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Date : 20150505


Dossier : IMM-2619-14

Référence : 2015 CF 584

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 5 mai 2015

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

THANGARASA SRIGNANAVEL

 

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Résumé

[1]               La Cour est saisie d’une demande présentée par Thangarasa Srignanavel [le demandeur] en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, en vue d’obtenir le contrôle judiciaire d’une décision datée du 31 octobre 2013, qui a été communiquée au demandeur le 1er avril 2014 et par laquelle un agent d’immigration [l’agent] de Citoyenneté et Immigration Canada a rejeté la demande d’examen des risques avant le renvoi du demandeur [la demande d’ERAR] et a estimé qu’il n’avait ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger. L’avocat du demandeur n’a pas déposé d’observations écrites à l’appui de la demande d’ERAR de celui-ci. La présente demande est accueillie pour les motifs qui suivent.

II.                Les faits

[2]               Né le 18 août 1974, le demandeur est un citoyen sri-lankais d’origine tamoule, du nord du pays. Il a fui le Sri Lanka pour aller en Inde avec son épouse et son enfant. Ils ont vécu dans ce pays de novembre 2007 à janvier 2011. Avec l’aide d’un agent, il est revenu au Sri Lanka alors que sa femme et son enfant sont restés en Inde, et il a entrepris son voyage pour le Canada en février 2011.

[3]               Le demandeur est arrivé au Canada le 1er avril 2011 et a immédiatement demandé l’asile en invoquant sa crainte d’être persécuté par le gouvernement sri-lankais et par le Parti démocratique populaire de l’Eelam [le PDPE], un groupe paramilitaire progouvernemental. La Section de la protection des réfugiés [la SPR] de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés a rejeté sa demande d’asile le 16 janvier 2012. Les questions déterminantes étaient l’absence de crédibilité du demandeur et son absence de crainte objective de persécution de la part de la police, de l’armée sri-lankaise et du PDPE. Le demandeur a déposé le 16 février 2012 une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de la SPR, qui a été rejetée le 1er janvier 2012 (IMM‑1648‑12).

[4]               Après avoir été informé par l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] que son renvoi était imminent, le demandeur a demandé le 4 décembre 2012 le report de son renvoi en faisant valoir que la situation s’était détériorée considérablement au Sri Lanka depuis le rejet de sa demande d’asile par la SPR. Le demandeur a de nouveau demandé le report de son renvoi, le 11 décembre 2012, après avoir reçu officiellement signification par l’ASFC, le 6 décembre 2012, d’une directive lui enjoignant de se présenter pour son renvoi le 29 décembre 2012 à 18 h 25.

[5]               Le 21 décembre 2012, le demandeur a saisi notre Cour d’une requête en bref de mandamus visant à enjoindre à l’ASFC d’examiner sa demande de report du renvoi et sa requête en sursis à l’exécution du renvoi du Canada vers le Sri Lanka et de rendre une décision (IMM‑13055‑12). Le 24 décembre 2012, l’ASFC a rejeté la requête en report du renvoi du demandeur et, le 28 décembre 2012, la Cour a sursis à l’exécution du renvoi du demandeur.

[6]               Le 2 janvier 2013, comme l’ASFC avait refusé de reporter son renvoi et qu’un sursis à l’exécution de celui‑ci avait été accordé, le demandeur s’est désisté de sa demande de bref de mandamus et a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l’ASFC, demande qui a été rejetée le 4 juillet 2013 (IMM‑22‑13).

[7]               Le demandeur a présenté une demande d’ERAR le 9 mai 2013. La date limite pour le dépôt des observations écrites était le 25 mai 2013. L’avocat du demandeur n’avait pas pris note de cette date, de sorte qu’il n’a pas déposé d’observations écrites à l’appui de la demande d’ERAR.

[8]               L’omission de l’avocat était une pure erreur administrative involontaire et ne constituait d’aucune façon une inconduite ou un défaut de tenir compte de l’intérêt de son client. Des mécanismes étaient en place; personne ne s’est aperçu qu’il y avait une date limite à respecter. L’échéance n’a pas été respectée et, par conséquent, la demande d’ERAR – qui exigeait le dépôt de nouveaux éléments de preuve – a été rejetée.

[9]               L’avocat a à juste titre communiqué avec son ordre professionnel, le Barreau du Haut‑Canada, pour signaler lui-même le problème. Il a demandé l’avis du Barreau, et il a suivi l'avis qui lui a été donné en expliquant ce qui s'était passé à son client et en obtenant son consentement pour continuer à le représenter.

[10]           Comme aucune observation n’avait été déposée, l’agent a rejeté la demande d’ERAR du demandeur le 31 octobre 2013. Cette décision a été communiquée au demandeur le 1er avril 2014. Le demandeur a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision devant la Cour le 4 avril 2014.

[11]           Le 10 avril 2014, le demandeur a reçu signification d’une directive lui enjoignant de se présenter pour son renvoi le 5 mai 2014 à 18 h 30. Le 1er mai 2014, la Cour a sursis à l’exécution du renvoi du demandeur au Sri Lanka en attendant qu’une décision soit rendue au sujet de sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l’agent d’ERAR, et l’autorisation de contrôle judiciaire a été accordée le 28 janvier 2015.

III        Décision faisant l’objet du contrôle

[12]           L’agent d’ERAR a fait observer que l’ERAR ne constituait pas une révision de la décision de la SPR et il a relevé certaines des conclusions de la SPR. Il a fait observer que la Cour avait rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire présentée par le demandeur à l’égard de cette décision. Aux fins de son évaluation, l’agent a examiné la demande d’ERAR du demandeur ainsi que la décision et les motifs de la SPR.

[13]           L’agent d’ERAR a fait observer que le demandeur n’avait fait mention d’aucun risque, se contentant plutôt de déclarer ce qui suit : [traduction« voir les observations de mon avocat ». L’agent a signalé qu’aucune observation n’avait été reçue à la date limite prévue du 25 mai 2013. Pour ce motif, l’agent a conclu que le demandeur n’avait pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour le persuader de tirer une conclusion différente de celle de la SPR, à savoir que le demandeur n’avait ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

IV        Question en litige

[14]           La présente affaire soulève la question de savoir si le défaut de l’avocat du demandeur de déposer des observations écrites à l’appui de sa demande d’ERAR constitue un manquement aux principes de justice naturelle.

V         Norme de contrôle

[15]           Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 57 et 62 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a affirmé qu’il n’était pas nécessaire de se livrer à une analyse relative à la norme de contrôle applicable lorsque « la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ».

[16]           La norme de contrôle applicable aux questions relatives à l’équité procédurale et à la justice naturelle est celle de la décision correcte (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43; Sketchley c Canada (PG), 2005 CAF 404, aux paragraphes 53 à 55). Dans l’arrêt Dunsmuir, au paragraphe 50, la Cour suprême du Canada a expliqué ce qui était attendu du tribunal qui applique la norme de contrôle de la décision raisonnable :

La cour de révision qui applique la norme de la décision correcte n’acquiesce pas au raisonnement du décideur; elle entreprend plutôt sa propre analyse au terme de laquelle elle décide si elle est d’accord ou non avec la conclusion du décideur. En cas de désaccord, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose. La cour de révision doit se demander dès le départ si la décision du tribunal administratif était la bonne.

VI        Arguments des parties et analyse

[17]           La question qui m’est soumise concerne le droit du demandeur de présenter l’intégralité de sa cause. Il s’agit d’une question de justice naturelle et d’équité procédurale. Dans l’arrêt Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, au paragraphe 22, la Cour suprême du Canada a souligné ce qui suit :

[...] les droits de participation faisant partie de l’obligation d’équité procédurale visent à garantir que les décisions administratives sont prises au moyen d’une procédure équitable et ouverte, adaptée au type de décision et à son contexte légal institutionnel et social, comprenant la possibilité donnée aux personnes visées par la décision de présenter leur point de vue complètement ainsi que des éléments de preuve de sorte qu’ils soient considérés par le décideur. [Non souligné dans l’original.]

[18]           Se fondant sur les arrêts Shirwa c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 2 RCF 51 (CAF) [Shirwa] et R c GDB, 2000 CSC 22 [GDB], la Cour a déclaré, dans le jugement Brown c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1305, aux paragraphes 55 et 56, que l’incompétence ou la négligence de l’avocat ne constitue un manquement aux principes de justice naturelle que dans les circonstances extraordinaires suivantes :

[55]      La Cour suprême du Canada a déclaré dans l’arrêt GDB [...] que, pour démontrer que l’incompétence de son avocat s’est traduite par un manquement à l’équité procédurale, le demandeur doit démontrer : (1) que les actes ou les omissions de l’avocat relevaient de l’incompétence et (2) qu’une erreur judiciaire en a résulté. La Cour suprême du Canada a également confirmé qu’il incombait à l’appelant de faire la preuve des actes ou omissions qu’il reproche à son avocat et que « [l]a sagesse rétrospective n’a pas sa place dans cette appréciation »

[56]      Dans les instances visées par la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, l’incompétence de l’avocat ne constitue un manquement aux principes de justice naturelle que dans des « circonstances extraordinaires ». En ce qui concerne le volet relatif à l’examen du travail de l’avocat, son incompétence ou sa négligence doit, au minimum, être suffisamment précise et nettement appuyée par la preuve. Elle doit également être exceptionnelle et le second volet (celui relatif à l’erreur judiciaire (peut prendre plusieurs formes : le travail de l’avocat peut avoir compromis l’équité procédurale ou encore la fiabilité de l’issue du procès peut avoir été compromise. À cet égard, le demandeur doit démontrer qu’il existe une probabilité raisonnable que l’issue du procès aurait été différente, n’eût été l’incompétence de son représentant. [Non souligné dans l’original.]

Je tiens à souligner la nécessité de conclure à la « probabilité raisonnable que l’issue du procès aurait été différente ».

[19]           Toutefois, dans le jugement Thamotharampillai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 438, aux paragraphes 9 et 10 [Thamotharampillai], la Cour a énoncé un critère légèrement différent en précisant qu'il incombe au demandeur d’établir seulement l’existence d’une « cause défendable » et non de démontrer « une probabilité raisonnable que l’issue du procès aurait été différente » :

[9]        Pour obtenir gain de cause en l’espèce, le demandeur doit démontrer les faits sur lesquels repose la prétention d’incompétence, l’incompétence du consultant et le fait qu’une erreur judiciaire en a résulté (Robles c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 374, 2 Admin LR (4th) 315, et Hallatt c. Canada, [2004] 2 C.T.C. 313).

[10]      Les deux premiers éléments ne sont pas en cause. En fait, le consultant en immigration n’a pas suivi les instructions reçues de déposer des observations. La seule question est de savoir si cette absence de compétence a donné lieu à une erreur judiciaire. Il est reconnu qu’il ne suffit pas de faire valoir qu’un consultant compétent aurait déposé des observations supplémentaires. Il s’agit de déterminer si ces observations auraient influé sur la décision du représentant du ministre. M. Thamotharampillai soutient qu’il s’est acquitté de son fardeau d’établir l’existence d’une cause défendable. Le ministre soutient qu’il doit exister une probabilité raisonnable que ces nouveaux éléments auraient influé sur la décision en cause.

La Cour a précisé plus loin, au paragraphe 13, en quoi consistait le fardeau du demandeur : « Il lui faut démontrer qu’il existe une cause raisonnablement défendable, non que, selon la prépondérance des probabilités, il aurait gain de cause ».

[20]           À mon avis, le critère qu’il convient d’appliquer dépend de la faute commise. Il faut tenir compte du contexte dans lequel l’erreur a été commise.

[21]           Bien qu’elle ne constitue pas une négligence ou une incompétence professionnelle au sens courant du terme, l’erreur administrative involontaire dont l’avocat du demandeur assume en l'espèce la responsabilité comme il se doit est une sorte de négligence et/ou d’incompétence, bien qu’elle se situe au bas de l’échelle de gravité. J’apporte cette précision parce que des mécanismes appropriés étaient prévus, mais qu'ils ont tous malheureusement échoué.

[22]           Dans ces conditions, j’estime que le demandeur doit démontrer qu’il existe une cause raisonnablement défendable suivant laquelle, n’eût été l’erreur en question, le résultat aurait pu être différent. Il n’est pas nécessaire d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur aurait eu gain de cause. Ce critère imposerait un fardeau beaucoup trop onéreux, s'agissant d'une erreur administrative involontaire.

[23]           Je tiens à souligner qu’on ne peut se contenter d’invoquer une erreur administrative involontaire ou une variante de celle-ci pour obtenir le réexamen de l’affaire relativement à laquelle l’erreur a été commise. Dans le cas qui nous occupe, le demandeur doit établir l’existence d’une cause raisonnablement défendable suivant laquelle il obtiendrait gain de cause en ce qui concerne les documents manquants. À mon avis, le demandeur a satisfait à ce critère, et ce, pour les motifs qui suivent.

[24]           Le demandeur est un Tamoul du nord du Sri Lanka et il a établi à deux reprises devant notre Cour – dans le cadre de deux requêtes en sursis à l’exécution de son renvoi – qu’il subirait un préjudice irréparable s’il devait être expulsé du Canada. Le demandeur a déposé devant la Cour des documents sur la situation au Sri Lanka qui donnent à penser que les risques ont changé, une question qu'il revient à l’agent d’ERAR et non à la Cour d’évaluer plus en profondeur. En l’espèce, il s’agit par ailleurs d’inaction et non d’action fautive, bien que je formule cette observation sans me fonder outre mesure sur cette distinction.

[25]           La situation a évolué au Sri Lanka et elle continue à évoluer. La Cour prend connaissance d’office de sa décision antérieure (Navaratnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 244, aux paragraphes 13 à 16 [Navaratnam]) dans laquelle elle a pris acte de la détérioration de la situation survenue au Sri Lanka depuis 2012. Tant dans la présente espèce que dans l’affaire Navaratnam, la SPR s’était fondée sur des documents du HCR remontant à 2010 qui n’étaient plus à jour. Dans l’arrêt Navaratnam, j’ai écrit ce qui suit :

[13]      À l’audience, j’ai fait part aux deux parties du souci de la Cour quant au fait de se fonder sur des décisions désuètes dans le cadre du présent contrôle judiciaire. Je suis conscient de la règle générale selon laquelle un contrôle judiciaire est fondé sur le dossier, sous réserve du dépôt de nouveaux éléments de preuve recevables. Et même si la SPR procède à une évaluation exhaustive en vertu des articles 96 et 97, lors de son examen ultérieur l’agent d’ERAR doit évaluer lui aussi les risques. Mais il est bien connu qu’au Sri Lanka la situation est en train de changer. La décision initiale de la SPR a été rendue dans ce que l’on pourrait appeler les dernières lueurs de la paix. Le 17 décembre 2010, la SPR a mentionné une décision convaincante qui lui a permis d’assouplir sa position au sujet du retour au Sri Lanka de Tamouls de sexe masculin originaires du Nord. Cependant, ce premier élan d’optimisme n’était pas fondé, comme l’ont démontré des instances canadiennes et d’autres instances en matière de réfugiés. En décembre 2012, le HCR a remplacé ses Lignes directrices de 2010 concernant les Tamouls retournant au Sri Lanka parce que la situation de ces derniers s’était détériorée. En l’espèce, la décision que la SPR a rendue en 2011 reposait sur les Lignes directrices du HCR de 2010 qui, si elles étaient en vigueur à l’époque, ne le sont plus aujourd’hui.

[14]      L’agent d’ERAR s’est également fondé sur les Lignes directrices du HCR de 2010 dans la mesure où il s’est appuyé sur les conclusions antérieures de la SPR à propos de la situation dans le pays, même si, à ce moment-là, elles ne s’appliquaient plus. Il me faut ajouter que l’agent d’ERAR était tenu de consulter des documents à jour sur la situation dans le pays. Le fait d’avoir omis d’évaluer, voire de mentionner les Lignes directrices du HCR de 2012 exige que cette décision, rendue en août 2013, soit infirmée.

[15]      Depuis le changement apporté aux Lignes directrices du HCR, la situation des Tamouls retournant au Sri Lanka semble s’être détériorée encore plus. En avril 2013, l’envoyé spécial du premier ministre du Canada au Sri Lanka a signalé, après son enquête, que ce que les Tamouls du Sri Lanka vivaient était une « épuration ethnique douce ». En octobre 2013, le premier ministre du Canada a boycotté la Réunion des chefs de gouvernement des pays du Commonwealth organisée par le Sri Lanka à cause des problèmes de ce pays sur le plan des droits de la personne, et le traitement des Tamouls en faisait partie. Les Suisses ont cessé de renvoyer des Sri-Lankais dans leur pays à la fin de 2013. Pour ce qui est de la position adoptée par les autorités canadiennes en matière de réfugiés, il vaut vraiment la peine de signaler, selon moi, que le 7 novembre 2014 la SPR a révoqué sa décision à caractère persuasif de 2010 concernant les Tamouls : voir l’Avis de révocation d’une décision à caractère persuasif VA9-02166. Il s’agit toutes là de questions de notoriété publique.

[16]      Je suis conscient que tous ces faits nouveaux n’ont pas été soumis à l’agent d’ERAR. Cependant, un ERAR a pour objet important de veiller à ce que le Canada évalue bien les risques avant que l’on expulse un demandeur. L’agent d’ERAR représente la dernière ligne de l’examen des risques, sous réserve de la décision d’une portée limitée de l’agent chargé du renvoi. Rien ne sert d’effectuer un ERAR s’il est fondé sur des informations que l’on sait inexactes. Compte tenu de ce fait et de l’instabilité de la situation au Sri Lanka pour ce qui est des Tamouls en général et, plus précisément, des demandeurs d’asile déboutés qui sont de retour, je suis d’avis qu’en renvoyant l’affaire à un agent d’ERAR différent en vue d’une nouvelle décision, il serait utile que l’on dépose de nouveaux éléments de preuve.

[26]           Je suis convaincu que le demandeur s’est acquitté du fardeau qui lui incombait et qu’il a démontré l’existence d’une cause défendable en ce qui concerne l’existence de nouveaux risques qu’il appartiendra à l’agent d’ERAR d’examiner dans le cadre d’une nouvelle demande d’ERAR.

[27]           Aucune des parties n’a proposé de question à certifier, et l’affaire n’en soulève aucune.

VII      Dispositif

[28]           La demande est accueillie, aucune question n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie, que la décision de l’agent d’ERAR est annulée et que l’affaire est renvoyée à un autre agent d’ERAR pour qu’il rende une nouvelle décision à la lumière des nouveaux éléments de preuve qui pourront être déposés. Aucune question n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DOSSIER :

IMM-2619-14

 

INTITULÉ :

THANGARASA SRIGNANAVEL c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 27 AVRIL 2015

 

JUgement et motifs :

le juge BROWN

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

 

LE 5 MAI 2015

 

COMPARUTIONS :

Robert I. Blanshay

POUR LE demandeur

 

Kevin Doyle

POUR LE défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ordre professionnel

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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