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Date : 20151009


Dossier : T-238-80

Référence : 2015 CF 1159

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 9 octobre 2015

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

JIM SHOT BOTH SIDES ET ROY FOX,

CHARLES FOX, STEVEN FOX,

THERESA FOX, LESTER TAILFEATHERS,

GILBERT EAGLE BEAR,

PHILLIP MISTAKEN CHIEF,

PETE STANDING ALONE,

ROSE YELLOW FEET,

RUFUS GOODSTRIKER ET

LESLIE HEALY,

CONSEILLERS DE LA BANDE DES BLOOD,

EN LEUR PROPRE NOM ET EN CELUI

DES INDIENS DE LA RÉSERVE NUMÉRO 148

DE LA BANDE DES BLOOD et

LA RÉSERVE NUMERO 148 DE LA BANDE DES BLOOD

 

demandeurs

et

SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               Les demandeurs [la Tribu des Blood] et la défenderesse [le Canada] ont toutes deux présenté des requêtes complémentaires concernant les aspects procéduraux du procès relatif à la présente action. Les requêtes ont été instruites ensemble; l’ordonnance et les motifs en l’espèce traitent des deux requêtes.

[2]               Dans l’action, la Tribu des Blood allègue que le territoire qui lui a été donné par le Canada est de superficie moindre que celle convenue au titre des dispositions du Traité no 7.

[3]               La Tribu des Blood, conformément à une directive délivrée par le juge responsable de la gestion de l’instance le 12 septembre 2014, sollicite une ordonnance confirmant que la présente action sera instruite en trois phases. Les deux parties et la Cour conviennent de procéder ainsi.

[4]               Au cours de la phase 1, la Cour recevra les éléments de preuve concernant les traditions orales de la Tribu des Blood ainsi que des témoignages d’aînés de la Tribu des Blood sous forme de récits oraux. Les parties conviennent que cette preuve sera entendue dans la réserve de la Tribu des Blood, qui est située près de Standoff (Alberta). Le juge du procès ainsi que les parties et leurs avocats ont effectué une visite de site pour confirmer que les installations qui s’y trouvent sont adéquates pour entendre et consigner cette preuve. L’entente visant à ce que le témoignage des aînés soit entendu avant le reste de la preuve qui sera fournie au procès a été conclue, parce que les aînés qui ont été proposés comme témoins ne rajeunissent pas et que certains d’entre eux pourraient ne pas être disponibles pour témoigner plus tard, ou être incapables de le faire. Les parties et la Cour conviennent qu’il est préférable de procéder de cette manière plutôt que de recueillir les témoignages par commission rogatoire. Elles conviennent aussi que, compte tenu de l’important délai entre la réception du témoignage des aînés et la réception du reste de la preuve, la Cour entendra les observations quant à l’admissibilité de la preuve des aînés immédiatement après les témoignages de ces derniers. Une décision quant à l’admissibilité pourrait être rendue uniquement à la conclusion de la phase 2 du procès, si le juge est d’avis qu’un tel délai sert mieux les intérêts de la justice.

[5]               Au cours de la phase 2, qui se déroulera dans les deux années suivant la phase 1 à moins que le juge du procès en ordonne autrement, la Cour recevra la preuve du Canada ainsi que toute contre-preuve de la Tribu des Blood. À la suite de la phase 2, la Cour rendra un jugement quant à la réclamation, mais ne tranchera pas les questions se rapportant au redressement si la Tribu des Blood a gain de cause. La phase 3, si nécessaire, traitera du redressement.

[6]               La Tribu des Blood demande aussi à la Cour de rendre une ordonnance selon laquelle les parties, sous réserve de toute directive du juge responsable de la gestion de l’instance ou du juge du procès, et sans égard au commencement ou à l’achèvement de la phase 1 du procès, ont droit de :

a.    Procéder à un nouvel interrogatoire préalable des agents et employés de la partie adverse, conformément aux Règles des Cours fédérales, et ce, avant le début de la phase 2 du procès;

b.    Signifier des avis d’intention de recueillir des témoignages d’experts avant le début de la phase 2 du procès;

c.    Signifier de tels avis dans les sept jours précédant le début de la phase 2 du procès, comme le permet la Loi sur la preuve au Canada et l’Alberta Evidence Act.

[7]               Le Canada ne s’oppose pas au prononcé d’une telle ordonnance et la Cour est convaincue qu’elle servirait les intérêts de la justice.

[8]               La Tribu des Blood demande aussi à la Cour de rendre une ordonnance selon laquelle la phase 1 peut comprendre une visite de site des endroits situés dans la réserve de la Tribu des Blood ou près de celle‑ci, et qui, selon la Tribu, seront abordés dans le témoignage des aînés. Le Canada ne s’y oppose pas. La Cour consent à une telle visite de site, pourvu qu’elle ne produise pas une preuve constituant le fondement d’une inférence qui pourrait être tirée par le juge du procès, et que l’objet de cette visite se limite à donner au juge du procès et aux avocats une meilleure compréhension du témoignage qui sera livré par les aînés. Si une telle visite de site a lieu, la Tribu des Blood en informera la Cour et le Canada, et ce, au moins 6 semaines avant le commencement de la phase 1; à défaut, aucune visite de site n’aura lieu. Toute visite de site sera organisée par la Tribu des Blood, à ses frais, et tous les avocats, leurs conseillers, le juge du procès et le personnel de la Cour prendront part à cette visite, qui devra avoir lieu lors de la première journée de la phase 1.

[9]               Le Canada, dans sa requête incidente, demande à la Cour de rendre une ordonnance établissant un protocole relatif à l’instruction de la preuve produite dans la phase 1. Les deux parties ont fourni une proposition de protocole pour cette partie du procès. La question en litige entre les parties qui a été plaidée en détail est la demande du Canada visant à ce que la Tribu des Blood fournisse, avant le début de la phase 1 du procès, des déclarations de « témoignages anticipés » à l’égard des témoignages des aînés.

[10]           Le Canada a proposé le protocole suivant en ce qui a trait aux déclarations de témoignages anticipés :

1. DÉCLARATIONS DE TÉMOIGNAGES ANTICIPÉS :

a.  Les demandeurs fourniront à la défenderesse, d’ici une date limite qui sera fixée par le juge responsable de la gestion de l’instance, une déclaration de témoignage anticipé pour chaque aîné qui sera appelé à titre de témoin.

b.  Les déclarations de témoignages anticipés contiendront suffisamment de détails pour permettre des contestations fondées sur la pertinence ou autre, ainsi que pour permettre une préparation adéquate d’un contre‑interrogatoire. Le contenu de la déclaration comprendra, sans toutefois s’y limiter, une déclaration détaillée, précise et exhaustive de :

i.          La langue qui sera employée par chaque aîné;

ii.         La manière avec laquelle la tradition orale des aînés est conservée, les personnes qui ont le droit de relater la tradition orale et comment elles ont obtenu ce droit, la pratique de la communauté en ce qui a trait à la protection de l’intégrité de sa tradition orale (dans la mesure où ce renseignement n’est pas donné dans le rapport ou dans la déclaration d’un autre expert);

iii.        Des renseignements suffisants quant aux antécédents personnels, familiaux, communautaires et professionnels de l’aîné, de manière à pleinement évaluer le statut du témoin à titre d’aîné dans la communauté et l’autorité de celui‑ci pour réciter la tradition orale (dans la mesure ce renseignement n’est pas donné dans le rapport ou la déclaration d’un autre expert);

iv.        Tout autre élément contextuel au sujet de l’aîné qui est pertinent quant au témoignage qu’il livrera;

v.         Le moment et la manière avec laquelle l’aîné a eu connaissance de la preuve en question;

vi.        La personne ayant transmis la preuve à l’aîné, la relation entre l’aîné et cette personne, la réputation générale de cette personne et la question de savoir si cette personne a eu une connaissance directe de l’incident ou si on le lui a relaté;

vii.       Le contenu du témoignage du témoin.

c.  Les déclarations de témoignages anticipés ne constitueront pas une preuve au procès, mais la défenderesse pourra utiliser ces déclarations à titre de preuve d’une déclaration antérieure de l’aîné qui témoigne.

[11]           La Tribu des Blood s’est opposée à fournir des déclarations de témoignages anticipés pour les aînés. Ils soutiennent que [traduction« la preuve à propos de la tradition de la tribu des Blood, de sa culture et de son lien avec l’utilisation de leurs terres, aidera la Cour à comprendre quelles terres, selon les chefs de la Tribu des Blood, font partie de leur territoire natal ». La nature générale de cette preuve des aînés a été décrite dans les termes suivants par l’avocat à l’audience :

[traduction]
La Cour entendra donc la preuve de la tradition de la Tribu des Blood en ce qui a trait à la conclusion de traités et à la signature de traités. Elle entendra la preuve quant à la manière dont ils protégeaient leur territoire et, plus particulièrement, sur le concept de droit exclusif à leur territoire et au sujet du partage de leur territoire avec les autres. La Cour entendra la preuve à propos de la prise de décision au sein de la Tribu des Blood. La Cour entendra la preuve à propos des événements entourant l’adhésion au Traité no 7 par la Tribu des Blood et par les autres Premières Nations, y compris la preuve concernant ce qui s’est produit selon la perspective de la Tribu des Blood, l’obstacle de la langue et le problème occasionné par les interprètes. La Cour entendra la preuve de ce que le chef Red Crow voulait dire lorsqu’il a affirmé qu’il retournait à la maison, à la suite des négociations ayant mené au Traité no 7. Vous entendrez la preuve à propos de l’arpentage de la réserve et de l’emplacement des marqueurs d’arpentage. La Cour entendra la preuve à propos des déplacements des membres de la Tribu des Blood à l’époque du traité et d’autres éléments de preuve connexes se rapportant à la pauvreté et à la population de la Tribu des Blood. La Cour entendra la preuve à propos des territoires qui étaient traditionnellement utilisés par les membres de la Tribu des Blood à titre de domicile ou d’aire d’hivernage. La Cour entendra la preuve à propos de ce que ces terres signifiaient pour les membres de la Tribu des Blood et comment ces derniers les exploitaient. La Cour entendra la preuve à propos des faits subséquents pertinents, comme, par exemple, lorsque des mormons se sont mis à occuper une partie du territoire situé près de Cardston, ainsi que la preuve concernant le départ de membres de la Tribu des Blood des terres situées entre Waterton et Valley Rivers.

Voici là des exemples du type de preuve que vous entendrez.

[12]           La Tribu des Blood fait d’abord valoir qu’exiger des déclarations de témoignages anticipés [traduction« crée un processus tout à fait nouveau qui ne fait pas partie d’un procès civil conduit conformément au droit de la preuve et aux règles de la Cour ». La Tribu des Blood reconnaît que la Cour ainsi que d’autres tribunaux judiciaires ont exigé des témoins experts et des témoins « professionnels », comme les policiers, fournissent des déclarations de témoignages anticipés, mais ils soulignent que les aînés ne sont pas appelés à témoigner à titre d’experts et qu’ils ne peuvent pas être décrits comme des témoins expérimentés. De plus, ils soulignent que les aînés sont des hommes et des femmes âgés de 70 ans et plus, voire même 80 ans et plus. L’avocat demande : [traduction« Pourquoi la Cour donnerait-elle une broche à la partie adverse pour qu’elle pique et grille certains aînés », alors qu’une telle chose n’est pas nécessaire dans les autres affaires civiles?

[13]           L’avocat a tort lorsqu’il donne à penser que la présente action n’est pas différente des autres affaires civiles, car ce n’est pas le cas. Tout d’abord, dans les autres actions civiles, les témoignages des aînés ne seraient pas admis, ou, s’ils l’étaient, se verraient accorder peu de poids, puisqu’il s’agit de ouï‑dire. Dans la présente action, comme c’est le cas dans tous les autres litiges en matière autochtone, le témoignage est prima facie admissible, parce que la Tribu des Blood n’a pas une tradition d’histoire écrite, mais plutôt de tradition orale. Deuxièmement, contrairement aux autres actions civiles, il n’y a pas d’interrogatoire préalable du représentant des demandeurs, de sorte que le Canada n’a pas la possibilité de poser des questions en vue de connaître la preuve que la Tribu des Blood propose de présenter par l’intermédiaire de ses aînés à l’appui de la réclamation. Troisièmement, je rejette la proposition selon laquelle ces témoins sont exposés au risque de se faire « griller » en raison de leur âge avancé et parce que le Canada peut soulever des doutes quant à leur crédibilité si leurs témoignages divergent du contenu des déclarations de témoignages anticipés. Le Canada a accepté de conduire son contre‑interrogatoire dans le respect. Si le témoignage qui est livré à la suite de questions directes diverge de manière importante de ce qui a été mentionné dans la déclaration de témoignage anticipé du témoin, le témoin en question, ou l’avocat dans ses observations, devra en répondre. Il n’y a rien d’inhabituel ou de contraire à la norme à cet égard.

[14]           La Tribu des Blood fait aussi valoir que [traduction« la nature même de la preuve ne se prête pas à une déclaration de témoignages anticipés ». Je n’en suis pas convaincu. Les Lignes directrices de la Cour fédérale sur la pratique en matière de litiges intéressant les autochtones, qui ont été élaborées après de longues consultations avec tous les intervenants, envisagent précisément l’existence d’une divulgation avant le témoignage d’un aîné. Elles prévoient plus précisément ce qui suit à cet égard :

La partie qui fait témoigner un aîné devrait fournir des renseignements concernant l’aîné et le fondement de ses connaissances à propos du sujet sur lequel il témoignera. Compte tenu de la dynamique différente et les questions logistiques possibles qui peuvent arriver lors du témoignage d’un aîné, il n’est pas nécessaire que cette divulgation coïncide avec la divulgation des documents, pourvu qu’elle soit faite en temps opportun

La divulgation devrait également fournir des renseignements à propos des pratiques ou des protocoles de la collectivité autochtone relatifs à la demande de témoignage d’un aîné. Les aînés s’abstiennent souvent de se décrire comme tels et la partie qui appelle l’aîné à témoigner peut demander à un membre de la collectivité de présenter l’aîné et de confirmer son statut d’aîné.

La divulgation devrait également résumer le témoignage envisagé, gardant à l’esprit que le respect des Autochtones envers les aînés peut signifier ne pas aiguiller les propos de l’aîné et qu’un aîné qui n’est pas au fait de la procédure judiciaire peut répondre sur des sujets imprévus.

Lorsque le caractère adéquat de la divulgation soulève des difficultés entre les parties, ces dernières devraient solliciter de l’aide dans le cadre de la gestion de l’instance ou de la gestion de l’instruction en vue d’obtenir une directive ou une décision sur la divulgation à fournir et son échéance.

[Non souligné dans l’original.]

[15]           En dernier lieu, la Tribu des Blood fait valoir que la Cour n’a pas compétence pour ordonner à une partie de produire des déclarations de témoignages anticipés. Je conviens avec le Canada que la Cour a compétence pour rendre l’ordonnance qu’on lui demande de rendre, et elle l’a effectivement fait dans des affaires antérieures en matière autochtone. Le juge Russell, dans la décision Sawbridge Band c Canada, 2007 FC 657, au paragraphe 38, explique que les déclarations de témoignages anticipés [traduction« ont été conçues comme un outil procédural visant à garantir l’équité, l’efficience, la bonne préparation de tous, ainsi que pour prévenir les surprises au procès ». Bien que cela ne soit pas expressément prévu dans les Règles des Cours fédérales, un juge a compétence pour ordonner à une partie de produire des déclarations de témoignages anticipés en vertu des articles 3, 53, 265, 270 et 385 des Règles, lesquelles prévoient globalement qu’un juge peut rendre toute ordonnance relative au déroulement de l’action qui assure qu’une décision équitable soit rendue en temps opportun. À mon sens, si aucune déclaration de témoignage anticipé n’est produite relativement au témoignage des aînés, compte tenu des faits exposés ci‑dessus, l’action ne sera pas réglée de manière équitable et rapide, parce que la Couronne sera surprise et qu’elle ne sera pas en position de réellement soumettre à l’examen le témoignage des aînés, comme le prévoient les Lignes directrices de la Cour fédérale sur la pratique en matière de litiges intéressant les Autochtones, ainsi que la procédure judiciaire généralement reconnue au Canada.

[16]           Pour ces motifs, je suis disposé à ordonner à la Tribu des Blood de préparer et produire des déclarations de témoignages anticipés à l’attention du Canada en ce qui concerne le témoignage des aînés.

[17]           Je crois aussi qu’il est souhaitable que la Cour dresse un protocole détaillé concernant la conduite du présent procès, et plus particulièrement de la phase 1. Les parties ont reçu une ébauche du protocole que propose la Cour quant à cette phase, et elles ont formulé plusieurs commentaires qui ont été incorporés dans l’ordonnance.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.             Le procès dans la présente affaire se déroulera en trois phases :

Phase 1 – Témoignage des aînés de la Tribu des Blood et preuve connexe d’experts et de profanes de la Tribu des Blood [la preuve de la phase 1];

Phase 2 – Toute autre preuve de la Tribu des Blood et la preuve du Canada, y compris la preuve d’experts du Canada et la contre‑preuve de la Tribu des Blood [la preuve de la phase 2];

Phase 3 – La preuve concernant le redressement [la preuve de la phase 3].

2.             La phase 1 du procès aura lieu devant la Cour à l’édifice multifonctions de la Tribu des Blood, situé dans la municipalité de Standoff (Alberta), le lundi 2 mai 2016, à 9 h 30; cette phase ne durera pas plus de vingt (20) jours et consistera en la réception de la preuve de la phase 1. La salle d’audience sera configurée de la manière exposée au plan joint à titre d’annexe A. Les avocats et les agents de la Cour ne porteront pas leur uniforme officiel de la Cour, mais plutôt une tenue de ville décontractée. Le juge du procès portera sa toge. Le personnel de sécurité portera des vêtements qui les identifieront adéquatement en tant que tel. L’avocat restera assis lorsqu’il interrogera ou contre‑interrogera un aîné. Les avocats se lèveront uniquement lorsqu’ils s’adressent à la Cour.

3.             La Tribu des Blood peut conduire une cérémonie traditionnelle à l’endroit prévu pour la phase 1 du procès immédiatement avant que la Cour n’amorce cette phase.

4.             Le procès se poursuivra devant la Cour au 635, 8e avenue sud‑ouest, 3e étage, dans la Ville de Calgary (Alberta) à la suite de la phase 1, soit le lundi 30 mai 2016, à 9 h 30 (ou plus tôt, selon la directive du juge du procès), pour une durée de trois (3) jours. Lors de cette phase, les observations des parties quant à l’admissibilité de la preuve de la phase 1 seront entendues. Il est convenu que d’autres éléments de preuve pertinents à l’égard de certains de ces arguments peuvent être présentés lors de la phase 2 du procès, ce qui nécessitera des arguments supplémentaires quant à la recevabilité à ce moment‑là.

5.             Sous réserve de toute autre ordonnance du juge du procès, la phase 2 du procès commencera devant la Cour au 635, 8e avenue sud‑ouest, 3e étage, dans la Ville de Calgary (Alberta), le lundi 7 mai 2018 à 9 h 30, et sera d’une durée de vingt (20) jours.

6.             Sous réserve du paragraphe 11, chaque partie doit divulguer à la partie adverse tous les documents, dossiers, cartes, dessins, photos et autres éléments auxquels elle prévoit faire référence au cours de la phase 1 [les documents de la phase 1], et ce, dès que ces éléments sont identifiés. Dans les trente (30) jours précédant début du procès, les parties prépareront un recueil conjoint des documents, lequel contiendra les documents de la phase 1, et qui seront utilisés au cours de cette phase. L’admissibilité de tout document qui n’a pas été identifié et produit conformément à la présente disposition au cours de la phase 1 relèvera du pouvoir discrétionnaire du juge du procès.

7.             La Tribu des Blood présentera des éléments de preuve à la phase 1 concernant la manière dont sa tradition orale est conservée, les personnes qui ont droit de relater cette tradition, la manière dont ce droit est déterminé et la pratique de la communauté en ce qui a trait à la protection de l’intégrité de sa tradition orale. Dans la mesure où une telle preuve n’est pas contenue dans un rapport d’expert qui a été précédemment fourni au Canada ou validé au moyen de l’interrogatoire préalable avant la phase 1, la Tribu des Blood doit fournir au Canada une déclaration de témoignage anticipé du témoin ou des témoins (qui contiendra les détails exposés ci‑dessous) appelés à livrer le témoignage en question.

8.             Aucune requête visant à exclure de l’audience un aîné qui sera appelé à témoigner lors de la phase 1 ne sera présentée ou instruite avant que les témoignages se rapportant aux traditions orales de la Tribu des Blood ne soient terminés.

9.             Les aînés seront présentés avant leur témoignage par Annabel Crop Eared Wolf, ou par un autre témoin dont l’identité aura été convenue par les parties, qui présentera des éléments de preuve de nature biographique et généalogique concernant chaque aîné qui sera appelé à témoigner. Ce témoin livrera aussi un témoignage au sujet du fondement sur lequel les aînés sont reconnus par la Tribu des Blood. Si aucun interrogatoire préalable n’a été effectué concernant cette preuve, la Tribu des Blood fournira au Canada une déclaration de témoignage anticipé pour ce témoin, et ce, au moins quatre‑vingt‑dix (90) jours avant le début du procès. Ce témoin pourra être contre‑interrogé par le Canada.

10.         Tous les interrogatoires des aînés, y compris les interrogatoires directs et les contre‑interrogatoires, seront conduits de manière respectueuse et assujettis à la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, aux Règles des Cours fédérales, ainsi qu’à tout autre texte de loi applicable aux procès devant la Cour fédérale.

11.         La Tribu des Blood donnera au Canada une déclaration de témoignage anticipé pour chaque aîné qu’elle propose d’appeler à témoigner lors de la phase 1. La Tribu des Blood a désigné quatre (4) de ces aînés et l’a fait savoir au Canada. Dans les soixante (60) jours suivant la date de la présente ordonnance, ou une période plus longue si les parties y consentent ou si la Cour en ordonne ainsi, la Tribu des Blood donnera au Canada une déclaration de témoignage anticipé pour chacun de ces aînés. Une telle déclaration pour chacun des quatre autres aînés que la Tribu des Blood propose d’appeler à témoigner sera fournie au Canada d’ici le 31 décembre 2015. Le Canada disposera de quatre‑vingt‑dix (90) jours, après qu’on lui eut transmis la déclaration de témoignage anticipé à l’égard d’un aîné, pour relever et divulguer à la Tribu des Blood le ou les documents qu’elle souhaite soumettre à cet aîné.

12.         Les déclarations de témoignages anticipés contiendront suffisamment de détails pour permettre au Canada de contester les témoignages proposés quant à leur pertinence, ainsi que pour lui permettre de se préparer adéquatement en vue du contre‑interrogatoire. Le contenu de la déclaration de témoignage anticipé, pour chaque aîné, comprendra une description détaillée de :

a.       La langue qui sera employée par chaque aîné;

b.      Des renseignements quant aux antécédents personnels, familiaux, communautaires et professionnels de l’aîné, de manière à pleinement évaluer le statut de témoin à titre d’aîné de la communauté et l’autorité de celui‑ci pour réciter la tradition orale;

c.       Tout autre élément contextuel au sujet de l’aîné qui est pertinent quant au témoignage qu’il ou elle livrera;

d.      Le moment et la manière avec laquelle l’aîné a eu connaissance de la preuve en question;

e.       La personne qui a transmis la preuve à l’aîné, la relation entre l’aîné et cette personne, la réputation générale de cette personne et la question de savoir si cette personne avait eu une connaissance directe de l’incident ou si on lui a relaté;

f.       Le contenu du témoignage de l’aîné.

13.         Les déclarations de témoignages anticipés ne feront pas partie de la preuve au procès, mais la défenderesse pourra utiliser ces déclarations à titre de preuve d’une déclaration antérieure de l’aîné qui témoigne dans l’éventualité où le témoignage livré au procès diverge de manière importante du contenu du témoignage anticipé, ou qu’il soit incompatible avec cette déclaration.

14.         Les parties s’entendront au sujet d’un interprète et d’une personne épelant les mots, de manière à traduire le pied‑noir vers l’anglais et l’anglais vers le pied‑noir au besoin. Si les parties ne peuvent s’entendre au sujet d’un interprète ou d’une personne épelant les mots quatre‑vingt‑dix (90) jours avant le début de la phase 1, la Cour en nommera un (suivant les observations des parties). L’interprète et la personne épelant les mots sera impartiale, indépendante, à la satisfaction des parties et de la Cour, et il peut s’agir de deux personnes distinctes. Si l’interprétation devait être nécessaire, la Cour fournira le matériel pour l’interprétation simultanée.

15.         Le Canada n’interrompra pas un aîné alors que celui‑ci parle, sauf si une objection immédiate relative au privilège est nécessaire ou s’il y a de graves problèmes d’interprétation.

16.         Le retard ou le report d’une objection par le Canada ne portera pas atteinte à son droit de soulever l’objection plus tard au cours de la phase 1.

17.         Le Canada peut soulever une objection à l’égard d’une question posée par l’avocat avant que l’aîné ne commence son témoignage en réponse, s’il est d’avis que l’objection est sérieuse au point où elle doit être soulevée sur‑le‑champ. Toute omission du Canada de soulever une objection quant à une question au cours du témoignage d’un aîné ne portera pas atteinte son droit de s’opposer ultérieurement à la question (et à la réponse) au cours de la partie suivante de la phase 1, qui doit commencer le 30 mai 2016.

18.         Le Canada peut soulever une objection qui, selon lui, ne devrait pas attendre au lundi 30 mai 2016, après la clôture du témoignage donné par un aîné et avant le début du témoignage de l’aîné suivant, ou au cours des pauses lors du témoignage de l’aîné.

19.         Le Canada et la Tribu des Blood pourront, à compter du lundi 30 mai 2016, à 9 h 30, et pendant une période de trois (3) jours, présenter des arguments liés à l’admissibilité de la preuve des aînés qui a été recueillie à la phase 1.

20.         Une décision quant à l’admissibilité sera reportée jusqu’à la conclusion de la phase 2 si le juge du procès est d’avis qu’un tel report sert l’intérêt de la justice.

21.         Aucune décision quant au poids devant être attribué à toute partie de la preuve entendue lors de la phase 1 ne sera prise avant la conclusion de la phase 2 du procès.

22.         Un sténographe sera présent en tout temps au cours de la phase 1 et rédigera une transcription certifiée des instances de la phase 1. Celle‑ci sera réalisée en temps réel.

23.         La phase 1 sera enregistrée (vidéo et audio) par une ou des personnes convenues par les parties ou, à défaut d’une entente, nommées par la Cour. Ces nominations auront lieu conformément aux Lignes directrices de la Cour fédérale sur les médias, et la vidéo donnera un gros plan frontal direct du visage du témoin. Les enregistrements appartiennent à la Cour et une copie certifiée conforme de l’enregistrement audio et vidéo des instances de la phase 1 recevront une cote à titre de pièce au procès.

24.         Sans égard au commencement et à l’achèvement de la phase 1 du procès, les parties ont droit, sous réserve de toute directive du juge responsable de la gestion de l’instance ou du juge du procès, de :

a.       Procéder à un nouvel interrogatoire préalable des agents et employés de la partie adverse, conformément aux Règles des Cours fédérales, et ce, avant le début de la phase 2 du procès;

b.      Signifier des avis d’intention de recueillir des témoignages d’experts avant le début de la phase 2 du procès;

c.       Signifier de tels avis dans les sept jours précédant le début de la phase 2 du procès, comme le permet la Loi sur la preuve au Canada et le Alberta Evidence Act.

25.         Exception faite des questions découlant de la présente ordonnance, lesquelles seront tranchées par le juge du procès, le juge chargé de la gestion de l’instance continuera à gérer la présente action conformément aux Règles des Cours fédérales et règlera toutes les questions préliminaires au procès, à moins qu’il ne convienne que le juge du procès soit mieux placé que lui pour rendre une telle décision.

26.         Chaque partie assume ses propres frais afférents aux présentes requêtes.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

Maxime Deslippes


Annexe « A »

Plan de la configuration de la salle d’audience


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

T-238-80

 

INTITULÉ :

JIM SHOT BOTH SIDES ET AL c SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

CALGARY (ALBERTA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 JUILLET 2015

 

ordONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DE L’ORDONNANCE ET DES MOTIFS :

LE 9 OctobRe 2015

 

COMPARUTIONS :

Gary Befus

Gilbert Eagle Bear

 

pour les demandeurs

 

Marianne Panenka

Damon Park

 

pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Walsh LLP

Barristers and Solicitors

Calgary (Alberta)

 

pour les demandeurs

 

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ministère de la Justice du Canada

Région des Prairies

Edmonton (Alberta)

 

Pour lA DÉFENDERESSE

 

 

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