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Date : 20150227


Dossier : IMM-6982-13

Référence : 2015 CF 251

Vancouver (Colombie-Britannique), le 27 février 2015

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

EDWIN ALEJANDRO PEREZ MENDOZA

VALENTINA ARENAS IBANEZ

LAURA CAMILA HOSTOS ARENAS

SARA ALEJANDRA PEREZ ARENAS

MARIA FERNANDA PEREZ ARENAS

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La présente demande de contrôle et d’annulation de la décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) qui a rejeté la demande d’asile des demandeurs doit être accueillie pour les motifs qui suivent.

Le contexte

[2]               Les demandeurs sont une famille provenant de la Colombie : Edwin Alejandro Perez Mendoza (Edwin), son épouse, Valentina Arenas Ibanez, et leurs trois enfants.

[3]               En janvier 1994, la ferme familiale d’Edwin, située à Fusa, en Colombie, a été envahie par les Forces armées révolutionnaires de Colombie ‒ Armée du peuple (les FARC), une organisation paramilitaire. Les FARC ont exigé que le père d’Edwin leur donne 40 millions de pesos, sinon elles enlèveraient l’un de ses fils. La famille a été avertie de ne pas communiquer avec les autorités, et le père a payé la somme exigée.

[4]               Les FARC ont exigé une somme additionnelle de 50 millions de pesos du père d’Edwin en 2001 et ont menacé d’enlever le neveu d’Edwin si elles ne recevaient pas le montant voulu. Le père d’Edwin est entré en contact avec les autorités, qui ont lancé une enquête policière, mais la police n’a pas été en mesure de protéger la famille. N’ayant pas suffisamment de fonds pour payer la somme exigée, la famille a vendu la ferme et s’est cachée.

[5]               En août 2009, le frère d’Edwin, Mauricio Perez Mendoza (Mauricio), est allé visiter une ferme appartenant à la famille de son épouse à Fusa. Il a tenté de cacher son identité et, comme la visite s’est déroulée sans incident, il a continué de se rendre sur la ferme de manière périodique.

[6]               À partir du 19 avril 2011, Mauricio a reçu plusieurs appels téléphoniques de la part des FARC, qui lui demandaient de verser une [traduction] « contribution » et qui donnaient des renseignements détaillés à son sujet et au sujet de son épouse ainsi que de ses enfants. Les FARC l’ont averti de ne pas communiquer avec la police, mais il avait, de toute façon, trop peur pour ce faire, puisqu’elle n’avait pas réussi à protéger son père en 2001 et qu’elle comportait un bon lot d’agents corrompus.

[7]               Plus tard, Mauricio a consulté un conseiller juridique et a signalé l’incident à la police le 19 mai 2011. La plainte a été assignée à un enquêteur, mais Mauricio estimait que sa situation n’était pas prise au sérieux, et les appels des FARC se sont poursuivis. Selon les conseils de son avocat, il a déposé un rapport auprès de la Croix-Rouge. Mauricio et sa famille se sont enfuis aux États‑Unis et, par la suite, se sont rendus au Canada. Ils se sont vu accorder l’asile par la SPR, après l’arrivée d’Edwin au Canada et sa présentation d’une demande d’asile, mais avant l’audience d’Edwin devant la SPR.

[8]               Le 20 janvier 2012, Edwin a appris du frère de sa belle-sœur, Jair Neira Mendez (Jair), que les FARC cherchaient Mauricio et que, comme elles ne l’avaient pas trouvé, elles étaient maintenant à la recherche d’Edwin. Ce dernier était effrayé, mais comme il ne pensait pas que les FARC avaient trouvé sa résidence, située à Bogota, il a entrepris un voyage d’affaires déjà prévu le 23 janvier 2012. Il est rentré chez lui plus tôt que prévu, soit le 27 janvier 2012. Son épouse et ses enfants sont peu sortis de leur domicile pendant son absence.

[9]               À son retour, Edwin a confirmé auprès de Jair que les FARC avaient posé des questions à son sujet et au sujet de Mauricio, car elles avaient demandé de l’argent à Mauricio et celui‑ci n’avait rien versé. Edwin craignait que, s’il disait aux FARC que Mauricio n’était plus en Colombie ou s’il ne coopérait pas, elles lui exigent de l’argent ou s’en prennent peut‑être à lui ou à sa famille à titre de représailles.

[10]           Suivant les conseils de son père et de Mauricio, Edwin a rencontré le même avocat que Mauricio avait consulté et a présenté une dénonciation le 20 février 2012. On lui a dit de revenir dans huit jours.

[11]           Le 25 février 2012, Edwin a reçu un appel téléphonique des FARC au cours duquel ces dernières ont demandé des renseignements sur Mauricio ainsi qu’une [traduction] « contribution » de 20 millions de pesos. Edwin et sa famille ont commencé à avoir peur, et ses enfants ont cessé de fréquenter l’école. Edwin avait communiqué avec les autorités à deux reprises pour s’informer quant à l’état de sa dénonciation.

[12]           Edwin a reçu d’autres appels des FARC au cours desquels ces dernières menaçaient de le tuer ou d’enlever une de ses filles s’il n’obéissait pas. Ensuite, le 28 février 2012, après avoir reçu un autre appel de menaces, il a emmené sa famille vivre chez sa belle-mère.

[13]           Le 29 février 2012, les autorités ont confirmé que le cas était transféré à l’Unité nationale de lutte contre l’enlèvement et l’extorsion à des fins d’enquête. On a demandé à Edwin d’attendre l’appel d’un enquêteur, qui consignerait sa déclaration. Il n’a reçu aucun appel avant de quitter le pays. Le 1er mars 2012, Edwin a reçu un autre appel des FARC l’avertissant qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps pour répondre à leur demande. Edwin en est venu à croire, le 7 mars 2012, que les FARC le cherchaient à son appartement. Il a décidé que lui et sa famille quitteraient la Colombie. Le 15 mars 2012, il s’est rendu à l’installation de la Croix‑Rouge, tout comme son frère l’avait fait, pour signaler ses problèmes et obtenir de l’aide relativement à l’enquête policière.

[14]           Edwin et sa famille se sont enfuis de la Colombie le 19 mars 2012 et se sont rendus aux États‑Unis. Ils sont entrés au Canada le 28 mars 2012 et ont demandé l’asile.

[15]           Le 3 avril 2012, un enquêteur a téléphoné à la belle-mère d’Edwin dans le but de consigner la déclaration de ce dernier. Il se peut que l’enquête ait été close, puisque lui et sa famille se trouvaient au Canada.

[16]           La SPR a conclu que les demandeurs n’avaient pas la qualité de réfugié au sens de la Convention parce que leur crainte n’était pas liée à un motif énoncé dans la Convention. La preuve qu’ils ont produite consiste en le fait qu’ils ont été ciblés pour extorsion par les FARC parce que d’autres membres de leur famille n’avaient pas obéi à leurs ordres. Il a été conclu que, bien que les FARC aient effectivement certains objectifs d’ordre politique, les demandeurs n’étaient pas ciblés pour des motifs politiques.

[17]           La SPR a déclaré ce qui suit, au paragraphe 5 de ses motifs : [traduction] « la question déterminante en l’espèce est la protection offerte par l’État », et elle a conclu que les demandeurs n’avaient pas été en mesure de réfuter la présomption de protection de l’État.

Les questions en litige

[18]           Les demandeurs ont soulevé les questions suivantes :

1.                  La conclusion relative à la protection de l’État était‑elle fondée sur des considérations étrangères à la question?

2.                  La conclusion relative à la protection de l’État était‑elle inéquitable et tirée sans égard à la preuve?

3.                  La conclusion relative aux efforts déployés par les demandeurs pour obtenir la protection de l’État justifie‑t‑elle l’annulation de la décision dans son intégralité?

4.                  La SPR a‑t‑elle eu tort de conclure que la protection de l’État serait raisonnablement assurée pour les demandeurs?

[19]           De l’avis de la Cour, les véritables questions en litige sont les suivantes :

1.                  Les nombreuses déclarations de la SPR au sujet de la crédibilité d’Edwin, sur lesquelles la décision n’est nullement fondée, justifient‑elles l’annulation de la décision?

2.                  Le défaut de la SPR de mentionner et d’analyser la décision favorable rendue par la SPR à l’égard de Mauricio ou d’établir une distinction d’avec cette décision justifie‑t­-il l’annulation de la décision?

3.                  La conclusion de la SPR selon laquelle les demandeurs ont cherché à obtenir la protection de l’État uniquement dans le but d’étayer leur demande d’asile justifie‑t‑elle l’annulation de la décision?

Analyse

A.         Les conclusions quant à la crédibilité

[20]           La Commission a rendu diverses conclusions quant à la crédibilité au sujet d’Edwin, notamment les suivantes :

   Edwin a attendu un mois après avoir pris connaissance des menaces des FARC avant de signaler l’incident à la police;

   Selon l’explication offerte par Edwin, il a attendu avant de signaler l’incident parce qu’il ne craignait pas les FARC avant que celles‑ci communiquent directement avec lui le 25 février 2012; toutefois, cette explication ne concorde pas avec le fait qu’il a tenté d’obtenir une protection le 20 février 2012;

   Il était invraisemblable qu’Edwin ait consulté son avocat avant de communiquer avec la police compte tenu de la preuve qu’il a produite voulant que, à titre d’agent de sécurité, il communiquait toujours avec la police aussitôt que possible après un incident;

   Dans sa dénonciation (datée du 20 février 2012), il a affirmé qu’il devait voyager outre‑mer pour protéger sa famille, ce qui ne concorde pas avec la preuve qu’il a produite, selon laquelle il ne craignait pas les FARC avant le 25 février 2012 et n’a décidé de quitter la Colombie que le 14 mars 2012;

   Dans sa dénonciation, il a affirmé qu’une personne surveillait et suivait lui et sa famille; or, il n’a pas mentionné ce fait dans l’exposé circonstancié de son Formulaire de renseignements personnels (FRP), et cette affirmation ne cadre pas avec la preuve qu’il a produite selon laquelle il ne craignait pas les FARC avant le 25 février 2012;

   Edwin a affirmé ne pas avoir effectué de suivi auprès des autorités après le 29 février 2012, ce qui ne concorde pas avec la preuve qu’il a produite, selon laquelle il avait continué de s’occuper de ses affaires et d’aller dans un marché public jusqu’à ce que lui et sa famille quittent la Colombie;

   Son affirmation voulant qu’il ait continué de travailler jusqu’à son départ ne cadre pas avec son FRP, dans lequel il a mentionné qu’il avait arrêté de travailler en janvier 2012;

   Il est invraisemblable qu’après le 29 février 2012, il ait eu trop peur pour quitter sa maison en vue d’effectuer un suivi auprès des autorités, mais non pour continuer de s’occuper de ses affaires;

   Il est invraisemblable qu’il n’ait pas cherché à en savoir plus sur l’enquête relative à Mauricio avant de décider de quitter le pays;

   La preuve qu’il a produite était incohérente quant à la raison pour laquelle il avait consulté la Croix‑Rouge, tout en sachant que celle-ci n’avait aucune influence sur les autorités;

   Comme Mauricio n’avait pas reçu d’aide de la Croix‑Rouge, Edwin n’avait aucune raison de se rendre à la Croix‑Rouge, puisqu’il avait déjà décidé de quitter la Colombie.

[21]           En dépit de ces conclusions relatives à la crédibilité tirées par la SPR, cette dernière, soulignent les demandeurs, n’a pas conclu de façon claire qu’Edwin n’était pas crédible en ce qui a trait aux menaces proférées par les FARC, au signalement des incidents à la police et à la conduite de cette dernière, et au signalement des incidents à la Croix‑Rouge. En fait, la SPR semble avoir accepté l’ensemble du témoignage factuel livré par Edwin à l’appui des demandes des demandeurs. Aucune des parties de leur récit n’est rejetée par la SPR, et il n’y a certainement aucune partie rejetée en raison de ses préoccupations sur le plan de la crédibilité.

[22]           Les conclusions défavorables quant à la crédibilité doivent être énoncées en termes clairs et explicites (Hilo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1991), 130 NR 236, 26 ACWS (3d) 104 (CAF)), et c’est une erreur de ne pas préciser quels éléments de preuve le décideur juge crédibles et non crédibles (Rahman c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1989), 8 Imm LR (2d) 170, 16 ACWS (3d) 105 (CAF)). En l’espèce, la SPR a mentionné à maintes reprises qu’elle concluait qu’Edwin n’était pas crédible, mais rien ne renvoie à un élément de preuve en particulier rejeté en raison de cette conclusion quant à la crédibilité. Malheureusement, cette situation, aux yeux des demandeurs et de la Cour, donne à penser que les conclusions quant à la crédibilité ont influé sur l’appréciation de la preuve de la part de la SPR, qui a amené cette dernière à rendre la conclusion relative à la protection de l’État dont il est question.

[23]           Je n’accepte pas l’argument du défendeur selon lequel la conclusion relative à la protection de l’État aurait nécessairement été identique même si la SPR n’avait pas fait référence à ses préoccupations au sujet de la crédibilité d’Edwin. Il n’y a tout simplement aucune façon de le savoir. Cela suffit pour conclure que la décision ne satisfait pas à l’exigence énoncée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, à savoir que le caractère raisonnable d’une décision doit tenir principalement « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel ».

B.         La décision favorable à l’égard de la demande d’asile de Mauricio

[24]           Malgré certaines différences, la demande d’asile de Mauricio était fondée sur les mêmes agents de persécution, la même conduite en matière de recherche de la protection de l’État et, en grande partie, les mêmes faits que ceux se rapportant à la demande d’Edwin. Par surcroît, comme la demande de Mauricio a été accueillie, la SPR a dû conclure que Mauricio ne pouvait obtenir la protection de l’État en Colombie. Comme le soutiennent les demandeurs, à tout le moins, Mauricio se trouvait dans une situation similaire. Toutefois, la décision faisant l’objet du contrôle ne fait nullement mention de la décision favorable rendue par la SPR à l’égard de la demande de Mauricio.

[25]           La Cour a conclu qu’il incombait au commissaire de la SPR qui arrive à une conclusion différente de celle rendue par un autre commissaire à l’égard d’une demande présentée par un membre de la famille dans des circonstances similaires d’expliquer les raisons pour lesquelles il est parvenu à une conclusion contradictoire : Mengesha c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 431, 184 ACWS (3d) 193, au paragraphe 5; Siddiqui c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 6, 154 ACWS (3d) 673, aux paragraphes 18 à 20 (Siddiqui).

[26]           Je suis parfaitement d’accord avec l’observation suivante faite par le juge Phelan dans la décision Siddiqui : « L’omission d’expliquer le fondement de cette conclusion différente nuit à l’intégrité des décisions de la Commission et leur donne un goût d’arbitraire qui n’est sans doute ni voulu, ni acceptable. » En l’espèce, la SPR a traité longuement de ses préoccupations sur le plan de la crédibilité, alors qu’elles ne s’appliquaient pas à sa décision; l’influence inappropriée sur la décision ou le goût d’arbitraire de celle‑ci est donc exacerbé.

[27]           Cette erreur constitue, elle aussi, un fondement suffisant pour l’annulation de la décision.

C.        La motivation derrière la recherche de la protection de l’État

[28]           La SPR a conclu qu’Edwin avait signalé les menaces des FARC dans le seul but d’étayer sa demande d’asile :

[traduction]

Qui plus est, le demandeur a affirmé avoir fait une dénonciation afin qu’il y ait une preuve de ce qui lui était arrivé en Colombie. Il ne croyait pas que les autorités colombiennes seraient en mesure de l’aider de quelque façon que ce soit. Vu les préoccupations en matière de crédibilité susmentionnées et le fait que le demandeur, de son propre aveu, ne croyait pas que la dénonciation lui serait utile, le tribunal conclut que le demandeur a fait une dénonciation dans le but de disposer d’une preuve à l’appui de sa demande d’asile au Canada, et non parce qu’il cherchait à obtenir une protection en Colombie. Un demandeur doit chercher à obtenir une protection dans son propre pays avant de chercher à obtenir une protection dans un autre pays, ou il doit fournir une explication raisonnable quant à la raison pour laquelle il n’a pas tenté d’obtenir une protection dans son propre pays. [Non souligné dans l’original.]

[29]           Les demandeurs soutiennent que la SPR a eu tort de fonder ses conclusions relatives à la protection de l’État sur la raison pour laquelle les demandeurs ont tenté d’obtenir une protection. À leur avis, la question à savoir s’ils ont recherché une protection afin de prouver que la protection en question serait inefficace ou parce qu’ils croyaient que l’État pouvait assurer leur protection n’est pas pertinente. Ils soutiennent également que le fait d’exiger aux demandeurs d’asile de démontrer qu’ils ont cherché à obtenir une protection parce qu’ils croyaient sincèrement que l’État leur la fournirait ne cadre pas avec la décision rendue dans l’arrêt Procureur général c Ward, [1993] 2 RCS 689, 103 DLR (4th) 1. Ils affirment également que le fait qu’il s’agisse d’un comportement opportuniste n’est pas pertinent, car le principal objectif de l’enquête de la SPR consiste à déterminer si un demandeur d’asile sera en danger s’il retourne dans son pays, et ils offrent comme exemple les revendications de statut de réfugié sur place, où la motivation derrière la présentation de la revendication est sans importance : Ghasemain c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1266, 242 FTR 164, au paragraphe 31.

[30]           Le défendeur affirme que la motivation est pertinente aux fins de l’analyse de la SPR parce que le fait qu’Edwin a déposé la dénonciation après avoir décidé de quitter la Colombie, et sans allouer aux autorités suffisamment de temps pour intervenir, ne constitue pas une tentative raisonnable d’obtenir la protection de l’État.

[31]           La conclusion de la SPR selon laquelle la tentative d’obtenir la protection était compromise par la motivation qui y a été associée par la SPR même semble être unique. Généralement, la SPR conclut que la présomption de protection de l’État n’a pas été réfutée parce que le demandeur n’a pas cherché à obtenir cette protection. En l’espèce, la SPR semble affirmer, en partie, que cette présomption n’a pas été réfutée parce qu’Edwin a cherché à l’obtenir, mais pour de mauvaises raisons. Je n’ai nullement besoin de trancher la question de savoir si la motivation n’est jamais un facteur pertinent à prendre en compte lorsqu’un demandeur a tenté d’obtenir la protection de l’État, car, en l’espèce, il n’y avait simplement rien qui justifiait les spéculations de la SPR à propos de la motivation d’Edwin. La SPR ne lui a jamais demandé son avis sur cette préoccupation. Je suis d’accord avec les demandeurs pour dire que l’équité exige que, si la SPR entend s’attaquer aux raisons pour lesquelles un demandeur a cherché à obtenir une protection pour ensuite les lui reprocher, elle ait l’obligation envers le demandeur de lui poser carrément une question claire et directe à ce sujet. À mon avis, agir autrement, comme l’a fait la SPR en l’espèce, constitue un manquement à l’équité procédurale et à la justice naturelle.

[32]           Cette erreur est, elle aussi, un fondement suffisant pour l’annulation de la décision.

[33]           Pour ces trois motifs, séparément et cumulativement, cette décision doit être annulée, et les demandes d’asile des demandeurs doivent faire l’objet d’une nouvelle décision. Aucune des parties n’a proposé de question en vue de la certification.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande est accueillie, que la décision est annulée, que la demande d’asile doit faire l’objet d’une nouvelle décision de la part d’un tribunal différemment constitué de la SPR et qu’aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6982-13

INTITULÉ :

EDWIN ALEJANDRO PEREZ MENDOZA ET AUTRES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

le 26 janvier 2015

JUGEMENT ET MOTIFS :

le juge ZINN

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

le 27 février 2015

COMPARUTIONS :

Aisling Bondy

POUR LES DEMANDEURS

Julie Waldman

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aisling Bondy

Avocate

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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