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Date : 20160122


Dossier : T-819-15

Référence : 2016 CF 76

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 22 janvier 2016

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

JEAN-CLAUDE BRETON

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La présente demande de contrôle judiciaire concerne une décision rendue par le président indépendant Romain du tribunal disciplinaire en établissement de l'Établissement de Collins Bay. Aux termes de cette décision, le président indépendant a condamné le demandeur à sept jours d'isolement après l'acceptation d'un plaidoyer de culpabilité pour des menaces de voies de fait à l'encontre d'un agent correctionnel, en manquement à l'alinéa 40h) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LC 1992, ch. 20 (LSCMLC).

[2]               Le demandeur demande le contrôle judiciaire de la décision au motif que le président indépendant a fait preuve de partialité à l'égard de l'avocate de service qui le représentait, compromettant ainsi sa capacité à présider l'affaire du demandeur de façon équitable. Par ailleurs, le demandeur soutient que la procédure était injuste et que la peine définitive était déraisonnable compte tenu des éléments de preuve et des circonstances présentés au président indépendant.

[3]               Je suis d'avis, même si j'ai quelques réserves, que le demandeur n'a pas démontré qu'une crainte réelle ou raisonnable de partialité justifiait l'intervention de la Cour. Cependant, je suis aussi d'avis que le président indépendant a commis une erreur quand il a déterminé la sanction qui devait être imposée. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

I.                   Contexte

[4]               Le demandeur purge une peine de cinq ans à l'Établissement de Collins Bay pour vol qualifié, voies de fait graves, possession d’armes dangereuses, complicité après le fait et défaut de se conformer à une ordonnance de probation.

[5]               Le demandeur a admis avoir fait des déclarations et commis des gestes qui auraient pu être perçus comme menaçants à l'encontre d'un agent correctionnel en décembre 2014, alors qu'il se trouvait à l'Établissement de Millhaven. Le demandeur a été accusé de manquement à la discipline pour « [s'être livré] ou [avoir menacé] de se livrer à des voies de fait ou [avoir pris] part à un combat » (l'accusation d’infraction disciplinaire) en vertu de l'alinéa 40h) de la LSCMLC. Le demandeur fait aussi face à des accusations aux termes du Code criminel, LRC (1985), ch. C-46 découlant du même incident.

[6]               En raison des menaces alléguées, le demandeur a été placé en isolement préventif à l'Établissement de Millhaven pendant une période de 50 jours. Il a ensuite été transféré à l'Établissement de Collins Bay.

[7]               Le 22 avril 2015, à l'Établissement de Collins Bay, le demandeur a comparu devant le président indépendant Romain avec son avocate de service, Me Kingston, pour répondre à l'accusation d'infraction disciplinaire déposée contre lui. Juste avant le début de l'audience, le demandeur, l'avocate de service et le conseiller du tribunal disciplinaire en établissement de l'Établissement de Collins Bay pour le Service correctionnel du Canada (SCC), Elliott Gray, ont convenu que le demandeur allait plaider coupable à l'accusation d'infraction disciplinaire et qu'une proposition conjointe allait être présentée pour la sanction à imposer. Dans cette proposition conjointe, ils ont recommandé qu'on accorde au demandeur un crédit pour 30 jours passés en isolement (la durée maximale d'un isolement préventif aux termes de la LSCMLC). En d'autres mots, la proposition conjointe ne recommandait aucune autre sanction, probablement en reconnaissance des 50 jours d'isolement déjà effectués par le demandeur à la suite de l'incident qui a mené à l'accusation d'infraction disciplinaire.

[8]               Au début de l'audience disciplinaire, il y a eu un problème avec la divulgation de documents portant sur l'accusation d'infraction disciplinaire. Une demande d'ajournement pour permettre au demandeur de recevoir et d'examiner les documents en question a été rejetée par le président indépendant. Cependant, une demande présentée par Me Kingston pour consulter le demandeur à l'extérieur de sa salle d'audience a été accordée. Les documents qui n'avaient pas été divulgués précédemment sont demeurés dans la salle d'audience, conformément à la pratique du président indépendant de ne pas permettre le retrait des documents d’inculpation.

[9]               À son retour dans la salle d'audience, le demandeur a plaidé coupable à l'accusation d'infraction disciplinaire. Par l'entremise de Me Kingston, il a ensuite remis en question l'exactitude des faits présentés dans l'accusation d'infraction disciplinaire. Le demandeur a demandé qu'un renvoi pour avoir proféré des menaces de mort soit retiré aux fins du plaidoyer de culpabilité. Le président indépendant a refusé de modifier les renseignements relatifs à l'accusation sans le consentement de l'agent qui a porté les accusations et de l'Établissement. L'agent qui a porté les accusations n'a pas consenti à cette modification.

[10]           En raison des préoccupations du demandeur quant à l'exactitude des faits présentés dans l'accusation d'infraction disciplinaire, le président indépendant a une fois de plus permis à Me Kingston de discuter avec le demandeur. Après cette discussion, le demandeur a confirmé son intention de plaider coupable à l'accusation d'infraction disciplinaire, comme il avait été rédigé. Le président indépendant a accepté le plaidoyer de culpabilité et a condamné le demandeur.

[11]           Il a par la suite rejeté la proposition conjointe quant à la sanction appropriée et a imposé au demandeur une peine de sept jours d'isolement disciplinaire.

II.                Décision contestée

[12]           En ce qui concerne la détermination de la sanction appropriée, le président indépendant a reconnu qu'il avait reçu une proposition conjointe, mais il a fait remarquer qu'il n'était pas lié par cette proposition. Il a également souligné qu'il était tenu de prendre en compte la sécurité et la sûreté du personnel institutionnel et que ce n'était pas la première fois que le demandeur proférait des menaces aux membres du personnel. Pour ce qui est de la détermination de la peine, le président indépendant a souligné ce qui suit : (1) il s'agissait d'une accusation très grave; (2) la peine devait être juste et appropriée; (3) même si le demandeur avait déjà passé du temps en isolement, il ne s'agissait pas d'une sanction imposée par le tribunal; (4) le tribunal devait imposer sa propre sanction en fonction des faits dont il disposait; (5) la sanction de cinq jours d'isolement qui avait été imposée au demandeur lors du premier incident ne semblait pas avoir eu un effet dissuasif.

[13]           Le président indépendant a imposé une peine de sept jours supplémentaires d'isolement, une peine qu'il a qualifiée de [TRADUCTION] « minimale en ce qui le concernait ».

III.             Incidents qui ont entraîné les allégations de partialité

[14]           Les allégations de partialité présentées par le demandeur découlent d'un conflit entre le président indépendant et l'avocate de service, Me Kingston. Ce conflit est attribuable à deux plaintes déposées par Me Kingston auprès du sous-directeur en février et en mars 2015. Dans la plainte qu'elle a déposée en février 2015, Me Kingston alléguait qu'elle avait au cours du mois été victime de harcèlement sexuel de la part du président indépendant Romain, qui avait lu avec attention un exemplaire du magazine Maxim en sa présence au tribunal. Scott Doering, conseiller du tribunal à l'Établissement de Collins Bay de 2006 à 2015 et actuellement coordonnateur, Opérations correctionnelles au même établissement, qui était présent lors de l'incident de février 2015, a reçu comme directive de discuter avec le président indépendant Romain et avec Me Kingston au sujet de la plainte.

[15]           Me Kingston a affirmé qu'elle était insatisfaite de la réponse institutionnelle à sa plainte.

[16]            Le président indépendant Romain a appris que Me Kingston était à l'origine de la plainte de février 2015.

[17]           En réponse à la plainte de février 2015 de Me Kingston, le président indépendant Romain a placé une couverture du magazine Maxim par-dessus un magazine de mode masculine qu'il a ensuite exhibé dans la salle d'audience en présence de Me Kingston en mars 2015. Ce geste a donné lieu à la plainte déposée par Me Kingston en mars 2015 auprès du sous-directeur. Le président indépendant Romain a reconnu ce geste dans une correspondance, mais il a expliqué qu'il avait essayé de lui [TRADUCTION] « démontrer qu'on ne peut pas juger un livre par sa couverture ». Cependant, selon l'affidavit de Me Kingston, le sous-directeur l'a avisée qu'il n'y avait rien à faire contre la présence du magazine Maxim dans la salle d'audience parce que tout le monde pouvait l'acheter au magasin. M. Doering a affirmé dans son affidavit que Me Kingston avait refusé de participer à une discussion avec le président indépendant Romain dans le but d'en arriver à une résolution informelle. M. Doering a également souligné dans son affidavit qu'il ne s'agissait pas d'un magazine de pornographie.

[18]           Il semble que c'est ainsi que l'Établissement a mis fin aux mesures prises à la suite des plaintes.

[19]           Entre le 11 et le 25 mars 2015, le président indépendant Romain a envoyé une série de quatre lettres à Aide juridique Ontario dans lesquelles il affirmait [TRADUCTION] « avoir beaucoup de problèmes » avec Me Kingston. Il y établissait les circonstances entourant les plaintes déposées devant le sous-directeur et soulevait différentes préoccupations relatives à sa conduite et à son comportement. Dans cette correspondance, le président indépendant Romain a demandé à plusieurs reprises qu'on n'affecte plus Me Kingston au tribunal disciplinaire de l'Établissement de Collins Bay à titre d'avocate de service.

[20]           En plus des quatre lettres envoyées à Aide juridique Ontario, le président indépendant Romain a aussi préparé une note de service qu'il comptait distribuer à tous les agents de l'Établissement de Collins Bay. Cette note de service portait sur les incidents qui ont entraîné les plaintes de Me Kingston devant le sous-directeur et contenait des commentaires sur la conduite de Me Kingston dans son rôle d'avocate de service. Plus précisément, il était allégué dans la lettre que Me Kingston touchait toujours les détenus de façon inappropriée, qu'elle utilisait un langage grossier dans ses conversations informelles et qu'elle s'était présentée devant le tribunal vêtue de façon inappropriée à trois reprises. Les représentants de l'Établissement de Collins Bay ont refusé de permettre au président indépendant Romain de distribuer cette lettre, mais il l'a jointe à sa lettre du 16 mars 2015 à l'intention du directeur régional d'Aide juridique Ontario.

[21]           Me Kingston a répondu à l'ensemble des allégations figurant dans les différentes lettres du président indépendant Romain et dans la note de service qu'il avait préparée aux fins de distribution interne au sein de l'Établissement de Collins Bay dans une seule lettre datée du 10 avril 2015 et envoyée à Aide juridique Ontario.

[22]           Le 22 avril 2015, Me Kingston s'est présentée devant le président indépendant Romain en sa capacité d'avocate de service. Des propositions conjointes sur les sentences ont été présentées dans ses trois affaires, et le président indépendant Romain a choisi de ne pas les suivre dans les trois cas. La dernière de ces trois propositions touchait le demandeur. C'est dans ce contexte que le demandeur avance l'argument de partialité.

IV.             Législation pertinente

[23]           Les articles 38 à 44 de la LSCMLC établissent un régime disciplinaire pour les détenus du système correctionnel fédéral, lequel régime est conçu pour encourager les détenus à se conduire d'une manière qui favorise le bon ordre dans les pénitenciers fédéraux et pour contribuer à la réadaptation et à la réinsertion des détenus dans la collectivité. Les parties pertinentes des lois et des règlements sont reproduites dans l'annexe A à la fin de la présente section Jugement et motifs.

V.                Observations du demandeur

[24]           Le demandeur soutient qu'il existe une obligation d’agir équitablement dans le contexte disciplinaire de la prison et que cette équité nécessite qu'il soit informé des allégations et des éléments de preuve contre lui. Le demandeur fait également valoir que les procédures judiciaires disciplinaires aux termes de la LSCMLC sont assujetties à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés et qu'elles doivent par conséquent être menées conformément aux principes de la justice fondamentale, en vertu de l'affaire Hanna c. Établissement de Mission, [1995] ACF nº 1370, paragraphe 36, 102 FTR 275 (CF 1re inst.).

[25]           Le demandeur soutient que le fait que le président indépendant n'a pas ajourné l'audience pour permettre la divulgation des documents ou, à tout le moins, pour lui permettre d'examiner en privé les documents non divulgués avec son avocate de service a donné lieu à un manquement à l'équité et était fondamentalement injuste. De la même façon, le demandeur soutient qu'il s'est retrouvé dans une situation où il a dû choisir entre subir un procès injuste ou plaider coupable à des gestes qu'il n'avait pas commis dans l'espoir de recevoir une sentence correspondant à la peine déjà purgée. Le fait de placer le demandeur dans cette position était non seulement fondamentalement injuste, mais cette situation l'a aussi empêché d'exercer son droit à une possibilité raisonnable de retenir les services d'un avocat, comme il est prévu au paragraphe 31(2) de la LSCMLC.

[26]           Le demandeur fait valoir que s'il avait eu la possibilité d'examiner les documents non divulgués, il se serait rendu compte que les documents générés au moment de son infraction présumée n'indiquaient pas qu'il avait proféré des menaces de mort, comme il est allégué dans les renseignements relatifs à l'accusation d'infraction disciplinaire. Ces renseignements auraient vraisemblablement changé sa position relative au plaidoyer de culpabilité et ainsi donné lieu à une décision différente.

[27]            Le demandeur fait aussi valoir qu'il n'a pas pu bénéficier d'un procès équitable devant le président indépendant Romain en raison de l'animosité entre ce dernier et l'avocate de service qui le représentait, Me Kingston. Le demandeur utilise le fait que le président indépendant Romain n'a pas accepté les propositions conjointes précédentes de Me Kingston le jour de son audience comme élément de preuve supplémentaire de l'iniquité inévitable d'une audience au cours de laquelle Me Kingston agirait à titre d'avocate de service devant le président indépendant Romain.

VI.             Observations du défendeur

[28]           Le défendeur soutient que le président indépendant n'était pas tenu d'adopter la proposition conjointe et que sa décision d'imposer une peine de sept jours d'isolement était raisonnable au motif qu'elle était transparente, justifiable et intelligible.

[29]            Le défendeur souligne que la recommandation des parties ne constituait qu'un des facteurs que devait examiner le président indépendant, lequel était également tenu de prendre en compte la gravité de l'infraction ainsi que toutes les circonstances aggravantes et atténuantes, conformément à l'affaire Swift c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1143, paragraphe 80 (affaire Swift). Le président indépendant a expliqué la raison pour laquelle il a rejeté la proposition conjointe; il avait conclu que la sanction proposée était indûment légère et qu'elle ne reflétait pas adéquatement les antécédents du demandeur en matière de profération de menaces aux gardiens.

[30]           En ce qui concerne la question de la divulgation, le défendeur soutient que le demandeur a bien soulevé des préoccupations, mais qu'il a par la suite choisi de plaider coupable, renonçant ainsi à tout droit procédural qu'il aurait pu avoir à cet égard.

[31]           En ce qui concerne la partialité alléguée, le défendeur soutient que le demandeur était tenu de soulever la question à la première occasion s'il estimait que le président indépendant Romain faisait preuve de partialité envers lui et son avocate. Le défendeur se fonde sur la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l'arrêt Bassila c. Canada, 2003 CAF 276, paragraphe 10, 124 ACWS (3d) 833 (arrêt Bassila) et soutient qu'en ne soulevant pas ses préoccupations, le demandeur a renoncé à son droit d'alléguer aujourd'hui que le président indépendant Romain a fait preuve de partialité.

[32]           Le défendeur conclut en soutenant que la décision était raisonnable et que rien ne laisse croire, à l'exception d'une allégation imprécise, que le président indépendant a fait preuve de partialité quand il a rendu sa décision. Le défendeur rappelle à la Cour que dans son affidavit, M. Doering a indiqué qu'il a vu le président indépendant Romain accepter et rejeter des propositions conjointes, que celui-ci adoptait la même approche avec tous les avocats et qu'il veillait à ce que les sanctions proposées soient appropriées en fonction de la gravité des infractions, du nombre d'infractions, des infractions commises par le passé et des observations des avocats.

VII.          Questions en litige

[33]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève les points suivants :

1)                  Le président indépendant a-t-il refusé au demandeur une audience équitable en ne lui accordant pas un ajournement pour remédier au problème de divulgation?

2)                  Le président indépendant a-t-il fait preuve de partialité à l'égard de Me Kingston, compromettant ainsi sa capacité à présider la cause du demandeur de façon équitable?

3)                  La décision du président indépendant relative à la sanction était-elle raisonnable?

VIII.       Critère de contrôle

[34]           Les faits sont constants et je souscris au fait que la norme de contrôle de la raisonnabilité s'applique à l'évaluation par le président indépendant de la culpabilité du demandeur et à sa décision sur la sanction, lesquelles donnent lieu à des questions de fait et à des moyens mélangés de fait et de droit, conformément à l'affaire Angou c. Canada (Procureur général), 2006 CF 1462, paragraphe 11, 304 FTR 253 et à l'affaire Swift, paragraphe 33. La norme du bien-fondé s'applique aux questions relatives à l'équité procédurale, y compris à la partialité, conformément à l'arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 RCS 339, paragraphe 43.

IX.             Analyse

A.                Équité procédurale dans les instances disciplinaires

[35]           Avant d'aborder les questions en l'espèce, il serait utile d'examiner brièvement la législation régissant la discipline carcérale.

[36]           Dans l'affaire Terreault c. Établissement pénitentiaire de Cowansville, 2003 CF 1529, 250 FTR 207 (affaire Terreault), le juge Edmond Blanchard a établi les règles qui régissent la discipline carcérale, lesquelles règles figurent au paragraphe 13 de la décision :

[TRADUCTION]

 13       Selon les défendeurs, les principes gouvernant la discipline carcérale dans les pénitentiers [sic] sont clairement expliqués dans la décision Hendrickson c. Kent Institution, _1990] F.C.J. No. 19 (1ère inst.) en ligne : QL :

Les principes régissant la discipline pénitentiaire se trouvent dans les arrêts Martineau no 1 (précité) et no 2 (note de bas de page : [1979], 50 CCC [2d] 353 [CSC]), Blanchard c. Tribunal disciplinaire des détenus de l'établissement de Millhaven (note de bas de page : [1982], 69 CCC [2d] 171), et Howard c. Tribunal disciplinaire des détenus de l'établissement de Stony Mountain (note de bas de page : [1985], 9 CCC [3d] 195), et ils peuvent être résumés comme suit :

1. Une audience dirigée par le président indépendant du tribunal disciplinaire d'une institution est une procédure administrative qui n'a aucun caractère judiciaire ou quasi judiciaire.

2. Sauf dans la mesure où il existe des dispositions légales ou des règlements ayant force de loi et indiquant le contraire, il n'y a aucune obligation de se conformer à une procédure particulière ou de respecter les règles régissant la réception des dépositions généralement applicables aux tribunaux judiciaires ou quasi judiciaires ou à une procédure accusatoire.

3. Il existe un devoir général d'agir avec équité en veillant à ce que l'enquête soit menée équitablement et en respectant la justice naturelle. Lors d'une audience devant un tribunal disciplinaire, le devoir d'agir avec équité consiste à permettre à la personne de connaître les allégations, le témoignage et la nature du témoignage contre elle, de pouvoir répondre au témoignage et donner sa version des faits. [Non souligné dans l’original.]

4. L'audience ne doit pas être menée comme une procédure contradictoire, mais comme une procédure d'enquête. La personne dirigeant l'audience n'est pas tenue de prendre en compte chaque défense concevable, bien qu'elle ait le devoir de mener une enquête complète et équitable ou, en d'autres termes, d'étudier les deux côtés de la question.

5. La Cour n'a pas à réviser les éléments de preuve comme on le ferait dans une affaire jugée par un tribunal judiciaire ou lors de la révision d'une décision d'un tribunal quasi judiciaire. Elle doit simplement décider s'il y a vraiment eu manquement au devoir général d'agir avec équité.

6. La discrétion judiciaire en matière disciplinaire doit être exercée modérément et un redressement ne doit être accordé « qu'en cas de sérieuse injustice » (Martineau no 2, page 360). [Non souligné dans l’original.]

B.                 Question 1 – Rejet de la demande d'ajournement

[37]            L'affidavit de M. Elliott Gray fait référence aux [TRADUCTION] « documents relatifs au placement en isolement du demandeur à la suite de l'incident ». Il semble qu'il s'agisse des documents qui n'ont pas été divulgués au demandeur. Cependant, ces documents ne font pas partie du dossier présenté à la Cour.

[38]           Dans son mémoire des faits et du droit, le demandeur a démontré qu'il y avait un écart entre les renseignements figurant sur l'acte d'accusation et ceux présentés dans l'affidavit de M. Gray, lequel repose sur les documents sur le placement en isolement que le demandeur n'avait pas reçus avant l'audience disciplinaire. Selon l'affidavit de M. Gray, les documents sur le placement en isolement n'indiquent pas que le demandeur a proféré des menaces de mort, comme il est indiqué sur l'acte d'accusation. Le fait que les parties n'aient pas inclus la documentation démontrant la divulgation irrégulière a malheureusement privé la Cour de la capacité à déterminer la nature de l'écart entre les documents sur le placement en isolement et l'acte d'accusation.

[39]           Cependant, je conclus qu'en dépit de l'absence d'une divulgation complète avant l'audience disciplinaire, les éléments de preuve versés au dossier établissent que le demandeur connaissait le dossier qui allait être traité. Me Kingston, dans son affidavit, déclare ce qui suit :

[TRADUCTION]

Avant le début de l'audience, le demandeur et moi avons examiné l'acte d'accusation et les rapports en présence de M. Gray, et nous avons eu une discussion informelle avec lui. [Non souligné dans l’original.] Nous avons convenu de présenter une proposition conjointe recommandant qu'on accorde un crédit pour 30 jours passés en isolement dans le cadre d'un plaidoyer de culpabilité. Une fois encore, M. Romain a ignoré la proposition conjointe et imposé une peine de sept jours supplémentaires en isolement.

[40]           Bien que le demandeur soutienne au paragraphe 31 de son mémoire des faits et du droit que [TRADUCTION] « la divulgation qui lui a été refusée aurait vraisemblablement changé sa position sur son plaidoyer », il n'y a aucun élément de preuve à cet effet, ni dans l'affidavit du demandeur ni dans celui de Me Kingston, pas plus que dans aucun autre document versé au dossier présenté à la Cour.

[41]           Dans le cadre d'une instance disciplinaire aux termes de la LSCMLC, le devoir d'agir avec équité consiste à permettre à la personne de connaître les allégations, le témoignage et la nature du témoignage contre elle, de répondre aux éléments de preuve et de donner sa version des faits (affaire Terreault, paragraphe 13). La jurisprudence enseigne également qu'il est à la discrétion d'un président indépendant d'accorder ou de refuser un ajournement et que la Cour n'accordera de recours que dans le cas d'un refus entraînant un préjudice irréparable, conformément à l'affaire Goulet c. Canada (Service correctionnel), [1996] ACF nº 1307, paragraphes 19 et 20, 121 FTR 54 (CF 1re inst.).

[42]           En l'espèce, bien que la divulgation ait été faite très tard dans le processus, je suis d'avis qu'elle a été faite juste avant l'audience, comme l'indique l'affidavit de Me Kingston. C'est pourquoi je conclus que le demandeur a à tout le moins eu l'occasion de prendre connaissance de l'écart entre l'acte d'accusation et les documents sur le placement en isolement. Je note également que, même si le président indépendant a rejeté la demande d'ajournement, il a accepté la demande du demandeur de pouvoir consulter son avocate de service après avoir été informé du problème relatif à la divulgation. C'est après cette consultation que le demandeur a plaidé coupable à l'accusation d'infraction disciplinaire.

[43]           Par conséquent, je ne suis pas convaincu que le président indépendant, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de rejeter la demande d'ajournement de l'audience à un autre jour, a causé un préjudice irréparable au demandeur. C'est pourquoi je suis d'avis qu'il n'y a pas eu de manquement à l'équité procédurale.

[44]           À titre subsidiaire, je suis d'accord avec le défendeur lorsqu'il affirme que le demandeur a renoncé à ses droits relativement à la divulgation inappropriée quand il a choisi d'aller de l'avant avec un plaidoyer de culpabilité et la sanction en découlant.

C.                 Question 2 – Partialité

[45]           Le critère applicable pour déterminer s'il y a eu partialité a été récemment réaffirmé par la juge Abella dans le cadre d'une décision unanime de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Commission scolaire francophone du Yukon, district scolaire #23 c. Yukon (Procureure générale), [2015] 2 RCS 282 [arrêt Yukon] :

20        Le critère applicable pour déterminer s’il existe une crainte raisonnable de partialité n’est pas contesté et il a été formulé pour la première fois par notre Cour en ces termes :

... à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [le décideur], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? [Référence omise.] (Committee for Justice and Liberty c. Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369, p. 394, le juge de Grandpré (dissident))

[…]

26        Par conséquent, l’analyse de la question de savoir si le comportement du décideur suscite une crainte raisonnable de partialité est intrinsèquement contextuelle et fonction des faits, et le fardeau d’établir la partialité qui incombe à la partie qui en allègue l’existence est donc élevé : consulter Wewaykum, au paragraphe 77; S. (R.D.), au paragraphe 114, le juge Cory. Comme le juge Cory l’a fait observer dans l’arrêt S. (R.D.) :

... les allégations de crainte de partialité ne seront généralement pas admises à moins que la conduite reprochée, interprétée selon son contexte, ne crée véritablement l’impression qu’une décision a été prise sur la foi d’un préjugé ou de généralisations. Voici le principe primordial qui se dégage de cette jurisprudence : les commentaires ou la conduite reprochés ne doivent pas être examinés isolément, mais bien selon le contexte des circonstances et [eu égard] à l’ensemble de la procédure. [Je souligne; par. 141.]

[46]           La décision rendue dans l'arrêt Yukon a été examinée par le juge Russel Zinn dans l'affaire Ali c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 814, dans laquelle il met l'accent au paragraphe 23 sur la nécessité de tenir compte du déroulement de l'ensemble de l'instance : « La jurisprudence indique clairement que pour déterminer s’il existe une crainte raisonnable de partialité, il faut analyser attentivement et rigoureusement le déroulement de toute l’instance. Le dossier doit être examiné dans son intégralité pour déterminer si l’effet cumulatif des écarts et des irrégularités fait naître une crainte de partialité. »

[47]           À l'examen des circonstances en l'espèce, il est évident qu'il y avait un conflit continu entre le président indépendant Romain et l'avocate de service, Me Kingston. Ce conflit découlait principalement du fait que le président indépendant Romain avait un exemplaire du magazine Maxim en sa possession dans la salle d'audience, ce qui a choqué Me Kingston et a donné lieu à sa plainte devant les autorités de l'Établissement.

[48]           Le président indépendant Romain a par la suite aggravé la situation en ayant une copie de la couverture du magazine Maxim en sa possession dans la salle d'audience à une deuxième occasion.

[49]           Le demandeur se fonde sur les éléments de preuve associés à ce conflit pour établir que le président indépendant a fait preuve de partialité. Par ailleurs, le demandeur a aussi fait référence à l'affaire Romain c. Ontario (lieutenant-gouverneur), [2005] OJ nº 3721, 258 DLR (4th) 567 (C. Div.) pour démontrer que le président indépendant Romain avait déjà, il y a de nombreuses années, adopté un comportement fautif en sa qualité de juge de paix. J'ai examiné les observations du demandeur à cet égard, mais j'estime que la conduite adoptée il y a de nombreuses années par le président indépendant Romain en sa qualité de juge de paix n'est pas pertinente pour ce qui est de la question de la partialité soulevée dans le contexte de la présente demande.

[50]           Une partie qui soulève une allégation de partialité doit surmonter la présomption d'impartialité. Il n'est pas facile de réfuter cette présomption, ce qui impose un lourd fardeau à la partie qui soulève l'allégation (arrêt Yukon, paragraphes 25 et 26).

[51]           En l'espèce, le demandeur a établi qu'il existait un important conflit non résolu entre le président indépendant Romain et Me Kingston. Cependant, ce conflit ne peut être abordé de façon isolée. Il est aussi nécessaire de tenir compte de ce qui s'est passé lors de l'audience et des gestes posés par le demandeur et Me Kingston à la lumière de l'allégation de partialité qui est maintenant soulevée.

[52]           La transcription de l'audience démontre que le président indépendant Romain a fait preuve de professionnalisme et de courtoisie quand il a traité les questions qu'il était appelé à trancher. Il n'a pas sommairement rejeté la proposition conjointe sur la sanction, mais l'a plutôt examinée avant de présenter le raisonnement qui l'a amené à choisir de s'écarter de la proposition conjointe. La transcription révèle également que Me Kingston n'a, à aucun moment pendant la durée de l'audience, soulevé une préoccupation relative à la partialité. De la même façon, aucun élément de preuve n'indique qu'elle a soulevé cette préoccupation lors de ses consultations avec le demandeur. Comme l'a souligné la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Bassila, au paragraphe 10 : « La personne qui croit que le juge président a fait naître une crainte raisonnable de partialité doit le faire savoir à la première occasion. On ne peut entretenir secrètement une crainte raisonnable de partialité en vue de la faire valoir en cas d’issue défavorable. »

[53]           Les éléments de preuve présentés par les souscripteurs d’affidavit du défendeur, M. Doering et M. Gray, indiquent que l'approche adoptée par le président indépendant Romain à l'égard de la proposition conjointe était entièrement cohérente avec la façon dont il a approché ces propositions dans les autres affaires. Ces éléments de preuve indiquent que le président indépendant Romain s'assure généralement que les propositions conjointes sont appropriées dans le contexte de l'infraction, puis qu'il rejette les propositions au besoin et impose des sanctions plus ou moins lourdes, selon le cas. Ils concluent que l'approche adoptée par le président indépendant Romain dans l'affaire du demandeur était cohérente avec l'approche adoptée dans les autres affaires et avec les autres avocats.

[54]           Je suis assurément troublé par le comportement du président indépendant en réponse à la plainte de Me Kingston. À mon avis, son comportement, comme l'indique le dossier, était inconvenant et traduisait un piètre jugement de la part d'une personne occupant le rôle qui avait été confié au président indépendant Romain dans le cadre du régime disciplinaire de la LSCMLC. Cependant, malgré le fait que je suis très mal à l'aise avec le comportement du président indépendant Romain en réponse à la plainte de Me Kingston, je ne suis pas convaincu que le demandeur a réussi à s'acquitter du lourd fardeau de démontrer qu'un observateur raisonnable et pleinement informé de la situation conclurait que le président indépendant Romain avait fait preuve de partialité (arrêt Bassila, paragraphe 9).

D.                Question 3 – Caractère raisonnable de la décision

[55]           Après l'examen de la transcription de l'audience, je suis d'avis que le président indépendant (1) a entravé de façon inappropriée l’exercice de son pouvoir discrétionnaire et (2) qu'il n'a pas tenu compte de toutes les mesures prises par le SCC relativement à l'infraction avant la décision relative à l’accusation d'infraction disciplinaire, comme l'exige l'alinéa 34f) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (RSCMLC).

(1)               Entrave inappropriée à l’exercice du pouvoir discrétionnaire

[56]           Quand il a déterminé que la proposition conjointe serait refusée et qu'il a décidé d'imposer une sanction de sept jours d'isolement, le président indépendant a affirmé ce qui suit : [TRADUCTION] « Maintenant, il a peut-être été sanctionné et je conviens bien entendu qu'il a passé du temps en isolement au moment où l'infraction a été commise, mais il ne s'agissait pas d'une sanction imposée par le tribunal. Le tribunal doit imposer sa propre sanction en fonction des faits dont il dispose et c'est exactement ce que je dois faire ici, aujourd'hui. » [Non souligné dans l'original.]

[57]           Dans sa déclaration, le président indépendant affirme qu'il s'estime tenu d'imposer une sanction supplémentaire en l'espèce plutôt que de reconnaître le temps déjà passé en isolement. À cet égard, je note que les 50 jours d'isolement imposés dépassent considérablement la période maximale de 30 jours prévue comme peine disciplinaire à l'alinéa 44(1)f) du RSCMLC. À la lumière de la peine administrative déjà imposée et purgée, le président indépendant n'était pas tenu d'imposer une sanction supplémentaire après avoir accepté le plaidoyer de culpabilité du demandeur.

[58]           Le fait que le président indépendant pensait qu'il était tenu d'imposer une peine supplémentaire constitue à mon avis une erreur susceptible de révision.

(2)               Omission de tenir compte de toutes les mesures prises dans le cadre de l'infraction

[59]           Le dossier indique également que le demandeur faisait face à des accusations criminelles pour le même incident, lequel constituait l'objet de l'accusation d'infraction disciplinaire. Le lancement des accusations criminelles est, à mon avis, une mesure prise par le SCC relativement à l'infraction que devait traiter le président indépendant Romain. En vertu de l'alinéa 34f) du RSCMLC, le président indépendant est tenu de tenir compte de toutes les mesures avant d'imposer une peine :

34. Avant d’infliger une peine visée à l’article 44 de la Loi, la personne qui tient l’audition disciplinaire doit tenir compte des facteurs suivants :

f) toute mesure prise par le Service par rapport à cette infraction avant la décision relative à l’accusation;

34. Before imposing a sanction described in section 44 of the Act, the person conducting a hearing of a disciplinary offence shall consider

(f) any measures taken by the Service in connection with the offence before the disposition of the disciplinary charge;

[60]           Aucun élément de preuve au dossier ne démontre que le président indépendant a tenu compte des accusations criminelles, contrairement à ce que lui impose le Règlement.

(3)               Conclusion

[61]           À mon avis, en raison des erreurs commises par le président indépendant, sa décision d'imposer une peine de sept jours d'isolement est déraisonnable. Malgré cette conclusion, je suis conscient que les décisions prises dans le processus disciplinaire de la LSCMLC doivent être soumises à un important devoir de réserve lors du contrôle judiciaire. Cependant, ce devoir de réserve ne devrait pas empêcher le contrôle judiciaire d'une décision si le décideur a entravé l’exercice de son pouvoir discrétionnaire ou qu'il n'a pas respecté les dispositions légales ou les règlements ayant force de loi.

X.                Dépens

[62]           Au cours de la plaidoirie, les parties ont abordé la question des dépens et ont convenu que, même si des dépens devraient être adjugés à la partie qui obtiendrait gain de cause, toute compensation devrait être symbolique à la lumière de la situation du demandeur. Des dépens d'un montant de 100 $ devront être adjugés à la partie qui a obtenu gain de cause.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est accordée et que la décision est annulée. Des dépens d'un montant de 100 $ sont adjugés au demandeur.

« Patrick Gleeson »

Juge


Annexe A

Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LC 1992, ch. 20 :

38. Le régime disciplinaire établi par les articles 40 à 44 et les règlements vise à encourager chez les détenus un comportement favorisant l’ordre et la bonne marche du pénitencier, tout en contribuant à leur réadaptation et à leur réinsertion sociale.

39. Seuls les articles 40 à 44 et les règlements sont à prendre en compte en matière de discipline.

40. Est coupable d’une infraction disciplinaire le détenu qui :

[…]

h) se livre ou menace de se livrer à des voies de fait ou prend part à un combat;

[…]

41. (1) L’agent qui croit, pour des motifs raisonnables, qu’un détenu commet ou a commis une infraction disciplinaire doit, si les circonstances le permettent, prendre toutes les me- sures utiles afin de régler la question de façon informelle.

(2) À défaut de règlement informel, le directeur peut porter une accusation d’infraction disciplinaire mineure ou grave, selon la gravité de la faute et l’existence de circonstances atténuantes ou aggravantes.

42. Le détenu accusé se voit remettre, conformément aux règlements, un avis d’accusation qui mentionne s’il s’agit d’une infraction disciplinaire mineure ou grave.

43. (1) L’accusation d’infraction disciplinaire est instruite conformément à la procédure réglementaire et doit notamment faire l’objet d’une audition conforme aux règlements.

 (3) La personne chargée de l’audition ne peut prononcer la culpabilité que si elle est convaincue hors de tout doute raisonnable, sur la foi de la preuve présentée, que le détenu a bien commis l’infraction reprochée.

44. (1) Le détenu déclaré coupable d’une infraction disciplinaire est, conformément aux règlements pris en vertu des alinéas 96i) et j), passible d’une ou de plusieurs des peines suivantes :

a) avertissement ou réprimande;

 b) perte de privilèges;

c) ordre de restitution, notamment à l’égard de tout bien endommagé ou détruit du fait de la perpétration de l’infraction;

d) amende;

e) travaux supplémentaires;

f) isolement — avec ou sans restriction à l’égard des visites de la famille, des amis ou d’autres personnes de l’extérieur du pénitencier — pour un maximum de trente jours, dans le cas d’une infraction disciplinaire grave.

38. The purpose of the disciplinary system established by sections 40 to 44 and the regulations is to encourage inmates to conduct themselves in a manner that promotes the good order of the penitentiary, through a process that contributes to the inmates’ rehabilitation and successful reintegration into the community.

39. Inmates shall not be disciplined otherwise than in accordance with sections 40 to 44 and the regulations.

40. An inmate commits a disciplinary offence who

[…]

(h) fights with, assaults or threatens to assault another person;

[…]

41. (1) Where a staff member believes on reasonable grounds that an inmate has committed or is committing a disciplinary offence, the staff member shall take all reasonable steps to resolve the matter informally, where possible.

(2) Where an informal resolution is not achieved, the institutional head may, depending on the seriousness of the alleged conduct and any aggravating or mitigating factors, issue a charge of a minor disciplinary offence or a serious disciplinary offence.

42. An inmate charged with a disciplinary offence shall be given a written notice of the charge in accordance with the regulations, and the notice must state whether the charge is minor or serious.

43. (1) A charge of a disciplinary offence shall be dealt with in accordance with the prescribed procedure, including a hearing conducted in the prescribed manner.

(3) The person conducting the hearing shall not find the inmate guilty unless satisfied beyond a reasonable doubt, based on the evidence presented at the hearing, that the inmate committed the disciplinary offence in question.

44. (1) An inmate who is found guilty of a disciplinary offence is liable, in accordance with the regulations made under paragraphs 96(i) and (j), to one or more of the following:

(a) a warning or reprimand;

(b) a loss of privileges;

(c) an order to make restitution, including in respect of any property that is damaged or destroyed as a result of the offence;

(d) a fine;

(e) performance of extra duties; and

(f) in the case of a serious disciplinary offence, segregation from other inmates — with or without restrictions on visits with family, friends and other persons from out-side the penitentiary — for a maximum of 30 days.

Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620 :

25. (1) L’avis d’accusation d’infraction disciplinaire doit contenir les renseignements suivants :

a) un énoncé de la conduite qui fait l’objet de l’accusation, y compris la date, l’heure et le lieu de l’infraction disciplinaire reprochée, et un résumé des éléments de preuve à l’appui de l’accusation qui seront présentés à l’audition;

b) les date, heure et lieu de l’audition.

(2) L’agent doit établir l’avis d’accusation disciplinaire visé au paragraphe (1) et le  remettre au détenu aussitôt que possible.

31. (1) Au cours de l’audition disciplinaire, la personne qui tient l’audition doit, dans des limites raisonnables, donner au détenu qui est accusé la possibilité :

a) d’interroger des témoins par l’intermédiaire de la personne qui tient l’audition, de présenter des éléments de preuve, d’appeler des témoins en sa faveur et d’examiner les pièces et les documents qui vont être pris en considération pour arriver à la décision;

b) de présenter ses observations durant chaque phase de l’audition, y compris quant à la peine qui s’impose.

(2) Le Service doit veiller à ce que le détenu accusé d’une infraction disciplinaire grave ait, dans des limites raisonnables, la possibilité d’avoir recours à l’assistance d’un avocat et de lui donner des instructions en vue de l’audition disciplinaire et que cet avocat puisse prendre part aux procédures au même titre que le détenu selon le paragraphe (1).

34. Avant d’infliger une peine visée à l’article 44 de la Loi, la personne qui tient l’audition disciplinaire doit tenir compte des facteurs suivants :

a) la gravité de l’infraction disciplinaire et la part de responsabilité du détenu quant à sa perpétration;

b) ce qui constitue la mesure la moins restrictive possible dans les circonstances;

c) toutes les circonstances, atténuantes ou aggravantes, qui sont pertinentes, y compris la conduite du détenu au pénitencier;

 d) les peines infligées à d’autres détenus pour des infractions disciplinaires semblables commises dans des circonstances semblables;

e) la nature et la durée de toute autre peine visée à l’article 44 de la Loi qui a été infligée au détenu, afin que l’ensemble des peines ne soit pas excessif;

f) toute mesure prise par le Service par rapport à cette infraction avant la décision relative à l’accusation;

g) toute recommandation présentée à l’audition quant à la peine qui s’impose.

40. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la décision de

mettre le détenu en isolement aux termes de l’alinéa

44(1)f) de la Loi alors qu’il purge déjà une peine d’isolement

pour une autre infraction disciplinaire grave doit

préciser si les peines d’isolement doivent être purgées concurremment ou consécutivement.

(2) Lorsque les peines d’isolement visées au paragraphe

(1) doivent être purgées consécutivement, leur total

ne peut pas dépasser 45 jours d’isolement.

25. (1) Notice of a charge of a disciplinary offence shall

(a) describe the conduct that is the subject of the charge, including the time, date and place of the alleged disciplinary offence, and contain a summary of the evidence to be presented in support of the charge at the hearing; and

(b) state the time, date and place of the hearing.

(2) A notice referred to in subsection (1) shall be issued and delivered to the inmate who is the subject of the charge, by a staff member as soon as practicable.

31. (1) The person who conducts a hearing of a disciplinary offence shall give the inmate who is charged a reasonable opportunity at the hearing to

(a) question witnesses through the person conducting the hearing, introduce evidence, call witnesses on the inmate’s behalf and examine exhibits and documents to be considered in the taking of the decision; and

(b) make submissions during all phases of the hearing, including submissions respecting the appropriate sanction.

(2) The Service shall ensure that an inmate who is charged with a serious disciplinary offence is given a reasonable opportunity to retain and instruct legal counsel for the hearing, and that the inmate’s legal counsel is permitted to participate in the proceedings to the same extent as an inmate pursuant to subsection (1).

34. Before imposing a sanction described in section 44 of the Act, the person conducting a hearing of a disciplinary offence shall consider

(a) the seriousness of the offence and the degree of responsibility the inmate bears for its commission;

(b) the least restrictive measure that would be appropriate in the circumstances;

(c) all relevant aggravating and mitigating circumstances, including the inmate’s behaviour in the penitentiary;

(d) the sanctions that have been imposed on other inmates for similar disciplinary offences committed in similar circumstances;

(e) the nature and duration of any other sanction described in section 44 of the Act that has been imposed on the inmate, to ensure that the combination of the sanctions is not excessive;

(f) any measures taken by the Service in connection with the offence before the disposition of the disciplinary charge; and

(g) any recommendations respecting the appropriate sanction made during the hearing.

40. (1) Subject to subsection (2), where an inmate is ordered to serve a period of segregation pursuant to paragraph 44(1)(f) of the Act while subject to a sanction of segregation for another serious disciplinary offence, the order shall specify whether the two periods of segregation are to be served concurrently or consecutively.

(2) Where the sanctions of segregation referred to in subsection (1) are to be served consecutively, the total period of segregation imposed by those sanctions shall not exceed 45 days.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-819-15

 

INTITULÉ :

JEAN-CLAUDE BRETON c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 24 NOVEMBRE 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 22 JANVIER 2016

 

COMPARUTIONS :

John Dillon

 

Pour le demandeur

 

Max Binnie

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John Dillon

Avocat-procureur

Kingston (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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