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Date : 20150814


Dossier : IMM-6525-14

Référence: 2015 CF 953

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 14 août 2015

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

JOHN TAIWO OLUWOLE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], visant la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la CISR] a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] selon laquelle le demandeur n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR.

[2]               Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée.

I.                   Le contexte

[3]               Le demandeur est un citoyen nigérian qui prétend être menacé par le groupe militant Boko Haram.

[4]               Le demandeur, qui est chrétien, allègue avoir pris part à un sommet de la prière organisé par Gospel Faith Mission International dans la ville d’Ado Ekiti (Nigeria) du 26 au 28 avril 2013. Il affirme qu’à l’occasion ce sommet, il a dirigé une prière demandant à Dieu d’accorder au président du Nigeria la sagesse et la force d’écraser Boko Haram et d’apporter la paix dans le pays.

[5]               Le 14 mai 2013, le gouvernement du Nigeria a étendu l’état d’urgence aux trois États du nord-est dans lesquels Boko Haram était le plus actif.

[6]               D’après le demandeur, le groupe Boko Haram l’a tenu responsable de l’état d’urgence imposé à la suite de sa prière, et il aurait commencé à être harcelé. Il prétend que sa maison a été vandalisée, qu’il a été poursuivi dans les rues et menacé. Il ajoute que personne ne voulait le fréquenter à cause du danger que cela représentait et qu’il a perdu son travail. Il affirme qu’il est entré dans la clandestinité, qu’il s’est séparé de sa femme et de ses enfants, et qu’il a fini par quitter le Nigeria pour venir au Canada.

[7]               Lorsqu’elle a rejeté la demande d’asile, la SPR a conclu que le demandeur n’était pas crédible et qu’il bénéficiait de toute façon d’une possibilité de refuge intérieur [PRI] dans les villes de Lagos et de Port Harcourt.

[8]               La SAR a confirmé la décision de la SPR en appel. Elle s’est demandé si elle devait admettre de nouveaux éléments de preuve documentaire et accueillir la demande d’audience présentée par le demandeur. Cette nouvelle preuve comprenait : le certificat de décès de l’épouse du demandeur délivré par la Commission nationale de la population [National Population Commission]; un affidavit de la tante du demandeur attestant le décès de son épouse; un affidavit de l’un des paroissiens du demandeur qui avait retrouvé une affiche annonçant le sommet de la prière auquel le demandeur avait pris part, ainsi que l’affiche elle-même; des éléments de preuve documentaire provenant d’Internet et concernant l’arrestation de membres soupçonnés de Boko Haram à Lagos et à Ogun.

[9]               La SAR a examiné les exigences prévues par la loi pour l’admission de nouveaux éléments de preuve en appel, et a noté qu’aux termes du paragraphe 110(4) de la LIPR, le demandeur ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet de sa demande ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’aurait pas normalement présentés, dans les circonstances, au moment du rejet. La SAR a conclu que l’affidavit du paroissien, l’affiche et les documents provenant d’Internet étaient normalement accessibles au moment de l’audience de la SPR ou avant le rejet de la demande. Ces éléments de preuve ne satisfaisaient donc pas aux exigences prévues par la loi.

[10]           La SAR a estimé que le certificat de décès et l’affidavit de la tante – quant à eux – satisfaisaient à ces exigences. Elle a donc examiné ces éléments en fonction des facteurs définis par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Raza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CAF 385 [Raza], et qui doivent être pris en compte afin d’apprécier les nouveaux éléments de preuve dont la production est proposée aux termes de l’alinéa 113a) de la LIPR relativement à un examen des risques avant renvoi [ERAR]. Ces facteurs sont la nouveauté, la crédibilité, la pertinence et le caractère substantiel.

[11]           La SAR doutait de la crédibilité du certificat de décès. Comme l’a expliqué son avocat durant l’audition de la demande de contrôle judiciaire, le demandeur souhaitait introduire la preuve du décès de sa femme pour établir qu’elle avait été assassinée par des militants dans l’État de Lagos. Cependant, la SAR a fait observer que le document ne précisait pas la cause du décès et n’en confirmait pas le caractère suspect. La SAR a également invoqué le Cartable national de documentation [CND] sur le Nigeria d’après lequel un dossier d’hôpital doit être fourni pour obtenir un certificat de décès. Un tel document n’a pas été présenté en l’espèce. En outre, la SAR a tenu compte de la preuve documentaire établissant que Benin City, dans le sud du Nigeria, était un pôle de l’industrie de la photogravure, où il était possible de se procurer pratiquement n’importe quel document falsifié. En raison de ces préoccupations touchant à la crédibilité, SAR a conclu que la nouvelle preuve documentaire liée au décès de l’épouse était inadmissible. Elle a donc refusé la demande d’audience du demandeur.

[12]           Partant de là, la SAR a appliqué la norme de contrôle en appel définie dans Iyamuremye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 494 [Iyamuremye], Eng c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 711 [Eng] et Alvarez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 702 [Alvarez], et estimé que la SPR n’avait commis aucune erreur manifeste et dominante dans son évaluation de la crédibilité du demandeur. Elle a notamment maintenu la conclusion de la SPR suivant laquelle, si les affiches annonçant le sommet de la prière avaient bel et bien été distribuées dans tout le Nigeria comme l’alléguait le demandeur, ce dernier aurait pu en soumettre une copie à l’audience qui s’est déroulée devant la SPR.

[13]           La SAR a également estimé que la SPR n’avait commis aucune erreur manifeste et dominante en concluant que le demandeur bénéficiait d’une PRI à Lagos et à Port Harcourt. La SAR a jugé que les nouveaux éléments de preuve concernant Lagos étaient inadmissibles, parce qu’ils étaient normalement accessibles avant l’audience de la SPR, et a noté à cet égard que le demandeur n’avait pas contesté en appel l’existence d’une PRI à Port Harcourt.

II.                Les questions en litige

[14]           Compte tenu des observations des parties qui seront examinées ci-après, la présente demande soulève les questions suivantes :

A.             La SAR a-t-elle commis une erreur dans son analyse concernant l’existence pour le demandeur d’une PRI à Lagos et à Port Harcourt?

B.              La SAR a-t-elle commis une erreur dans son traitement de la preuve se rapportant au décès de l’épouse du demandeur?

C.              La SAR a-t-elle commis une erreur dans son traitement de la preuve concernant l’affiche et la brochure de la réunion de prière?

III.             Les observations des parties

[15]           Le demandeur soutient que la SAR a commis une erreur en déclarant inadmissible le certificat de décès de son épouse. D’après lui, contrairement à ce qu’a conclu la SAR, le CND indique que les parents biologiques peuvent obtenir un certificat de décès de la Commission nationale de la population s’ils présentent une preuve d’identité, même sans certificat de l’hôpital. Il ajoute que la SAR a commis une erreur en tenant compte du fait qu’il était possible de se procurer de faux documents à Benin City, cette ville n’ayant aucune pertinence à l’égard du demandeur ou de sa demande d’asile.

[16]           S’agissant de l’affiche, le demandeur fait valoir que la SAR a commis la même erreur que la SPR en concluant que l’affiche du sommet de la prière était un élément de preuve important aux fins de la demande et qu’il ne l’avait pas fournie, parce qu’elle n’a pas considéré qu’il avait soumis à l’audience une copie de la brochure, qui était identique à l’affiche à ceci près qu’elle était plus petite.

[17]           Dans le mémoire des arguments qu’il a déposé en l’espèce, le demandeur n’a soulevé aucun argument concernant les conclusions de la SAR relatives aux PRI. Cependant, à l’audition de la présente demande, son avocat a fait valoir que la SAR aurait pu parvenir à des conclusions différentes si elle n’avait pas commis d’erreur concernant l’affiche. Il a ajouté que l’affidavit de son client déposé devant la SAR précisait que des membres du groupe Boko Haram investissaient des régions du Nigeria, notamment Port Harcourt, ce qui, d’après le demandeur, peut être interprété comme remettant en question la conclusion de la SPR selon laquelle cette ville représentait une PRI viable; des éléments de preuve à cet effet étaient joints à l’affidavit.

[18]           À l’audition de la présente demande, le défendeur s’est opposé à ce que le demandeur soulève ces arguments parce qu’ils ne figuraient pas dans son mémoire des arguments; il renvoie la Cour à la décision Al Mansuri c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 22 [Al Mansuri], pour rappeler qu’elle jouit d’un pouvoir discrétionnaire en pareille situation.

[19]           Le défendeur soutient que la décision de la SAR est raisonnable et défendable, quelle que soit la norme de contrôle. Il soutient pour l’essentiel que la SPR a conclu que le demandeur bénéficiait de PRI à Lagos et à Port Harcourt, ce que ce dernier n’a pas contesté devant la SAR à l’égard de Port Harcourt, une conclusion déterminante au regard de la demande d’asile. Le défendeur fait valoir que la mention de Port Harcourt dans l’affidavit du demandeur ne peut pas être dûment interprétée comme remettant en question la conclusion de la SPR selon laquelle cette ville représentait une PRI viable; il renvoie la Cour à la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, à titre de jurisprudence établissant qu’une partie doit soulever une question clairement et directement pour que le décideur soit tenu de la considérer.

[20]           Le défendeur affirme également que la SAR a correctement examiné l’admissibilité du certificat de décès. Il ajoute que le CND indique qu’un certificat de décès de l’hôpital est nécessaire pour obtenir un certificat de décès de la Commission nationale de la population, et que cette exigence s’applique aux parents biologiques. Par conséquent, il était raisonnable de la part de la SAR de conclure que le certificat de décès n’était pas crédible et donc pas admissible, puisqu’un certificat de l’hôpital n’a pas été fourni et que la preuve indiquait qu’il était facile de se procurer des documents frauduleux.

[21]           À l’audition de la présente demande, l’avocat du défendeur a renvoyé la Cour à la décision de la juge Gagné dans Singh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 1022 [Singh], pour souligner que c’était une erreur de la part de la SAR d’appliquer l’analyse de l’arrêt Raza, qui concernait l’admission d’éléments de preuve dans le contexte d’un ERAR, à l’admission d’éléments de preuve au titre du paragraphe 110(4) de la LIPR. Le défendeur invite instamment la Cour à privilégier plutôt l’analyse effectuée dans la décision Denbel c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 629 [Denbel], dans laquelle le juge Mosley s’est respectueusement opposé à la conclusion tirée dans la décision Singh et a estimé aux paragraphes 40 à 44 que la SAR pouvait importer les facteurs de l’arrêt Raza au moment d’appliquer la nouvelle règle de preuve énoncée au paragraphe 110(4) de la LIPR.

[22]           Quant à la question de l’affiche, le défendeur fait valoir que la SAR a examiné la conclusion de la SPR, la preuve dont cette dernière disposait, ainsi que les arguments du demandeur, et a conclu que la SPR n’avait commis aucune erreur manifeste et dominante en tirant une inférence défavorable quant à la crédibilité du fait que le demandeur n’ait pas soumis l’affiche. Le défendeur soutient qu’il était loisible à la SAR de tirer une telle conclusion.

IV.             La norme de contrôle

[23]           Comme je l’ai déjà noté, la SAR s’est appuyée sur les décisions Iyamuremye, Eng et Alvarez, pour conclure que la norme de contrôle applicable l’obligeait à apprécier elle-même la preuve afin de déterminer si la SPR avait invoqué un mauvais principe de droit ou mal apprécié les faits au point de commettre une erreur manifeste et dominante. Bien qu’il y ait des divergences dans la jurisprudence de la Cour en ce qui a trait à la norme de contrôle que doit appliquer la SAR (ainsi que l’a récemment résumé la décision Ngandu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 423), la manière dont elle l’a formulée en l’espèce est conforme à l’approche adoptée dans Iyamuremye, Eng et Alvarez. Il est important de noter qu’aucune des parties ne soulève cette question. Comme elle a suivi l’une des approches élaborées par la Cour, rien ne justifie de revenir sur la norme de contrôle employée en l’espèce par la SAR.

[24]           Je note aussi que la juge Gagné a déclaré aux paragraphes 35 à 42 de la décision Singh que la Cour devait adopter la norme de la décision raisonnable lorsqu’elle examine une décision de la SAR concernant l’admission de nouveaux éléments de preuve aux termes du paragraphe 110(4) de la LIPR. Je souscris à cette approche.

V.                Analyse

A.                 La SAR a-t-elle commis une erreur dans son analyse concernant l’existence pour le demandeur d’une PRI à Lagos et à Port Harcourt?

[25]           Si le demandeur n’a pas contesté devant la SAR la conclusion selon laquelle Port Harcourt était une PRI viable, cette question devient donc décisive et la présente demande doit être rejetée. Dans la décision Siliya c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 120 [Siliya], le juge Boswell avait affaire à une situation factuelle très similaire : les demandeurs n’avaient pas contesté devant la SAR la conclusion de la SPR selon laquelle il existait une PRI. En rejetant la demande de contrôle judiciaire, le juge Boswell a déclaré ce qui suit au paragraphe 25 :

[25]      Je rejette l’argument des demandeurs selon lequel la SAR a commis une erreur en concluant que l’existence d’une PRI était décisive sans apprécier leurs arguments selon lesquels la SPR avait mal qualifié la nature du risque. La décision de la SAR ne devrait pas être modifiée parce que les demandeurs n’ont jamais contesté la conclusion décisive de la SPR quant à la PRI et, par conséquent, rien ne permettait à la SAR d’intervenir. La norme selon laquelle la SAR a examiné la conclusion quant à la PRI n’est donc pas pertinente; par contre, même si la SAR a appliqué une norme erronée, cela ne change rien à sa conclusion :

[35]      La question de la possibilité de refuge intérieur fait partie intégrante de la définition de réfugié au sens de la Convention et de celle de personne à protéger. Comme les appelants ont des possibilités de refuge intérieur dans leur propre pays, ils n’ont pas besoin de la protection auxiliaire du Canada.

[26]           Comme dans la décision Siliya, si le demandeur n’a pas contesté devant la SAR la conclusion de la SPR selon laquelle il existait une PRI à Port Harcourt, la SAR n’avait alors aucune raison d’intervenir en appel. Quant au moment auquel le demandeur a soumis des observations concernant cette PRI, la décision Al Masuri enseigne que la Cour jouit d’un certain pouvoir discrétionnaire pour traiter cette situation, comme l’a reconnu le défendeur lors des plaidoiries. La liste non exhaustive des facteurs pertinents à l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire est énoncée au paragraphe 12 de cette décision :

[...] Les facteurs à prendre en compte dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire comprennent à mon avis les suivants : 

(i) Les faits et éléments intéressant les nouveaux arguments étaient‑ils tous connus (ou raisonnablement accessibles) à l’époque où la demande d’autorisation fut déposée et/ou mise en état?

(ii) Est‑il possible que la partie adverse subisse un préjudice si les nouveaux arguments sont étudiés?

(iii) Le dossier révèle‑t‑il tous les faits à l’origine des nouveaux arguments?

(iv) Les nouveaux arguments sont‑ils apparentés à ceux au regard desquels fut accordée l’autorisation?

(v) Quelle est la force apparente des nouveaux arguments?

(vi) Le fait de permettre que les nouveaux arguments soient invoqués retardera‑t‑il indûment l’audition de la demande?

[27]           Si l’on applique ces facteurs, les faits intéressant les nouveaux arguments étaient connus au moment du dépôt de la demande d’autorisation. Ce facteur milite contre le demandeur. Cependant, les autres facteurs lui sont favorables. Bien que le défendeur se soit inquiété du préjudice découlant de la présentation tardive de ces arguments, son avocat a abordé la question avec beaucoup de compétence lors des plaidoiries, de telle sorte que l’audition de la présente affaire n’a pas été retardée. Le dossier divulguait tous les faits pertinents au regard des nouveaux arguments, qui me semblent inextricablement liés aux autres motifs examinés par la Cour. Enfin, comme je l’explique plus en détail ci-après, j’estime que la position du demandeur selon laquelle la conclusion de la SPR concernant Port Harcourt a été remise en question, était fondée.

[28]           Par conséquent, j’examinerai l’argument du demandeur en vertu de mon pouvoir discrétionnaire.

[29]           Lors des plaidoiries, l’avocat du demandeur a renvoyé la Cour au paragraphe 34 de son affidavit déposé devant la SAR, qui indique :

[traduction
34.       Est jointe et versée en pièce « C » une copie conforme d’une coupure de presse (Givology – Reuters Edition) confirmant que Boko Haram investit Lagos, Ogun, État de Rivers au Nigeria, ce qui correspond à Port Harcourt. [Non souligné dans l’original.]

[30]           Je relève également dans le dossier de demande du demandeur que le mémoire déposé par son avocat à l’appui de l’appel interjeté devant la SAR inclut une observation d’après laquelle le tribunal a commis une erreur en concluant qu’il n’y avait pas de membre de Boko Haram dans le sud du Nigeria, ce qui contredit la preuve documentaire, ainsi que les mentions dans l’affidavit du demandeur, notamment au paragraphe 34.

[31]           Il m’apparaît donc que les documents soumis par le demandeur contestaient devant la SAR la conclusion de la SPR selon laquelle Port Harcourt était une PRI viable. Cependant, même si elle a estimé que la question ne faisait pas débat en l’absence d’observations concernant Port Harcourt comme PRI viable, la SAR s’est néanmoins demandé à titre subsidiaire si la SPR avait tiré des conclusions erronées sur la PRI à l’égard de Lagos et Port Harcourt. À mon avis, la SAR ne s’est pas trompée en concluant que la SPR n’avait pas commis d’erreur manifeste en estimant qu’il serait raisonnable et sûr pour le demandeur de vivre à Lagos et à Port Harcourt. La SAR s’est référée à la preuve que la SPR avait considérée, notamment le CNP, de même que la taille des PRI proposées et les distances qu’elles supposaient; elle a conclu que la SPR avait dûment tenu compte de l’ensemble de la preuve qui lui avait été soumise et qu’elle avait effectué une analyse approfondie en appliquant les deux volets du critère relatif à la PRI avant de parvenir à sa conclusion.

[32]           Ce faisant, la SAR note que le demandeur a tenté d’invoquer de nouveaux éléments de preuve relatifs à la ville de Lagos, mais que ceux-ci ont été jugés inadmissibles parce qu’ils étaient normalement accessibles au moment de l’audience devant la SPR. Il s’agit de l’élément de preuve susmentionné, joint en pièce « C » à l’affidavit du demandeur. Je me suis donc demandé si la Cour doit examiner la décision de la SAR de ne pas admettre cet élément de preuve à la lumière de la décision Singh, qui remettait en question l’application par la SAR des critères de l’arrêt Raza. Cependant, comme l’a noté la SAR dans sa décision, cet élément de preuve particulier ne satisfaisait pas au critère prévu par la loi parce qu’il était normalement accessible au moment de l’audience devant la SPR. Lorsqu’elle a refusé de l’admettre, la SAR s’est uniquement appuyée sur l’analyse prévue par la loi, sans appliquer les facteurs de l’arrêt Raza. Je ne vois donc aucune raison de conclure que la décision de la SAR sur ce point est déraisonnable.

[33]           Comme l’a indiqué la Cour dans la décision Calderon c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 263, au paragraphe 10, la conclusion suivant laquelle il existe une PRI viable est décisive à l’égard d’une demande d’asile :

[10]           La question de savoir s’il existe une PRI est décisive. Comme cela a été énoncé dans la décision Irshad, précitée, au paragraphe 21, le concept de PRI fait partie intégrante de la définition de réfugié au sens de la Convention. Pour être considéré comme un réfugié au sens de la Convention, une personne doit être un réfugié d’un pays et non d’une région d’un pays. Par conséquent, lorsqu’il est conclu à l’existence d’une PRI, un revendicateur n’est pas un réfugié ou une personne à protéger (voir Sarker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 353; [2005] A.C.F. no 435).

[34]           Par conséquent, s’agissant des deux autres questions, soit la preuve liée au traitement du certificat de décès et de l’affiche, j’examinerai d’abord s’il est possible que l’issue de ces questions puisse avoir un impact sur les conclusions relatives à la PRI.

B.                 La SAR a-t-elle commis une erreur dans son traitement de la preuve se rapportant au décès de l’épouse du demandeur?

[35]           Je me dois d’aborder cette question, car s’il devait être admis et tenu pour confirmer l’allégation du demandeur selon laquelle son épouse a été assassinée par des militants de Boko Haram à Lagos, cet élément de preuve peut avoir un impact sur la conclusion selon laquelle cette ville constitue une PRI viable. La question de savoir s’il aura aussi une incidence sur la conclusion concernant Port Harcourt est moins claire. Cependant, si la conclusion selon laquelle le demandeur serait en sécurité à Lagos devait être réexaminée compte tenu de la preuve relative au décès de l’épouse, son allégation selon laquelle il ne serait à l’abri nulle part au Nigeria devrait à tout le moins être reconsidérée.

[36]           Comme je l’ai noté plus haut, la SAR a appliqué le critère établi dans l’arrêt Raza qui se rapporte aux nouveaux éléments de preuve soumis dans le contexte d’un ERAR. Dans la décision Singh, la juge Gagné a estimé qu’il est déraisonnable de la part de la SAR d’appliquer l’arrêt Raza en perdant de vue que son rôle est bien différent de celui d’un agent d’ERAR et que les facteurs de l’arrêt Raza, élaborés dans le contexte de l’alinéa 113a) de la LIPR, ne sont pas directement applicables au paragraphe 110(4). L’analyse de la juge Gagné se trouve aux paragraphes 55 à 58 de la décision Singh :

[55]      Par conséquent, pour qu’il y ait un « véritable appel fondé sur les faits » devant la SAR, les critères d’admissibilité des éléments de preuve doivent être assez souples pour que cet appel puisse avoir lieu. Dans bien des cas, les éléments de preuve en cause seront essentiels pour établir le fondement factuel des erreurs que la SPR aurait commises, selon le demandeur. Cette considération devient d’autant plus pertinente eu égard aux délais stricts auxquels doit se conformer le demandeur pour présenter des éléments de preuve à la SPR. Le demandeur doit désormais présenter tous les documents dans les 50 jours suivant la date où il a fait sa demande. Auparavant, la loi prévoyait la présentation des documents requis 20 jours avant l’audience, ce qui donnait généralement un plus délai beaucoup plus long. Lorsque la SPR souligne dans une décision la faiblesse de la preuve du demandeur, la SAR devrait avoir, si elle examine ultérieurement cette décision, une certaine latitude pour permettre au demandeur de pallier les lacunes soulevées.

[56]      Ce n’est pas tout. Dans l’arrêt Raza, la juge Sharlow établit une distinction entre les questions posées explicitement par l’alinéa 113a) de la Loi et celles qui résultent implicitement de cet alinéa. Elle énonce clairement que ces dernières questions, qui concernent la crédibilité, la pertinence, la nouveauté et le caractère substantiel, sont liées à l’objectif que vise l’alinéa 113a), dans le cadre du régime établi par la Loi à l’égard des demandes d’asile et des ERAR. À mon avis, il faut y répondre dans ce contexte particulier et il n’est pas possible d’y répondre dans le contexte d’un appel devant la SAR.

[57]      Bref, j’estime qu’il n’était pas raisonnable de la part de la SAR d’appliquer de façon stricte les critères établis dans l’arrêt Raza au moment d’interpréter le paragraphe 110(4) de la Loi tout en ne comprenant pas que son rôle diffère sensiblement de celui d’un agent d’ERAR.

[58]      Pour veiller à la cohérence de la loi, dans la mesure où la SAR peut entendre un appel portant sur des questions de fait et des questions mixtes de fait et de droit, la principale question est de savoir si les éléments de preuve « n’étaient [...] pas normalement [ou raisonnablement selon la version anglaise] accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés ».

[37]           J’ai également tenu compte de l’analyse du juge Mosley, exposée aux paragraphes 40 à 44 de la décision Denbel :

[40]      La SAR avait le droit d’utiliser les facteurs énoncés dans l’arrêt Raza, établis pour les ERAR, lorsqu’elle a appliqué la règle régissant les nouveaux éléments de preuve énoncée au paragraphe 110(4). Dans la décision Iyamuremye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 494, au paragraphe 45, le juge Shore s’est exprimé en ces termes :

Considérant la pénurie de jurisprudence interprétant le paragraphe 110(4) et vu la similitude essentielle des dispositions en question, la Cour ne considère pas qu’il était déraisonnable de la SAR de référer aux facteurs énoncés dans l’affaire Raza, ci-dessus, pour analyser l’admissibilité de nouveaux éléments de preuve. Cette jurisprudence a établi un sens juridique d’application générale aux mots « preuve nouvelle », qui, à l’avis de la Cour, s’harmonise avec l’intention claire du législateur quant au paragraphe 110(4) d’obliger la SAR de réviser la décision de la SPR telle quelle, à moins que des preuves nouvelles, crédibles et pertinentes soient survenues depuis le rejet, qui auraient pu conduire la SPR à statuer autrement si elle en avait eu connaissance.

[Non souligné dans l’original]

[41]      De plus, la SAR s’est appuyée sur les termes exprès du paragraphe 29(4) des Règles pour exclure les nouveaux éléments de preuve présentés après le dépôt du dossier d’appel. Cette règle énumère explicitement certains facteurs de l’arrêt Raza.

[42]      Dans la décision Khachatourian, précitée, au paragraphe 37, le juge Simon Noël exprime ses réserves quant à l’opportunité d’appliquer l’arrêt Raza dans le contexte de la SAR. Il se reporte à l’analyse effectuée par la juge Gagné dans la décision Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 1022, aux paragraphes 44 à 58. Là encore, sans vouloir lui manquer de respect, je suis en désaccord. Comme l’a souligné le juge Shore dans la décision Iyamuremye, le libellé du paragraphe 110(4) et de l’alinéa 113a) est presque identique. Compte tenu de la structure générale de ces dispositions, je n’accorde aucune importance à la légère différence dans la version française (« qu’elle n’aurait pas normalement présentés » comparativement à « qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés »).

[43]      Lorsqu’elle interprète l’intention du législateur, la Cour doit accorder la priorité au texte écrit en l’absence de toute ambiguïté lexicale. Ni les opinions de la Cour sur les meilleures politiques ni des passages tirés du hansard ne peuvent l’emporter sur le texte de la loi. À mon avis, le législateur voulait que, dans ces deux dispositions législatives, le même critère juridique soit consacré. Si le législateur avait eu l’intention d’établir des règles d’admissibilité plus souples dans le cadre des appels interjetés devant la SAR, il n’aurait pas reproduit le libellé restrictif régissant les ERAR.

[44]      Je conclus que la SAR a raisonnablement exclu les éléments de preuve en cause pour les motifs qu’elle a exposés. La demanderesse a insisté sur le fait que la SAR avait exclu la lettre de son fils en application du paragraphe 29(4) des Règles. J’estime que la SAR a raisonnablement exclu cette lettre, car elle était peu pertinente et avait peu de valeur probante. Elle a également fait part de ses préoccupations raisonnables quant à la possibilité que cette lettre ait pu être disponible plus tôt.

[38]           Le juge Locke a récemment examiné ces précédents assez divergents dans la décision Niyas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 878, et indiqué, au paragraphe 27, qu’ils semblent avoir été conciliés dans la décision rendue par la juge Kane dans la décision Ching c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 725 :

[27]      Comme les juges Gagné et Noël, je suis d’avis que la création de la SAR avait pour objet d’offrir un « véritable appel fondé sur les faits ». Toutefois, il est également vrai que le libellé de l’alinéa 113a) et du paragraphe 110(4) de la LIPR « est presque identique ». Je suis conscient du fait que [traduction] « lorsque les termes d’une loi ont fait l’objet d’une interprétation prétorienne et que le législateur les reprend sans les modifier [...], on doit considérer que le législateur les utilise dans le sens dans lequel ils ont été interprétés par les tribunaux » : Elmer A. Driedger, Construction of Statutes, 2e éd., Toronto, Butterworths, 1983, à la page 125. La décision de la juge Kane dans l’affaire Ching (au paragraphe 58) semble rapprocher ces deux positions : « Si [la SAR] décide de s’inspirer de l’arrêt Raza, étant donné le libellé analogue des dispositions concernées de la Loi, elle devra se demander comment il convient d’adapter le critère de cet arrêt au contexte d’un appel portant sur des questions bien précises. » En conséquence, les facteurs de l’arrêt Raza offrent des éléments d’orientation utiles qui devraient toutefois permettre de favoriser le droit du demandeur à un « appel véritable fondé sur les faits ».

[39]           Je conclus, en me laissant guider par ce précédent, que l’application par la SAR des facteurs de l’arrêt Raza à la nouvelle preuve relative au décès de l’épouse du demandeur était raisonnable. En examinant cette preuve à la lumière des facteurs établis dans l’arrêt Raza, la SAR a conclu qu’elle n’était pas crédible. Même si elle n’avait pas pris en compte l’arrêt Raza, la SAR aurait été tenue de considérer la crédibilité de la preuve avant d’envisager son impact sur l’appel du demandeur. Il n’y avait donc pas de contradiction entre l’application par la SAR des facteurs de l’arrêt Raza et le droit du demandeur à un véritable appel fondé sur les faits.

[40]           Cependant, la Cour doit encore se demander si la SAR a commis une erreur dans son évaluation de la crédibilité du certificat de décès, comme le soutient le demandeur. À cet égard, je ne souscris pas à son argument voulant que le CND indique qu’un parent biologique peut obtenir un certificat de décès de la Commission nationale de la population sans fournir un certificat de l’hôpital où le défunt est décédé. L’extrait pertinent du CND se lit ainsi :

Sur son site Internet, la Commission nationale de la population (National Population Commission - NPC) du Nigéria explique que la Division de l’enregistrement des évènements vitaux (Vital Registration Division) a notamment pour fonctions de [traduction] « concevoir, fabriquer et délivrer les actes de naissance et de décès » (Nigéria s.d.). Or, un conseiller au haut-commissariat auxiliaire du Canada au Nigéria à Lagos a mentionné, dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, qu’il est rare que la NPC délivre des actes de décès, car la plupart des personnes n’en voient pas l’utilité (Canada 25 févr. 2011). Néanmoins, toute personne désirant obtenir un acte de décès de la part de la NPC doit présenter un acte de décès délivré par l’hôpital où la personne est décédée, un formulaire de demande ainsi qu’une preuve qu’elle est liée par le sang au défunt (ibid.).

Le conseiller a aussi expliqué que, si la personne qui demande l’acte de décès est chrétienne, elle devra faire certifier le décès par un médecin hospitalier de sorte que le corps puisse être [traduction] « envoyé dans un dépôt mortuaire » (ibid.). D’après lui, il n’est pas nécessaire que la personne soit décédée à l’hôpital où l’acte de décès est délivré (ibid.). De plus, tout acte de décès délivré par un hôpital a qualité de document juridique (ibid.).

Lors d’un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, le premier secrétaire du haut-commissariat du Nigéria à Ottawa a fourni des renseignements assez similaires, expliquant que les hôpitaux délivrent des actes de décès et en informent la NPC (Nigéria 23 févr. 2011). L’obtention d’un acte de décès requiert la présentation d’un rapport de médecin attestant le décès de la personne (ibid.). Selon le premier secrétaire, les frais encourus pour l’acte de décès [traduction] « varient selon l’hôpital » (ibid.). Parmi les sources qu’elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n’a trouvé aucun renseignement sur le délai de traitement.

Le premier secrétaire a précisé que la femme, le mari, les enfants ou les frères et sœurs d’une personne décédée peuvent demander un acte de décès (ibid.). Le conseiller a fourni ce même renseignement, mentionnant qu’en fournissant la preuve de leur identité, les enfants biologiques et les personnes qui ont des liens de sang avec le défunt peuvent présenter une demande d’acte de décès (Canada 25 févr. 2011). Le conseiller a aussi ajouté que le [traduction] « membre de la famille peut parfois être une personne désignée pour représenter la famille pour un motif lié à la capacité de lire et d’écrire ou aux moyens financiers » (ibid.).

[Non souligné dans l’original.]

[41]           Je comprends la preuve contenue dans le CND de la même manière que la SAR, c’est‑à‑dire que ce sont les parents biologiques (ou dans certains cas leurs représentants) qui peuvent obtenir un certificat de décès de la NPC, mais qu’ils doivent pour cela présenter un certificat de l’hôpital où la personne est décédée. Je ne peux rien reprocher à l’interprétation de la preuve du CND par la SAR.

[42]           Je ne trouve pas non plus déraisonnable que la SAR ait tenu compte de la preuve selon laquelle il est possible de se procurer pratiquement n’importe quel document falsifié à Benin City. Le demandeur soutient dans son mémoire des arguments que le certificat de décès n’a pas été délivré dans cette ville. Cependant, s’il était faux, il est évident que ce document n’indiquerait pas nécessairement où il a réellement été produit.

[43]           Dans l’ensemble, les conclusions de la SAR concernant la crédibilité du certificat de décès sont intelligibles et appartiennent aux issues acceptables, et sont donc raisonnables.

C.                 La SAR a-t-elle commis une erreur dans son traitement de la preuve concernant l’affiche et la brochure de la rencontre de prière?

[44]           L’avocat du demandeur a fait valoir que la SAR a tiré des conclusions erronées à l’égard de la brochure et de l’affiche, et que ses conclusions relatives à la PRI auraient pu être différentes si elle n’avait pas commis ces erreurs. La décision de la SPR atteste que le demandeur a soutenu devant elle qu’il ne serait en sécurité nulle part au Nigeria, car la brochure et l’affiche, qui contenaient une photo de lui, avaient été largement diffusées dans tout le pays. Par conséquent, même si les conclusions de la SAR concernant l’affiche intéressaient principalement la crédibilité du demandeur, j’ai examiné la question de savoir si la SAR a commis une erreur dans son traitement de cet élément de preuve puisque cette éventualité aurait pu influencer les conclusions liées à la PRI.

[45]           Le demandeur soutient que la SPR et la SAR n’ont pas réalisé que l’affiche, qu’il n’avait pas produite à l’audience de la SPR, n’est qu’une plus grande version de la brochure qu’il avait soumise. J’ai examiné les deux décisions et n’ai relevé aucune erreur susceptible de contrôle de la part de la SAR sur ce point. Je note que la SPR a employé les termes « affiche », [traduction« dépliant » et « brochure » pour désigner les documents se rapportant au sommet de la prière. Le demandeur insiste sur le fait qu’il n’existe que deux documents, l’un plus grand que l’autre. La SPR mentionne le [traduction] « dépliant [et l’]affiche » et n’a pas jugé crédible que le demandeur n’ait pas pu en fournir une copie, puisqu’il avait déclaré durant son témoignage qu’ils avaient été distribués dans tout le Nigeria. Il n’est pas tout à fait clair à la lecture de la décision de la SPR si elle employait de manière interchangeable les termes [traduction] « dépliant » et « affiche » pour désigner le document de plus grande taille, ou si elle a compris qu’il s’agissait de deux documents distincts.

[46]           Cependant, j’estime que cette question est sans conséquence, puisque la SPR a bien compris que le demandeur avait déposé une copie de la brochure concernant la rencontre de prière, et que ce document contenait une photo de lui, ainsi que son nom et le titre « chef de prière ». La SPR évaluait la crédibilité du demandeur d’après le fait qu’il n’avait pas été en mesure de fournir l’affiche, alors qu’elle était censée avoir été distribuée à grande échelle et ressembler au dépliant.

[47]           Il appert également que la SAR a compris l’argument du demandeur selon lequel l’affiche et la brochure étaient simplement deux versions de tailles différentes du même document. La SAR a décrit la prétendue erreur qu’elle était priée de considérer comme « [le fait d’estimer] que l’appelant aurait dû conserver une copie de l’affiche faisant la promotion de la croisade et [de ne pas accepter] l’explication selon laquelle l’affiche n’est pas différente de la brochure ». La SAR conclut donc que la SPR n’a commis aucune erreur manifeste et dominante en estimant que si les affiches avaient été diffusées dans tout le Nigeria comme le prétendait le demandeur, ce dernier aurait pu en soumettre une copie à la SPR. La manière dont la SAR a traité cette question ne trahit pas un malentendu concernant la preuve et je ne relève aucune erreur susceptible de contrôle dans sa décision de ne pas revenir sur les conclusions de la SPR sur ce point.

[48]           Je ne relève donc aucune erreur de la part de la SAR en l’espèce, et je dois par conséquent rejeter la présente demande. Aucune des parties n’a demandé qu’une question soit certifiée aux fins d’appel.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question n’est certifiée aux fins d’appel.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice-conseil


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6525-14

INTITULÉ :

JOHN TAIWO OLUWOLE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

le 22 juillet 2015

JUGEMENT ET MOTIFS :

le juge southcott

DATE DES MOTIFS :

LE 14 août 2015

COMPARUTIONS :

Mercy Dadepo

POUR LE demandeur

Nicholas Dodokin

POUR LE défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mercy Dadepo

Avocat

Toronto (Ontario)

POUR LE demandeur

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE défendeur

 

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