logique. Voici ce qu’a déclaré la Cour suprême de Terre‑Neuve (Cour d’appel) à ce sujet dans l’arrêt Osmond c. Newfoundland (Workers’ Compensation Commission) (2001), 200 Nfld. & P.E.I.R. 203, au paragraphe 134 :

[traduction[…] Tirer une inférence équivaut à un raisonnement par lequel une conclusion de fait est tirée en tant que conséquence logique d’autres faits établis par la preuve. La conjecture, par contre, est simplement hypothèse ou supposition; il y a une faille dans le raisonnement, d’un point de vue logique, qui lie un fait à la conclusion que l’on veut établir. La conjecture, contrairement à l’inférence, nécessite un acte de foi.

 

[33]      Dans l’arrêt Squires c. Corner Brook Pulp and Paper Ltd. (1999), 175 Nfld. & P.E.I.R. 202 (C.A.), la même cour a examiné la jurisprudence plus ancienne de la Cour suprême du Canada et de la Chambre des lords concernant la distinction entre une inférence et une conjecture. Le juge Cameron, qui a rédigé l’arrêt, a déclaré ce qui suit :

[traduction]

 

113.     Dans l’arrêt Pacific Railway Company c. Murray, [1932] R.C.S. 112, aux pages 115 à 117, la Cour a cité en l’approuvant le passage suivant tiré de Jones c. Great West Railway Co. (1930), 47 T.L.R. 39 :

Il est souvent très difficile de faire la distinction entre une hypothèse et une inférence. Une hypothèse peut être plausible, mais elle n’a aucune valeur en droit puisqu’il s’agit d’une simple supposition. Par contre, une inférence au sens juridique est une déduction tirée de la preuve et si elle est justifiée, elle pourra avoir une valeur probante. J’estime que le lien établi entre un fait et une cause relève toujours de l’inférence. La force probante d’une inférence de causalité fondée en droit peut varier d’intensité, allant de la certitude pratique à la probabilité raisonnable.

 

114.     Dans l’arrêt Caswell c. Powell Duffryn Associated Collieries Ltd., [1940] A.C. 152, la Chambre des lords a indiqué comme suit la différence entre une hypothèse et une inférence, aux pages 169 et 170 :

Il faut établir soigneusement une distinction entre une inférence et une conjecture ou une hypothèse. Il ne peut y avoir d’inférence à moins qu’il n’y ait des faits objectifs permettant d’inférer les autres faits que l’on cherche à établir. Dans certains cas, les autres faits peuvent être inférés avec autant de certitude pratique que s’ils avaient été réellement observés. Dans d’autres cas, l’inférence ne va pas au‑delà de la probabilité raisonnable. Mais en l’absence de faits positifs prouvés permettant de tirer l’inférence, l’opération de l’inférence ne peut être faite, et il ne reste qu’une simple hypothèse ou conjecture.

 

115.     Cette déclaration a été approuvée par la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans l’arrêt Lee c. Jacobson (1994), 120 D.L.R. (4th) 155, ainsi que par la Cour d’appel de la Saskatchewan dans l’arrêt Kozak c. Funk (1997), 158 Sask. R. 283.                               [Non souligné dans l’original.]

 

[34]      Il n’est pas possible de tirer une inférence lorsque la preuve est équivoque en ce sens qu’elle est également compatible avec d’autres inférences ou conclusions.

 

[35]      En l’espèce, rien dans le dossier public ou ex parte présenté à la Cour, y compris les affidavits déposés au nom de l’intimé, ne démontre expressément que le décideur a pris en compte l’existence de son pouvoir discrétionnaire. L’absence d’une telle preuve n’est cependant pas déterminante pour la question. On était en présence d’une situation semblable dans l’affaire Telezone, dans laquelle la Cour a examiné le dossier produit, y compris des documents ministériels internes, afin d’être convaincue que le décideur comprenait l’existence de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire de communiquer les documents.

 

[36]      À l’inverse, tout comme l’absence d’éléments de preuve précis concernant l’exercice du pouvoir discrétionnaire n’est pas déterminante, l’existence d’une déclaration dans un document portant qu’un pouvoir discrétionnaire a été exercé ne sera pas nécessairement déterminante. Conclure qu’une telle déclaration est déterminante pour l’enquête consisterait à accorder plus d’importance à la forme qu’au fond et à encourager l’énoncé de déclarations passe‑partout dans le document du décideur. Dans chaque affaire portant sur l’aspect discrétionnaire de l’article 15 de la Loi, la cour de révision doit examiner l’ensemble de la preuve pour décider si elle est convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que le décideur a compris qu’il avait un pouvoir discrétionnaire de communiquer des documents et qu’il a ensuite exercé ce pouvoir discrétionnaire. La cour de révision peut alors être tenue d’inférer du contenu du document que le décideur a reconnu l’existence du pouvoir discrétionnaire et a ensuite cherché à établir un équilibre entre les intérêts opposés en faveur de la communication et contre celle‑ci, comme la Cour en a discuté dans l’arrêt Telezone, au paragraphe 116.

 

[37]      Concernant maintenant les éléments de preuve, j’estime que les renseignements suivants du dossier sont utiles.

1.                  Le 23 avril 2007, le MAECI a répondu à la demande d’accès de l’appelant en lui fournissant des copies expurgées des rapports sur les droits de la personne pour les années 2002 à 2006.

2.                  Comme l’a expliqué le juge, la phrase suivante a été expurgée du rapport de 2006 :

[traduction] Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante.

 

3.                  Le 25 avril 2007, The Globe and Mail a publié un article qui contenait une partie des renseignements expurgés du rapport de 2006 fourni à l’appelant, de même que des parties non expurgées du même rapport de 2006 que le journal avait obtenues d’une source confidentielle. Voici ce que le journal indiquait :

[traduction] Parmi les phrases caviardées par le ministère des Affaires étrangères dans le résumé du rapport, il y a la phrase « Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante », selon des passages complets du rapport que The Globe a obtenu de façon indépendante.    [Non souligné dans l’original.]

 

Voir le dossier d’appel, volume II, à la page 328.

4.                  Comme le juge l’a souligné au paragraphe 11 de ses motifs, le 11 juillet 2007, un employé de l’intimé « a été contre‑interrogé dans le cadre d’une autre instance devant la Cour fédérale et il a authentifié sous serment un extrait de la communication faite par le journal The Globe and Mail. [Il] a confirmé que le rapport de 2006 contenait la phrase suivante : [traductionLes exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante. »

5.                  Le 15 novembre 2007, à la suite de l’enquête du commissaire, le MAECI a fourni à l’appelant des versions moins expurgées des rapports (pièce D jointe à l’affidavit de l’appelant). Dans la version du rapport de 2006 fournie à l’appelant, la phrase [traduction] « Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante » était toujours caviardée. Voir la page 150 du dossier d’appel.

6.                  Le 7 février 2008, la Cour fédérale a rendu ses motifs dans Amnesty International Canada c. Canada (Forces canadiennes), 2008 CF 162. Au paragraphe 105 de ses motifs, la juge Mactavish a écrit ce qui suit :

105.     De plus, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada a lui‑même reconnu, dans ses examens annuels de la situation des droits de l’homme en Afghanistan, que le mauvais traitement des détenus était chose courante dans les prisons afghanes. À titre d’exemple, le rapport de 2006 du MAECI, publié en janvier 2007, a conclu que : [traduction] « Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante. »
                                                [Non souligné dans l’original.]

 

7.                  Le 2 avril 2009, le juge a exigé de l’intimé à divulguer la phrase [traduction] « Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante » qui se trouvait dans les rapports de 2005 et de 2006.

 

[38]      Pour les motifs qui suivent, compte tenu de l’ensemble de la preuve, je ne suis pas en mesure d’inférer de cette conduite que le décideur comprenait et a pris en compte le fait que le paragraphe 15(1) de la Loi lui conférait un pouvoir discrétionnaire de communiquer ou de refuser de communiquer les renseignements qui y étaient décrits.

 

[39]      Tout d’abord, le dossier ne contient aucune explication sur la raison pour laquelle l’intimé n’a pas communiqué la phrase [traduction] « Les exécutions extrajudiciaires, les disparitions, la torture et l’emprisonnement sans procès sont monnaie courante » à l’appelant dans sa deuxième communication du 15 novembre 2007. À cette date, la phrase avait été publiée par The Globe and Mail et un employé du MAECI avait confirmé dans une instance publique que le rapport de 2006 contenait cette phrase. De plus, le dossier est muet quant à la raison pour laquelle le caviardage n’a pas été éliminé plus tard à la suite de la publication des motifs de la Cour fédérale dans l’instance instituée par Amnesty International qui confirmait encore une fois que la phrase figurait dans le rapport de 2006.

 

[40]      Dans son affidavit, Mme McCulloch déclare ce qui suit :

[traduction]

 

20.       Je sais que le journal The Globe and Mail a publié un article le 25 avril 2007 dans lequel il révélait une partie du document de 2006 en cause dans la présente instance. À ma connaissance, le MAECI n’a pas autorisé ou permis la communication de ces renseignements à The Globe and Mail. Je sais également que des membres du Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique ont obtenu une partie ou la totalité du document de 2006 en cause. Je ne connais pas la source du document transmis au Comité.

 

[41]      Cet extrait n’explique pas pourquoi le MAECI a continué de protéger les renseignements qui étaient tombés dans le domaine public. La preuve de Mme McCulloch semble laisser entendre que le MAECI était d’avis qu’il pouvait continuer à faire valoir la nécessité de protéger les renseignements parce qu’il n’était pas la source de la fuite. Rien n’indique que l’intimé se soit demandé à quelque moment que ce soit après la première communication des renseignements à l’appelant si la divulgation publique antérieure des renseignements expurgés constituait un facteur pertinent pour l’examen du pouvoir discrétionnaire de communiquer des documents qui étaient autrement visés par le paragraphe 15(1). Bien que cela ne puisse pas être vrai dans tous les cas, la communication publique antérieure des renseignements constituait un incitatif en faveur de l’exercice du pouvoir discrétionnaire de communiquer les renseignements à l’appelant, d’autant plus qu’en l’espèce un employé du MAECI avait publiquement confirmé que la phrase se trouvait dans le rapport. La communication publique antérieure pouvait ne pas être suffisante pour amener l’intimé à communiquer les renseignements à l’appelant. Toutefois, si l’intimé a compris qu’un tel pouvoir discrétionnaire existait, on s’attendrait à trouver dans le document une indication selon laquelle l’exercice du pouvoir discrétionnaire a été envisagé.

 

[42]      Le MAECI a expliqué la communication du 15 novembre 2007 en disant qu’il a fait la communication à l’appelant pour que celle‑ci soit conforme à la communication faite dans une autre instance en application de l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C‑5.

 

[43]      Plus récemment, certains renseignements communiqués en 2010 ont été communiqués à l’appelant parce que le MAECI avait présenté des versions moins expurgées des documents à la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire.

 

[44]      Dans les cas où il y avait eu une communication supplémentaire, l’appelant a reçu ces renseignements parce qu’ils avaient déjà été fournis dans d’autres forums.

 

[45]      À mon avis, le dossier présenté à la Cour convient tant au décideur qui examine la question de savoir si la communication de renseignements précis risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales sans égard à l’existence d’un pouvoir discrétionnaire de communication qu’à celui qui prend en compte le pouvoir discrétionnaire. Un tel élément de preuve équivoque ne permet pas de faire l’inférence demandée. En conséquence, je ne suis pas convaincue que le décideur a envisagé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Comme je l’ai expliqué au paragraphe 17 des présents motifs, l’omission de prendre en compte l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire est un motif de révision parce que la Loi exige que l’intimé envisage l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

 

5.         Conclusion

[46]      Il s’ensuit que j’accueillerais l’appel avec dépens tant devant notre Cour que devant la Cour fédérale en raison de l’omission de l’intimé d’exercer le pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 15(1) de la Loi. Sauf dans la mesure où le jugement de la Cour fédérale a ordonné la communication de deux parties expurgées des documents, j’annulerais le jugement de la Cour fédérale et renverrais l’affaire à l’intimé pour lui permettre d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 15(1) de la Loi en ce qui concerne les trois autres expurgations en cause.

 

6.         Observations finales

[47]      Aux termes du paragraphe 52(2) de la Loi, une demande de contrôle judiciaire présentée à la Cour fédérale en vertu de la Loi doit être entendue à huis clos si la demande vise un refus de communiquer un document en application de l’article 15 de la Loi. Le paragraphe 52(2) de la Loi exige également que la Cour d’appel fédérale entende à huis clos l’appel interjeté à l’égard d’une telle demande.

 

[48]      Dans le présent appel, seules les observations de l’intimé fondées sur un dossier ex parte ont été entendues à huis clos. Cela était conforme à la décision du juge en chef Lutfy dans Kitson c. Canada (Ministre de la Défense nationale), [2010] 3 R.C.F. 440 (C.F.).

 

[49]      Dans la décision Kitson, le juge en chef Lutfy a conclu que l’alinéa 52(2)a) et d’autres dispositions de la Loi portaient atteinte à des droits et des libertés garantis par la Charte canadienne des droits et libertés. Le juge en chef Lutfy a poursuivi en donnant une interprétation atténuante du paragraphe 52(2) de façon qu’il ne s’applique qu’aux arguments présentés en l’absence d’une autre partie pour le compte de l’institution gouvernementale. Cette interprétation a eu pour effet de faire correspondre l’article 52 de la Loi à la disposition parallèle de la Loi sur la protection des renseignements personnels que la Cour suprême a examinée dans l’arrêt Ruby c. Canada (Solliciteur général), précité.

 

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord.

            Pierre Blais j.c. »

 

 

« Je suis d’accord.

            Johanne Trudel j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


ANNEXE

 

            Les paragraphes 13(1) et 15(1), l’article 17, les alinéas 21(1)a) et b) et l’article 52 de la Loi sur l’accès à l’information sont rédigés comme suit :

 

13. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le responsable d’une institution fédérale est tenu de refuser la communication de documents contenant des renseignements obtenus à titre confidentiel :

a) des gouvernements des États étrangers ou de leurs organismes;

b) des organisations internationales d’États ou de leurs organismes;

c) des gouvernements des provinces ou de leurs organismes;

d) des administrations municipales ou régionales constituées en vertu de lois provinciales ou de leurs organismes;

 

 

e) d’un gouvernement autochtone.

 

. . .

 

15. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite des affaires internationales, à la défense du Canada ou d’États alliés ou associés avec le Canada ou à la détection, à la prévention ou à la répression d’activités hostiles ou subversives, notamment :

 

a) des renseignements d’ordre tactique ou stratégique ou des renseignements relatifs aux manoeuvres et opérations destinées à la préparation d’hostilités ou entreprises dans le cadre de la détection, de la prévention ou de la répression d’activités hostiles ou subversives;

b) des renseignements concernant la quantité, les caractéristiques, les capacités ou le déploiement des armes ou des matériels de défense, ou de tout ce qui est conçu, mis au point, produit ou prévu à ces fins;

 

c) des renseignements concernant les caractéristiques, les capacités, le rendement, le potentiel, le déploiement, les fonctions ou le rôle des établissements de défense, des forces, unités ou personnels militaires ou des personnes ou organisations chargées de la détection, de la prévention ou de la répression d’activités hostiles ou subversives;

d) des éléments d’information recueillis ou préparés aux fins du renseignement relatif à :

(i) la défense du Canada ou d’États alliés ou associés avec le Canada,

(ii) la détection, la prévention ou la répression d’activités hostiles ou subversives;

e) des éléments d’information recueillis ou préparés aux fins du renseignement relatif aux États étrangers, aux organisations internationales d’États ou aux citoyens étrangers et utilisés par le gouvernement du Canada dans le cadre de délibérations ou consultations ou dans la conduite des affaires internationales;

f) des renseignements concernant les méthodes et le matériel technique ou scientifique de collecte, d’analyse ou de traitement des éléments d’information visés aux alinéas d) et e), ainsi que des renseignements concernant leurs sources;

g) des renseignements concernant les positions adoptées ou envisagées, dans le cadre de négociations internationales présentes ou futures, par le gouvernement du Canada, les gouvernements d’États étrangers ou les organisations internationales d’États;

h) des renseignements contenus dans la correspondance diplomatique échangée avec des États étrangers ou des organisations internationales d’États, ou dans la correspondance officielle échangée avec des missions diplomatiques ou des postes consulaires canadiens;

i) des renseignements relatifs à ceux des réseaux de communications et des procédés de cryptographie du Canada ou d’États étrangers qui sont utilisés dans les buts suivants :

(i) la conduite des affaires internationales,

(ii) la défense du Canada ou d’États alliés ou associés avec le Canada,

(iii) la détection, la prévention ou la répression d’activités hostiles ou subversives.

 

. . .

 

17. Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de nuire à la sécurité des individus.

 

. . .

 

21. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents datés de moins de vingt ans lors de la demande et contenant :

a) des avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre;

b) des comptes rendus de consultations ou délibérations auxquelles ont participé des administrateurs, dirigeants ou employés d’une institution fédérale, un ministre ou son personnel;

 

. . .

 

52. (1) Les recours visés aux articles 41 ou 42 et portant sur les cas où le refus de donner communication totale ou partielle du document en litige s’appuyait sur les alinéas 13(1) a) ou b) ou sur l’article 15 sont exercés devant le juge en chef de la Cour fédérale ou tout autre juge de cette Cour qu’il charge de leur audition.

 

(2) Les recours visés au paragraphe (1) font, en premier ressort ou en appel, l’objet d’une audition à huis clos; celle‑ci a lieu dans la région de la capitale nationale définie à l’annexe de la Loi sur la capitale nationale si le responsable de l’institution fédérale concernée le demande.

 

(3) Le responsable de l’institution fédérale concernée a, au cours des auditions, en première instance ou en appel et sur demande, le droit de présenter des arguments en l’absence d’une autre partie.

13. (1) Subject to subsection (2), the head of a government institution shall refuse to disclose any record requested under this Act that contains information that was obtained in confidence from

(a) the government of a foreign state or an institution thereof;

(b) an international organization of states or an institution thereof;

(c) the government of a province or an institution thereof;

(d) a municipal or regional government established by or pursuant to an Act of the legislature of a province or an institution of such a government; or

(e) an aboriginal government.

 

[…]

 

15. (1) The head of a government institution may refuse to disclose any record requested under this Act that contains information the disclosure of which could reasonably be expected to be injurious to the conduct of international affairs, the defence of Canada or any state allied or associated with Canada or the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities, including, without restricting the generality of the foregoing, any such information

(a) relating to military tactics or strategy, or relating to military exercises or operations undertaken in preparation for hostilities or in connection with the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities;

 

(b) relating to the quantity, characteristics, capabilities or deployment of weapons or other defence equipment or of anything being designed, developed, produced or considered for use as weapons or other defence equipment;

(c) relating to the characteristics, capabilities, performance, potential, deployment, functions or role of any defence establishment, of any military force, unit or personnel or of any organization or person responsible for the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities;

 

(d) obtained or prepared for the purpose of intelligence relating to

 

(i) the defence of Canada or any state allied or associated with Canada, or

(ii) the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities;

(e) obtained or prepared for the purpose of intelligence respecting foreign states, international organizations of states or citizens of foreign states used by the Government of Canada in the process of deliberation and consultation or in the conduct of international affairs;

 

 

(f) on methods of, and scientific or technical equipment for, collecting, assessing or handling information referred to in paragraph (d) or (e) or on sources of such information;

 

 

(g) on the positions adopted or to be adopted by the Government of Canada, governments of foreign states or international organizations of states for the purpose of present or future international negotiations;

 

 

(h) that constitutes diplomatic correspondence exchanged with foreign states or international organizations of states or official correspondence exchanged with Canadian diplomatic missions or consular posts abroad; or

 

(i) relating to the communications or cryptographic systems of Canada or foreign states used

 

 

(i) for the conduct of international affairs,

(ii) for the defence of Canada or any state allied or associated with Canada, or

(iii) in relation to the detection, prevention or suppression of subversive or hostile activities.

 

[…]

 

17. The head of a government institution may refuse to disclose any record requested under this Act that contains information the disclosure of which could reasonably be expected to threaten the safety of individuals.

 

 

[…]

 

21. (1) The head of a government institution may refuse to disclose any record requested under this Act that contains

 

(a) advice or recommendations developed by or for a government institution or a minister of the Crown,

(b) an account of consultations or deliberations in which directors, officers or employees of a government institution, a minister of the Crown or the staff of a minister participate,

 

 

[…]

 

52. (1) An application under section 41 or 42 relating to a record or a part of a record that the head of a government institution has refused to disclose by reason of paragraph 13(1)(a) or (b) or section 15 shall be heard and determined by the Chief Justice of the Federal Court or by any other judge of that Court that the Chief Justice may designate to hear those applications.

(2) An application referred to in subsection (1) or an appeal brought in respect of such application shall

(a) be heard in camera; and

(b) on the request of the head of the government institution concerned, be heard and determined in the National Capital Region described in the schedule to the National Capital Act.


(3) During the hearing of an application referred to in subsection (1) or an appeal brought in respect of such application, the head of the government institution concerned shall, on the request of the head of the institution, be given the opportunity to make representations
ex parte.

 

 

 


cour d’appel fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑198‑09

 

Intitulé :                                                   AMIR ATTARAN c.
Le ministre DES affaires étrangères

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 8 décembre 2010

 

Observations écrites

SupplémentaireS :                               Le 18 avril 2011 par l’appelant

                                                                        Le 28 avril 2011 par l’intimé

 

Motifs du jugement :                        LA juge DAWSON

 

Y ONT SOUSCRIT :                                     le juge en chef BLAIS

                                                                        LA JUGE TRUDEL

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 27 mai 2011

 

 

Comparutions :

 

Paul Champ

Khalid El Gazzar

 

Pour l’appelant

 

Christopher Rupar

 

Pour l’intimé

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Champ & Associés

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour l’appelant

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

Pour l’intimé

 

 

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