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Date : 20160112


Dossier : IMM‑2949‑15

Référence : 2016 CF 37

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 12 janvier 2016

En présence de monsieur le juge Shore

ENTRE :

ARTHUR EISMA, LORENZO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Le contexte

[1]               La Cour est saisie, sous le régime du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), d’une demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur à l’encontre de la décision, datée du 2 juin 2015, par laquelle une agente d’immigration (l’agente) a conclu que le demandeur n’avait pas été victime de la traite de personnes et a en outre rejeté sa demande de permis de séjour temporaire et d’autorisation d’emploi ouverte, au motif qu’il n’était pas, au moment de cette décision, interdit de territoire au Canada.

[2]               Le demandeur, M. Arthur Jr. Eisma Lorenzo, est âgé de 38 ans et citoyen philippin.

[3]               Le demandeur allègue qu’il est entré au Canada le 23 juin 2011, à titre de travailleur étranger temporaire, pour occuper un emploi dans une épicerie de Labrador City (Buy N Fly Food Limited). Il y a rempli les tâches de commis à l’épicerie et aux produits maraîchers jusqu’à l’expiration de son contrat d’un an, le 22 juin 2012. Pendant qu’il travaillait à cette épicerie, soit en février 2012, le demandeur s’est vu offrir par Miriam et Jeff Staples un emploi de serveur dans l’un de leurs restaurants. Étant donné son statut au Canada, il avait besoin d’une autorisation d’emploi pour pouvoir accepter cette offre. Afin d’obtenir les documents nécessaires, le demandeur a consulté l’avocat qui représentait le couple. C’est seulement après qu’il eut convenu de payer les honoraires et débours de cet avocat que celui‑ci lui a communiqué l’avis relatif au marché du travail (l’AMT).

[4]               Le 23 juin 2012, le demandeur s’est installé dans un bâtiment affecté par les Staples au logement de leurs salariés, et, après avoir reçu son autorisation d’emploi comme serveur – valable du 28 juin 2012 au 27 juin 2013 –, il a commencé à travailler pour le couple le 28 juin 2012.

[5]               Bien que son AMT et l’autorisation d’emploi délivrée en conséquence n’eussent pour objet que son emploi au restaurant Jungle Jim’s, déclare le demandeur, les Staples lui ont ordonné de travailler dans un autre restaurant leur appartenant : Greco Pizza.

[6]               Le demandeur affirme avoir été victime de la traite de personnes pendant qu’il était employé par les Staples : il habitait avec environ vingt-six compagnons de travail, à tout moment donné, dans une maison qui ne comptait que cinq chambres à coucher et deux salles de bains; il n’avait pas d’horaire de travail régulier; on ne lui rémunérait pas toujours ses heures supplémentaires; les plaintes des salariés étaient accueillies par des menaces d’expulsion; les salariés n’avaient pas de vie privée, les Staples ayant pour habitude de se présenter à l’improviste à leur logement pour leur ordonner d’aller travailler; enfin, les Staples attribuaient à leurs salariés des tâches supplémentaires sans augmenter leur rémunération.

[7]               L’emploi du demandeur au restaurant Jungle Jim’s a pris fin dans les faits le 31 mai 2013, et officiellement le 2 juin de la même année.

[8]               Avant sa cessation d’emploi, le demandeur s’est plaint à divers organismes de ses conditions de vie et de travail. En octobre 2012, il a informé le Bureau des normes de travail de Terre‑Neuve‑et‑Labrador de ses conditions difficiles de logement et de travail. En novembre 2012, après avoir participé à un séminaire sur les normes de travail, il s’est plaint à quelqu’un de ses conditions de logement et de travail, à la suite de quoi les Staples ont organisé une réunion avec leur personnel. En outre, le demandeur a téléphoné à Citoyenneté et Immigration Canada en février 2013, et il a déposé avec des compagnons de travail une plainte collective en mars de la même année.

[9]               Après sa cessation d’emploi chez Jungle Jim’s, le demandeur a travaillé dans une succursale de Canadian Tire à Labrador City du 12 au 23 juillet 2013. Il avait obtenu le bénéfice d’une candidature à cet emploi dans le cadre du Programme des candidats de la province de Terre‑Neuve‑et‑Labrador.

[10]           Après avoir reçu une autorisation d’emploi comme serveur, valable du 16 octobre 2013 au 16 octobre 2015, le demandeur a travaillé environ cinq mois et demi pour une entreprise dénommée L.H. Service Center Ltd., qui a mis fin à son emploi le 2 avril 2014.

[11]           Le 16 avril 2014, le demandeur s’est installé en Colombie‑Britannique. À son arrivée dans cette province, il a essayé, sans succès, de trouver un employeur qui consentirait à demander une étude d’impact sur le marché du travail afin de l’embaucher. Le 14 avril 2015, il a demandé un permis de séjour temporaire à titre de victime de la traite de personnes (VTP) (où il mettait en cause Jungle Jim’s) ainsi qu’un permis de séjour temporaire non destiné aux VTP et une autorisation d’emploi ouverte.

[12]           Le demandeur a invoqué les cinq motifs suivants à l’appui de sa demande de permis de séjour temporaire à titre de VTP :

1.      Il participait à l’enquête et aux poursuites dont faisait l’objet son ex‑employeur, Jeff Staples, touchant les conditions de vie de ses salariés, le défaut de rémunération de leurs heures supplémentaires, l’irrégularité de leurs horaires, etc.

2.      Il subvient aux besoins de sa famille, restée aux Philippines.

3.      Il dispose d’une vaste expérience professionnelle dans les secteurs de l’hôtellerie, de la restauration et des croisières, et il contribue à l’économie canadienne.

4.      Il aurait du mal à s’établir à nouveau aux Philippines, étant donné qu’il a quitté son foyer et sa famille pour venir au Canada. Il n’aurait aucun moyen de subsistance dans son pays d’origine.

5.      La santé mentale et le bien-être du demandeur justifient qu’on lui permette de rester au Canada.

II.                La décision faisant l’objet du contrôle

[13]           Avant de rendre sa décision, l’agente s’est entretenue avec le demandeur le 14 mai 2015, principalement afin d’établir les faits et d’apprécier sa crédibilité.

[14]           Dans une décision datée du 2 juin 2015, l’agente a rejeté la demande de M. Lorenzo et a conclu qu’il n’était pas une victime de la traite de personnes et qu’il n’avait droit ni à un permis de séjour temporaire non destiné aux VTP ni à une autorisation d’emploi ouverte.

[15]           Pour ce qui concerne la demande de permis de séjour temporaire non destiné aux VTP, l’agente a rejeté la demande de permis de séjour temporaire formée par M. Lorenzo, aux termes des paragraphes 24(1) et (3) de la LIPR, au motif qu’elle n’était pas convaincue de la présence de raisons suffisamment impérieuses pour délivrer un tel permis :

[TRADUCTION]

M. Lorenzo a également demandé l’examen de la possibilité de lui délivrer un PST non-VTP au titre de l’article 24 de la LIPR. Or, à l’heure actuelle, il n’est pas interdit de territoire. J’ai aussi examiné la possibilité de la délivrance d’un PST sous le régime de l’article 24 et conclu à l’inexistence de raisons suffisamment impérieuses pour délivrer un tel permis. M. Lorenzo est résident temporaire au Canada depuis près de quatre ans et il y jouira d’un statut au regard de l’immigration jusqu’au 16 octobre 2015. Il n’a pas de parents dans notre pays, et aucune circonstance particulière n’exige qu’il y reste. Qui plus est, il n’a pu trouver d’emploi au Canada au cours de l’année écoulée. En revanche, il a des parents dans son pays d’origine, les Philippines, où vivent sa mère et sa sœur.

(Décision de l’agente, dossier du tribunal, à la page 8.)

[16]           Enfin, concernant le permis de séjour temporaire demandé à titre de VTP, l’agente a rappelé les critères que les instructions ministérielles prescrivent d’appliquer à l’examen préliminaire visant à établir si l’intéressé a été victime de la traite de personnes :

•    le recrutement était frauduleux ou forcé et à des fins (réelles ou voulues) d’exploitation;

•    la victime a été forcée de prendre un emploi ou d’exécuter une autre activité;

•    les conditions d’emploi équivalaient à de l’exploitation;

•    la liberté de la victime était limitée.

(Décision de l’agente, dossier du tribunal, à la page 5.)

[17]           L’agente a examiné les cinq motifs avancés par le demandeur et les a rejetés. Elle a conclu de cet examen à l’inexistence d’indicateurs suffisants pour établir avec certitude que le demandeur fût, au moment de la décision, une victime de la traite de personnes.

[18]           L’agente a rejeté le premier motif (participation du demandeur à l’enquête et aux poursuites) pour la raison qu’aucune accusation n’avait encore été portée sous le régime de la LIPR. Le deuxième motif (le fait que le demandeur subvenait aux besoins de sa famille restée aux Philippines), le troisième (sa contribution à l’économie canadienne) et le quatrième (la difficulté de s’établir à nouveau aux Philippines et le peu de possibilités d’y gagner de l’argent) sont de nature économique. L’agente a fait observer que le demandeur n’avait pas démontré comment il subvenait aux besoins de sa famille aux Philippines; de plus, il avait économisé une somme importante, compte tenu du caractère peu spécialisé des emplois qu’il avait occupés. En outre, le demandeur était capable de subvenir à ses propres besoins bien que sans emploi depuis environ quatorze mois au moment de la décision. En ce qui a trait au cinquième motif (la santé mentale et le bien-être), l’agente a fait valoir que deux années s’étaient écoulées depuis les abus dont il alléguait avoir été victime. Par conséquent, le demandeur aurait pu suivre un traitement, s’il avait exercé sa faculté d’en demander un, et ainsi se rétablir de ses troubles mentaux allégués. L’agente a également relevé que le demandeur avait travaillé pour deux employeurs différents après son emploi chez Jungle Jim’s et qu’il avait participé à un bon nombre d’activités bénévoles depuis son installation en Colombie‑Britannique. En conséquence, elle a rejeté sa demande de permis de séjour temporaire à titre de VTP.

III.             Les questions en litige

[19]           Le demandeur a reconnu dans son mémoire en réplique ne pas remplir les conditions requises pour obtenir un permis de séjour temporaire non destiné aux VTP. En conséquence, la Cour estime que la principale question en litige est la suivante :

Le rejet par l’agente de la demande de permis de séjour temporaire formée par M. Lorenzo à titre de VTP est-il raisonnable?

IV.             La position des parties

[20]           Le demandeur soutient que la décision de l’agente est déraisonnable, au motif qu’elle n’a pas effectué une analyse valable du point de savoir s’il est une VTP, c’est‑à‑dire que cette décision ne comporte pas d’éléments suffisant à montrer qu’elle a en fait pris en considération les critères que les instructions ministérielles prescrivent d’appliquer à une telle analyse. Par conséquent, la décision de l’agente est déraisonnable, celle‑ci n’ayant pas mené une analyse valable, telle que la LIPR et les instructions ministérielles lui en faisaient l’obligation. Deuxièmement, cette décision se révèle déraisonnable au motif que l’agente a commis une erreur en omettant de prendre en considération la totalité de la preuve pertinente ou a mal interprété cette preuve.

[21]           Le défendeur soutient au contraire que la décision de l’agente est raisonnable, au motif que le demandeur ne pouvait prétendre à aucun des types de permis de séjour temporaire qu’il sollicitait sous le régime du paragraphe 24(1) de la LIPR, n’étant pas interdit de territoire. En outre, comme le demandeur n’a pas de permis de séjour temporaire, il ne remplit pas la condition requise pour obtenir une autorisation d’emploi ouverte. Subsidiairement, le défendeur avance qu’il n’y avait aucune raison impérieuse de délivrer au demandeur un permis de séjour temporaire pour VTP et il affirme le caractère raisonnable de l’analyse effectuée par l’agente du point de savoir si M. Lorenzo était ou non en fait une VTP. Qui plus est, il n’aurait servi à rien de délivrer au demandeur un permis de séjour temporaire non destiné aux VTP, puisque M. Lorenzo, au moment où l’agente a rendu sa décision, jouissait déjà du statut de résident temporaire.

V.                La norme de contrôle applicable

[22]           L’appréciation par un agent d’immigration du point de savoir si un demandeur remplit les conditions requises pour se voir délivrer un permis de séjour temporaire sous le régime du paragraphe 24(1) de la LIPR est de nature hautement discrétionnaire et doit donc être contrôlée suivant la norme de la décision raisonnable (Alvarez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 667, au paragraphe 18; Evans c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 259 (Evans), au paragraphe 26.

VI.             Analyse

[23]           L’octroi d’un permis de séjour temporaire sous le régime du paragraphe 24(1) de la LIPR est une décision hautement discrétionnaire et de caractère exceptionnel (Dhaliwal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 762, au paragraphe 32), étant donné que cette décision a pour objet d’autoriser un étranger à entrer au Canada ou à y rester en dépit de son interdiction de territoire ou de son inobservation de la LIPR :

[22]      On vise avec l’article 24 de la LIPR à rendre moins sévères les conséquences qu’entraîne dans certains cas la stricte application de la LIPR, lorsqu’il existe des « raisons impérieuses » pour qu’il soit permis à un étranger d’entrer ou de demeurer au Canada malgré l’interdiction de territoire ou l’inobservation de la LIPR. Fondamentalement, le permis de séjour temporaire permet aux agents d’intervenir dans des circonstances exceptionnelles tout en remplissant les engagements sociaux, humanitaires et économiques du Canada. (Guide de l’immigration, ch. OP 20, section 2; pièce B de l’affidavit d’Alexander Lukie; Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration) c. Hardayal, [1978] 1 R.C.S. 470 (QL).)

(Farhat c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1275, au paragraphe 22)

[24]           Le principal argument du défendeur est que l’agente ne pouvait octroyer au demandeur le permis de séjour temporaire qu’il sollicitait à titre de VTP, au motif qu’il n’était pas interdit de territoire au Canada au moment où elle a rendu sa décision. Le demandeur invoque quant à lui une note des instructions ministérielles consignées dans le guide Permis de séjour temporaire (PST) : victimes de la traite des personnes – points à examiner, pour soutenir qu’il est permis à un agent d’immigration de délivrer un permis de séjour temporaire pour VTP, même à un demandeur non interdit de territoire :

Note : Si la victime de la traite de personnes a déjà un statut au regard de l’immigration grâce à un autre programme, l’agent peut envisager de ne pas lui délivrer de PST jusqu’à ce que son statut actuel soit expiré. Cependant, une entrevue s’impose tout de même, dont les conclusions seront transmises à la DGGOC.

Note: If the victim of human trafficking has existing immigration status through another program, officers may consider not issuing a TRP until the current status has lapsed. However, the client must still be interviewed, and details reported to OMC.

(Affidavit de Felicia Cheng, Instructions ministérielles, à la page 12)

[25]           Interpréter les instructions ministérielles comme juridiquement contraignantes et conférant à l’agent d’immigration des pouvoirs que la LIPR ne prévoit pas, comme le demandeur voudrait y amener la Cour, entrerait en contradiction flagrante avec le principe constant selon lequel les instructions de cette nature n’ont pas force de loi (Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), [2013] 2 RCS 559, 2013 CSC 36, au paragraphe 85; Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 (Kanthasamy), au paragraphe 32). Les instructions ministérielles « peuvent servir à déterminer ce qui constitue une interprétation raisonnable d’une disposition donnée de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (Agraira, par. 85) » (Kanthasamy, précité, au paragraphe 32).

[26]           Il faut voir dans la note reproduite plus haut des instructions ministérielles une interprétation raisonnable du paragraphe 24(1) de la LIPR, et non l’interpréter comme conférant aux agents d’immigration un mandat supplémentaire dans leur examen des demandes formées sous le régime de ce paragraphe. Selon l’interprétation de la Cour, cette note dit que l’agent n’a pas à rejeter automatiquement la demande de permis de séjour temporaire présentée par une personne se déclarant victime de la traite de personnes, au motif qu’elle n’est pas interdite de territoire. Plutôt, l’agent peut examiner la demande et, s’il conclut que le demandeur est effectivement une VTP, il peut attendre, pour lui délivrer un permis de séjour temporaire à ce titre, qu’il devienne interdit de territoire.

[27]           Or c’est exactement ce qu’a fait l’agente en l’espèce. Elle a décidé d’examiner la demande de permis de séjour temporaire de M. Lorenzo comme une demande formée en tant que VTP, même si le demandeur n’était pas alors interdit de territoire.

[28]           Ayant établi qu’il était permis à l’agente d’examiner la demande formée par M. Lorenzo en tant que VTP, la Cour doit maintenant répondre à la question de savoir si sa décision était raisonnable. Le demandeur soutient que l’agente a rendu une décision déraisonnable en rejetant sa demande, aux motifs que, selon lui, elle n’a pas effectué une analyse valable du point de savoir s’il est une VTP, qu’elle a omis de prendre en considération la totalité de la preuve pertinente et qu’elle a mal interprété cette preuve.

[29]           La Cour ne souscrit pas à la thèse du demandeur. La décision de l’agente est raisonnable. Celle‑ci a énuméré dans l’exposé de ses motifs les critères qui doivent guider l’examen préliminaire du point de savoir si le demandeur est une VTP. Bien qu’elle n’ait pas consigné dans le texte de sa décision une analyse fondée pas à pas sur ces facteurs, mais ait préféré y analyser pas à pas les cinq motifs sur lesquels s’appuyait le demandeur pour solliciter un permis de séjour temporaire en tant que VTP, il ressort à l’évidence de ce texte qu’elle a bel et bien pris les critères en considération et les a incorporés dans son examen.

[30]           L’argument principal du demandeur est que l’agente n’a pas accordé un poids suffisant aux éléments de preuve qu’il avait produits. Ayant conclu, après un examen attentif de ces éléments, que l’agente a en fait tenu compte de la totalité de la preuve, la Cour conclu que la décision de l’agente est raisonnable. Dans le cadre d’une demande de permis de séjour temporaire, il n’appartient pas à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve produite devant l’agent d’immigration ni de substituer à la décision de ce dernier une issue qui serait à son avis préférable (Evans, précitée, au paragraphe 27).

VII.          Conclusion

[31]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question grave de portée générale à certifier.

REMARQUE INCIDENTE

Étant donné tout ce qui précède au sujet de l’ensemble de la preuve, il importe de rappeler que, selon la totalité du dossier dont la Cour a pris connaissance et pour autant qu’elle en comprenne le contexte, les faits de traite de personnes allégués dans ce dossier n’avaient encore donné lieu à aucune accusation sous le régime de la LIPR. Il se pourrait cependant qu’il n’en soit plus ainsi, et que la présence du demandeur ainsi que son témoignage sur ses anciennes conditions de travail revêtent maintenant une utilité conforme à ses déclarations consignées dans le présent dossier. Si tel est le cas, il appartient aux autorités de l’Immigration de décider si la présence du demandeur est requise pour toute instance en cours ou pendante concernant la traite de personnes et les conditions de travail y afférentes.

« Michel M.J. Shore »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2949‑15

INTITULÉ :

ARTHUR EISMA, LORENZO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (colombie‑britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 JANVIER 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SHORE

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 12 JANVIER 2016

COMPARUTIONS :

Natalie Drolet

POUR LE DEMANDEUR

Marjan Double

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

West Coast Domestic Workers’ Association

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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