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Date : 20140108


Dossier :

A-136-13

 

Référence : 2014 CAF 3

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

 

 

ENTRE :

PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

 

appelant

et

SAF-HOLLAND CANADA LTD.

 

intimée

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 8 janvier 2014

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 8 janvier 2014

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                               LA JUGE SHARLOW

 


Date : 20140108


Dossier :

A-136-13

 

Référence : 2014 CAF 3

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

 

 

ENTRE :

PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

 

appelant

et

SAF-HOLLAND CANADA LTD.

 

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Ottawa (Ontario), le 8 janvier 2014)

LA JUGE SHARLOW

[1]               Dans une décision rendue le 18 janvier 2013 (AP-2012-004, [2013] T.C.C.E. no 7 (QL)), le Tribunal canadien du commerce extérieur a accueilli l’appel de l’intimée SAF-HOLLAND Canada Ltd. (auparavant Holland Hitch of Canada Limited) en matière de classement tarifaire. Le Tribunal a conclu que certains modèles de sellettes d’attelage importés de France par l’intimée sont admissibles au traitement en franchise de droits prévu au numéro tarifaire 9958.00.00 du Tarif des douanes, L.R.C. 1985, ch. I-21.

 

[2]               Voici le libellé du numéro tarifaire 9958.00.00 :

Parties, accessoires et articles, à l’exclusion des pneumatiques et chambres à air, devant servir à la fabrication de parties d’équipement d’origine de véhicules de tourisme, de camions ou d’autobus, ou devant servir d’équipement d’origine dans la fabrication de ces véhicules ou de leurs châssis.

Parts, accessories and articles, excluding tires and tubes, for use in the manufacture of original equipment parts for passenger automobiles, trucks or buses, or for use as original equipment in the manufacture of such vehicles or chassis therefor.

 

 

 

[3]               La conclusion du Tribunal concernant la portée du numéro tarifaire 9958.00.00 est exposée en ces termes au paragraphe 106 de ses motifs :

[…] « équipement d’origine » renvoie aux sellettes d’attelage devant servir à la fabrication de véhicules, à l’assemblage de « première monte » ou comme pièces de rechange pour des camions équipés au départ du même produit d’attelage et couverts par une garantie [...]

 

 

 

[4]               Le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (la Couronne) a interjeté appel devant nous de la décision du Tribunal en vertu de l’article 68 de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.). La Couronne soutient que l’interprétation des mots « équipement d’origine » du numéro tarifaire 9958.00.00 doit exclure les produits devant servir à autre chose que la fabrication et l’assemblage d’origine de camions et, plus particulièrement, à des réparations.

 

[5]               La norme applicable à l’appel de décisions du Tribunal en matière de classement tarifaire est celle de la décision raisonnable (voir, par exemple, Produits Standard Inc. c. Canada (Agence des services frontaliers), 2010 CAF 27). Est raisonnable la décision du Tribunal qui appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et dont les motifs témoignent de « la justification de la décision […] la transparence et […] l’intelligibilité du processus décisionnel » : Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe  47.

 

[6]               En l’espèce, le principal argument de la Couronne est que le Tribunal a mal interprété les mots « équipement d’origine » (original equipment) du numéro tarifaire 9958.00.00 parce qu’il n’a pas appliqué la définition énoncée au Règlement sur les règles d’origine (ALÉNA), DORS/94-14 à l’égard de l’expression « élément d’origine » (original equipment), dont voici le texte :

2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent règlement.

2. (1)  For purposes of these Regulations,

 

[…]

« élément d’origine » Matière qui est incorporée dans un véhicule automobile avant la première cession du titre de propriété de celui-ci ou la première consignation du véhicule à une personne qui n’est pas un monteur de véhicules automobiles, et qui est :

“original equipment” means a material that is incorporated into a motor vehicle before the first transfer of title or consignment of the motor vehicle to a person who is not a motor vehicle assembler, and that is

 

a) soit un produit d’un poste tarifaire énuméré à l’annexe IV;

 

b) soit un montage de composantes d’automobile, une composante d’automobile, une sous-composante ou une matière répertoriée.

(a) a good of a tariff provision listed in Schedule IV, or

 

(b) an automotive component assembly, automotive component, sub-component or listed material;

 

 

 

[7]               Par cet argument, la Couronne invoque la présomption réfutable selon laquelle les mots identiques de deux textes de loi revêtent le même sens lorsque ces textes portent sur un même domaine ou font partie d’un régime législatif global (en se reportant au paragraphe 15(2) de la Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21).

 

[8]               L’argument a été soumis au Tribunal, qui l’a rejeté pour les motifs exposés aux paragraphes 55 à 75 de sa décision. Essentiellement, le Tribunal a conclu que, s’agissant de l’application du Règlement relatif aux règles d’origine aux termes de l’Accord de libre‑échange nord‑américain, les mots « élément d’origine » (original equipment) pouvaient avoir un sens qui différait de celui des mots « équipement d’origine » (original equipment) figurant au numéro tarifaire 9958.00.00 du Tarif des douanes. À notre avis, ces motifs sont fouillés et convaincants et ils ont mené le Tribunal à une conclusion raisonnable.

 

[9]               Nous constatons également que la Couronne n’a cité aucune décision affirmant ou impliquant que le législateur voulait que les définitions du Règlement s’appliquent à tous égards au Tarif des douanes ou qu’elles s’appliquent à la détermination de la classification des marchandises en vertu de ce tarif. Elle n’en a pas cité non plus qui affirme ou implique que le législateur voulait que tous les partenaires commerciaux du Canada soient liés par des dispositions réglementaires visant expressément les règles d’origine établies sous le régime de l’Accord de libre‑échange nord‑américain.

 

[10]           La Couronne a également soutenu que l’interprétation que le Tribunal a faite des mots « équipement d’origine » employés au numéro tarifaire 9958.00.00 est incompatible avec le sens ordinaire de cette expression. On a soumis au Tribunal des éléments de preuve contradictoires concernant le sens de l’expression, y compris des éléments se rapportant à son emploi dans l’industrie. Le Tribunal a examiné cette preuve ainsi que sa propre jurisprudence. Nous estimons que le sens ordinaire qu’il a dégagé des mots « équipement d’origine » dans le contexte de la présente affaire est raisonnable.

 

[11]           Après avoir analysé avec soin l’argumentation écrite et la plaidoirie de la Couronne, la Cour ne relève aucune erreur du Tribunal justifiant qu’elle intervienne. En conséquence, l’appel sera rejeté avec dépens.

 

 

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DoSSIER :

                                                                                                A-136-13

(APPEL D’UNE DÉCISION (AP-2012-004) DU TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR EN DATE DU 18 JANVIER 2013)

 

INTITULÉ :

PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA c. SAF-HOLLAND CANADA LTD.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                                                                Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                                                                LE 8 JANVIER 2014

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                   

LA JUGE SHARLOW

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

                                                                                                LA JUGE SHARLOW

COMPARUTIONS :

BRIAN HARVEY

 

POUR L’Appelant

 

MICHAEL KAYLOR

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR L’APPELANT

 

Lapointe Rosenstein Marchand Mélançon, LLP

Montréal (Québec)

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

 

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