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Date : 20160217


Dossier : IMM-2664-15

Référence : 2016 CF 218

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 février 2016

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

HIBIL HASSAN MAHDI

(aussi appelé MAHDI HIBIL HASSAN)

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une demande d’asile rejetée dans le cadre de laquelle le demandeur n’a pas réussi à établir son identité. La Section de la protection des réfugiés (SPR) a conclu à « l’absence d’un minimum de fondement », ce qui a pour effet d’empêcher le demandeur d’interjeter appel de la décision à la Section d’appel des réfugiés (SAR), où le droit d’examiner, de présenter des éléments de preuve et de recevoir une nouvelle décision soulage davantage le demandeur que le contrôle judiciaire effectué par la Cour.

[2]               En raison du recours accordé, soit la possibilité d’interjeter appel à la SAR, la Cour n’étudiera pas en détail la demande ou le caractère raisonnable de la décision relativement à son bien-fondé.

II.                Contexte

[3]               Le demandeur a soutenu qu’il était né en Somalie, de parents éthiopiens qui possédaient la citoyenneté éthiopienne. Il a affirmé qu’il était Somalien. Sa citoyenneté demeure une question ouverte.

[4]               Le risque allégué est qu’il pourrait être considéré comme un espion et une cible pour le groupe Al-Shabaab. Il a affirmé qu’il a été arrêté et emprisonné en raison de son origine ethnique et parce qu’il est soupçonné d’entretenir des liens avec un groupe rebelle.

[5]               Le récit des voyages du demandeur et des difficultés auxquelles il a fait face pour venir au Canada est long et compliqué. Il implique une détention aux États-Unis. Pour établir son identité, le demandeur a présenté à la SPR les mêmes documents qu’il a présentés aux autorités américaines.

[6]               Les autorités américaines ont été en mesure, sur la base de ces documents, d’établir l’identité du demandeur.

[7]               La SPR a conclu que selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’a pas réussi à présenter une preuve suffisamment crédible pour établir son identité somalienne ou éthiopienne. Il s’agit de la première étape d’une demande d’asile sans laquelle il n’y avait plus lieu d’examiner le reste de la demande.

[8]               Par conséquent, la SPR a conclu au paragraphe 28 que le demandeur n’avait pas réussi à fournir une preuve suffisamment crédible pour établir son identité. Au paragraphe 30, elle a même soutenu que la demande ne reposait sur aucun fondement crédible. Toutefois, la SPR a soutenu au paragraphe 28 qu’elle n’avait pas à déterminer s’il y a persécution ou un besoin de protection.

III.             Analyse

[9]               La norme de contrôle applicable à une conclusion d’« absence d’un minimum de fondement » est le caractère raisonnable (Hernandez c Canada [Citoyenneté et Immigration], 2016 CF 144, paragraphe 3). Toutefois, une telle conclusion doit être fondée sur l’absence d’une preuve crédible pour appuyer la demande. Dans la présente affaire, le seul aspect de la demande que la SPR a examiné était l’identité.

[10]           La conclusion d’« absence d’un minimum de fondement » en est une de grande importance parce qu’elle exclut le droit habituel d’interjeter appel à la SAR. Elle établit un seuil élevé (voir Ramón Levaria c Canada [Citoyenneté et Immigration], 2012 CF 314, 214 ACWS (3d) 562 [Levaria]). Cette conclusion ne doit pas être une solution « fourre-tout » ou une solution employée sans discernement, ni un résumé des insuffisances ou des pour et contre des preuves.

[11]           Une conclusion d’« absence d’un minimum de fondement » en est une que la preuve est dépourvue de tout fondement sur lequel repose une conclusion positive (Levaria, paragraphe 19).

[12]           La SPR n’est pas tenue d’adopter la conclusion des États-Unis relativement à l’identité. Cependant, à moins qu’elle ne conclue que la décision des États-Unis est si dénuée de fondement qu’elle est incapable de soutenir sa propre conclusion, la décision des États-Unis constitue au moins un motif valable pour conclure en faveur du demandeur.

[13]           Il était déraisonnable de conclure que la demande ne reposait sur aucun fondement crédible. Je n’émettrai aucun commentaire quant au caractère raisonnable des autres conclusions en matière de crédibilité, qui impliquaient l’appréciation de la preuve.

IV.             Conclusion

[14]           Le demandeur a été privé à tort d’un droit d’interjeter appel en raison d’une conclusion déraisonnable selon laquelle la demande était dénuée de fondement.

[15]           Pour préserver le droit du demandeur d’interjeter appel, la Cour ordonnera la suspension de l’exécution de la décision afin de permettre au demandeur d’interjeter appel à la SAR dans les 30 jours suivant la présente décision.

[16]           Si aucun appel n’est interjeté, la suspension expirera. Si un appel est interjeté, la Cour rejettera la présente demande de contrôle judiciaire en raison de son caractère théorique, sans qu’il soit porté atteinte au droit de demander le contrôle judiciaire d’une décision rendue par la SAR.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que l’exécution de la décision est suspendue afin de permettre au demandeur d’interjeter appel auprès de la SAR dans les 30 jours suivant la présente décision. Si aucun appel n’est interjeté, la suspension expirera. Si un appel est interjeté, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée en raison de son caractère théorique, sans qu’il soit porté atteinte au droit de demander le contrôle judiciaire d’une décision rendue par la SAR.

« Michael L. Phelan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2664-15

 

INTITULÉ :

HIBIL HASSAN MAHDI (aussi appelé MAHDI HIBIL HASSAN) c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge PHELAN

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 17 février 2016

 

COMPARUTIONS :

Eve Sehatzadeh

 

Pour le demandeur

 

Ildiko Erdei

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Eve Sehatzadeh

Avocate-procureure

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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