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Date : 20150713


Dossier : IMM-2730-14

Référence : 2015 CF 854

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 13 juillet 2015

En présence de madame la juge Gleason

ENTRE :

DICK PATRICK MUHENDA

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur sollicite l’annulation de la décision en date du 31 mars 2014 par laquelle une agente de Citoyenneté et Immigration Canada [CIC] a rejeté la demande de résidence permanente présentée par le demandeur au titre de la catégorie de l’époux ou du conjoint de fait au Canada.

I.                   Le contexte

[2]               Le demandeur est un citoyen du Rwanda d’origine tutsie. Il est arrivé au Canada le 7 mai 2000 et, dès son arrivée, a demandé l’asile. Le 2 mai 2001, la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés [la SPR] a rejeté la demande d’asile, ayant conclu que le demandeur manquait de crédibilité en ce qui a trait aux incidents de persécution qu’il soutenait avoir subis et aux risques auxquels il serait prétendument exposé s’il retournait au Rwanda. Toutefois, la SPR a accepté que le demandeur avait établi son identité, à savoir Dick Patrick Muhenda, sur la base du témoignage d’une personne qui a confirmé l’identité du demandeur et a affirmé qu’ils avaient fréquenté l’école primaire ensemble au Rwanda. Le demandeur n’a pas demandé le contrôle judiciaire de cette décision de la SPR.

[3]               Le 23 juin 2001, le demandeur a épousé une citoyenne canadienne et ensuite, le 23 août 2001, il a présenté une demande de résidence permanente à titre d’époux de cette dernière, en faisant valoir des motifs d’ordre humanitaire pour être autorisé à présenter sa demande à partir du Canada. Sa demande a été approuvée en principe le 21 février 2002. Par la suite, son dossier devait faire l’objet d’une enquête de sécurité.

[4]               Le Service canadien du renseignement de sécurité [le SCRS] et l’Unité des crimes de guerre de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] ont enquêté sur le demandeur. Il a d’abord été reçu en entrevue par des agents du SCRS en 2002. Durant cette entrevue, le demandeur a reconnu avoir fait de fausses déclarations dans sa demande d’asile et sa demande de résidence permanente en écrivant qu’il avait fréquenté l’école secondaire et l’université en Tanzanie. Il a également reconnu avoir fait ces fausses déclarations dans le but de cacher le fait qu’il se trouvait en Ouganda durant la période précédant le génocide au Rwanda.

[5]               Dans toute la documentation subséquente que le demandeur a présentée à l’appui de sa demande de résidence permanente, il n’a pas répété les fausses déclarations concernant sa présence en Tanzanie, mais a plutôt signalé qu’il avait fréquenté l’école secondaire et l’université en Ouganda, en soutenant avoir fréquenté le St-Leo’s College à Fort Portal, en Ouganda, et ensuite la Makarere University à Kampala, en Ouganda.

[6]               En juillet 2012, l’ASFC a achevé son enquête de sécurité et informé l’avocat du demandeur que l’Unité des crimes de guerre avait décidé de ne pas intervenir dans le dossier du demandeur étant donné que les renseignements ne permettaient pas d’établir qu’il était coupable d’un crime de guerre; et que l’ASFC n’avait pas de doutes concernant l’admissibilité du demandeur suivant l’article 34 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR]. L’article 34 expose les divers motifs de sécurité suivant lesquels un étranger peut être déclaré interdit de territoire au Canada; un de ces motifs est le fait de s’être livré à un acte d’espionnage.

[7]               L’Unité des crimes de guerre de l’ASFC a également écrit une note de service à CIC en juillet 2012. Dans cette note de service, l’Unité a conclu que les renseignements ne permettaient pas d’établir que le demandeur avait commis un crime de guerre. Dans la note, l’Unité des crimes de guerre a ajouté que le demandeur avait produit des certificats de police, des empreintes digitales et des copies de ses diplômes; que l’ASFC avait conclu, sur la base d’une vérification par empreintes digitales, que rien ne donnait à penser que le demandeur avait commis un crime; qu’il n’y avait pas de motif de mettre en doute la validité des certificats de police de l’Ouganda et du Rwanda; et que les diplômes déposés par le demandeur étaient authentiques. Selon les diplômes, il s’appelle « Patrick Agaba Muhenda » ou « Muhenda Patrick Agaba ».

[8]               Par la suite, CIC a repris son examen du dossier du demandeur et, en janvier 2013, dans le cadre de cet examen, a demandé à l’ASFC de procéder à une mise à jour de l’autorisation de sécurité.

[9]               En janvier 2014, l’ASFC a communiqué à CIC un rapport d’interdiction de territoire, dans lequel elle signalait que la Division du filtrage de sécurité à l’échelle nationale avait achevé son évaluation et avait conclu qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que le demandeur était interdit de territoire au sens de l’alinéa 34(1)f) de la LIPR, soit en raison de son appartenance à une organisation qui s’est livrée à de l’espionnage contre une institution démocratique. Des passages du rapport d’interdiction de territoire ont été expurgés pour des motifs de sécurité nationale, suivant l’article 87 de la LIPR; toutefois, dans les sections non expurgées, il est signalé que le rapport a été préparé sur la base de renseignements obtenus auprès du SCRS et que ce dernier avait interrogé le demandeur au sujet de ses liens possibles avec le gouvernement rwandais, le Front patriotique rwandais [FPR] et le Service de renseignement du Rwanda. De plus, le rapport signale de manière détaillée les actes de subversion commis par le Service de renseignement du Rwanda à l’étranger, y compris au Canada.

[10]           J’ai examiné les passages expurgés du rapport ainsi que les autres documents versés au présent dossier ayant été expurgés suivant l’article 87 de la LIPR, et je ne pense pas que les renseignements expurgés aient une incidence sur les questions qu’il faut trancher en l’espèce. Par conséquent, il est possible de rendre une décision juste et appropriée sur la base du dossier dont dispose la Cour.

[11]           En février 2014, l’agente a tenu une entrevue avec le demandeur en vue de décider s’il était admissible à titre de résident permanent. Le demandeur était accompagné de son avocat à l’entrevue. À mi-chemin de l’entrevue, l’agente a demandé à l’avocat du demandeur de quitter la pièce, car elle estimait que l’avocat avait un comportement perturbateur et elle croyait qu’il faisait des signaux pour guider les réponses du demandeur. Pour le reste de l’entrevue, le demandeur était seul.

[12]           L’entrevue s’est déroulée en anglais étant donné que le demandeur parlait peu le français. La langue maternelle de l’agente est le français. Bien que l’agente ait réalisé l’entrevue en anglais, la plupart de ses notes d’entrevue et sa décision ont été rédigées en français. Le demandeur a déposé un affidavit de l’avocat qui l’a représenté à l’entrevue. Dans l’affidavit, cet avocat témoigne que l’anglais de l’agente était si mauvais qu’il était difficile de comprendre ses questions. Cette affirmation est contestée par l’agente, qui a déposé un affidavit détaillé dans lequel elle soutient que son questionnement du demandeur était clair et que ce dernier avait clairement compris les questions. Le demandeur a lui aussi déposé un affidavit dans lequel, même s’il ne soutient pas avoir été incapable de comprendre l’agente, il note que son avocat a soulevé des préoccupations concernant la maîtrise de l’anglais par l’agente à l’entrevue.

[13]           À l’entrevue, l’agente a demandé au demandeur s’il faisait partie de l’armée rwandaise à l’époque du génocide au Rwanda et s’il avait agi à titre d’espion pour le gouvernement rwandais. Selon les notes de l’agente, l’échange suivant est survenu vers la fin de l’entrevue :

[traduction]

20- Nous avons reçu de l’information selon laquelle vous faisiez partie de l’armée en Ouganda à l’époque du génocide au Rwanda.

Pas vrai; jamais.

21- Nous avons aussi reçu de l’information selon laquelle vous travaillez pour le gouvernement rwandais, à titre d’espion chargé de dénoncer les gens qui n’appuient pas Kagame.

Pas vrai; jamais.

22- Êtes-vous au fait que de nombreux Rwandais qui vivent en Ouganda étaient ou sont des partisans du Front patriotique rwandais, le parti politique du président Paul Kagame, en 1994?

Je suis au fait.

  Et votre famille?

Ne sont pas des partisans.

II.                La décision

[14]           Dans sa décision en date du 31 mars 2014, l’agente a refusé la demande de résidence permanente, ayant conclu que le demandeur était interdit de territoire pour fausses déclarations au sens de l’article 40 de la LIPR; elle a également conclu que le demandeur n’avait pas établi qu’il n’était pas interdit de territoire pour avoir commis un acte visé à l’article 35 de la LIPR.

[15]           Suivant l’article 40 de la LIPR (plus particulièrement l’alinéa 40(1)a)), un étranger est interdit de territoire pour fausses déclarations s’il fait, directement ou indirectement, une présentation erronée sur un fait important, ou une réticence sur ce fait, « ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur » dans l’application de la LIPR. L’article 35 de la LIPR établit les motifs de l’interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux, y compris la perpétration de crimes de guerre. Ces dispositions, ainsi que l’article 34 de la LIPR, sont reproduites dans l’Annexe jointe aux présents motifs.

[16]           En ce qui a trait aux fausses déclarations, l’agente a noté dans la décision contestée que le demandeur avait fait des déclarations discordantes concernant ses activités et les lieux où il se trouvait entre 1983 et 2000. Elle a également conclu qu’il n’y avait aucun autre élément de preuve se rapportant aux activités et aux lieux de séjour du demandeur entre janvier et juillet 1994, à part son affirmation selon laquelle il se trouvait en Ouganda. L’agente a conclu qu’il était possible que le demandeur tentait de cacher son implication dans le génocide rwandais durant cette période. Plus précisément, elle a tiré les conclusions suivantes :

                     le demandeur a fourni des renseignements discordants pour ce qui est de l’année où ses parents l’avaient envoyé faire ses études à Fort Portal en Ouganda, affirmant dans ses diverses demandes d’immigration ou durant les entrevues qu’il avait quitté le Rwanda en 1983, 1984 ou 1986;

                     le demandeur a fourni des renseignements discordants pour ce qui est de l’endroit où il habitait pendant qu’il fréquentait le St-Leo’s College en Ouganda – il a d’abord signalé qu’il retournait chez son oncle tous les week-ends, puis a affirmé qu’il restait avec son oncle sur le campus et qu’ils ne retournaient qu’occasionnellement à la maison de son oncle les week-ends;

                     le demandeur a menti dans sa demande d’asile et sa première demande de résidence permanente en affirmant avoir effectué ses études secondaires et universitaires entre 1987 et 1997 en Tanzanie, plutôt qu’en Ouganda;

                     une recherche Internet a permis de relever que l’école élémentaire que le demandeur soutenait avoir fréquentée de 1976 à 1982 au Rwanda, soit la Kigarama Public School, se trouve peut-être en fait en Ouganda, à environ 22 kilomètres de Fort Portal en Ouganda, car il y a une école portant ce nom à cet endroit. L’agente a constaté qu’il n’y avait aucun endroit au Rwanda appelé « Kigarama ». Selon l’agente, lorsqu’elle a signalé ce fait au demandeur et a noté qu’il était inhabituel qu’une école au Rwanda porte un nom anglais, le demandeur s’est contenté de répondre que les noms des établissements changeaient fréquemment au Rwanda à l’époque, en raison de la situation instable. Toutefois, le demandeur conteste cette affirmation et, dans son affidavit, soutient avoir dit à l’agente que l’école se trouve dans le district de Rusumo Kigarama dans l’ancienne province de l’Est du Rwanda;

                     l’allocation mensuelle de 7 000 que le demandeur soutient avoir reçue durant ses études universitaires à la Makarere University à Kampala en Ouganda de 1990 à 1994 et qu’il soutient avoir utilisée pour défrayer ses fréquents allers-retours entre Kampala et sa résidence permanente à Fort Portal en Ouganda, soit une distance d’environ 296 kilomètres, constituait une somme importante. L’agente a constaté que cette allocation, si elle était versée mensuellement, correspondait à peu près au salaire médian en Ouganda à l’époque. Elle a ensuite émis l’hypothèse que le demandeur bénéficiait par conséquent d’un soutien important de sa famille, qui était sans doute du nombre des familles les plus prospères en Ouganda et, par conséquent, vraisemblablement proches des gens au pouvoir. Dans son affidavit, le demandeur affirme avoir dit à l’agente que l’allocation était versée à tous les étudiants de l’université sur une base trimestrielle;

                     l’agente a également noté que le demandeur ne parle pas français, ce qui était à son avis inhabituel chez un Rwandais ayant fréquenté l’école élémentaire au Rwanda. Elle a également signalé que de nombreux hauts responsables tutsis ayant des liens avec le FPR, y compris le président actuel, Paul Kagame, sont soupçonnés d’avoir participé activement au génocide de leur base en Ouganda.

[17]           L’agente a conclu que les fausses déclarations du demandeur concernant le lieu où il se trouvait durant les décennies 1980 et 1990 auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR, car elle estimait que l’enquête de sécurité visant le demandeur avait été réalisée en tenant compte de sa déclaration selon laquelle il avait vécu en Tanzanie.

[18]           De plus, l’agente a signalé qu’il y avait plusieurs discordances se rapportant à l’identité du demandeur, à savoir :

                     le demandeur a présenté un passeport rwandais au nom de Dick Patrick Muhenda, selon lequel il est né au Rwanda en 1972;

                     toutefois, d’autres documents d’identité soumis à CIC étaient au nom de Patrick Agaba Muhenda et de Muhenda Patrick Agaba (deux diplômes universitaires de la University of Makerere en Uganda, selon lesquels il aurait reçu un baccalauréat en sciences dans les domaines de la botanique et de la zoologie le 8 août 1993 et le 21 janvier 1994, respectivement). En outre, selon un certificat en date de mars 1990 du St-Leo’s College Kyegobe à Fort Portal en Ouganda, le demandeur s’appelle Patrick Muhenda Agaba. Toutefois, le demandeur a soutenu que « Agaba » était un sobriquet;

                     à l’entrevue tenue le 26 février 2014, l’agente a montré au demandeur des documents trouvés sur Internet se rapportant à un dénommé Muhenda Patrick Agaba, qui semble être un diplômé universitaire récemment embauché par le Service national de conseil agricole en Ouganda. L’agente a demandé au demandeur s’il s’était servi des documents d’identité de cette personne et le demandeur a répondu qu’il ne savait pas quoi dire. L’agente a conclu qu’il n’avait pas nié s’être servi des documents et que sa réponse pouvait être interprétée comme étant un acquiescement tacite;

                     l’agente a également signalé le fait qu’à l’entrevue, le demandeur lui avait avoué avoir utilisé le pseudonyme Gashumba Damascewe pour entrer aux États-Unis. Il a soutenu que Gashumba Damascewe était un ami qui avait fourni ses documents d’identité au demandeur pour lui permettre de se rendre aux États-Unis, puis au Canada. Par la suite, après que l’avocat du demandeur est intervenu et a laissé entendre que son client avait mal compris, l’agente a reformulé ses questions et a obtenu des réponses différentes du demandeur — il avait utilisé son propre passeport pour entrer aux États-Unis. L’agente a signalé qu’à ce moment-là, l’avocat du demandeur s’est fâché et a adopté un comportement perturbateur, et qu’il a semblé mimer le geste de déchirer son passeport à l’intention de son client. Le demandeur a ensuite déclaré qu’il était arrivé aux États-Unis en utilisant son propre passeport, qu’il avait obtenu un visa américain du fait qu’il travaillait pour une organisation non gouvernementale, et qu’il avait détruit son propre passeport en vue de demander l’asile au Canada. (C’est à ce moment que l’agente a demandé à l’avocat du demandeur de quitter la salle d’entrevue.)

[19]           L’agente a conclu qu’elle n’était pas convaincue de l’identité du demandeur et croyait que plusieurs des documents qu’il avait soumis ne lui appartenaient pas. Elle a laissé entendre que le demandeur tentait de cacher son identité de façon à cacher ses activités dans les années 1980 et 1990. Elle a signalé qu’elle soupçonnait qu’il s’appelle en fait Dick Patrick Muhenda et que son passeport rwandais est authentique.

[20]           L’agente a également relevé des discordances se rapportant à la famille du demandeur, à savoir :

                     à l’entrevue avec l’agente, le demandeur a déclaré que son père s’appelait Stephen Nzabakirira, qu’il était né en 1942 et qu’il était mort durant le génocide rwandais. Le demandeur a ajouté que son père vivait à Kigali et qu’il avait une maison dans le district de Kicukiro et une autre dans le district de Gatsa. L’agente a montré au demandeur un article tiré du New Times Rwanda, signalant qu’un homme ainsi dénommé était mort en octobre 2008. Selon l’article, cet homme avait pour tâche d’administrer les bourses au St-Leo’s College Kyegobe (l’école que le demandeur a fréquentée en Ouganda), qui était lié au ministère des Finances et de la Planification économique de la République du Rwanda. Il semble que M. Nzabakirira ait travaillé au collège du milieu des années 1970 au milieu des années 1980, durant la période où le demandeur a prétendument fréquenté cette école. Le demandeur a laissé entendre que le fait que l’homme décrit dans l’article avait le même nom que son père était une coïncidence. L’agente a formulé la conjecture selon laquelle le demandeur tentait de cacher le fait que son père était un exilé rwandais en Ouganda qui avait des liens étroits avec le gouvernement rwandais et qui occupait une position importante parmi les Tutsis rwandais exilés vivant en Ouganda;

                     l’agente doutait du récit du demandeur pour ce qui est du moment où il a rencontré Christine Mukantaganda, la mère de son fils Julius Nduwayezu, et du moment où il a rencontré son épouse actuelle, Illuminée Murekatete;

                     le demandeur a affirmé avoir rencontré Christine Mukantaganda en 1995 en Ouganda et a soutenu n’avoir appris que récemment qu’il avait un fils né d’elle, par l’entremise de son ami Danson Kagire. Toutefois, d’après la page Facebook de Julius, il est né à Kigali au Rwanda, et non en Ouganda;

                     le demandeur affirme avoir rencontré son épouse, qu’il avait connue dans son enfance, à Kigali au Rwanda en décembre 2014, à l’époque où il vivait en Ouganda. Selon le demandeur, il a pris l’autobus pour se rendre au Rwanda et l’a rencontrée là-bas. L’agente a noté que la situation en matière de sécurité au Rwanda était extrêmement tendue en décembre 1993, à la suite de la ratification des accords d’Arusha. De l’avis de l’agente, il était douteux que le demandeur se soit rendu au Rwanda de l’Ouganda, étant donné la situation en matière de sécurité.

[21]           En somme, l’agente a signalé qu’il n’était pas possible d’établir où le demandeur avait vécu, à quelle époque et sous quel nom. Par conséquent, elle a conclu qu’elle avait des doutes au sujet de l’identité du demandeur, notamment en raison de sa fausse déclaration antérieure selon laquelle il avait fait des études en Tanzanie, et elle n’était donc pas en mesure de rendre une décision sur son admissibilité au Canada.

[22]           L’agente n’était pas convaincue que le demandeur avait démontré qu’il n’était pas interdit de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux, suivant l’article 35 de la LIPR. Elle a noté qu’il incombe au demandeur de démontrer qu’il n’est pas interdit de territoire; de plus, elle a formulé la conjecture selon laquelle le demandeur faisait partie d’une diaspora tutsie généralement prospère et instruite vivant en Ouganda et qu’il avait peut-être pris part au génocide rwandais.

III.             Les questions à trancher

[23]           Le demandeur soutient que la présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

1.                  L’agente a-t-elle commis une erreur de droit en concluant que le fardeau de la preuve incombait au demandeur?

2.                  L’agente a-t-elle manqué à la justice naturelle en omettant de mettre le demandeur face à la preuve extrinsèque qu’elle avait en sa possession?

3.                  L’agente a-t-elle fait des conjectures et agi de manière déraisonnable en formulant des affirmations fondées sur des généralisations et des stéréotypes sur les Rwandais vivant en Ouganda?

4.                  L’agente a-t-elle rendu une décision abusive sans égards aux événements historiques en déclarant que les exilés rwandais tutsis vivant en Ouganda avaient participé au génocide des Tutsis au Rwanda en 1994?

5.                  L’agente a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’aviser le demandeur du paragraphe de l’article 35 de la LIPR qu’il avait prétendument enfreint?

6.                   Le déroulement de l’entrevue a-t-il nui à l’issue de la décision?

[24]           À mon avis, il est possible de résumer et de reformuler ces questions comme suit :

1.                  L’agente a-t-elle enfreint les droits du demandeur en matière d’équité procédurale?

2.                   La décision de l’agente était-elle raisonnable?

IV.             L’agente a-t-elle enfreint les droits du demandeur en matière d’équité procédurale?

[25]           Le demandeur soutient que ses droits en matière d’équité procédurale ont été enfreints principalement pour trois motifs : premièrement, parce que l’agente n’a pas divulgué de manière adéquate les préoccupations de l’ASFC associées aux soupçons d’espionnage et aux liens possibles du demandeur avec le gouvernement rwandais, le FPR et le Service de renseignement du Rwanda; deuxièmement, parce que la mauvaise maîtrise de la langue anglaise par l’agente s’est avérée un obstacle à une communication efficace durant l’entrevue; et, enfin, parce que l’agente n’aurait pas dû demander à l’ancien avocat du demandeur de sortir de la salle à mi‑chemin de l’entrevue.

[26]           À mon avis, le demandeur n’a pas démontré qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale, n’ayant établi aucun des trois motifs.

[27]           Pour ce qui est de la divulgation inadéquate de la preuve liée aux préoccupations de l’ASFC, la décision de l’agente n’était pas fondée sur l’article 34 de la LIPR. Si elle l’avait été, je conviendrais avec le demandeur que ses droits à l’équité procédurale avaient été enfreints, car la divulgation minimale de la part de l’agente, au terme de l’entrevue, concernant les soupçons d’espionnage et les liens possibles du demandeur avec le gouvernement rwandais, le FPR et le Service de renseignement du Rwanda est bien en-deça d’une communication adéquate des questions soulevées dans le rapport d’interdiction de territoire de l’ASFC. Toutefois, du fait que l’agente n’a pas fondé sa décision sur les questions soulevées par l’ASFC suivant l’article 34 de la LIPR, je ne pense pas que les droits du demandeur à l’équité procédurale aient été enfreints.

[28]           En ce qui a trait à la maîtrise de la langue anglaise par l’agente, étant donné que les affidavits se contredisent, je conclus que le demandeur n’a pas démontré que la compétence linguistique de l’agente en anglais ait fait en sorte que l’entrevue n’était pas équitable. À cet égard, je souscris à l’avis du défendeur selon lequel le fait que, dans son affidavit, le demandeur ne soutient pas ne pas avoir compris les questions abordées durant l’entrevue est déterminant; par conséquent, je conclus que cet argument ne tient pas non plus.

[29]           Enfin, en ce qui concerne la décision d’exclure l’avocat du demandeur de la salle d’entrevue, la preuve à ma disposition est encore une fois contradictoire. D’un côté, l’agente affirme que l’avocat du demandeur s’est mis à agir de manière perturbatrice et tentait de suggérer des réponses à son client à l’aide de gestes, si bien qu’elle lui a demandé de sortir. De l’autre côté, l’ancien avocat du demandeur et le demandeur affirment que l’avocat était intervenu pour signaler des lacunes dans l’anglais de l’agente, si bien que l’agente s’est fâchée et a demandé à l’avocat de sortir de la salle.

[30]           Je suis d’avis que, peu importe la version des événements, l’exclusion de l’avocat ne constituait pas une atteinte aux droits du demandeur en matière d’équité procédurale, car le rôle de l’avocat à l’entrevue se limitait à celui d’agir comme observateur. De plus, l’exclusion de l’avocat est survenue vers la fin de l’entrevue, d’après les notes de l’agente. Par conséquent, je ne pense pas que cette exclusion ait compromis le caractère équitable de l’entrevue ou ait constitué une atteinte aux droits du demandeur en matière d’équité procédurale.

[31]           Il s’ensuit que le premier motif soulevé par le demandeur doit être rejeté.

V.                La décision de l’agente était-elle raisonnable?

[32]           En ce qui a trait au bien-fondé de la décision de l’agente, la norme applicable au contrôle judiciaire est celle de la décision raisonnable, car le litige porte essentiellement sur des conclusions de fait : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir], aux paragraphes 51 et 53; Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 RCS 559, au paragraphe 50; Khoja c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 142, 362 FTR 118, au paragraphe 52; Hameed c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 271, 324 FTR 109, au paragraphe 22.

[33]           La norme de la décision raisonnable est une norme déférente qui exclut l’intervention de la cour de révision lorsque les motifs de décision du tribunal administratif sont transparents, justifiés et intelligibles et que les conclusions appartiennent aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration)  c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339 [Khosa], au paragraphe 59).

[34]           En ce qui a trait aux conclusions de fait, lorsque ces conclusions contredisent la preuve à la disposition du décideur, elles sont déraisonnables étant donné qu’il n’est pas possible de les justifier (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35, [1998] ACF no 1425, aux paragraphes 14 à 17; Rahal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 319, [2012] ACF no 369 [Rahal], aux paragraphes 38 et 39). De même, les conclusions qui relèvent de la pure conjecture ou qui ne sont aucunement étayées par la preuve dont dispose le décideur peuvent aussi être écartées en raison de leur caractère déraisonnable : Khosa, au paragraphe 45; Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes c Healy, 2003 CAF 380, [2003] ACF no 1517, au paragraphe 25; Rahal, aux paragraphes 37 et 38.

[35]           En l’espèce, je conclus que la décision de l’agente est déraisonnable parce que, sur un point essentiel, elle contredit la preuve dont l’agente disposait et que, sur d’autres points, elle relève de la pure conjecture.

[36]           À cet égard, la décision de l’agente repose principalement sur sa conclusion selon laquelle le demandeur a fait de fausses déclarations qui emportent interdiction de territoire suivant l’article 40 de la LIPR. Pour qu’une fausse déclaration tombe sous le coup de cet article et entraîne l’interdiction de territoire, elle doit avoir trait à un fait important et elle doit avoir la possibilité d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR. L’agente a conclu que les fausses déclarations du demandeur concernant l’endroit où il se trouvait dans les années 1980 et 1990 auraient pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR parce que l’enquête de sécurité dont il a fait l’objet avait été réalisée en tenant compte de sa déclaration selon laquelle il avait vécu en Tanzanie. Toutefois, cette conclusion est totalement incompatible avec la preuve à la disposition de l’agente, car le demandeur avait révélé avoir menti au sujet de sa présence en Tanzanie lors de la première entrevue avec le SCRS en 2002. Par conséquent, la fausse déclaration au sujet de sa résidence en Tanzanie n’a eu aucune incidence sur l’enquête de sécurité, car elle a été corrigée bien avant que l’enquête ne soit achevée. Par conséquent, la fausse déclaration faite initialement par le demandeur ne suffit pas pour justifier la décision concernant l’interdiction de territoire, étant donné qu’elle n’a pas entraîné et n’aurait pas pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR. Il s’ensuit que la conclusion contraire de l’agente est déraisonnable, car elle n’est pas étayée par la preuve.

[37]           De plus, les conclusions de l’agente au sujet des liens probables du demandeur et de sa famille avec le FPR reposent sur de pures conjectures, fondées sur rien d’autre que des suppositions concernant les Rwandais d’origine tutsie supposément prospères faisant partie de la diaspora en Ouganda. En outre, ces conjectures sont contredites par les enquêtes de sécurité menées par l’Unité des crimes de guerre de l’ASFC, qui a conclu que la preuve ne permettait pas de conclure que le demandeur avait pris part au génocide (qui, de toute manière, comme le signale le demandeur avec raison, concernait principalement le massacre de Tutsis par des Hutus). En outre, la conclusion selon laquelle la famille du demandeur était prospère, reposant uniquement sur l’allocation qu’il touchait, relève de la pure conjecture.

[38]           De plus, l’agente a tiré des conclusions déraisonnables en se fondant uniquement sur des renseignements trouvés sur Internet. À mon avis, l’agente s’est livrée à une conjecture inappropriée en concluant que le demandeur avait menti au sujet de l’école qu’il avait fréquentée au Rwanda du simple fait qu’il existe en Ouganda une autre école portant un nom similaire. De même, du fait que l’économe du St-Leo’s College à Kyegobe en Ouganda avait peut-être le même nom que le père du demandeur, il ne s’ensuit pas que le demandeur a menti au sujet de sa filiation (particulièrement lorsque cette filiation est corroborée par le passeport et le certificat de naissance soumis par le demandeur à CIC). Dans la même veine, le fait de trouver sur Internet une autre personne dénommée Patrick Agaba Muhenda ne permet pas de conclure que les diplômes du demandeur sont nécessairement faux, d’autant plus que l’ASFC avait confirmé leur authenticité. De plus, l’agente a écarté de manière déraisonnable l’explication du demandeur selon laquelle « Agaba » était un sobriquet.

[39]           Je conclus également que la façon dont l’agente a traité le récit du demandeur concernant ses rencontres avec Christine Mukantaganda et Illuminée Murekatete était déraisonnable. Le fait que le fils de Mme Mukantaganda est né au Rwanda n’est pas incompatible avec le fait que ses parents se sont rencontrés en Ouganda et le simple fait que la période qui a suivi les accords d’Arusha était mouvementée ne veut pas dire qu’il était impossible pour le demandeur de se rendre en autobus au Rwanda et d’y rencontrer Mme Murekatete, comme il le soutient.

[40]           Vu le manque d’éléments de preuve à l’appui de la conclusion clé de l’agente suivant l’article 40 de la LIPR et les multiples conjectures inappropriées que j’ai relevées dans la décision, il s’ensuit que la décision doit être annulée en raison de son caractère déraisonnable.

[41]           Aucune des parties n’a présenté de question à certifier suivant l’article 74 de la LIPR, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision de l’agente en date du 31 mars 2014 est annulée;

2.                  la demande de résidence permanente présentée par le demandeur est renvoyée à un autre agent de CIC pour nouvel examen;

3.                  aucune question de portée générale n’est certifiée en application de l’article 74 de la LIPR;

4.                  aucuns dépens ne sont adjugés.

« Mary J.L. Gleason »

Juge

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice-conseil


ANNEXE

Sécurité

34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

a) être l’auteur de tout acte d’espionnage dirigé contre le Canada ou contraire aux intérêts du Canada;

b) être l’instigateur ou l’auteur d’actes visant au renversement d’un gouvernement par la force;

b.1) se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s’entend au Canada;

c) se livrer au terrorisme;

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

e) être l’auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d’autrui au Canada;

f) être membre d’une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu’elle est, a été ou sera l’auteur d’un acte visé aux alinéas a), b), b.1) ou c).

Atteinte aux droits humains ou internationaux

35. (1) Emportent interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux les faits suivants :

a) commettre, hors du Canada, une des infractions visées aux articles 4 à 7 de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

b) occuper un poste de rang supérieur — au sens du règlement — au sein d’un gouvernement qui, de l’avis du ministre, se livre ou s’est livré au terrorisme, à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou commet ou a commis un génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à (5) de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre;

c) être, sauf s’agissant du résident permanent, une personne dont l’entrée ou le séjour au Canada est limité au titre d’une décision, d’une résolution ou d’une mesure d’une organisation internationale d’États ou une association d’États dont le Canada est membre et qui impose des sanctions à l’égard d’un pays contre lequel le Canada a imposé — ou s’est engagé à imposer — des sanctions de concert avec cette organisation ou association.

Fausses déclarations

40. (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi; […]

 

Security

34. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

(a) engaging in an act of espionage that is against Canada or that is contrary to Canada’s interests;

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

(b.1) engaging in an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

(c) engaging in terrorism;

(d) being a danger to the security of Canada;

(e) engaging in acts of violence that would or might endanger the lives or safety of persons in Canada; or

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b), (b.1) or (c).

Human or international rights violations

35. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of violating human or international rights for

(a) committing an act outside Canada that constitutes an offence referred to in sections 4 to 7 of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act;

(b) being a prescribed senior official in the service of a government that, in the opinion of the Minister, engages or has engaged in terrorism, systematic or gross human rights violations, or genocide, a war crime or a crime against humanity within the meaning of subsections 6(3) to (5) of the Crimes Against Humanity and War Crimes Act; or

(c) being a person, other than a permanent resident, whose entry into or stay in Canada is restricted pursuant to a decision, resolution or measure of an international organization of states or association of states, of which Canada is a member, that imposes sanctions on a country against which Canada has imposed or has agreed to impose sanctions in concert with that organization or association.

Misrepresentation

40. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act; […]


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DoSSIER :

IMM-2730-14

INTITULÉ :

DICK PATRICK MUHENDA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE:

Montréal (Québec)

(par vidéoconférence de Calgary, Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 avril 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

la juge GLEASON

 

DATE DES MOTIFS :

Le 13 juillet 2015

 

COMPARUTIONS :

Mitchell Goldberg

 

POUR Le demandeur

 

Patricia Nobl

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mitchell Goldberg

Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR Le demandeur

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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