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Date : 20160202


Dossier : IMM-362-15

Référence : 2016 CF 116

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 2 février 2016

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

GOLAM MUSTAFA, TASLIMA BEGUM ET MUHTASIM MUSTAFA ABID

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               Il s’agit d’un contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision rendue par la Section de la protection des réfugiés (SPR), selon laquelle les demandeurs étaient exclus de la protection des réfugiés en raison de crimes graves de droit commun commis aux États­Unis.

[2]               Les crimes concernaient l’utilisation de pièces d’identité obtenues de manière frauduleuse.

L’exclusion a été établie en vertu de l’alinéa 1Fb) de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 1951, [1969] R.T. Can. nº 6, 189 UNTS 150 (Convention).

II.                Dispositions législatives pertinentes

[3]               Pour en faciliter la consultation, les dispositions les plus pertinentes sont transcrites ci­après.

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

122 (1) Commet une infraction quiconque, en vue de contrevenir à la présente loi et s’agissant de tout document — passeport, visa ou autre, qu’il soit canadien ou étranger — pouvant ou censé établir l’identité d’une personne :

122 (1) No person shall, in order to contravene this Act,

a) l’a en sa possession;

(a) possess a passport, visa or other document, of Canadian or foreign origin, that purports to establish or that could be used to establish a person’s identity;

b) l’utilise, notamment pour entrer au Canada ou y séjourner;

(b) use such a document, including for the purpose of entering or remaining in Canada; or

c) l’importe ou l’exporte, ou en fait le commerce.

(c) import, export or deal in such a document.

(2) La preuve de tout fait visé au paragraphe (1) quant à un document laissé en blanc, incomplet, modifié, contrefait ou illégitime vaut, sauf preuve contraire, preuve de l’intention de contrevenir à la présente loi.

(2) Proof of the matters referred to in subsection (1) in relation to a forged document or a document that is blank, incomplete, altered or not genuine is, in the absence of evidence to the contrary, proof that the person intends to contravene this Act.

123 (1) L’auteur de l’infraction visée :

123 (1) Every person who contravenes

a) à l’alinéa 122(1)a) est passible, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de cinq ans;

(a) paragraph 122(1)(a) is guilty of an offence and liable on conviction on indictment to a term of imprisonment of up to five years; and

b) aux alinéas 122(1)b) ou c) est passible, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de quatorze ans.

(b) paragraph 122(1)(b) or (c) is guilty of an offence and liable on conviction on indictment to a term of imprisonment of up to 14 years.

(2) Le tribunal tient compte dans l’infliction de la peine des circonstances suivantes :

(2) The court, in determining the penalty to be imposed, shall take into account whether

a) l’infraction a été commise au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle — au sens du paragraphe 121.1(1) — ou en association avec elle;

(a) the commission of the offence was for the benefit of, at the direction of or in association with a criminal organization as defined in subsection 121.1(1); and

b) l’infraction a été commise en vue de tirer un profit, que celui­ci ait été ou non réalisé.

(b) the commission of the offence was for profit, whether or not any profit was realized.

133 L’auteur d’une demande d’asile ne peut, tant qu’il n’est statué sur sa demande, ni une fois que l’asile lui est conféré, être accusé d’une infraction visée à l’article 122, à l’alinéa 124(1)a) ou à l’article 127 de la présente loi et à l’article 57, à l’alinéa 340c) ou aux articles 354, 366, 368, 374 ou 403 du Code criminel, dès lors qu’il est arrivé directement ou indirectement au Canada du pays duquel il cherche à être protégé et à la condition que l’infraction ait été commise à l’égard de son arrivée au Canada.

133 A person who has claimed refugee protection, and who came to Canada directly or indirectly from the country in respect of which the claim is made, may not be charged with an offence under section 122, paragraph 124(1)(a) or section 127 of this Act or under section 57, paragraph 340(c) or section 354, 366, 368, 374 or 403 of the Criminal Code, in relation to the coming into Canada of the person, pending disposition of their claim for refugee protection or if refugee protection is conferred.

Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 1951, [1969] R.T. Can. nº 6, 189 UNTS 150

Article 1F.      Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :

[...]

b)         Qu’elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiés;

Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C­46

57 (1) Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, étant au Canada ou à l’étranger, selon le cas :

57 (1) Every one who, while in or out of Canada,

a) fait un faux passeport;

(a) forges a passport, or

b) sachant qu’un passeport est faux :

(b) knowing that a passport is forged

(i) soit s’en sert, le traite ou lui donne suite,

(i) uses, deals with or acts on it, or

(ii) soit fait, ou tente de faire, accomplir l’un des actes visés au sous­alinéa (i).

(ii) causes or attempts to cause any person to use, deal with or act on it, as if the passport were genuine,

is guilty of an indictable offence and liable to imprisonment for a term not exceeding fourteen years.

(2) Quiconque au Canada ou à l’étranger, afin d’obtenir un passeport pour lui­même ou pour une autre personne ou afin d’obtenir une modification ou une addition importante à un tel passeport, fait une déclaration écrite ou orale qu’il sait être fausse ou trompeuse est coupable :

(2) Every one who, while in or out of Canada, for the purpose of procuring a passport for himself or any other person or for the purpose of procuring any material alteration or addition to any such passport, makes a written or an oral statement that he knows is false or misleading

a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;

(a) is guilty of an indictable offence and liable to imprisonment for a term not exceeding two years; or

b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

(b) is guilty of an offence punishable on summary conviction.

(5) Au présent article, passeport s’entend au sens de l’article 2 du Décret sur les passeports canadiens.

(5) In this section, passport has the same meaning as in section 2 of the Canadian Passport Order.

...

366 (1) Commet un faux quiconque fait un faux document le sachant faux, avec l’intention, selon le cas :

366 (1) Every one commits forgery who makes a false document, knowing it to be false, with intent

a) qu’il soit employé ou qu’on y donne suite, de quelque façon, comme authentique, au préjudice de quelqu’un, soit au Canada, soit à l’étranger;

(a) that it should in any way be used or acted on as genuine, to the prejudice of any one whether within Canada or not; or

b) d’engager quelqu’un, en lui faisant croire que ce document est authentique, à faire ou à s’abstenir de faire quelque chose, soit au Canada, soit à l’étranger.

(b) that a person should be induced, by the belief that it is genuine, to do or to refrain from doing anything, whether within Canada or not.

(2) Faire un faux document comprend :

(2) Making a false document includes

a) l’altération, en quelque partie essentielle, d’un document authentique;

(a) altering a genuine document in any material part;

b) une addition essentielle à un document authentique, ou l’addition, à un tel document, d’une fausse date, attestation, sceau ou autre chose essentielle;

(b) making a material addition to a genuine document or adding to it a false date, attestation, seal or other thing that is material; or

c) une altération essentielle dans un document authentique, soit par rature, oblitération ou enlèvement, soit autrement.

(c) making a material alteration in a genuine document by erasure, obliteration, removal or in any other way.

Décret sur les passeports canadiens, TR/81­86

2 Dans le présent décret,

2 In this Order,

passeport désigne un document officiel canadien qui établit l’identité et la nationalité d’une personne afin de faciliter les déplacements de cette personne hors du Canada; (passport)

passport means an official Canadian document that shows the identity and nationality of a person for the purpose of facilitating travel by that person outside Canada; (passeport)

Loi sur l’immigration, L.R.C. (1985), ch. I­2

95.1(1) La personne qui revendique le statut de réfugié au sens de la Convention et qui a avisé l’agent d’immigration en ce sens ne peut, tant que la question n’est pas tranchée, être accusée ou déclarée coupable d’aucune des infractions suivantes, si elle est arrivée directement au Canada du pays qu’elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d’être persécutée :

95.1(1) No person who claims to be a Convention refugee and has notified an immigration officer of the claim shall, pending disposition of the claim, be charged with or convicted of

a) l’infraction visée aux alinéas 94(1)a), b), k) ou l);

(a) an offence under paragraph 94(1)(a), (b), (k) or (l),

b) l’infraction visée aux alinéas 94(1)f), g) ou h) et relative à l’interrogatoire dont elle a fait l’objet dans le cadre de la présente loi;

(b) an offence under paragraph 94(1)(f), (g) or (h) in relation to an examination of that person under this Act,

c) l’infraction visée à l’article 95 ou 98 et relative à son arrivée au Canada ou à l’interrogatoire dont elle a fait l’objet dans le cadre de la présente loi;

(c) an offence under section 95 or 98 in relation to the coming into Canada of that person or an examination of that person under this Act, or

d) l’infraction visée à l’article 57, à l’alinéa 340c) ou aux articles 354, 366, 368, 374 ou 403 du Code criminel et relative à son arrivée au Canada.

 

(d) an offence under section 57, paragraph 340(c) or any of sections 354, 366, 368, 374 or 403 of the Criminal Code in relation to the coming into Canada of the person,

if that person came to Canada directly from the country that the person left, or outside of which the person remains, by reason of fear of persecution.

III.             Contexte

[4]               Golam Mustafa (le demandeur principal) [qui se nomme en fait Mohammed Golam Kibria], Taslima Begum (la demanderesse) [l’épouse du demandeur principal], qui sont tous deux des citoyens du Bangladesh, et leur fils, Muhtasim Mustafa Abid (le demandeur mineur), citoyen des États­Unis, font une demande d’asile conformément à l’article 96 et au paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[5]               Le demandeur principal a fondé sa demande sur une participation politique contraire à la position du parti au pouvoir.

[6]               La Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (Commission) a conclu que le demandeur principal avait fait des démarches pour obtenir une fausse identité, qu’il avait utilisé des moyens frauduleux pour obtenir un visa pour les États­Unis et qu’il avait conservé cette fausse identité pendant douze ans jusqu’à ce qu’il soit découvert par les autorités américaines. Il avait réussi à obtenir un visa en prétendant être le fils de son frère dans le but d’éviter le long délai d’attente nécessaire pour l’obtention d’un visa.

[7]               Le demandeur principal est entré aux États­Unis le 8 août 1999 comme immigrant ayant obtenu le droit d’établissement étant donné qu’il était à la charge de son « père », qui s’avérait être son frère.

Le demandeur principal s’est marié par téléphone avec la demanderesse, qui se trouvait au Bangladesh. Par la suite, ils ont eu un garçon qui est né aux États­Unis.

[8]               Le demandeur principal a eu plusieurs interactions avec le FBI, qui tentait de déterminer s’il avait des liens avec un groupe extrémiste islamique aux États­Unis.

[9]               Après avoir présenté une demande de citoyenneté, le demandeur principal a été avisé qu’un test d’ADN serait effectué pour confirmer son identité. Au cours de leurs interactions avec le FBI, le demandeur principal et la demanderesse ont affirmé qu’ils ne se sentaient pas en sécurité aux États­Unis et qu’ils sont donc venus au Canada.

Qui plus est, ils ont utilisé les passeports en cause pour entrer au Canada.

[10]           Dans le formulaire de renseignements personnels, le demandeur principal a déclaré qu’il s’appelait Golam Mustafa. Par la suite, il a changé sa version, affirmant qu’il s’appelait Mustafa Mohammed Kibria, puis Mohammed Golam Kibria. Sa date de naissance et ses relations ont également changé. Il a ajouté un père différent, une mère, ainsi que deux frères et deux sœurs. Deux personnes précédemment indiquées comme étant ses sœurs sont devenues ses nièces.

[11]           Sans grande surprise, il a fourni un nouvel exposé des faits, affirmant qu’il était à risque en raison de sa participation politique. Il a également divulgué sa « réelle » identité.

[12]           Également sans grande surprise, la SPR a conclu de façon générale que le demandeur principal n’était pas un témoin crédible ou digne de confiance. La SPR a également conclu que ni le demandeur principal ni la demanderesse n’éprouvaient une crainte fondée d’être persécutés ou qu’ils s’exposaient personnellement à un danger de mort ou à un risque de préjudice s’ils retournaient au Bangladesh.

À cet égard, la SPR a noté deux cas de refoulement.

[13]           La Commission n’a pas accepté l’explication selon laquelle ils ne connaissaient pas le processus d’immigration ou qu’ils s’étaient fondés sur le fait qu’ils n’avaient pas d’avocat au moment de la préparation de leur formulaire de renseignements personnels.

[14]           La question déterminante était la crédibilité. La conclusion d’« exclusion » était une autre conclusion. L’audience initiale a été ajournée afin que les parties aient le temps de présenter des observations en lien avec la décision récemment rendue dans l’affaire Febles c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2014] 3 RCS 431, 2014 CSC 68 (Febles).

IV.             Analyse

[15]           La norme de contrôle relative à la question de la crédibilité est le caractère raisonnable, et le juge des faits doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard de sa position avantageuse : Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF nº 732, 42 ACWS (3d) 886.

La norme de contrôle relative à la conclusion d’exclusion est plus nuancée et sera abordée ultérieurement.

A.                Crédibilité

[16]           Rien ne me permet de conclure que la conclusion de la SPR quant à la crédibilité est déraisonnable. Le fait que le demandeur principal a changé continuellement son récit, et ce, sans réelle justification de mentir constitue un fondement suffisant pour conclure qu’il n’est pas digne de confiance. La SPR n’a ignoré aucun élément de preuve documentaire crédible qui permettrait de mettre en doute cette conclusion générale.

Les efforts déployés par le demandeur principal pour éviter d’être repéré, y compris le fait qu’il ne s’était pas présenté à un test d’ADN, minent la suggestion selon laquelle sa crainte était bien fondée. Si c’était le cas, il n’aurait pas déployé tant d’efforts pour camoufler la vérité.

[17]           Les demandeurs affirment que la SPR aurait dû commenter les faits clés contenus dans les éléments de preuve objectifs. Même si la décision de la Commission aurait pu être plus exhaustive, il est difficile de voir comment des motifs plus exhaustifs auraient pu appuyer les demandeurs.

[18]           La conclusion de la Commission concorde avec le dossier. Les motifs sont clairs et intelligibles, et il était raisonnablement loisible à la Commission de prendre cette décision.

Pour ce motif, le contrôle judiciaire sera rejeté.

B.                 Exclusion

[19]           Comme la crédibilité est un facteur déterminant, les remarques de la Cour sur l’exclusion sont incidentes. Il est généralement préférable de s’abstenir de faire des remarques incidentes, mais en l’espèce, je m’écarte de ce principe pour éviter de laisser entendre que la Cour a accueilli ou confirmé la conclusion de la Commission, plus particulièrement sa conclusion sur les actes criminels qui ont prétendument été commis.

[20]           Comme il a été indiqué précédemment, les demandeurs ont été exclus en vertu de l’alinéa 1Fb) de la Convention :

Article 1F.      Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :

[...]

b)         Qu’elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiés;

[21]           En l’espèce, le demandeur principal n’avait pas été reconnu coupable d’un crime grave de droit commun. Par conséquent, le critère approprié est de savoir si l’on a « des raisons sérieuses de penser » qu’il avait commis un tel crime.

[22]           Le crime qui est au cœur de l’allégation est le fait de savoir, au Canada ou à l’étranger, qu’un passeport est faux [alinéa 57(1)b)]. Cet acte criminel peut entraîner un emprisonnement maximal de quatorze ans.

[23]           Le fondement factuel repose sur la confession du demandeur principal, qui a avoué avoir obtenu son passeport du Bangladesh de manière frauduleuse en se procurant un faux acte de naissance indiquant un nouveau nom et une nouvelle date de naissance. Toutefois, le faux document auquel on fait référence est le passeport (et non l’acte de naissance). Le passeport émis n’a pas été modifié, et le demandeur n’a pas fabriqué son propre passeport.

[24]           Du point de vue de la norme de contrôle, l’analyse des faits et l’application de ces faits par la Commission doivent être raisonnables : Uppal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 338, 289 RCF 196; Kathirgamathamby c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 811, 437 RCF 185.

[25]           Toutefois, toute présomption réfutable que l’interprétation de la loi relève également du caractère raisonnable est facilement réfutable : Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, [2011] 3 RCS 654, 2011 CSC 61. L’interprétation de l’alinéa 1Fb) relève de la norme de la décision correcte (Febles, plus particulièrement à la Cour d’appel). De plus, la question fondamentale est de savoir si l’acte fautif visait l’utilisation d’un faux document par le demandeur principal ou la fausse déclaration de celui­ci en vue d’obtenir son passeport du Bangladesh [paragraphe 57(2) du Code criminel]. Cette considération va bien au­delà du domaine d’expertise de la Commission et est importante pour le grand public. Elle doit donc être déterminée correctement.

[26]           L’importance de la distinction entre un faux document [alinéa 57(1)b)] et une fausse déclaration visant à obtenir un passeport [paragraphe 57(2)] est que la peine maximale d’emprisonnement est de 14 ans dans le premier cas et de 2 ans dans le deuxième cas.

[27]           Cette différence relative aux peines est l’un des facteurs à examiner pour déterminer si le crime de droit commun est « grave » à un point tel que le demandeur principal peut être exclu en vertu de la Convention.

[28]           Dans l’affaire Febles, la Cour suprême du Canada a confirmé l’approche adoptée dans les affaires Chan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] FCJ Nº 1180, [2000] 4 CF 390, et Jayasekara c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] 4 RCF 164, 2008 CAF 404. Selon cette approche, la règle de dix ans (un crime passible d’une peine d’emprisonnement de dix ans ou plus est réputé être une infraction grave) est une ligne directrice utile à laquelle d’autres facteurs contextuels, comme les peines effectivement infligées, doivent être ajoutés pour examiner la question.

[29]           À mon avis, la Commission a commis une erreur en interprétant le paragraphe 57(1) du Code criminel de façon à inclure des documents qui n’avaient pas été falsifiés (comme il est défini dans le Code criminel). À cause de cette erreur, la Commission conclut qu’on a des raisons sérieuses de penser qu’un crime grave a été commis à l’extérieur du Canada et que le demandeur principal doit être exclu en vertu de l’alinéa 1Fb).

[30]           Il est important de noter que les arguments relatifs à l’application des articles 122 et 123 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés n’ont pas été suffisamment élaborés. L’article 133 empêche l’application de l’article 122 dans le contexte d’une demande d’asile.

L’alinéa 1Fb) vise à sanctionner toute personne qui tente d’entrer au Canada et qui pourrait avoir commis un crime grave de droit commun à l’extérieur du Canada. En l’espèce, le crime (s’il avait été commis au Canada) serait la fausse déclaration faite au Bangladesh en vue d’obtenir un passeport. Un tel crime peut entraîner une peine maximale d’emprisonnement de deux ans.

[31]           Malgré cette erreur dans l’analyse de la Commission et sa considération mécanique de la règle de dix ans, qui entraînerait une conclusion d’exclusion invalide, la décision de la Commission est maintenue en raison de la conclusion raisonnable relative à la crédibilité.

V.                Conclusion

[32]           Par ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question n’est soumise pour être certifiée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Michael L. Phelan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-362-15

 

INTITULÉ :

GOLAM MUSTAFA, TASLIMA BEGUM ET MUHTASIM MUSTAFA ABID c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 décembre 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 2 février 2016

 

COMPARUTIONS :

Howard C. Gilbert

 

Pour les demandeurs

 

Suranjana Bhattacharyya

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Howard C. Gilbert

Avocat­procureur

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

Willian F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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