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Date : 20151015

Dossier : T-1784-12

Référence : 2015 CF 1149

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 15 octobre 2015

En présence de monsieur le juge Zinn

demande d’autorisation de recours collectif

ENTRE :

LE CHEF EUGENE HORSEMAN ET

LA PREMIÈRE NATION DE HORSE LAKE

demandeurs

et

SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

ORDonnance MODIFIÉE ET MOTIFS

[1]               Les demandeurs cherchent à obtenir l’autorisation de l’action en l’espèce comme recours collectif en vertu de la partie 5.1 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106. L’article 334.16 des Règles énonce plusieurs conditions à satisfaire pour qu’une action soit autorisée comme recours collectif.

[2]               Pour les motifs qui suivent, les demandeurs n’ont pas convaincu la Cour qu’ils remplissaient toutes ces conditions obligatoires et par conséquent, l’action en l’espèce ne peut être autorisée comme recours collectif.

Le contexte

[3]               Entre 1871 et 1921, le Canada a négocié onze traités distincts [les Traités numérotés] avec diverses Premières nations. Ces traités englobent la totalité de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, des parties de la Colombie‑Britannique, du Yukon, des Territoires du Nord‑Ouest et de l’Ontario. Les traités accordaient d’importantes étendues de terre au Canada en échange de promesses faites par le Canada aux Premières nations. Après la conclusion des Traités numérotés, d’autres bandes y ont adhéré. L’adhésion la plus récente est celle de la Première nation de McLeod Lake qui a adhéré au Traité no 8 en 2000. Désormais, j’appellerai toutes les Premières nations signataires des traités les « bandes visées par les traités ».

[4]               Le Canada convenait, dans chacun des Traités numérotés, de verser une annuité à chaque membre de la bande visée par un traité et, dans plusieurs cas, une annuité supplémentaire ou supérieure aux chefs et aux dirigeants [les annuités]. Les dispositions pertinentes des Traités numérotés concernant ces annuités sont reproduites en annexe A.

[5]               En 1875, le montant des annuités prévues dans les Traités nos1 et 2 a été augmenté de 3 $ par personne à 5 $, et une allocation supplémentaire devait être payée aux chefs et aux dirigeants. Outre ces rajustements, les demandeurs allèguent que le Canada n’a jamais rajusté le montant des annuités prévues dans les Traités numérotés et, par conséquent, ils affirment que [traduction] « la valeur des annuités a diminué au point où ces versements ne contribuent plus au bien-être des bénéficiaires individuels. »

[6]               Les demandeurs soutiennent que les dispositions des Traités numérotés qui prévoient les annuités confèrent aux bénéficiaires le droit à un montant qui doit être rajusté tous les ans pour refléter l’inflation et les variations du pouvoir d’achat afin de conserver une valeur équivalente à son pouvoir d’achat au moment de la conclusion du traité. Ils soutiennent que le Canada a manqué à ses obligations en vertu des Traités numérotés et à ses obligations fiduciaires. Ils réclament donc des dommages‑intérêts et [traduction] « une indemnisation en equity d’un montant égal à la valeur actuelle des pertes subies par les bénéficiaires individuels » par suite de l’omission du Canada de rajuster les annuités au fil du temps, et ce, pour tous les membres du groupe.

[7]               Même si la réclamation présentée à l’égard de chaque membre individuel du groupe envisagé peut représenter un petit montant, le Canada a déposé un rapport d’expert qui estime que si les demandeurs avaient gain de cause dans ce recours collectif, l’obligation du Canada à l’égard des annuités passées s’élèverait à un ou deux milliards de dollars. Comme on l’a fait remarquer à l’audience, le montant dont le Canada peut être tenu de verser n’a aucune pertinence concernant la question de savoir si l’action en l’espèce peut être autorisée.

[8]               Les représentants proposés des demandeurs sont le chef Eugene Horseman [le chef] et la Première nation de Horse Lake [la PNHL]. Le chef est membre de la PNHL, laquelle a succédé aux Castors de Dunvegan, qui sont parmi les signataires du Traité no 8. Selon les modalités de ce traité, le chef a le droit de recevoir une annuité.

[9]               Les demandeurs proposent que le groupe soit défini comme suit : [traduction] « Toutes les personnes ayant le droit de recevoir des annuités en vertu des modalités de chacun des Traités numérotés. »

[10]           Dans le cas où la présente action est autorisée comme recours collectif, les demandeurs avancent les questions communes suivantes :

[traduction]

a.  Est-ce que chacune des dispositions des Traités numérotés, correctement interprétée, prévoit le droit de recevoir une annuité qui est rajustée annuellement pour tenir compte de l’inflation et des variations du pouvoir d’achat, en vue de conserver une valeur équivalente au pouvoir d’achat conféré au moment de la conclusion de chacun des Traités numérotés?

b.  Est-ce que Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord, a envers le groupe, relativement à l’administration des annuités en vertu des Traités numérotés, l’obligation fiduciaire de rajuster le montant des annuités de rente pour tenir compte des variations de l’inflation et pour protéger le pouvoir d’achat, en vue de conserver une valeur équivalente au pouvoir d’achat conféré au moment de la conclusion de chacun des Traités numérotés?

c.  La Couronne manque-t-elle de façon continue à ses obligations issues des traités en versant des annuités qui ne sont pas rajustées pour tenir compte de l’inflation et des variations du pouvoir d’achat?

d.  Le groupe devrait-il recevoir des dommages‑intérêts et une indemnité en equity par suite de l’omission de la défenderesse de rajuster les annuités pour prendre en compte les variations de l’inflation et du pouvoir d’achat et, si oui, quelle méthode doit être employée pour établir le montant?

[11]           Avant d’instituer la présente action, la PNHL a formulé une revendication auprès de la Direction générale des revendications particulières du ministère des Affaires indiennes et du Nord, par laquelle elle faisait valoir que les annuités dues au titre du Traité no 8 devaient être rajustées pour refléter les variations du pouvoir d’achat; il s’agit là de la réclamation même de la présente action. Le 17 décembre 2011, la Direction générale des revendications particulières a répondu que la demande ne pouvait pas être traitée, parce qu’elle alléguait une perte pour les membres individuels de la PNHL et non une perte pour la PNHL elle-même :

[traduction]
Après un examen minutieux, il a été décidé que la demande ne sera pas évaluée plus en profondeur selon la Politique sur les revendications particulières (la Politique), énoncée dans la Politique sur les revendications particulières et Guide sur le processus de règlement. Les allégations relatives à l’omission de la Couronne de verser des annuités à des personnes individuelles, si elles étaient prouvées, donneraient lieu à une perte individuelle pour ces personnes. Afin d’être évaluée en vertu de la Politique, une revendication doit être présentée par une Première nation qui a subi une perte découlant du grief allégué. Par conséquent, votre revendication n’a pas été présentée au ministre et ne sera pas examinée suivant le processus de règlement des revendications particulières […]

[12]           Après avoir entendu les observations des parties à l’égard de la présente requête en autorisation, les parties ont informé la Cour d’une décision récente du Tribunal des revendications particulières dans l’affaire Bande Beardy’s et Okemasis nos 96 et 97 c Sa Majesté la Reine du chef du Canada, 2015 TRPC 3 [Beardy’s]. La décision visait une réclamation découlant du fait que le Canada n’avait pas versé les annuités prévues par le Traité no 6 entre 1885 et 1888, dans la foulée de la Rébellion du Nord‑Ouest. Le Canada soutenait que le tribunal n’était pas compétent à l’égard de la réclamation, parce que les demandes d’annuités étaient de nature individuelle et non un droit de la collectivité.

[13]           Le tribunal a conclu, aux paragraphes 314 à 317, qu’il était bel et bien compétent parce que l’omission de payer les annuités était une perte pour la collectivité :

Le Traité n° 6 prévoit le versement de paiements annuels à toutes les générations futures des membres de la collectivité. Il ne pouvait s’agir d’une promesse faite aux enfants à naître. Ces derniers n’existent pas, du moins dans le sens matériel. C’est une promesse faite à la collectivité, formée de l’ensemble de ses membres, collectivement, telle qu’elle est composée, peu importe le moment.

Le droit au paiement prend fin quand le nom d’un membre est retiré de la liste de bande. Bien qu’une personne dont le nom ne figure plus sur la liste de bande puisse être un membre de facto de la communauté, elle n’est plus reconnue par le gouvernement comme un membre de la bande constituée en vertu de l’Acte relatif aux Sauvages de 1880. Dans le cadre du système d’administration et de gouvernance imposé aux peuples autochtones par l’Acte relatif aux Sauvages de 1880, le droit individuel au paiement annuel est ainsi perdu, puisque ce droit n’est pas conféré à la personne, mais à la collectivité telle qu’elle est composée à ce moment-là.

Le paiement annuel permet à la collectivité de subvenir à ses besoins puisqu’une somme d’argent, aussi maigre soit-elle, est versée à chaque membre. C’est là l’objectif du paiement annuel prévu par le Traité n° 6, lequel est une contrepartie partielle de la cession d’un droit collectif sur les terres. Le défaut de verser la somme prévue à une personne qui y avait droit constitue une perte pour la collectivité.

La revendicatrice, une bande au sens de l’Acte relatif aux Sauvages de 1880 et une Première Nation au sens de la LTRP, est l’incarnation actuelle de la collectivité qui a subi une perte entre 1885 et 1889. Cette perte est donc une perte au sens du paragraphe 14(1) de la LTRP.

[14]           Les parties ont fourni des observations écrites sur les répercussions, le cas échéant, de la décision Beardy’s sur la présente requête. Elles se sont penchées sur la question de savoir si, compte tenu de Beardy’s, le processus applicable aux revendications particulières constituait une meilleure procédure pour régler les réclamations présentées en l’espèce, de même que sur la question de savoir si Beardy’s offrait des indications sur la question de la qualité pour agir.

[15]           La décision Beardy’s ne lie pas la Cour, et il convient de relever que même le tribunal estimait que la question des versements d’annuités comportait à la fois un aspect individuel et collectif. Pour ces motifs, je conclus que Beardy’s n’est pas utile dans le cadre de l’examen de la question de la qualité pour agir. Elle peut toutefois être pertinente pour la question de la meilleure procédure pour présenter la présente réclamation.

[16]           Les cinq conditions pour qu’une action soit autorisée comme recours collectif sont énoncées à l’article 334.16 des Règles, qui est reproduit à l’annexe B. Ces conditions sont les suivantes :

1.                   les actes de procédure doivent révéler une cause d’action valable;

2.                   il doit exister un groupe identifiable formé d’au moins deux personnes;

3.                  les réclamations des membres du groupe doivent soulever des points de droit ou de fait communs;

4.                  le recours collectif est le meilleur moyen de régler, de façon juste et efficace, les points de droit ou de fait communs;

5.                   il doit exister un représentant demandeur qui :

                                                          i.           représenterait de façon équitable et adéquate les intérêts du groupe;

                                                        ii.          a élaboré un plan qui propose une méthode efficace pour poursuivre l’instance et tenir les membres du groupe informés de son déroulement;

                                                      iii.          n’a pas de conflit d’intérêts avec d’autres membres du groupe en ce qui concerne les points de droit ou de fait communs;

                                                      iv.          communique un sommaire de la convention qui est intervenue entre lui et l’avocat relativement aux honoraires et débours.

[17]           Le Canada fait valoir que la requête en autorisation ne remplit aucune des conditions à l’exception de la deuxième : le Canada convient qu’il existe un groupe identifiable.

Analyse

A.                Les actes de procédure révèlent‑ils une cause d’action valable?

[18]           Les demandeurs soulèvent deux causes d’action dans leurs actes de procédure : le manquement allégué aux obligations du Canada découlant des traités et son manquement allégué à son obligation fiduciaire.

[19]           Le Canada fait valoir qu’il existe trois raisons pour lesquelles les actes de procédure ne révèlent pas une cause d’action valable.

[20]           Premièrement, selon le Canada, les réclamations présentées par les demandeurs sont fondées sur des droits collectifs et non pas sur des droits individuels. Le Canada affirme que l’action collective est un véhicule approprié dans les cas où des droits communs ou collectifs sont en cause, tandis qu’une action en recours collectif est exercée dans les cas où des droits individuels sont en cause. Comme aucun droit individuel n’est en cause, le Canada fait valoir que la réclamation ne peut être accueillie sous sa forme actuelle. Le Canada fait valoir cette prétention à titre de question préliminaire relative à la qualité d’agir. Toutefois, pour les motifs qui suivent, cette prétention est examinée de façon plus appropriée au moment de l’examen de la question de savoir si la réclamation présente une cause d’action valable.

[21]           Deuxièmement, le Canada soutient que les réclamations des demandeurs ne peuvent être accueillies, [traduction] « parce que les causes d’action alléguées ne sont pas du tout vraisemblables. »

[22]           Troisièmement, le Canada fait valoir que [traduction] « la demande ne révèle pas une cause d’action pour manquement à l’obligation fiduciaire ou une revendication défendable à l’égard d’un manquement continu à des obligations découlant de traités. »

[23]           Selon les demandeurs, le seuil auquel ils doivent répondre pour convaincre la Cour que leurs actes de procédure révèlent une cause d’action valable est très bas. Dans Le Corre c Canada (Procureur général), 2004 CF 155 aux paragraphes 21 à 23, confirmée par 2005 CAF 127, la Cour a conclu que le critère à satisfaire est identique à celui appliqué en matière de radiation de procédures : est-il évident et manifeste que le demandeur ne peut avoir gain de cause et que l’action est vouée à l’échec? La jurisprudence enseigne qu’il n’est pas nécessaire que les demandeurs satisfassent à un critère préliminaire quant au fond qui exige un examen de la preuve. Toutefois, dans l’arrêt Pro‑Sys Consultants Ltd c Microsoft Corp, [2013] 3 RCS 477, au paragraphe 63, la Cour suprême a déclaré que le critère n’est pas satisfait si, « à supposer que les faits invoqués soient vrais, la demande ne pourrait manifestement pas être accueillie. » En conséquence, bien que la Cour puisse examiner les faits tels qu’ils sont allégués, elle ne peut chercher ailleurs que dans la déclaration pour établir si le critère a été satisfait.

(1)               La présente action peut-elle être instituée comme recours collectif?

[24]           Les dispositions relatives aux recours collectifs prévoient un mécanisme procédural pour le regroupement de demandes semblables. Il s’ensuit que la viabilité d’un recours collectif est tributaire de la viabilité des demandes individuelles qui le composent. Si les membres individuels du groupe n’ont pas la qualité pour faire valoir les réclamations formulées, le recours collectif échouera nécessairement.

[25]           La Cour d’appel du Manitoba a reconnu ce point dans l’arrêt Soldier c Canada (Procureur général), 2009 MBCA 12 au paragraphe 30 [Soldier CA], dans lequel elle a statué que [traduction] « [l]es demandeurs qui intentent l’action en autorisation doivent avoir la qualité pour instituer une action comme s’il s’agissait d’une action individuelle. » De même, dans l’arrêt Bisaillon c Université Concordia, 2006 CSC 19 au paragraphe 17, les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada ont statué que « [l]e recours collectif demeure un véhicule procédural dont l’emploi ne modifie ni ne crée des droits substantiels […]. La procédure du recours collectif ne saurait justifier une action en justice lorsque, considérées individuellement, les différentes réclamations visées par le recours ne le permettraient pas. » Les dispositions législatives portant sur les recours collectifs ne créent pas de nouvelles causes d’action; elles sont plutôt de nature procédurale.

[26]           Étant donné qu’un recours collectif ne peut être accueilli, à moins que les membres individuels du groupe n’aient la qualité pour agir, la question de la qualité pour agir devrait être examinée dans le cadre de l’analyse de la question de savoir si les actes de procédure révèlent une cause d’action valable, au titre de l’alinéa 334.16a). La Cour du Banc de la Reine du Manitoba a adopté cette approche dans la décision Soldier c Canada (Procureur général), 2006 MBQB 50 [Soldier BR], au paragraphe 26 :

[traduction]
Je suis convaincue que la question de la qualité pour agir est une question à examiner à cette étape‑ci, soit au moment de déterminer s’il existe une cause d’action et si l’alinéa 4a) de la Loi est respecté. Il ne peut y avoir de cause d’action s’il n’y a pas de qualité pour agir.

[27]           La Cour d’appel a maintenu cette approche dans l’arrêt Soldier CA, dans lequel elle écrit ce qui suit au paragraphe 37 : [traduction] « […] la juge saisie de la demande d’autorisation du recours collectif n’a pas commis d’erreur de principe ni n’a commis d’erreur manifeste et dominante lorsqu’elle a examiné la question de la qualité pour agir dans le cadre de la question de savoir si les demandeurs avaient une cause d’action. »

[28]           Dire que la question de la qualité pour agir fait partie, en toute logique, de l’analyse relative à l’autorisation ne veut pas dire qu’elle doit toujours être examinée dans le cadre de l’analyse. Comme la Cour d’appel l’a souligné dans l’arrêt Soldier CA, au paragraphe 34 : [traduction] « la question du moment pour examiner la question de la qualité pour agir relève du pouvoir discrétionnaire du juge et peut varier selon les faits de chaque affaire et de la nature de la preuve présentée. » La Cour d’appel a fait remarquer que selon les éléments dont dispose la cour, il peut être approprié d’examiner la question de la qualité pour agir plus tôt. Cette question peut être étudiée dans le cadre d’une requête en radiation ou en jugement sommaire préalable à la requête en autorisation ou plus tard, comme cela a été le cas en l’espèce, au moment de l’audience relative à la requête en autorisation.

[29]           En l’espèce, le Canada soutient que les membres individuels du groupe demandeur ne possèdent pas la qualité pour faire appliquer le droit aux annuités qui est prévu par les Traités numérotés. Le Canada fait valoir que le droit à des annuités prévu par un traité est un droit collectif détenu par les bandes visées par les traités. En conséquence, ce droit peut uniquement être appliqué pour le compte des bandes dans leur ensemble au moyen d’une action collective.

[30]           Afin de comprendre la raison pour laquelle le Canada affirme que les actions collectives conviennent parfaitement pour faire appliquer des droits collectifs, il est utile de comprendre l’historique de cette forme d’action et, plus particulièrement, son historique devant les cours fédérales. Dans l’arrêt Western Canadian Shopping Centres Inc c Dutton, 2001 CSC 46 aux paragraphes 19 à 29, la Cour suprême du Canada décrit de façon assez détaillée l’évolution des instances auxquelles participaient plusieurs parties. Contrairement aux tribunaux judiciaires qui se prononçaient sur des questions individuelles entre demandeurs et défendeurs, les cours d’equity ont mis au point la règle obligatoire de la jonction des instances qui exigeait que toute personne ayant un intérêt dans l’affaire devienne partie au litige. L’avantage de cette évolution « [traduction] permettait à la cour d’examiner tous les aspects du litige et donc de s’assurer que nul ne serait lésé par sa décision sans avoir eu la possibilité de se faire entendre » et « avait également l’avantage d’éviter la multiplication des procédures. »

[31]           La règle de la jonction obligatoire d’instances s’est révélée inadéquate lorsque les parties intéressées au conflit sont devenues trop nombreuses pour être jointes. Les tribunaux d’equity ont assoupli la règle et a créé le recours collectif. Dans Chance c May (1722), Prec Ch 592, 24 ER 265, des associés ont été autorisés à poursuivre en leur propre nom et au nom de 800 autres associés d’anciens trésoriers et gestionnaires de la société pour détournement de fonds. Comme l’a fait observer la Cour suprême, « [l]a cour a autorisé l’action parce qu’[traduction] “elle était présentée en leur propre nom, et aux noms de tous les autres propriétaires de la même entreprise, sauf les défendeurs, et donc tous les autres étaient en réalité des parties”, et “parce qu’il serait impossible qu’ils soient tous nommément parties, et il y aurait constamment des annulations pour cause de décès ou autres raisons, et que justice ne serait pas rendue si tous étaient parties à l’action”. » L’action collective pouvait donc être exercée quand de nombreuses parties avaient le même intérêt dans une action — une ou plusieurs personnes pouvaient représenter tous les particuliers intéressés et la décision s’appliquait à chacun d’entre eux.

[32]           Avant 2002, l’exigence de l’intérêt commun des personnes était prévue au paragraphe 114(1) des Règles des Cours fédérales, qui était est rédigé ainsi : « Lorsque des personnes ont un intérêt commun dans une instance, celle-ci peut être engagée par ou contre l’une ou plusieurs de ces personnes au nom de toutes celles‑ci ou de certaines d’entre elles. »

[33]           L’article 114 des Règles a été abrogé en 2002 au moment de l’entrée en vigueur du régime des recours collectifs. Toutefois, dans Rule-Making in a Mixed Jurisdiction: The Federal Court (Canada) (2010), 49 SCLR (2d) 313, M. le juge Allan Lutfy et Emily McCarthy indiquent que l’article 114 des Règles a été rétabli en 2007 avec des modifications, à la demande de l’Association du Barreau autochtone. Les auteurs font remarquer, à la page 324, qu’un sous‑comité du Comité des règles a conclu que les droits issus de traités ne sont pas en règle générale des droits individuels et que la possibilité de se retirer d’un recours collectif autochtone suscitait des difficultés :

[traduction]
Un examen de la nature des droits ancestraux et des droits issus de traités au Canada indique qu’ils sont, pour la plupart, des droits à caractère sui generis qui sont détenus collectivement et qui, parfois, découlent d’une entente conclue par une bande ou une nation avec la Couronne du chef du Canada. Ces droits sont transmis à des personnes individuelles en raison de l’appartenance de ces dernières à une bande ou à une nation particulière, mais ils ne sont pas détenus par ces personnes à titre individuel. Ainsi, l’appartenance au groupe est la condition essentielle pour exercer le droit ou pour le faire appliquer.

La gouvernance d’une bande ou d’une nation est réglementée soit par le droit coutumier, soit par la Loi sur les Indiens. Par conséquent, les membres des collectivités des Premières nations appartiennent à un groupe (généralement) identifiable; ils cherchent à faire appliquer un droit collectif et la capacité de se retirer du litige — en raison de la nature du droit en cause – est au mieux problématique.

[34]           L’article 114 des Règles a donc été rétabli. Une action collective peut être introduite par une personne agissant à titre de représentant d’une ou plusieurs autres personnes si les conditions suivantes sont réunies : « les points de droit et de fait soulevés, selon le cas, (i) sont communs au représentant et aux personnes représentées, sans viser de façon particulière seulement certaines de celles-ci, (ii) visent l’intérêt collectif de ces personnes; […] ».

[35]           Les demandeurs reconnaissent que les droits issus de traités sont en général de nature collective et qu’ils [traduction] « appartiennent » aux Premières nations signataires. Ils soutiennent toutefois que dans les circonstances appropriées, les réclamations portant sur des droits issus de traités peuvent être formulées individuellement. Dans l’arrêt Soldier CA, la Cour d’appel du Manitoba a conclu qu’il n’était pas évident et manifeste que les membres individuels des Premières nations n’avaient pas la qualité pour solliciter des paiements d’annuités rajustés au moyen d’un recours collectif. Les demandeurs se reportent également à l’arrêt Behn c Moulton Contracting Ltd., 2013 CSC 20 [Behn], dans lequel la Cour suprême du Canada a confirmé que les droits issus de traités étaient des droits collectifs. Toutefois, au paragraphe 33, elle a poursuivi en soulignant que cela n’empêchait pas complètement les membres individuels de faire valoir des droits issus de traités parce que ces droits pouvaient posséder des attributs individuels :

La Couronne soutient que les demandes fondées sur des droits issus de traités doivent être présentées par la collectivité autochtone ou en son nom. Cette proposition générale est trop restrictive. Il est vrai que les droits ancestraux et issus de traités sont, de par leur nature, des droits collectifs. Toutefois, certains droits, bien que la collectivité autochtone en soit titulaire, sont néanmoins exercés par des membres à titre individuel ou attribués à ceux-ci. De tels droits peuvent par conséquent posséder des attributs à la fois collectifs et individuels. Il est possible que des membres de la collectivité possèdent à titre individuel un intérêt acquis dans la protection de ces droits. Comme certains intervenants l’ont fait valoir, il se peut fort bien que, lorsque les circonstances s’y prêtent, des membres d’une collectivité puissent être en mesure d’invoquer à titre individuel certains droits ancestraux ou issus de traités.
[Renvois omis.]

Dans l’arrêt Behn, la Cour suprême du Canada a choisi de ne pas se prononcer sur la question de savoir si des personnes individuelles pouvaient, au moyen de recours collectifs, faire appliquer des droits issus de traités, puisqu’il n’était pas nécessaire de le faire « à ce stade de l’instance et de l’évolution du droit » et compte tenu du fondement de l’arrêt.

[36]           À l’appui de leur position selon laquelle les annuités sont des droits individuels, les demandeurs renvoient à la lettre de 2011 de la Direction générale des revendications particulières, dans laquelle elle fait part de son avis selon lequel  le droit de percevoir une annuité est un droit individuel. Le Canada fait valoir que cet élément de preuve n’est pas convaincant.

[37]           Les demandeurs soulignent également que le Canada paie les annuités directement aux membres individuels des bandes et, par conséquent, ils soutiennent que l’interprétation selon laquelle il s’agit d’un droit individuel est correcte. Le Manuel d’administration des paiements prévus par des traités [le Manuel d’AADNC] d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada [AADNC] prévoit que les annuités découlant des traités sont « payables à une personne » et que la personne doit en reconnaître la réception en signant la liste de paiement des traités, qui « sert de preuve de l’acquittement par la Couronne de ses obligations découlant des traités, en ce qui concerne le paiement d’annuités à une personne ». De plus, les processus administratifs en vigueur à AADNC reconnaissent la survie du droit de certaines personnes, même lorsque leur Première nation n’existe plus ou qu’elle n’est plus reconnue comme Première nation par la Couronne.

[38]           Le Canada pourrait au bout du compte réussir à montrer que le droit de recevoir une annuité est un droit de nature collective, parce que les Traités numérotés visent la cession des terres détenues collectivement et qu’ils ont été conclus par les bandes visées par les traités et par des Premières nations. La position du Canada selon laquelle c’est le lien d’un particulier avec une bande visée par un traité ou une Première nation qui crée son droit de recevoir une annuité, et le fait que ce droit peut être exercé ou invoqué de façon individuelle ne change pas la nature du droit sous-jacent. Toutefois, la question que doit examiner la Cour à cette étape‑ci est celle de savoir s’il est évident et manifeste que la réclamation des demandeurs ne peut être accueillie.

[39]           L’action en l’espèce ressemble grandement à celle instituée dans Soldier BR. Cette réclamation visait des annuités versées sous le régime du Traité no 1 et du Traité no 2. La juge saisie de la demande d’autorisation de recours collectif a décrit la réclamation comme étant essentiellement la suivante : [traduction] « la Couronne avait l’obligation continue de verser à chaque Indien de l’argent représentant un montant suffisant pour acheter des effets [soit le nombre de couvertures de laine, d’étoffes indiennes, de fil et de pièges que 15 $ auraient pu acheter au prix courant à Montréal en 1871] au prix courant. » La juge a rejeté la requête en autorisation de recours collectif, en concluant au paragraphe 43 que [traduction] « le droit même à l’annuité et toute interprétation du droit issu de traités nécessaire pour établir ce droit sont collectifs. » Bien que la Cour d’appel du Manitoba ait rejeté l’appel, elle a conclu que la juge saisie de la demande d’autorisation de recours collectif avait commis une erreur en concluant que les demandeurs n’avaient pas la qualité d’agir parce que les annuités étaient un droit collectif et non pas un droit individuel. Elle a déclaré ce qui suit au paragraphe 59 :

[traduction]
[…] la réponse à la question de savoir s’il s’agit d’une affaire de droits collectifs qui doit être instruite au moyen d’une action collective ou d’une affaire de droits communs qui doit être instruite au moyen d’un recours collectif n’est pas si claire en droit qu’il soit possible de dire qu’il est manifeste et évident que les demandeurs n’ont pas la qualité pour agir et que par conséquent, ils n’ont pas de cause d’action.

[40]           À mon avis, compte tenu des faits tels que plaidés, la jurisprudence se rapproche de l’arrêt de la Cour d’appel. Il n’est pas évident et manifeste que les demandeurs n’ont pas la qualité pour agir de sorte que la présente réclamation ne être accueillie à titre de recours collectif.

(2)               Le manquement à des obligations découlant de traités

[41]           Le Canada fait valoir que l’allégation des demandeurs selon laquelle il aurait manqué à ses obligations issues de traités et à son obligation fiduciaire est [traduction] « repose entièrement sur une prétention non fondée selon laquelle les parties à chacun des Traités numérotés avaient l’intention et comprenaient, au moment de la signature de chaque Traité numéroté, que le montant des annuités augmente annuellement pour prendre en compte les effets de l’inflation. » Le Canada souligne qu’au paragraphe 43 du mémoire des demandeurs, ces derniers reconnaissent que [traduction] « la collecte et l’examen des éléments de preuve historique […] n’ont aucunement révélé que les parties qui avaient négocié les Traités numérotés avaient pris en compte la possibilité d’inflation. » En conséquence, le Canada soutient que les revendications des demandeurs ne sont pas du tout vraisemblables et que ces derniers ne peuvent montrer que les actes de procédure révèlent une cause d’action valable.

[42]           Les demandeurs indiquent dans leurs actes de procédure que [traduction] « au moment de la signature de chacun des Traités numérotés, toutes les parties avaient l’intention et voulaient que les annuités continuent à contribuer grandement au bien-être des bénéficiaires individuels. » Les demandeurs mentionnent qu’ils s’appuieront, en partie, sur des éléments de preuve selon lesquels au moment où les premiers traités ont été négociés en 1871, un travailleur agricole qualifié et une servante ne gagnaient que 156 $ et 60 $ annuellement. Le Traité no 1 offrait à une famille autochtone de cinq personnes un montant annuel de 25 $ que le rapport du commissaire de l’époque décrivait comme étant [traduction] « habituellement suffisant pour fournir à la famille de nombreux éléments de confort. »

[43]           Selon les demandeurs, aucune des parties n’envisageait que le pouvoir d’achat de l’annuité disparaîtrait au fil du temps. Ils soutiennent plutôt que la présupposition commune était que l’annuité fournirait aux Indiens un niveau de [traduction] « confort » fonction du pouvoir d’achat du montant convenu à l’époque. Les demandeurs demanderont à la Cour de conclure à l’existence d’une modalité contractuelle étant donné cette volonté afin de donner plein effet à leur entente mutuelle, à savoir conclure à l’existence d’une modalité selon laquelle l’annuité doit être rajustée pour préserver son pouvoir d’achat. Cet argument est fondé sur l’approche que la Cour suprême a exprimée au paragraphe 43 de l’arrêt R c Marshall, [1999] 3 RCS 456 :

Le droit reconnaît depuis longtemps que, lorsque des parties concluent une entente, elles présument certaines choses qui lui donnent plein effet. Les tribunaux tiennent pour avérée l’existence d’une condition contractuelle à la lumière de l’intention présumée des parties lorsque cela est nécessaire pour donner plein effet au contrat, par exemple lorsque cela respecte le « critère de l’observateur objectif »: M.J.B. Enterprises Ltd. c. Construction de Défense (1951) Ltée, [1999] 1 R.C.S. 619, au par. 30. (Voir également : The « Moorcock » (1889), 14 P.D. 64; Société hôtelière Canadien Pacifique Ltée c. Banque de Montréal, [1987] 1 R.C.S. 711; et, sur un plan général, voir: Waddams, op. cit., au par. 490; Treitel, op. cit., aux pp. 190 à 194.) En l’espèce, si l’observateur objectif doué d’ubiquité avait dit, « Tous ces propos concernant les maisons de troc c’est très bien, mais si les Mi’kmaq doivent faire ces promesses, auront‑ils le droit de chasser et de pêcher pour prendre quelque chose à échanger à ces maisons de troc? », compte tenu de l’honneur de la Couronne, il aurait fallu répondre : « évidemment ». Si le droit est disposé à suppléer aux lacunes de contrats écrits -- préparés par des parties bien informées et par leurs conseillers juridiques -- afin d’en dégager un résultat sensé et conforme à l’intention des deux parties, quoiqu’elle ne soit pas exprimée, il ne saurait demander moins de l’honneur et de la dignité de la Couronne dans ses rapports avec les Premières nations. De fait, l’honneur de la Couronne a été invoquée de façon expresse par les tribunaux au début du 17e siècle pour faire en sorte qu’une concession de la Couronne atteigne le but qu’elle visait : The Case of The Churchwardens of St. Saviour in Southwark (1613), 10 Co. Rep. 66b, 77 E.R. 1025, à la p. 67b et la p. 1026, et Roger Earl of Rutland’s Case (1608), 8 Co. Rep. 55a, 77 E.R. 555, à la p. 56b et les pp. 557 et 558.

[Non souligné dans l’original.]

[44]           À mon avis, il n’est pas possible de dire qu’il est manifeste et évident que les actes de procédure tels que libellés ne révèlent pas une cause d’action valable pour violation d’un traité si, comme l’invoquent les actes de procédure, les parties avaient l’intention et comprenaient, au moment de la signature du traité, que l’annuité fournisse un certain niveau de confort aux Indiens. Aucune modalité de rajustement n’a été négociée parce que, comme les demandeurs le font valoir et le Canada semble en convenir, aucune partie ne croyait alors que le pouvoir d’achat de l’annuité pouvait s’éroder de manière substantielle. Ces faits allégués, de concert avec l’application du critère de « l’observateur objectif », fournissent une cause d’action valable pour atteinte à un traité.

(3)               Manquement à l’obligation fiduciaire

[45]           Le Canada soutient que les demandeurs ont omis de plaider les faits importants nécessaires pour satisfaire à l’un ou l’autre des deux critères pour établir l’existence d’une obligation fiduciaire. Le Canada, en s’appuyant sur l’arrêt Manitoba Métis Federation Inc c Canada (Procureur général), 2013 CSC 14, fait valoir que la première situation dans laquelle une obligation fiduciaire peut prendre naissance est « s’il existe un intérêt autochtone particulier ou identifiable et si la Couronne exerce, à l’égard de cet intérêt autochtone, des pouvoirs discrétionnaires d’une manière entraînant une responsabilité de la nature d’une obligation de droit privé ». Toujours selon le Canada, la deuxième situation est « s’il existe un engagement de la part du fiduciaire à agir au mieux des intérêts du bénéficiaire ou des bénéficiaires, une personne ou d’un groupe de personnes définies vulnérables au contrôle du fiduciaire (le bénéficiaire ou les bénéficiaires), et un intérêt juridique ou un intérêt pratique important du bénéficiaire ou des bénéficiaires sur lequel l’exercice, par le fiduciaire, de son pouvoir discrétionnaire ou de son contrôle pourrait avoir une incidence défavorable ».

[46]           En ce qui concerne la première situation, les demandeurs soutiennent que les dispositions portant sur les annuités sont un intérêt autochtone particulier et identifiable. Ils font de plus valoir que le Canada a assumé le contrôle à l’égard de cet intérêt. Je reconnais qu’il est possible de soutenir que les dispositions sur les annuités constituent un intérêt autochtone particulier. Les demandeurs mentionnent dans leurs actes de procédure que [traduction] « le ministre a la responsabilité de fixer le montant des annuités et de les distribuer » et qu’en ce faisant, il a [traduction] « l’obligation de rajuster le montant des annuités pour prendre en compte les variations de l’inflation et conserver le pouvoir d’achat. » À mon avis, voilà un fondement suffisant pour conclure qu’il existe une cause d’action valable plaidée selon laquelle le Canada a manqué à son obligation fiduciaire envers les bénéficiaires des annuités prévues par les traités.

[47]           Pour ce motif, il n’est pas possible de dire qu’il est manifeste et évident que les faits tels que plaidés ne révèlent pas une cause d’action valable en matière de manquement à l’obligation fiduciaire.

[48]           Les demandeurs ont satisfait à la première partie du critère applicable à l’autorisation d’un recours collectif.

B.                 Un groupe identifiable formé d’au moins deux personnes

[49]           Comme je l’ai mentionné plus tôt, le Canada reconnaît que cette exigence est satisfaite si le groupe est défini comme étant [traduction] « toutes les personnes ayant droit de recevoir des annuités en vertu des modalités des Traités numérotés conformément au chapitre 4 du Manuel d’administration des paiements prévus par des traités d’AADNC de mars 2002. »

C.                 Les points de droit ou de fait communs

[50]           Le droit sur ce que constituent des points de droit ou de fait communs aux fins de l’autorisation de recours collectif est bien établi.

[51]           Les réclamations du groupe envisagé doivent soulever des points de droit ou de fait communs à tous les membres du groupe, que ces points prédominent ou non sur ceux qui ne concernent qu’un membre (alinéa 334.16(1)c) des Règles).

[52]           Pour apprécier la question de savoir si ces points communs existent, la Cour entreprend une analyse fondée sur l’objet — la question à examiner est celle de savoir si le fait d’autoriser le recours collectif permettra « d’éviter la répétition de l’appréciation des faits ou de l’analyse juridique » (Western Canada Shopping Centres Inc c Dutton, 2001 CSC 46 au paragraphe 39, [2001] 2 RCS 534 [Dutton]; Rumley c Colombie-Britannique, 2001 CSC 69 au paragraphe 29, [2001] 3 RCS 184 [Rumley], Vivendi Canada Inc c Dell'Aniello, 2014 CSC 1 au paragraphe 44, [2014] 1 RCS 3 [Vivendi]). La réponse à une question commune peut être nuancée pour refléter les réclamations individuelles (Rumley, au paragraphe 32).

[53]           Il n’est pas essentiel que les membres du groupe soient dans une situation identique par rapport à la partie adverse, et même des différences assez importantes entre les membres du groupe n’empêchent pas de conclure à l’existence de questions communes (Dutton, au paragraphe 39 et Pro-Sys, aux paragraphes 108 et 112). Établir la communauté des questions n’exige pas la preuve que les actes allégués ont effectivement eu lieu. Il faut plutôt établir que les questions soulevées sont communes à tous les membres du groupe (Pro-Sys, au paragraphe 110).

[54]           Dans les arrêts Dutton et Pro-Sys, la Cour suprême a statué qu’une question sera « commune » uniquement lorsque son règlement est nécessaire pour que la réclamation de chaque membre soit réglée. L’arrêt Dutton a statué qu’une issue favorable à un demandeur signifie nécessairement une issue favorable à tous. Toutefois, dans Vivendi, aux paragraphes 45 et 46, la Cour suprême a quelque peu assoupli le critère strict de sorte que la question est maintenant [traduction] « le succès d’un membre provoque-t-il l’échec d’un autre membre? » :

À la lumière des précisions apportées dans l’affaire Rumley, il convient de rappeler que le critère du succès commun dégagé dans Dutton ne doit pas être appliqué rigidement. En effet, une question commune peut exister même si la réponse qu’on lui donne peut différer d’un membre à l’autre du groupe. Ainsi, pour qu’une question soit commune, il n’est pas nécessaire que le succès d’un membre du groupe entraîne nécessairement celui de tous les membres du groupe. Toutefois, le succès d’un membre ne doit pas provoquer l’échec d’un autre membre.

Les arrêts Dutton et Rumley établissent donc le principe selon lequel une question sera considérée comme commune si elle permet de faire progresser le règlement de la réclamation de chacun des membres du groupe. En conséquence, la question commune peut exiger des réponses nuancées et diverses selon la situation de chaque membre. Le critère de la communauté de questions n’exige pas une réponse identique pour tous les membres du groupe, ni même que la réponse bénéficie dans la même mesure à chacun d’entre eux. Il suffit que la réponse à la question ne crée pas de conflits d’intérêts entre les membres du groupe.

[Non souligné dans l’original.]

[55]           Comme je l’ai mentionné plus tôt, les demandeurs soutiennent que le présent litige comporte quatre points de droit ou de fait communs à trancher : l’interprétation des Traités numérotés, la question de savoir si le Canada a une obligation fiduciaire envers les membres du groupe, la question de savoir s’il y a un manquement continu aux obligations qui incombent au Canada en vertu des traités et la méthode de calcul de l’indemnité pour la perte des annuités.

(1)               L’interprétation des traités

[56]           Les demandeurs soutiennent que l’interprétation des dispositions relatives aux annuités dans les Traités numérotés est une question commune, parce que le règlement de cette question appuierait substantiellement les réclamations de tous les membres du groupe proposé.

[57]           Les demandeurs soutiennent que le libellé des dispositions relatives aux annuités est substantiellement le même dans chaque Traité numéroté et que chaque traité ultérieur s’est fondé sur les traités qui l’ont précédé. Les demandeurs renvoient au témoignage de Mme Holmes qui a témoigné pour le Canada et qui a déclaré que les Traités numérotés ne pouvaient pas être examinés de façon appropriée isolément et que la recherche individuelle à l’égard de chacun des traités serait [traduction] « très inefficace » en raison des [traduction] « très nombreux chevauchements. » Les demandeurs font valoir que le règlement de cette question en tant que point commun éviterait une répétition considérable de l’appréciation des faits et de l’analyse.

[58]           De plus, ils soutiennent que si la preuve indique que les Traités numérotés doivent être interprétés différemment, tout ce qui est alors nécessaire est une réponse nuancée à la question commune, une approche qui ne veut pas dire que la question n’est pas commune, comme l’a mentionné l’arrêt Vivendi.

[59]           Le Canada souligne à juste titre, aux paragraphes 16 et 17 de son mémoire, que le libellé et la portée des onze traités comportent des différences :

[traduction]
16.       Selon le libellé précis de chaque traité, non seulement le montant de l’annuité prévue au traité diffère‑t‑il, mais de façon significative, il en est de même pour la méthode de paiement ou « l’espèce ». À titre d’exemple :

a)  Les Traités nos 1 et 2 prévoient le paiement suivant : « […] à chaque famille indienne de cinq personnes la somme de 15 dollars, cours du Canada, ou dans cette proportion pour les familles plus ou moins nombreuses, ce paiement devant se faire en effets de l’espèce que ces Indiens choisiront, tels que couvertures de laine, étoffes indiennes (de couleurs assorties), fil et pièges, au prix courant de Montréal, ou en argent, si Sa Majesté le juge à propos et dans l’intérêt des Indiens. » 

b)  Le 30 avril 1875, le Conseil privé a pris un décret en conseil faisant passer « de $3 à $5 par année le montant du versement annuel remis à chaque Indien aux termes des traités nos 1 et 2 […] à la condition que quiconque bénéficiant de ce montant accru accepte de renoncer à toute réclamation en ce qui concerne les "promesses ultérieures" », qui renvoient à certains articles promis par les commissaires des traités, qui n’étaient pas inclus dans le texte des traités.

c)  Les Traités nos 3 à 8, 10 et 11 prévoient le paiement annuel d’une somme de 5 $ à chaque Indien. Les Traités nos 4, 7, 8 et 11 prescrivent que les paiements doivent être « faits aux chefs de familles pour ceux qui les composent ».

d) Le Traité no 9 prévoit le paiement d’une rente annuelle de 4 $ à chacun des Indiens et « c’est le chef de famille qui percevra toutes les rentes. »

17.       Les Traités numérotés, à l’exception des Traités nos 1, 2 et 9, contiennent également des dispositions visant un paiement annuel (parfois appelé « salaire ») au chef et aux conseillers. Le montant du paiement ainsi que le nombre de conseillers admissibles à le recevoir varie d’un traité à un autre et, dans certains cas, varie selon la bande visée par le traité :

a)  Bien que les Traités nos 1 et 2 ne prévoient pas de paiement annuel supplémentaire pour les chefs et les conseillers, le décret en conseil de 1875 a approuvé, outre le paiement de 5 $ « un montant annuel de 20 $ à chaque chef ». Depuis 1875, le Canada a également versé un montant annuel de 15 $ aux conseillers des bandes visées par les Traités nos 1 et 2.

b)  Les Traités nos 3, 5 et 6 prévoient un paiement global de 30 $ à un chef et de 20 $ à un conseiller admissible parce qu’outre le paiement annuel de 5 $ à chaque Indien, « il est de plus convenu » que chaque chef doit recevoir 25 $ par année et chaque conseiller doit recevoir 15 $ par année. Le nombre de conseillers qui peuvent recevoir le paiement supplémentaire varie : le nombre ne devant pas excéder trois (Traités nos 3 et 5) et jusqu’à quatre conseillers (Traité no 6).

c)  Les Traités nos 4, 7, 8, 10 et 11 prévoient un paiement annuel de 25 $ à chaque chef et de 15 $ à chaque conseiller.  Contrairement aux Traités nos 1, 2, 3, 5 et 6, les Traités nos 4, 7, 8, 10 et 11 ne prévoient pas que le paiement annuel au chef et aux conseillers s’ajoute au paiement annuel de 5 $ versé à chaque Indien. Le nombre de conseillers qui peuvent recevoir le paiement varie selon le traité : le nombre ne devant pas excéder quatre par bande (Traité no 4) ou le nombre étant illimité (Traité no 10). D’autres nombres varient selon la taille de la bande : le nombre ne devant pas excéder quatre pour chaque grande bande et deux pour une petite bande (Traité no 8), une bande d’au moins 30 membres pour que le chef reçoive le paiement et un conseiller par centaine de membres recevra un paiement (Traité no 11). Le Traité no 7 détaille le nombre de conseillers qui ont le droit de recevoir un paiement par groupe de bandes visées par le traité : le nombre ne devant pas excéder 15 (Pieds‑Noirs et Gens du Sang); 4 (Piégânes et Sarcis) et 5 (Stony).

d) Le Traité no 9 ne contient aucune disposition quelle qu’elle soit concernant un paiement annuel supplémentaire pour les chefs et les conseillers.

[60]           Je conviens avec le Canada que l’interprétation des traités s’appuie sur des faits et que les traités doivent être interprétés un par un. Je rejette la prétention du Canada selon laquelle les demandeurs demandent à la Cour d’interpréter les dispositions portant sur les annuités de tous les Traités numérotés en bloc. Les demandeurs reconnaissent que les onze Traités peuvent faire l’objet d’une interprétation différente. Je ne suis toutefois pas d’accord avec les demandeurs que faire une telle chose ne constituerait pas plus qu’une approche « nuancée » du genre décrit dans l’arrêt Vivendi.

[61]           L’approche décrite dans l’arrêt Vivendi met l’accent sur l’effet de la réponse à la question sur chaque membre du groupe. Dans ce contexte, à mon avis, la question commune concerne chaque traité individuellement. L’interprétation de chaque traité distinct peut être une question commune pour chaque particulier ayant droit à une annuité en vertu de ce traité. Il n’y a toutefois pas de communauté manifeste chez les membres de ce groupe et chez les particuliers ayant droit à une annuité en vertu d’un autre traité.

[62]           Faire valoir, comme le font les demandeurs, que la question commune est une question d’interprétation des traités consiste à énoncer la question commune en des termes beaucoup trop larges et d’une manière beaucoup trop générale. Dans l’arrêt Rumley, au paragraphe 29, la Cour suprême a fait une mise en garde à l’égard d’une telle approche :

[…] Il ne serait ni juste ni efficace de certifier une action en fonction de questions qui ne sont communes que si on les énonce en termes très généraux. Une telle action se diviserait inévitablement en instances individuelles. […]

[63]           Même si les demandeurs établissent que chaque traité ultérieur a été négocié en ayant présent à l’esprit ceux qui l’avait précédé, cela ne signifie pas que l’interprétation des traités antérieurs offrira une grande preuve probante à l’égard de l’interprétation appropriée d’un traité conclu ultérieurement. Comme la Cour suprême l’a déclaré dans l’arrêt R c Marshall, [1999] 3 RCS 456, au paragraphe 80, « chaque traité doit être examiné à la lumière de son contexte historique et culturel particulier ».

[64]           La preuve au dossier, telle que résumée aux paragraphes 130 à 146 du mémoire du Canada, révèle le contexte historique et culturel particulier de chacun des traités, notamment les éléments suivants : (i) l’intervalle de 50 ans entre la négociation du Traité no 1 et celle du Traité no 11; (ii) les différentes bandes visées par les traités ayant négocié ces traités et l’absence d’uniformité chez les personnes qui ont négocié pour le Canada; (iii) l’inclusion d’un tiers, l’Ontario, lors de la négociation du Traité no 9; (iv) les différentes régions géographiques visées par chaque traité; (v) les motivations différentes que chaque bande visée par un traité et le Canada avaient à l’égard de la conclusion du traité; (vi) les différents intérêts culturels que chaque bande visée par un traité tenait à préserver; (vii) les différentes superficies des terrains cédés par les bandes visées par les traités.

[65]           Je conviens avec le Canada qu’une analyse individuelle du texte du traité, de l’intention mutuelle des parties et des fins initiales pour lesquelles les diverses parties ont conclu le traité doit être effectuée à l’égard de chacun des Traités numérotés (voir Badger, aux paragraphes 51 et 52, Marshall, au paragraphe 80, Sundown, au paragraphe 25). De plus, certains bénéficiaires individuels se sont récemment ajoutés à un traité par suite de leur adhésion à un traité existant. Quels étaient la motivation, l’intérêt et l’intention de la bande en adhérant au traité et étaient‑ils les mêmes que ceux des signataires initiaux?

[66]           La nécessité d’examiner chaque traité dans son contexte historique et culturel particulier est incompatible avec un recours collectif de la portée envisagée par les demandeurs. Dans R c Goodstriker, 2012 ABPC 319, la Cour provinciale de l’Alberta a insisté sur le fait qu’un traité ne peut pas être examiné en fonction de ce que les parties d’une autre collectivité autochtone ont convenu dans un autre traité visant des peuples différents.

[67]           Toutes ces différences et circonstances individuelles m’amènent à conclure qu’il n’existe pas de question commune pour les membres du groupe envisagé concernant l’interprétation de onze traités différents.

(2)               L’obligation fiduciaire

[68]           Pour plusieurs raisons parmi celles énoncées ci-dessus, je conclus qu’il n’existe pas de point commun concernant la question de savoir si le Canada avait une obligation fiduciaire envers chaque bénéficiaire d’une annuité. Que le Canada ait pris, à l’occasion de la ratification de chacun des Traités numérotés, l’engagement de préserver le pouvoir d’achat de l’annuité et que cela ait créé une obligation fiduciaire envers les bénéficiaires de l’annuité exige une analyse des circonstances de chaque traité séparément au moment de sa ratification ou de l’adhésion à celui-ci. Toute décision concernant la question de savoir si une obligation fiduciaire a pris naissance à la ratification d’un traité particulier ou à l’adhésion de celui-ci ne réglerait les questions que pour ce traité particulier.

(3)               Le manquement continu

[69]           De même, la question de savoir s’il existe un manquement continu aux Traités numérotés ou à l’obligation fiduciaire ne peut être une question commune que dans le cas d’une interprétation commune de tous les Traités numérotés ou d’une conclusion commune d’obligation fiduciaire. Sans une conclusion selon laquelle il existe une obligation commune, il ne peut y avoir de manquement commun à cette obligation.

(4)               Le calcul des dommages‑intérêts

[70]           À moins d’une interprétation commune de tous les Traités numérotés, la question de la méthode de calcul des dommages‑intérêts ne peut être une question commune aux membres du groupe. Si les demandeurs réussissaient à établir que les annuités prévues par plus d’un traité doivent être rajustées, alors il sera nécessaire d’effectuer une analyse complète de chacun de ces traités pour déterminer la méthode appropriée pour établir la valeur des annuités. De plus, il sera également nécessaire de fixer la date de commencement de ce rajustement à l’égard de chaque traité et il se peut qu’il y ait des variations entre les bénéficiaires des bandes initiales visées par les traités et les bénéficiaires des bandes qui ont adhéré au traité beaucoup plus tard.

[71]           Pour ces motifs, je conclus qu’aucun point ni fait communs n’a été soulevé concernant les membres individuels du groupe proposé. Les demandeurs n’ont pas satisfait à la troisième condition nécessaire pour autoriser la présente action en recours collectif.

D.                La meilleure procédure

[72]           Pour déterminer si le recours collectif est la meilleure procédure pour le règlement juste et efficace des questions communes, la Cour doit tout d’abord déterminer si une telle procédure constitue un moyen juste, efficace et pratique de faire progresser l’instance et, deuxièmement, si le recours collectif est préférable aux autres procédures (Rumley, au paragraphe 35).

[73]           Lors de l’examen de la question de la meilleure procédure, il faut considérer les questions communes dans le contexte général de l’action et la Cour doit en examiner « l’importance [...] par rapport à l’ensemble des revendications » (AIC Limited c Fisher, 2013 CSC 69, au paragraphe 21 [AIC], citant l’arrêt Hollick au paragraphe 30). Dans l’arrêt Hollick, la Cour suprême a reconnu qu’il importait de recourir « [traduction] […] à une analyse pratique tenant compte des coûts et des avantages et de prendre en considération l’incidence d’un recours collectif sur les membres du groupe, les défendeurs et le tribunal ». Ainsi, la Cour doit examiner tous les moyens raisonnables disponibles de régler les réclamations et non pas simplement faire en sorte que l’affaire aille de l’avant en tant que réclamations individuelles.

[74]           Dans l’arrêt AIC, la Cour suprême a statué que l’analyse relative au meilleur moyen était un exercice comparatif dans le cadre duquel la cour doit certes examiner dans quelle mesure le recours collectif projeté permet la réalisation des objectifs de l’économie des ressources judiciaires, de la modification des comportements et de l’accès à la justice. La véritable question est celle de savoir s’il existe « des moyens préférables de régler les demandes ».

[75]           Les demandeurs soutiennent que les actions individuelles et actions collectives sont les deux solutions de rechange valables, mais qu’aucune des deux ne serait pratique ou efficace lorsque comparée à un recours collectif.

[76]           Le Canada convient avec les demandeurs que des actions individuelles ne seraient pas appropriées, mais en convient au motif qu’il n’existe pas de droits individuels. Le Canada fait valoir que les réclamations de ces demandeurs seraient débattues de façon plus appropriée en tant qu’action collective instituée pour le compte de la PNHL et dont la portée se limiterait à l’interprétation de la disposition sur les annuités du Traité no 8. Le Canada soutient qu’une action collective visant tous les Traités numérotés n’est pas un moyen approprié de régler ces réclamations, parce que la portée est trop vaste et que cela est incompatible avec les principes d’interprétation des traités.

[77]           Les deux parties conviennent que le Tribunal des revendications particulières n’est pas la voie appropriée pour régler ces réclamations.

[78]           Après avoir conclu que l’action ne peut être autorisée comme recours collectif parce que les réclamations du groupe ne soulèvent pas de points de fait ou de droit communs, il n’est pas nécessaire d’examiner cette condition d’autorisation de façon très approfondie. Il vaut peut‑être mieux ne pas en dire plus. Toutefois, au bénéfice des parties et uniquement à titre de remarques incidentes afin de ne pas lier le juge à l’occasion d’une réclamation ultérieure, permettez-moi de faire les observations suivantes.

[79]           Je suis d’accord avec les parties que l’institution de nombreuses actions individuelles n’est pas le moyen approprié de procéder pour les raisons évidentes invoquées par tous les avocats. En revanche, une seule instance englobant tous les bénéficiaires d’annuités visés par onze traités différents négociés à des moments différents et dans des conditions différentes est exagérée. Un recours collectif ou une action collective limitée aux membres des bandes signataires assujetties à l’un des Traités numérotés paraît être une procédure crédible et, peut-on soutenir, appropriée.

[80]           Bien qu’il revienne au demandeur ou aux demandeurs de choisir la solution de rechange, j’estime que la position du Canada selon laquelle une action collective peut être plus appropriée est valable.

[81]           Si les réclamations des bénéficiaires d’annuités visés par un traité devaient être débattues en tant que recours collectif, alors chaque bénéficiaire serait autorisé à se retirer du recours. Selon le dossier, en date de juin 2014, une action individuelle et 15 actions collectives ont été instituées pour le compte de différentes bandes visées par des traités devant la Cour ou une cour supérieure. En vertu du paragraphe 334.21(2) des Règles, les personnes visées par ces actions seront automatiquement exclues du recours collectif, à moins qu’elles ne se désistent de ces actions. Pour des raisons relatives à la prescription, la Cour a été informée que le désistement était peu probable.

[82]           La disposition prévue dans le régime des recours collectifs concernant le retrait reconnaît à juste titre qu’une personne possédant une cause d’action peut choisir d’instituer son propre recours et ne devrait pas être automatiquement liée par la décision d’un tribunal dans un recours collectif. Pour cette raison, une décision rendue dans le cadre d’un recours collectif ne lie pas un demandeur individuel qui se retire ni ne lie le défendeur à l’égard de la réclamation de cette personne. Cette réalité met clairement en lumière la raison pour laquelle les recours collectifs ne sont pas en règle générale appropriés lorsque la question fondamentale à trancher est l’interprétation à donner à la disposition d’un traité. La Cour ne peut accepter que différents tribunaux ou juges adoptent des interprétations différentes d’un traité (un résultat possible dans un recours collectif suivi par d’autres instances par représentation ou actions individuelles). Cela en soi est un motif de conclure que, lorsque la réclamation repose, comme en l’espèce, sur l’interprétation d’un traité, cette réclamation sera mieux débattue au moyen d’une action collective, à l’égard de laquelle le retrait n’est pas un choix.

E.                 Le caractère approprié du représentant demandeur

[83]           Les demandeurs soutiennent que le chef a le droit de recevoir des annuités en vertu du Traité no 8 et que par conséquent, il est un membre du groupe envisagé. Il est le chef élu de la PNHL.

[84]           Selon les demandeurs, un représentant demandeur n’est pas tenu de posséder des connaissances détaillées à propos des questions juridiques soulevées dans l’action ou du processus applicable aux litiges civils pour représenter un groupe de façon équitable et appropriée (voir Maxwell c MLG Ventures Ltd., [1995] OJ no 1163 au paragraphe 10 (CJ Ont, Div gén); Momi, au paragraphe 75). Les demandeurs soutiennent que le chef a montré qu’il comprenait les réclamations de base dans la présente action et qu’il avait la capacité de donner des instructions aux avocats. Il sait qu’il représenterait tous les membres du groupe envisagé. De plus, les demandeurs font valoir que le chef n’a pas de conflit d’intérêts en ce qui a trait aux questions communes et qu’il a présenté un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre lui et les avocats du groupe. Ces conventions prévoient que les honoraires d’avocats peuvent atteindre un tiers des montants recouvrés ou des avantages obtenus dans le cadre du recours collectif. En bref, ils font valoir que toutes les exigences de l’alinéa 334.16(1)e) ont été respectées.

[85]           Si la Cour autorise le groupe envisagé à l’égard de toutes les bandes visées par la Loi sur les Indiens, les demandeurs soutiennent subsidiairement que la PNHL, représentée par le chef, est une représentante demanderesse appropriée. Les membres inscrits de la PNHL ont le droit de recevoir les annuités prévues au Traité no 8 et le chef est le chef élu de la PNHL.

[86]           Les demandeurs font valoir que le plan de litige démontre leur capacité à faire valoir avec rigueur la présente demande pour le compte du groupe. Ils soulignent « qu’il n’y a pas lieu d’examiner en détail un plan de litige à l’étape de l’autorisation », mais celui-ci doit démontrer que « le demandeur et son avocat ont réfléchi au déroulement de l’instance et qu’ils en saisissent les complexités » (Buffalo CF, au paragraphe 148).

[87]           Le Canada soutient, en citant des passages de l’interrogatoire du chef, que ni le chef ni la PNHL ne sont des représentants demandeurs appropriés pour le groupe envisagé.

[88]           Je suis d’accord avec le Canada que pour faire valoir un recours collectif avec rigueur et compétence, le représentant demandeur doit avoir au moins une compréhension de base de l’affaire à débattre et de son rôle dans le cadre du litige (Sullivan c Golden Intercapital (GIC) Investments Corp., 2014 ABQB 212 aux paragraphes 54 à 57). Le Canada m’a convaincu que l’interrogatoire du chef a montré qu’il ne connaissait pas suffisamment les faits et les points soulevés par la demande et qu’il ne comprend pas ses responsabilités qui lui incombent à titre de représentant demandeur. Il n’a que des connaissances rudimentaires des faits et des points soulevés par la demande qu’il fait valoir, il ne connaît les modalités d’aucun Traité numéroté et ne connaît pas la façon dont le droit aux annuités est établi. Il semblait être tout au plus un spectateur du litige en ce qu’il n’a pas joué un rôle actif à l’égard des décisions concernant le litige. Il n’a pas participé à l’identification ou à l’établissement du groupe projeté et ne savait pas si d’autres bandes visées par des traités ou membres de bandes l’avaient autorisé lui ou la PNHL à les représenter dans ce recours collectif. Même si le Canada a raison de souligner qu’il n’a pris aucune mesure pour identifier des témoins ou réunir des documents pertinents, cela est très peu pertinent, puisqu’il est tôt dans le litige pour prendre ces mesures. Il est toutefois troublant qu’il semble avoir peu ou pas de connaissances indépendantes concernant les actes de procédure, le plan de litige ou le plan d’avis dans l’action en l’espèce. Lors de l’interrogatoire du chef, le Canada a établi qu’il ne comprenait rien aux recours collectifs ni à son rôle en qualité de représentant demandeur.

[89]           Bien que les demandeurs soutiennent que ni le chef ni la PNHL n’ont de conflit d’intérêts avec d’autres membres du groupe projeté, je dois convenir avec le Canada qu’aucun des demandeurs n’a véritablement examiné la question de savoir si des conflits pouvaient exister. Les actes de procédure dans d’autres affaires en cours visant des annuités montrent la possibilité d’existence d’un conflit entre les personnes en ce qui a trait à qui a droit aux annuités ou qui devrait être considéré comme y ayant droit et la méthode pour établir les rajustements du montant.

[90]           Pour ces motifs, je conclus qu’aucun des demandeurs n’est un représentant demandeur approprié pour le recours collectif envisagé.

Conclusion

[91]           Pour les motifs exposés ci-dessus, la requête en autorisation de l’action en l’espèce à titre de recours collectif doit être rejetée. Conformément à l’article 334.39 des Règles, chaque partie assume ses propres frais.


ORDONNANCE

la cour ordonne que la requête en autorisation de la présente action comme recours collectif soit rejetée, sans frais.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes
Annexe A — Dispositions des Traités numérotés relatives aux rentes

Traité no 1 (le 3 août 1871)

« Aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, le commissaire de Sa Majesté fera faire le dénombrement exact de tous les indiens habitant le district ci-dessus décrit, en les répartissant par familles, et chaque année après la date de ce recensement, dans le courant du mois de juillet, et après en avoir dûment notifié les indiens, il paiera à chaque famille indienne de cinq personnes la somme de 15 dollars, cours du Canada, ou dans cette proportion pour les familles plus ou moins nombreuses, ce paiement devant se faire en effets de l’espèce que ces indiens choisiront, tels que couvertures de laine, étoffes indiennes (de couleurs assorties), fil et pièges, au prix courant de Montréal, ou en argent, si Sa Majesté le juge à propos et dans l’intérêt des indiens. »

Décret (le 30 avril 1875)

[traduction] « [C]ompte tenu du fait qu’il semble y avoir eu un malentendu entre le commissaire des Indiens et ces derniers en ce qui a trait aux traités nos 1 et 2, le gouvernement, comme preuve de sa bonne volonté et de sa bienveillance à l’égard des Indiens, consent à faire passer de 3 $ à 5 $ par année le montant du versement annuel remis à chaque Indien aux termes des traités nos 1 et 2, à verser en sus de cette nouvelle somme un montant annuel de $20 à chaque chef et à donner à chaque chef et à chaque dirigeant un habit complet tous les trois ans, chaque bande ayant droit à deux dirigeants, à la condition expresse, cependant, que chaque chef ou Indien bénéficiant de cette indemnité ou de ce versement annuel accru accepte de renoncer à toute réclamation auprès du gouvernement en ce qui concerne les "promesses ultérieures" autres que celles qui sont énoncées dans le mémoire annexé au traité. »

Traité no 2 (le 21 août 1871)

« Aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, le commissaire de Sa Majesté fera faire le dénombrement exact de tous les Indiens habitant le district ci-dessus décrit, en les répartissant par familles, et, chaque années après la date de ce recensement, dans le courant du mois de juillet, et après avoir dûment notifié les Indiens, il paiera à chaque famille indienne de cinq personnes la somme de 15 dollars, cours du Canada, ou dans cettre proportion pour les familles plus ou moins nombreuses, ce paiement devant se faire en effets de l’espèce que les Indiens choisiront, tels que couvertures de laine, étoffes indienne (de couleurs assorties), fil et pièges, aux prix courants de Montréal, ou en argent, si Sa Majesté le juge à propos et dans l’intérêt des Indiens. »

Décret (le 30 avril 1875)

[traduction] « [C]ompte tenu du fait qu’il semble y avoir eu un malentendu entre le commissaire des Indiens et ces derniers en ce qui a trait aux traités nos 1 et 2, le gouvernement, comme preuve de sa bonne volonté et de sa bienveillance à l’égard des Indiens, consent à faire passer de 3 $ à 5 $ par année le montant du versement annuel remis à chaque Indien aux termes des traités nos 1 et 2, à verser en sus de cette nouvelle somme un montant annuel de $20 à chaque chef et à donner à chaque chef et à chaque dirigeant un habit complet tous les trois ans, chaque bande ayant droit à deux dirigeants, à la condition expresse, cependant, que chaque chef ou Indien bénéficiant de cette indemnité ou de ce versement annuel accru accepte de renoncer à toute réclamation auprès du gouvernement en ce qui concerne les "promesses ultérieures" autres que celles qui sont énoncées dans le mémoire annexé au traité. »

Traité no 3 (le 3 octobre 1873)

« Et de plus il est convenu que les Commissaires de Sa Majesté, aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, feront faire un recensement exact de tous les Indiens qui habitent le pays ci-dessus décrit, les divisant en familles, et, chaque année, à partir de cette date, à une certaine époque dûment annoncée aux Indiens et à une ou des places fixées pour cette fin dans les limites du territoire cédé, paieront à chaque personne indienne la somme de cinq dollars par tête annuellement.

[…]

IL EST DE PLUS CONVENU entre Sa Majesté et les dits Indiens que chaque chef dûment reconnu comme tel, recevra un salaire annuel de vingt-cinq dollars par année, et chaque officier subordonné le nombre ne devant pas excéder trois par bande, — recevra quinze dollars par année; […] »

Traité no 4 (le 5 septembre 1874)

 « Aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, Sa Majesté fera faire un recensement de tous les Indiens habitant le pays ci-dessus décrit, et, l’année suivante, et annuellement ensuite, pour toujours, fera payer, argent comptant, à quelque époque convenable dont avis sera donné aux Indiens, et à une place ou des places choisies pour cette fin dans les limites du territoire cédé: chaque chef, vingt-cinq dollars; chaque homme marquant, dont le nombre ne devra pas excéder quatre par bande, quinze dollars; et à tout autre Indien, homme, femme et enfant, cinq dollars par tête; tels paiements devant être faits aux chefs de familles pour ceux qui les composent, à moins que pour quelque raison particulière, la chose soit sujette à objection. »

Traité no 5 (les 20 et 24 septembre 1875)

« Et de plus il est convenu que les Commissaires de Sa Majesté, aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, feront faire un recensement exact de tous les Indiens qui habitent le pays ci-dessus décrit, les divisant en familles; et chaque année, à partir de cette date, à une certaine époque dûment annoncée aux Indiens, et à une ou des places fixées pour cette fin dans les limites du territoire cédé, ils paieront à chaque personne indienne la somme de cinq dollars par tête annuellement.

[…]

IL EST DE PLUS CONVENU entre Sa Majesté et les dits Indiens que chaque chef dûment reconnu comme tel, recevra un salaire annuel de vingt-cinq dollars par année, et chaque officier subordonné, le nombre ne devant pas excéder trois par bande, — recevra quinze dollars par année; […] »

Traité no 6 (les 23 et 28 août et le 9 septembre 1876)

« Et, en outre, que les commissaires de Sa Majesté devront, aussitôt que possible après l’exécution de ce traité, faire prendre un recensement exact de tous les Indiens habitant l’étendue de pays ci-dessus décrite, en les rangeant par familles, et ils devront, chaque année après la date de ce recensement, à une certaine époque de l’année, dont on donnera dûment avis aux Indiens, et dans un endroit ou des endroits désignés à cet effet, dans l’étendue des limites des territoires cédés, payer à chaque personne indienne la somme de cinq dollars par tête annuellement;

[…]

Il est, en outre, convenu entre Sa Majesté et les dits Indiens que tout chef, dûment reconnu comme tel, devra recevoir un traitement annuel de vingt-cinq dollars par année; et tout officier subalterne, n’excédant pas le nombre de quatre pour chaque bande, devra recevoir quinze dollars par année; […] »

Traité no 7 (le 22 septembre 1877)

« Il est en outre entendu entre Sa Majesté et les Indiens qu’à partir de l’année prochaine et toutes les années subséquentes, et pour toujours, ils recevront en argent, à des endroits et des dates convenables, dont avis leur sera donné, vingt-cinq dollars pour chaque chef, à chaque sous-chef ou conseiller (le nombre de sous-chefs ne devant pas dépasser quinze chez les Pieds-Noirs et les Gens-du-Sang, quatre pour les bandes de Piégânes et des Sarcis, et cinq conseillers pour les bandes des Indiens Stony) quinze dollars et à chaque autre Indiens de tout âge, cinq dollars; ces montants, à moins de raisons particulières, devront être payés au chef de famille pour tous ceux qui en font partie. »

Traité no 8 (le 21 juin 1899)

« Sa Majesté convient aussi que l’an prochain et toutes les années subséquentes pour toujours, elle fera payer aux dits indiens, en argent, à des endroits et des dates convenables, dont avis leur sera donné, vingt-cinq dollars à chaque chef, à chaque conseiller, ne devant pas dépasser quatre pour chaque grande bande et deux pour une petite bande, quinze dollars, et à chaque autre indien de tout âge, cinq dollars, ces montants, à moins de raisons particulières, devront être payés au chef de famille pour tous ceux qui en font partie. »

Traité no 9 (le 6 novembre 1905)

« Sa Majesté convient de plus de payer, à partir de l’an prochain, aux lieux et dates annoncés, une rente annuelle de 4 dollars à chacun des indiens. À moins d’une raison tout-à-faite exceptionnelle, c’est le chef de la famille qui percevra toutes les rentes. »

Traité no 10 (le 28 août 1906)

« Sa Majesté convient aussi que l’année prochaine et chaque année subséquente à l’avenir et à toujours elle fera payer aux indiens en argent, à des endroits et à des dates convenables, dont les dits indiens seront dûment notifiés, à chaque chef vingt-cinq (25) dollars, à chaque sous-chef, quinze (15) dollars et à chaque autre indien quel que soit son âge, cinq (5) dollars. »

Traité no 11 (le 27 juin 1921)

« SA MAJESTÉ convient aussi que l’an prochain et toutes les années subséquentes pour toujours, il fera payer aux dits Indiens en argent, à des endroits et des dates convenables, dont avis leur sera donné, vingt-cinq dollars à chaque chef, à chaque conseiller, quinze dollars, et à chaque autre Indien de tout âge, cinq dollars; ces montants devront être payés au chef de famille pour tous ceux qui en font partie, étant entendu, aux fins du présent traité, que chaque bande comptant au moins trente personnes peut avoir des conseillers ou des dirigeants à raison d’un conseiller ou d’un dirigeant par centaine de membres. »


Annexe B — Règles des Cours fédérales – Autorisation des recours collectifs

334.16(1) Sous réserve du paragraphe (3), le juge autorise une instance comme recours collectif si les conditions suivantes sont réunies:

334.16(1) Subject to subsection (3), a judge shall, by order, certify a proceeding as a class proceeding if

a) les actes de procédure révèlent une cause d’action valable;

(a) the pleadings disclose a reasonable cause of action;

b) il existe un groupe identifiable formé d’au moins deux personnes;

(b) there is an identifiable class of two or more persons;

c) les réclamations des membres du groupe soulèvent des points de droit ou de fait communs, que ceux-ci prédominent ou non sur ceux qui ne concernent qu’un membre;

(c) the claims of the class members raise common questions of law or fact, whether or not those common questions predominate over questions affecting only individual members;

d) le recours collectif est le meilleur moyen de régler, de façon juste et efficace, les points de droit ou de fait communs;

(d) a class proceeding is the preferable procedure for the just and efficient resolution of the common questions of law or fact; and

e) il existe un représentant demandeur qui:

(e) there is a representative plaintiff or applicant who

(i) représenterait de façon équitable et adéquate les intérêts du groupe,

(i) would fairly and adequately represent the interests of the class,

 (ii) a élaboré un plan qui propose une méthode efficace pour poursuivre l’instance au nom du groupe et tenir les membres du groupe informés de son déroulement,

(ii) has prepared a plan for the proceeding that sets out a workable method of advancing the proceeding on behalf of the class and of notifying class members as to how the proceeding is progressing,

(iii) n’a pas de conflit d’intérêts avec d’autres membres du groupe en ce qui concerne les points de droit ou de fait communs,

(iii) does not have, on the common questions of law or fact, an interest that is in conflict with the interests of other class members, and

(iv) communique un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre lui et l’avocat inscrit au dossier.

(iv) provides a summary of any agreements respecting fees and disbursements between the representative plaintiff or applicant and the solicitor of record.

(2) Pour décider si le recours collectif est le meilleur moyen de régler les points de droit ou de fait communs de façon juste et efficace, tous les facteurs pertinents sont pris en compte, notamment les suivants:

(2) All relevant matters shall be considered in a determination of whether a class proceeding is the preferable procedure for the just and efficient resolution of the common questions of law or fact, including whether

a) la prédominance des points de droit ou de fait communs sur ceux qui ne concernent que certains membres;

(a) the questions of law or fact common to the class members predominate over any questions affecting only individual members;

b) la proportion de membres du groupe qui ont un intérêt légitime à poursuivre des instances séparées;

(b) a significant number of the members of the class have a valid interest in individually controlling the prosecution of separate proceedings;

c) le fait que le recours collectif porte ou non sur des réclamations qui ont fait ou qui font l’objet d’autres instances;

(c) the class proceeding would involve claims that are or have been the subject of any other proceeding;

d) l’aspect pratique ou l’efficacité moindres des autres moyens de régler les réclamations;

(d) other means of resolving the claims are less practical or less efficient; and

e) les difficultés accrues engendrées par la gestion du recours collectif par rapport à celles associées à la gestion d’autres mesures de redressement.

(e) the administration of the class proceeding would create greater difficulties than those likely to be experienced if relief were sought by other means.

(3) Si le juge constate qu’il existe au sein du groupe un sous-groupe de membres dont les réclamations soulèvent des points de droit ou de fait communs que ne partagent pas tous les membres du groupe de sorte que la protection des intérêts des membres du sous-groupe exige qu’ils aient un représentant distinct, il n’autorise l’instance comme recours collectif que s’il existe un représentant demandeur qui:

(3) If the judge determines that a class includes a subclass whose members have claims that raise common questions of law or fact that are not shared by all of the class members so that the protection of the interests of the subclass members requires that they be separately represented, the judge shall not certify the proceeding as a class proceeding unless there is a representative plaintiff or applicant who

a) représenterait de façon équitable et adéquate les intérêts du sous-groupe;

(a) would fairly and adequately represent the interests of the subclass;

b) a élaboré un plan qui propose une méthode efficace pour poursuivre l’instance au nom du sous-groupe et tenir les membres de celui-ci informés de son déroulement;

(b) has prepared a plan for the proceeding that sets out a workable method of advancing the proceeding on behalf of the subclass and of notifying subclass members as to how the proceeding is progressing;

c) n’a pas de conflit d’intérêts avec d’autres membres du sous-groupe en ce qui concerne les points de droit ou de fait communs;

(c) does not have, on the common questions of law or fact for the subclass, an interest that is in conflict with the interests of other subclass members; and

d) communique un sommaire des conventions relatives aux honoraires et débours qui sont intervenues entre lui et l’avocat inscrit au dossier.

(d) provides a summary of any agreements respecting fees and disbursements between the representative plaintiff or applicant and the solicitor of record.

 


cour fédérale

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

T-1784-12

Intitulé :

LE Chef Eugene Horseman et aL c Sa Majesté la Reine

 

Lieu de l’audience :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Date de l’audience :

Le 9 mars 2015

 

motifs de l’ordonnance et ordonnance :

le juge ZINN

 

Date des motifs :

Le 7 octobre 2015

 

Date de l’ordonnance modifiée :

Le 15 octobre 2015

 

Comparutions :

Paul R. Bennett

Mark W. Mounteer

 

Pour les demandeurs

 

Kathy Ring, Shelan Miller,

Lisa Laird, Brett Nash

 

Pour la défenderesse

 

Avocats inscrits au dossier :

Hordo Bennett Mounteer LLP

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

Donovan & Company

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Section du droit applicable aux Autochtones

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour la défenderesse

 

 

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