Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20151217


Dossier : IMM‑2412‑15

Référence : 2015 CF 1393

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 décembre 2015

En présence de monsieur le juge Boswell

ENTRE :

BAHRAM MOHITIAN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Vue d’ensemble

[1]               Le demandeur est un citoyen de l’Iran âgé de 53 ans. Il a avec son épouse, elle-même âgée de 43 ans, une fille de 19 ans et un fils de 14 ans. Depuis 2007, le demandeur travaille à son compte à la galerie Hassam Mohitian Silver de Téhéran, dans laquelle il détient une participation de 50 pour cent et où il occupe le poste de gérant. Il détient aussi une participation de 50 pour cent dans un verger d’agrumes situé à Chalous, en Iran, et, depuis 1996, il est propriétaire et gestionnaire d’un verger de noyers à Karaj, également en Iran. Les participations du demandeur dans ces entreprises sont évaluées à environ 1 177 120 $ CAN, et les autres biens dont il est propriétaire, à environ 1 036 000 $ CAN.

[2]               Le demandeur et son épouse sont venus visiter le Canada, plus particulièrement Vancouver et la Saskatchewan, pendant un mois en août 2007. Après ce voyage, en novembre 2007, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au Canada au titre de la catégorie des travailleurs autonomes, son intention étant d’acheter une ferme existante en Saskatchewan. Le traitement de la demande de visa de résident permanent est ensuite resté en plan près de sept ans, jusqu’à ce qu’un agent d’immigration de l’ambassade du Canada à Ankara, en Turquie, demande, dans une lettre datée du 6 février 2015, qu’on lui communique des formulaires d’immigration mis à jour et de nombreux autres documents. Par lettre datée du 8 mars 2015, le consultant embauché par le demandeur a transmis les documents demandés au service de l’immigration de l’ambassade. Par lettre datée du 30 mars 2015, un agent de l’ambassade [l’agent] a toutefois rejeté la demande de résidence permanente au Canada du demandeur à titre de travailleur autonome. Le demandeur sollicite maintenant le contrôle judiciaire de la décision de l’agent conformément au paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], et il demande à la Cour d’annuler la décision et de renvoyer l’affaire à un autre agent afin qu’il rende une nouvelle décision.

II.                Décision de l’agent

[3]               L’agent a déclaré dans la lettre de refus qu’il n’était pas convaincu que le demandeur répondait à la définition d’un « travailleur autonome » énoncée au paragraphe 88(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement], et que le demandeur n’avait pas fourni suffisamment de détails sur son emploi autonome envisagé au Canada. Selon l’agent, le demandeur n’avait pas fourni la preuve de recherches effectuées sur le coût des terres agricoles et des biens immobiliers en Saskatchewan, le coût des approvisionnements, les attentes quant aux salaires et aux revenus ou la faisabilité de l’exploitation agricole envisagée, de telle sorte qu’il n’avait pas démontré son intention de créer son propre emploi et de contribuer de manière importante à des activités économiques au Canada. L’agent a aussi déclaré dans la lettre de décision qu’il n’était [traduction] « pas convaincu » que le demandeur satisfaisait au [traduction] « critère de l’expérience utile ». L’agent a dit estimer que les fonds rapidement disponibles pour un transfert au Canada étaient peu importants, et ne pas être par conséquent convaincu que le demandeur pourrait se créer un emploi, subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille et apporter une contribution importante à la société canadienne. L’agent a ajouté dans la lettre de refus que le demandeur n’avait pas [traduction] « présenté un plan d’affaires réaliste, ni démontré [qu’il possède] l’expérience et les compétences requises » pour devenir un agriculteur autonome au Canada.

[4]               Dans les notes consignées dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC), l’agent a indiqué que le demandeur avait visité la Saskatchewan en 2007, et qu’il avait repéré comme cultures possibles celles des noisettes, des pommettes et des bleuets. Il a aussi indiqué que le demandeur travaillait à son compte et qu’il avait fourni une preuve de propriété de ses vergers et des explications concernant les tâches qu’il réalisait, et a conclu en ces termes : [traduction] « Je suis convaincu que le demandeur principal satisfait au critère de l’expérience utile ». L’agent a ajouté que le demandeur faisait état d’avoirs nets de 2 222 957 $ CAN et d’un fonds d’établissement de 800 000 $ CAN. L’agent a précisé que le demandeur avait déclaré qu’il vendrait des biens pour se procurer des fonds, mais qu’il avait [traduction] « relativement peu de fonds immédiatement disponibles, soit moins de 25 000 $ CAN ».

[5]               L’agent a aussi déclaré dans les notes du SMGC que le demandeur avait fourni [traduction] « peu de détails » sur ses activités indépendantes projetées, et il a souligné que, mis à part la preuve d’une demande de brochure sur les produits locaux faite au gouvernement de la Saskatchewan, il y a avait [traduction] « au dossier peu de détails et pas assez de documents à l’appui » permettant d’établir la faisabilité des activités agricoles envisagées par le demandeur.

III.             Affidavit de M. Milic

[6]               Une fois la décision de l’agent rendue, et une fois le mémoire des faits et du droit du défendeur déposé le 7 août 2015, Tony Milic, premier secrétaire auprès de Citoyenneté et Immigration Canada, a souscrit le 5 octobre 2015 un affidavit traitant d’une contradiction entre la lettre de décision du 30 mars 2015 de l’agent et les notes du SMGC. M. Milic déclare premièrement que la lettre de décision aurait dû indiquer que l’agent « était » convaincu – plutôt qu’il « n’était pas » convaincu – que le demandeur satisfaisait au critère de l’expérience utile. Il déclare deuxièmement que les mots [traduction] « ni démontré [qu’il possède] l’expérience et les compétences requises » n’auraient tout simplement pas dû figurer à l’antépénultième paragraphe de la lettre de décision. Ces mots font partie de la phrase [traduction] « Je ne suis pas convaincu que vous avez présenté un plan d’affaires réaliste, ni démontré que vous possédez l’expérience et les compétences requises qui attesteraient de votre aptitude à devenir un agriculteur autonome au Canada [non souligné dans l’original] ». On examinera ci‑après les questions soulevées par cet affidavit.

IV.             Questions en litige

[7]               La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

1.                  L’affidavit de M. Milic devrait‑il être admis en preuve aux fins du présent contrôle judiciaire?

2.                  L’agent a‑t‑il tiré des conclusions de fait déraisonnables en déterminant que le demandeur n’était pas admissible à la résidence permanente au Canada à titre de travailleur autonome?

3.                  L’agent a‑t‑il manqué à son obligation d’équité procédurale envers le demandeur en ne lui donnant pas l’occasion de répondre à ses préoccupations concernant son intention et sa capacité de créer son propre emploi au Canada?

V.                Analyse

A.                L’affidavit de M. Milic devrait‑il être admis en preuve aux fins du présent contrôle judiciaire?

[8]               En règle générale, le dossier de contrôle judiciaire est normalement limité à celui dont le décideur disposait; sinon, une demande de contrôle judiciaire risquerait de se transformer en un procès sur le fond, alors que l’objet véritable du contrôle judiciaire est de vérifier la légalité d’une action administrative (voir Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22, aux paragraphes 14 à 20, 428 NR 297 [Association des universités], cité dans Gaudet c Canada (Procureur général), 2013 CAF 254, au paragraphe 4, [2013] ACF n° 1189 (QL); voir aussi Bernard c Canada (Agence du revenu), 2015 CAF 263, aux paragraphes 13 à 28, [2015] ACF n° 1396). Le principe général interdisant à la Cour d’admettre des éléments de preuve dont ne disposait pas le décideur dans le cadre d’une instance en contrôle judiciaire souffre quelques exceptions reconnues, « et la liste des exceptions n’est sans doute pas exhaustive » (voir Association des universités, au paragraphe 20). L’affidavit de M. Milic relève‑t‑il d’une des exceptions mentionnées dans Association des universités?

[9]               Les affidavits sont parfois nécessaires pour porter à l’attention de la Cour des vices de procédure que le dossier de preuve du décideur administratif ne révèle pas, et lui permettre de s’acquitter, comme cour de révision, de son rôle de contrôle en matière d’équité procédurale. Je ne considère pas que l’affidavit de M. Milic relève de cette exception. Au contraire, cet affidavit traite du libellé de la décision visée par la demande de contrôle. Il ne présente aucune preuve quant à tout manquement éventuel à l’équité procédurale lorsqu’a été rendue cette décision.

[10]           Dans d’autres cas, un affidavit peut être admis dans le cadre du contrôle judiciaire pour faire ressortir l’absence totale de preuve dont le décideur disposait lorsqu’il a tiré une conclusion particulière. Encore une fois, je ne crois pas que l’affidavit de M. Milic est visé par cette autre exception. Le dossier certifié du tribunal compte plus de 500 pages en l’espèce, de sorte que l’agent disposait d’une preuve considérable pour étayer ses conclusions.

[11]           Il arrive aussi que la Cour admette un affidavit qui le renseigne sur le contexte général, lorsque cette information peut l’aider à comprendre les questions en jeu dans le contrôle judiciaire. La Cour d’appel fédérale a donné à cet égard la mise en garde suivante : « On doit s’assurer que l’affidavit ne va pas plus loin en fournissant des éléments de preuve se rapportant au fond de la question déjà tranchée par le tribunal administratif, au risque de s’immiscer dans le rôle que joue le tribunal administratif en tant que juge des faits et juge du fond » (Association des universités, au paragraphe 20). À cet égard encore, j’estime que l’affidavit de M. Milic ne relève pas d’une des exceptions reconnues à la règle générale susmentionnée.

[12]           L’affidavit de M. Milic soulève une question particulière dans la mesure où il vise à rectifier et corriger certaines erreurs typographiques qui entacheraient la lettre de refus. Il est vrai que les notes du SMGC consignent la conclusion suivante du 25 mars 2015 de l’agent : [traduction] « Je suis convaincu que le demandeur principal satisfait au critère de l’expérience utile ». Or, quelque cinq jours plus tard, l’agent (en supposant qu’il s’agisse du même) a écrit cette fois dans la lettre de refus du 30 mars 2015 : [traduction] « Je ne suis pas convaincu que le demandeur principal satisfait au critère de l’expérience utile ». Bien que les mots « Je ne suis pas » plutôt que « Je suis » dans la lettre de refus puissent fort bien être une erreur typographique, il est aussi possible que les notes consignées à ce sujet dans le SMGC, même si M. Milic confirme dans son affidavit qu’elles sont [traduction] « véridiques et exactes », ne le soient pas, et ce, même si l’affidavit est admis en preuve. D’ailleurs, que M. Milic puisse offrir à cet égard la moindre confirmation est pour le moins sujet à caution puisqu’il n’était manifestement pas l’auteur de ces notes.

[13]           À mon avis, l’affidavit de M. Milic soulève davantage de questions qu’il n’en résout quant à la décision à l’examen; il ne convient donc pas de l’admettre en preuve aux fins de la présente demande de contrôle judiciaire. Il ressort clairement de l’affidavit que M. Milic n’est pas l’agent qui a consigné les notes du SMGC, ni l’agent qui a rédigé la lettre de refus (laquelle ne porte par ailleurs aucune signature). M. Milic déclare également qu’on l’a informé (sans préciser qui l’a fait) que le demandeur [traduction] « n’avait ni l’intention ni la capacité requises de créer son propre emploi au Canada, et que cela avait entraîné le rejet de sa demande ». Il est bien établi en droit que l’auteur d’un affidavit doit identifier la source de son information s’il n’a pas une connaissance directe de ce qui est rapporté dans le document.

[14]           Précédemment dans son affidavit, au paragraphe 4, M. Milic mentionne aussi la [traduction] « demande de résidence permanente comme membre [de la catégorie] des travailleurs qualifiés » (non souligné dans l’original) » de M. Mohitian, ce qui est manifestement incorrect. En outre, c’est une chose de soutenir, comme le défendeur l’a fait lors de l’instruction de la présente affaire, qu’un mot manquant constitue une simple erreur typographique qu’il convient de corriger en acceptant l’affidavit de M. Milic, mais c’en est une tout autre d’accepter l’affidavit de M. Milic alors qu’on y demande de faire abstraction d’une phrase entière de la lettre de refus. En fait, la situation fait plutôt ressortir le caractère déraisonnable de la décision de l’agent, question sur laquelle je vais maintenant me pencher.

B.                 L’agent a‑t‑il tiré des conclusions de fait déraisonnables en déterminant que le demandeur n’était pas admissible à la résidence permanente au Canada à titre de travailleur autonome?

[15]           La réponse courte est oui.

[16]           Il était contradictoire que, dans les notes du SMGC, l’agent se dise [traduction] « je suis convaincu que le demandeur principal satisfait au critère de l’expérience utile », puis qu’il déclare dans la lettre de décision : [traduction] « Je ne suis pas convaincu que vous satisfaites au critère de l’expérience utile, ni que vous avez démontré que vous possédez l’expérience et les compétences requises ». Cette contradiction est inintelligible et donc déraisonnable.

[17]           Au vu du dossier, la contradiction donne à penser que l’agent ne s’est pas penché de manière adéquate sur la preuve présentée : il a procédé à son examen le 25 mars et a conclu que le demandeur satisfaisait au critère de l’expérience utile, puis, cinq jours plus tard, il semble avoir oublié cette conclusion en rédigeant la lettre de décision, le 30 mars. Pour ce seul motif, la décision est donc déraisonnable et l’affaire doit être renvoyée à un autre agent pour qu’il procède à un nouvel examen.

C.                 L’agent a‑t‑il manqué à son obligation d’équité procédurale envers le demandeur en ne lui donnant pas l’occasion de répondre à ses préoccupations concernant son intention et sa capacité de créer son propre emploi au Canada?

[18]           L’agent a conclu que le demandeur n’avait pas présenté un [traduction] « plan d’affaires réaliste ». Or, il a tiré cette conclusion sans disposer d’observations ou de renseignements du demandeur, sinon ceux qu’il avait fournis en soumettant sa demande en novembre 2007 et en répondant, en mars 2015, à la lettre du 6 février 2015 par laquelle l’ambassade lui demandait de lui remettre des formulaires mis à jour et divers autres documents. Cette lettre de février 2015 renfermait une liste de vérification de deux pages décrivant précisément quels formulaires et documents le demandeur devait transmettre; on y déclarait aussi que, lorsqu’un document exigé n’était pas disponible, une explication écrite exhaustive devait être donnée. On ne demandait ni ne recommandait dans cette lettre au demandeur de présenter un plan d’affaires.

[19]           Selon la section 5.5 du Guide – Traitement des demandes à l’étranger (OP‑8), Entrepreneur et travailleurs autonomes (2008-08-07) [le Guide], les membres de la catégorie des gens d’affaires peuvent ou non être appelés à passer une entrevue. Le demandeur n’a pas passé d’entrevue en l’espèce; cela différencie la présente affaire de nombreuses autres où la Cour a maintenu la décision d’un agent de refuser la résidence permanente demandée au titre de la catégorie des travailleurs autonomes en raison d’inquiétudes soulevées quant au plan d’affaires (voir, p. ex., Sahota c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 856, [2005] ACF n° 1074).

[20]           Lors de l’instruction, le demandeur n’a pas fait valoir que les circonstances de la présente affaire requéraient que l’agent le convoque en entrevue pour que soient abordées les inquiétudes particulières soulevées par son plan d’affaires. Il a toutefois soutenu qu’au vu des faits d’espèce, l’équité procédurale commandait qu’on lui fournisse l’occasion de dissiper les inquiétudes de l’agent quant au caractère réaliste de ce plan.

[21]           Aucune disposition de la Loi ou du Règlement n’exige bien sûr que la personne qui présente une demande de résidence permanente à titre de travailleur autonome soumette un plan d’affaires en bonne et due forme (voir, p. ex., Guryeva c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1103, au paragraphe 16, 258 ACWS (3d) 395; voir également Kameli c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 772, au paragraphe 19, 115 ACWS (3d) 1044). Il convient de noter ce que prévoit à cet égard la section 11.7 du Guide :

Les agents peuvent exiger des travailleurs autonomes qu’ils présentent la preuve qu’ils ont étudié le marché de l’emploi canadien et adopté un plan réaliste pouvant raisonnablement mener à un travail autonome.

Toutefois, on ne doit pas encourager le travailleur autonome à présenter un plan d’activité officiel qui entraînerait des dépenses inutiles et un fardeau administratif.

[22]           La section 5.14 du Guide offre en outre aux agents les conseils suivants :

Lorsque l’agent s’interroge sur la recevabilité de la demande ou l’admissibilité du demandeur, il doit donner au demandeur la possibilité de corriger ou de contredire ses interrogations. Le demandeur doit avoir la possibilité de réfuter le contenu de toute évaluation provinciale négative qui pourrait influer sur la décision finale. L’agent est tenu de procéder à une évaluation juste et approfondie conformément au libellé et à l’esprit de la législation applicable et selon les exigences de l’équité procédurale.

[23]           J’estime comme le demandeur qu’il n’était pas équitable en l’espèce que l’agent ne lui signale pas les inquiétudes que suscitait son plan d’affaires, d’autant plus que ni la Loi ni le Règlement ne lui imposaient de présenter un tel plan en bonne et due forme. Bien que la tenue d’une entrevue n’ait pas été requise, on aurait dû transmettre au demandeur une simple lettre relative à l’équité procédurale lui faisant part des préoccupations de l’agent à ce sujet, compte tenu notamment du long délai de traitement initial de la demande du demandeur, suivi de son traitement relativement rapide une fois les documents requis mis à jour par ce dernier.

[24]           Bien qu’elle ne porte pas précisément sur ce point, la décision de la Cour Yazdanian c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF n° 411, 170 FTR 129 [Yazdanian], qui concernait un agriculteur iranien qui sollicitait la résidence permanente au titre de la catégorie des entrepreneurs, met en évidence le principe que l’agent n’a pas respecté en l’espèce en n’accordant pas l’occasion au demandeur de dissiper les inquiétudes concernant son intention et sa capacité de créer son propre emploi au Canada. Dans Yazdanian, la juge Tremblay‑Lamer a en effet déclaré ce qui suit :

[18]      Je conviens avec le défendeur qu’il appartenait au demandeur de fournir à l’agente des visas suffisamment d’éléments pour étayer sa demande, mais lorsque l’agent des visas éprouve une préoccupation particulière susceptible d’aboutir au rejet d’une demande, l’équité exige de fournir au demandeur la possibilité de réagir à cette préoccupation. (Souligné dans l’original.)

VI.             Conclusion

[25]           En conclusion, la décision de l’agent est déraisonnable non seulement parce qu’elle est inintelligible, mais aussi parce qu’elle n’a pas été rendue dans le respect de l’équité procédurale, car le demandeur n’a pas eu l’occasion de dissiper les inquiétudes de l’agent quant au caractère réaliste de son plan d’affaires.

[26]           Par conséquent, la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Ni l’une ni l’autre partie n’a proposé de question aux fins de certification, de sorte qu’aucune question n’est certifiée. Aucuns dépens ne sont adjugés.


JUGEMENT

LA COUR accueille la demande de contrôle judiciaire et renvoie l’affaire à un autre agent des visas pour qu’il rende une nouvelle décision; aucune question grave de portée générale n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.

« Keith M. Boswell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2412‑15

 

INTITULÉ :

BAHRAM MOHITIAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 NOVEMBRE 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BOSWELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 17 DÉCEMBRE 2015

 

COMPARUTIONS :

Ram Sankaran

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Norain Mohamed

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Stewart Sharma Harsanyi

Avocats

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.