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Date : 20141009

Dossiers : A‑147‑11

A‑186‑11

Référence : 2014 CAF 226

En présence de monsieur le juge Stratas

ENTRE :

FRANCIS MAZHERO

appelant

et

ANDREW FOX, JACQUES ROBERGE ET NEIL SHARKEY

intimés

Requêtes jugées sur dossier sans comparution des parties.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 9 octobre 2014.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

LE JUGE STRATAS

 



Date : 20141009

Dossiers : A‑147‑11

A‑186‑11

Référence : 2014 CAF 226

En présence de monsieur le juge Stratas

ENTRE :

FRANCIS MAZHERO

appelant

et

ANDREW FOX, JACQUES ROBERGE ET NEIL SHARKEY

intimés

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE STRATAS

[1]               Le 1er octobre 2014, j'ai décidé que toutes les nouvelles requêtes déposées dans les présents appels réunis devaient m'être transmises pour que je les examine en ma qualité de juge responsable de la gestion de l'instance : Mazhero c. Fox, 2014 CAF 219, au paragraphe 15.

[2]               Le greffe m'a transmis deux nouvelles requêtes déposées par M. Mazhero le 3 octobre 2014.

[3]               Dans la première requête, M. Mazhero sollicite [TRADUCTION] « de la juge Sharlow » une ordonnance annulant ou infirmant son ordonnance du 9 juillet 2014. Dans cette ordonnance, la juge Sharlow demandait notamment à M. Mazhero d'expliquer pourquoi les présents appels réunis ne devaient pas être rejetés pour cause de retard.

[4]               La juge Sharlow ne se prononcera pas sur cette requête. Elle a pris sa retraite et ne siège plus à la Cour. De plus, toutes les requêtes doivent être entendues par le juge responsable de la gestion de l'instance. En cette qualité, il m'incombe de trancher cette requête.

[5]               Dans cette requête, M. Mazhero prétend contester l'ordonnance du 9 juillet 2014 sur le fondement du paragraphe 399(1) des Règles au motif qu'elle a été rendue ex parte.

[6]               La juge Sharlow a rendu son ordonnance du 9 juillet 2014 de sa propre initiative. À mon avis, il ne s'agit pas d'une ordonnance ex parte au sens du paragraphe 399(1) des Règles. Cette disposition vise la situation dans laquelle une partie a présenté une requête à la Cour en l'absence de l'autre partie et où, par la suite, la partie touchée par l'ordonnance demande son annulation au motif qu'elle a été obtenue sans que tous les renseignements pertinents aient fait l'objet d'une divulgation complète et franche ou qu'elle contient par ailleurs un vice grave : voir, par exemple, TMR Energy Ltd. c. State Property Fund of Ukraine, 2005 CAF 28, [2005] 3 R.C.F. 111.

[7]               Même si l'ordonnance du 9 juillet 2014 était susceptible de contrôle, je rejetterais la requête au motif qu'elle constitue un abus de procédure. La requête est irrecevable en raison du principe interdisant la remise en cause d'une question. M. Mazhero avait auparavant présenté des requêtes pour faire réviser l'ordonnance du 9 juillet 2014 et elles ont été rejetées : Mazhero c. Fox, 2014 CAF 219, au paragraphe 21. Il n'est pas possible de présenter par la suite des requêtes qui soulèvent des questions qui auraient pu être soulevées dans des requêtes antérieures : Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc., 2001 CSC 44, [2001] 2 R.C.S. 460; Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63, [2003] 3 R.C.S. 77. Il n'existe ici aucun élément justifiant d'écarter l'interdiction de la remise en cause d'une question.

[8]               La requête est également théorique. La juge Sharlow a tenu une audience de justification. Elle a autorisé que les appels réunis suivent leur cours. Voir Mazhero c. Fox, 2014 CAF 200, au paragraphe 16.

[9]               Quoi qu'il en soit, la requête de M. Mazhero n'est pas fondée. D'après le principal argument mis de l'avant dans la requête de M. Mazhero, la juge Sharlow n'avait pas le pouvoir d'agir de sa propre initiative pour lui demander d'expliquer pourquoi les appels réunis ne devraient pas être rejetés pour cause de retard. Elle avait effectivement ce pouvoir parce qu'un avis d'examen de l'état de l'instance avait été délivré auparavant et n'avait jamais été mis en œuvre. Elle possédait également ce pouvoir en vertu de son pouvoir absolu de réglementer le déroulement de la procédure : Canada (Revenu national) c. Compagnie d'assurance vie RBC, 2013 CAF 50, aux paragraphes 33 à 36.

[10]           La seconde requête de M. Mazhero a été présentée ex parte. Il sollicite une ordonnance enjoignant à deux des trois intimés et à une agente du greffe de notre Cour de comparaître devant un juge de la Cour fédérale pour expliquer pourquoi ils ne devraient pas être déclarés coupables d'outrage au tribunal.

[11]           La requête n'aurait pas dû être déposée ex parte. En conséquence, je rejette la requête.

[12]           Même si la requête avait été signifiée aux parties concernées, la requête serait rejetée parce qu'elle n'est pas fondée. Les deux intimés auraient commis un outrage au tribunal en raison de leur omission alléguée de présenter des observations avant la date limite fixée par la juge Sharlow dans son ordonnance du 9 juillet 2014. Ils n'ont pas contrevenu à cette ordonnance. Selon le paragraphe 3 de l'ordonnance, les intimés [TRADUCTION] « pouvaient » signifier et déposer des observations en réponse. Ils n'étaient pas tenus de le faire. Comme je l'ai expliqué dans une directive récente, les deux intimés ont en fait essayé de déposer des observations, mais leur dépôt n'a pu être effectué, en partie à cause d'une erreur commise par le personnel du greffe.

[13]           Quant à l'agente du greffe, la plainte semble venir du fait que le 22 juillet 2014, celle‑ci a refusé d'autoriser le dépôt d'une observation écrite et d'un affidavit de M. Mazhero. Plutôt que de demander à l'agente du greffe d'obtenir la directive d'un juge conformément à l'article 72 des Règles, M. Mazhero a envoyé directement une copie de l'observation écrite par messager à la juge Sharlow. Cette façon de faire n'était pas appropriée — les parties ne peuvent s'adresser aux juges que par l'intermédiaire du greffe ou de l'administrateur judiciaire. Après avoir examiné les documents du 22 juillet 2014, j'estime que la conduite de l'agente du greffe n'appelle aucune critique, encore moins une audience de justification pour outrage au tribunal.

[14]           En plus de l'omission de M. Mazhero de signifier la requête aux parties concernées et du fait qu'elle n'est pas fondée, je la rejette également parce qu'elle constitue un abus de procédure. Elle est abusive pour deux raisons :

                L'omission alléguée de la part des deux intimés de présenter des observations pour s'opposer à M. Mazhero n'a aucunement lésé ce dernier. En fait, cela a pu renforcer la cause de M. Mazhero. Et il a obtenu gain de cause : dans son ordonnance du 11 septembre 2014, la Cour a autorisé que les appels réunis suivent leur cours et ne les a pas rejetés pour cause de retard. Dans ces circonstances, M. Mazhero n'a aucune raison de se plaindre.

                Même si l'observation écrite du 22 juillet 2014 a été envoyée de façon irrégulière à la juge Sharlow, elle l'a acceptée et l'a placée dans le dossier de la Cour : Mazhero c. Fox, 2014 CAF 200, au paragraphe 14. À l'exception des frais de la transmission par messager — des frais que M. Mazhero aurait pu éviter en exerçant les droits que lui accorde l'article 72 des Règles — il n'a subi aucun préjudice.

[15]           Dans mon ordonnance du 1er octobre 2014, j'ai posé les questions suivantes (2014 CAF 219, au paragraphe 25) :

L'appelant souhaite‑t‑il réellement contester le bien‑fondé des jugements par lesquels la Cour fédérale a déclaré qu'il était un plaideur vexatoire? Ou souhaite‑t‑il plutôt se servir des appels réunis à des fins accessoires illégitimes?

[16]           Je conclus que M. Mazhero a présenté la requête ex parte en outrage au tribunal dans le seul but accessoire de causer du tort à deux des intimés et à l'agente du greffe. Il ne l'a pas déposée pour protéger ses droits dans les appels réunis, ni pour l'aider à préparer une audience sur le fond.

[17]           Dans mon ordonnance du 1er octobre 2014, j'ai exposé les étapes à suivre pour que les appels réunis de M. Mazhero soient rapidement entendus sur le fond. En particulier, je lui ai fourni des conseils clairs et pratiques sur le contenu du dossier d'appel. Je l'ai encouragé à se concentrer sur la mise en état des appels pour qu'ils puissent être entendus et sur cette seule tâche (2014 CAF 219, au paragraphe 36) :

S'il estime que ses appels sont bien fondés, l'appelant doit à présent procéder de manière méthodique, diligente et ferme pour qu'ils soient rapidement prêts pour audition pour permettre à la Cour de les examiner équitablement sur le fond.

[18]           Dans cette ordonnance, j'ai également donné à M. Mazhero l'avertissement suivant (2014 CAF 219, aux paragraphes 34 et 35) :

Enfin, si les ordonnances que je prononce aujourd'hui ne sont pas respectées, si une partie dépose plusieurs requêtes visant à obtenir une réparation que la Cour n'a pas compétence pour accorder, si une partie persiste à demander, par requête, l'annulation de chaque ordonnance sans fondement, ou si une partie dépose des requêtes frivoles et vexatoires, je prendrai des mesures fermes conformément au pouvoir absolu de la Cour de remédier aux abus de ses propres procédures.

Par exemple, si l'appelant adopte une pareille conduite, je conclurai que les appels réunis ne constituent qu'un outil permettant de poursuivre des fins illégitimes et je les rejetterai par procédure sommaire pour cause d'abus de procédure. Comme je l'ai déjà mentionné, j'ai des préoccupations à cet égard, mais j'espère avoir tort.

C'est la dernière fois que je donne ces avertissements.

[19]           Tout comme n'importe quelle partie, M. Mazhero est libre de présenter des requêtes — s'il a un motif valable de le faire — dans le but de protéger ses droits dans les présents appels réunis ou pour l'aider à les préparer pour qu'ils soient entendus sur le fond.

[20]           Cependant, compte tenu des circonstances décrites dans mon ordonnance du 1er octobre 2014 et à la lumière de ces deux requêtes — qui évoquent toutes deux un abus de procédure — il est maintenant nécessaire que je rende des ordonnances supplémentaires pour mettre fin à cet abus. J'ai le pouvoir de rendre ces ordonnances : Mazhero c. Fox, 2014 CAF 219, aux paragraphes 2 à 6.

[21]           Si M. Mazhero dépose une requête ou fait des observations à des fins autres que celles qui sont décrites au paragraphe précédent, les appels réunis seront immédiatement rejetés, avec dépens, par procédure sommaire. Pour être tout à fait clair, dans ses observations écrites concernant le contenu du dossier d'appel, qui doivent être déposées incessamment, M. Mazhero ne pourra faire des observations sur des sujets autres que ceux qui concernent le contenu du dossier d'appel.

[22]           Mon ordonnance du 1er octobre 2014 demeure intégralement exécutoire. Si M. Mazhero ne la respecte pas, les appels réunis seront immédiatement rejetés, avec dépens, par procédure sommaire.

[23]           Les présentes requêtes seront rejetées.

 « David Stratas »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Yves Bellefeuille, réviseur

 


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIERS :

A‑147‑11 et a‑186‑11

 

INTITULÉ :

FRANCIS MAZHERO c. ANDREW FOX, JACQUES ROBERGE ET NEIL SHARKEY

 

 

REQUÊTES JUGÉES SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

Le juge Stratas

 

DATE DES MOTIFS :

Le 9 octobre 2014

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Francis Mazhero

POUR SON PROPRE COMPTE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling Lafleur Hendersosn S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR L'INTIMÉ neil sharkey

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR LES INTIMÉS andrew fox et jacques roberge

 

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