Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20160229


Dossier : IMM-2891-15

Référence : 2016 CF 256

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 29 février 2016

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

AMUDAT OLAYEMI ADESIDA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision de la Section d’appel des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, datée du 22 mai 2015, qui rejetait l’appel de la demanderesse de la décision de la Section de la protection des réfugiés datée du 15 décembre 2014.

[2]               La demanderesse soutient être une citoyenne du Nigeria qui s’est enfuie au Canada parce qu’elle craignait le groupe Boko Haram et ses parents, lesquels voulaient la forcer à contracter un mariage arrangé.

[3]               La Section de la protection des réfugiés a rejeté la demande de la demanderesse concluant que celle­ci n’était pas parvenue à établir son identité, ce qui constitue un préalable à toute demande de statut de réfugié (Su c. Canada (Citoyenneté et Immigration) 2012 CF 743). À l’appui de son recours, la demanderesse a présenté comme seule pièce d’identité un passeport nigérien. La Section de la protection des réfugiés a constaté des divergences entre le témoignage de la demanderesse concernant la manière dont elle avait obtenu le passeport, lesquelles portaient à croire qu’elle l’avait obtenu frauduleusement. Il est également mentionné que les éléments de preuve objectifs contenus dans le cartable national de documentation (« CND ») indiquent que l’utilisation frauduleuse de documents est chose courante et qu’il est facile d’obtenir de tels documents au Nigeria. La Section de protection des réfugiés a conclu que la demanderesse n’était pas parvenue à produire des documents acceptables pour établir son identité, ni à fournir une explication plausible de son manque de documents dignes de foi ou de son incapacité à prendre des mesures raisonnables pour les obtenir, comme l’exige la Règle 11 des Règles de la Section de la protection des réfugiés (DORS/2012­256) et l’article 106 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001 ch. 27 (LIPR). La Section de la protection des réfugiés a ensuite tiré de brèves conclusions négatives sur la crédibilité de la demanderesse.

[4]               La Section d’appel des réfugiés a limité l’appel au problème d’identité qu’elle a jugé déterminant. La demanderesse a tenté de soumettre de nouvelles preuves à la Section d’appel des réfugiés, en vertu du paragraphe 110(4) de la LIPR. Il convient de noter que la demanderesse a déclaré à la Section de la protection des réfugiés que son passeport était sa seule pièce d’identité, car elle n’avait jamais eu de permis de conduire, d’acte de naissance, de carte d’identité nationale ou de preuve d’âge. Lorsqu’on lui a demandé comment elle avait obtenu son passeport, elle a répondu qu’elle avait en fait utilisé un acte de naissance à cette fin, mais ignorait où se trouvait ce document maintenant. Lorsque la Section de la protection des réfugiés a souligné que cette réponse contredisait sa déclaration précédente voulant qu’elle n’ait pas d’acte de naissance, la demanderesse a répondu qu’elle ne comprenait pas la question. La demanderesse a aussi déclaré que l’acte de naissance était le seul document qu’elle avait utilisé pour obtenir son passeport; cependant, la Section de la protection des réfugiés a cité l’information contenue dans le cartable national de documentation indiquant qu’il faut plusieurs documents, outre l’acte de naissance, pour obtenir un passeport au Nigeria, notamment des photographies, le formulaire du répondant et une lettre d’identification.

[5]               Les nouveaux éléments de preuve que la demanderesse a tenté de soumettre consistaient en trois documents destinés à établir son identité : un certificat d’enregistrement d’une naissance, un certificat d’origine, ainsi qu’un avis relatif à un diplôme national. Même si la Section d’appel des réfugiés a cité le paragraphe 110(4) de la LIPR et mentionné que la demanderesse n’avait pas expliqué pourquoi les documents n’étaient pas disponibles auparavant, elle n’a pas effectué une analyse du seuil d’admissibilité. Elle a plutôt examiné chaque document sans, finalement, ne leur accorder aucun poids.

[6]               La Section d’appel des réfugiés a ensuite passé en revue la décision de la Section de la protection des réfugiés et a convenu avec sa conclusion concernant l’identité. La Section d’appel des réfugiés a conclu que, comme l’identité constituait un problème, il était raisonnable que la Section de la protection des réfugiés questionne la demanderesse concernant les documents d’identification et la procédure qu’elle avait suivie pour obtenir son passeport. La Section d’appel des réfugiés a également observé que le passeport de la demanderesse avait été délivré l’année avant que celle­ci quitte le Nigeria et, par conséquent, il serait raisonnable de s’attendre à ce que la demanderesse puisse fournir une réponse franche sur la manière dont elle l’avait obtenu. En outre, un examen des dossiers de l’audience a montré que la demanderesse comprenait les questions qu’on lui posait et qu’elle savait qu’elle pouvait le dire si elle ne comprenait pas ou si elle ne se souvenait pas; par conséquent, son explication n’était pas satisfaisante. La Section d’appel des réfugiés partage l’avis de la Section de la protection des réfugiés que les divergences entre le témoignage de la demanderesse et l’information contenue dans le cartable national de documentation concernant les documents requis pour obtenir un passeport constituent des motifs pour conclure qu’il était plus que probable que le passeport avait été obtenu de manière frauduleuse.

[7]               La Section d’appel des réfugiés mentionne également que l’information sur laquelle s’est appuyée la Section de la protection des réfugiés, en ce qui concerne le processus de demande de passeports nigériens, a été fournie par le Service national de l’immigration du Nigeria et, par conséquent, n’est pas fondée sur les normes ou les attentes canadiennes, comme la demanderesse l’a prétendu. La Section d’appel des réfugiés remarque dans le témoignage de la demanderesse que celle­ci n’a jamais travaillé dans le secteur de la santé, mais qu’elle a présenté une carte d’identité d’employé d’un hôpital national à son point d’entrée. Elle a expliqué que la personne qui l’avait aidée à obtenir un visa canadien au Nigeria était celle qui lui avait obtenu cette carte. S’appuyant sur cette explication, la Section d’appel des réfugiés a conclu que la demanderesse avait accès à des documents frauduleux et qu’elle n’hésitait pas à les utiliser. Pour en venir à cette conclusion, elle s’est appuyée sur l’explication de la demanderesse concernant le passeport.

[8]               La Section d’appel des réfugiés a également étudié les cas de jurisprudence soumis par la demanderesse, lesquels indiquent que les documents délivrés par un gouvernement étranger sont présumés être valides, à moins qu’une preuve offerte n’indique le contraire. Dans le cas présent, elle a déterminé qu’il existait des preuves permettant de conclure, selon la prépondérance des probabilités, que le passeport de la demanderesse était frauduleux. La Section d’appel des réfugiés a cité l’affaire Jin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 126, laquelle indique que la Section de la protection des réfugiés n’était nullement tenue de soumettre des documents à l’évaluation d’un expert, à moins que des éléments de preuve suffisants ne mettent en doute leur authenticité.

[9]               La Section d’appel des réfugiés a également tenu compte des brefs motifs de la Section de la protection des réfugiés concernant la crédibilité de la crainte subjective évoquée par la demanderesse; cependant, comme il est mentionné ci­dessus, elle a conclu que le problème de l’identité était déterminant.

[10]           À mon avis, la question qui se pose est de savoir si la Section d’appel des réfugiés a commis une erreur dans son évaluation des nouveaux éléments de preuve et, par conséquent, de l’identité de la demanderesse.

[11]           En conséquence, je suis d’accord avec les parties que la décision devrait être révisée à la lumière de la norme de la décision raisonnable (Malambu c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CC 763, paragraphe 25; Cabdi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 26, paragraphe 16; Koffi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 FC 4, paragraphes 27 à 33; Tota c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 890, paragraphe 19).

[12]           En appel, après avoir examiné les nouveaux éléments de preuve sur l’identité, la Section d’appel des réfugiés a cité le paragraphe 110(4) de la LIPR, lequel porte sur l’admissibilité de nouveaux éléments de preuve. Le paragraphe 110(4) stipule de preuve admissibles sont ceux qui sont survenus depuis le rejet de sa demande de la personne ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’elle n’aurait pas normalement présentés, dans les circonstances, au moment du rejet. Toutefois, s’étant référée au paragraphe 110(4), la Section d’appel des réfugiés ne semble pas avoir effectué une analyse de l’admissibilité en s’appuyant sur cette disposition. En fait, si elle avait refusé d’admettre les documents en s’appuyant explicitement sur l’exigence légale contenue dans le paragraphe 110(4) de la LIPR, à mon avis, cette décision aurait sans doute été raisonnable, car la demanderesse n’avait fourni aucune explication sur la ou les raisons pour lesquelles elle n’avait pas pu obtenir les documents avant l’audience de la Section de la protection des réfugiés. En l’absence de cette analyse par la Section d’appel des réfugiés, son évaluation des nouveaux documents présente des difficultés.

[13]           En ce qui concerne le certificat d’enregistrement d’une naissance (« acte de naissance »), la Section d’appel des réfugiés constate que la date de délivrance de ce document se situe après le rejet de la demande de la demanderesse et que celle­ci n’offre aucune explication sur la ou les raisons pour lesquelles elle ne l’avait soumis auparavant sauf pour dire en appel que celui­ci n’était pas disponible. Néanmoins, la Section d’appel des réfugiés a déclaré que, comme l’identité constituait un problème, elle allait prendre le document en considération, puis elle a consigné cinq raisons pour lesquelles elle ne lui accordait aucun poids.

[14]           La première raison était que la demanderesse se trouvait au Canada lorsque le document a été délivré et, par conséquent, elle ignorait comment et à qui le document avait été délivré. Comme la demanderesse avait déjà présenté des témoignages contradictoires devant la Section de la protection des réfugiés en disant qu’elle n’avait pas d’acte de naissance et, plus tard, qu’elle avait un acte de naissance, mais qu’elle ignorait où celui­ci se trouvait, la Section d’appel des réfugiés pourrait fort bien avoir demandé à la demanderesse d’expliquer comment elle avait obtenu le document. Cependant, elle a admis le document et elle n’a pas convoqué une audience en vertu du paragraphe 110(6) de la LIPR dans le but d’élucider ses préoccupations à ce sujet. De plus, la Section d’appel des réfugiés ne fait état d’aucun élément de preuve contenu dans le cartable national de documentation pouvant suggérer que les actes de naissance nigériens ne sont pas délivrés à des citoyens qui se trouvent hors du pays. Il se peut aussi que la Section d’appel des réfugiés remettait en question l’authenticité du document, car les circonstances entourant son origine n’avaient pas été expliquées, mais cela n’est pas clair. La raison suivante pour laquelle la Section d’appel des réfugiés n’a accordé aucun poids à l’acte de naissance était le fait qu’il avait été délivré bien longtemps après la naissance de la demanderesse. Cependant, la Section d’appel des réfugiés n’explique pas pourquoi cela aurait une incidence négative sur le poids qu’elle accorde au document. En fait, les actes de naissance de remplacement seraient nécessairement délivrés après la date de naissance d’une personne et, en soi, cela ne porterait pas à croire que le document n’était pas authentique. La troisième raison invoquée par la Section d’appel des réfugiés était que le document avait été délivré après la présentation par la demanderesse de sa demande de statut de réfugié. Là encore, la Section d’appel des réfugiés aurait pu refuser d’admettre le document parce qu’aucune explication n’avait été donnée sur la raison pour laquelle celui­ci avait été délivré après la demande de statut de réfugié, mais elle ne l’a pas fait. Ayant admis le document, la Section d’appel des réfugiés n’explique pas pourquoi le fait que le document ait été délivré après la présentation de la demande de statut de réfugié par la demanderesse remet la validité ou la crédibilité du document en question ni pourquoi elle n’y accorde aucun poids.

[15]           La Section d’appel des réfugiés n’accorde pas non plus de poids à l’acte de naissance, parce que ce document a été délivré par le gouvernement local Owo et que le cartable national de documentation indique que les actes de naissance nigériens ne comportent aucune caractéristique cachée ou de sécurité permettant d’identifier le gouvernement local émetteur. Toutefois, elle n’a émis aucun commentaire sur le timbre et le filigrane qui apparaissent sur la face de la copie de ce document qui a été versé au dossier.

[16]           Enfin, la Section d’appel des réfugiés a déclaré que l’acte de naissance incluait un« timbre inexplicable » indiquant « Passeport international seulement ». Là encore, il n’est pas clair du tout pourquoi elle se serait appuyée sur ce fait pour n’accorder aucun poids au document. La Section d’appel des réfugiés ne fait aucune référence à la preuve documentaire indiquant que de tels timbres ne se trouvent habituellement pas sur un acte de naissance, ni à aucun autre motif d’objection au timbre. En d’autres mots, la présence du timbre « Passeport international seulement » sur l’acte de naissance est, de l’aveu même de la Section d’appel des réfugiés, inexplicable. Sans évidence qu’une telle caractéristique est anormale, plutôt que simplement inexplicable, cela ne peut constituer un motif pour remettre en question l’authenticité du document ou pour ne lui accorder aucun poids.

[17]           En ce qui concerne le certificat d’origine, là encore la Section d’appel des réfugiés n’y accorde aucun poids pour les première et troisième raisons invoquées ci­dessus et parce que celui­ci ne comportait aucune caractéristique de sécurité. Mes commentaires ci­dessus s’appliquent également pour ces deux raisons. En ce qui concerne l’absence d’une caractéristique de sécurité, la Section d’appel des réfugiés ne cite aucune preuve que l’on doit s’attendre à la présence d’une caractéristique de sécurité et elle n’émet aucun commentaire sur ce qui semble être un timbre ou un filigrane qui pourrait expliquer si ce sont là des marques de sécurité et, dans l’affirmative, la ou les raisons pour lesquelles elle n’en a pas tenu compte à l’évaluation du document.

[18]           Quant au diplôme, on ne lui a accordé aucune importance, parce que rien n’explique pourquoi ce document, qui avait été délivré deux ans avant l’arrivée au Canada de la demanderesse, n’était pas disponible à l’audience de la Section de la protection des réfugiés. Même s’il est vrai que le document porte une date antérieure à l’audience, la Section d’appel des réfugiés semble l’avoir accepté comme élément de preuve, plutôt que de le contester en vertu du paragraphe 110(4) de la LIPR. Donc, le raisonnement de la Section d’appel des réfugiés semble porter sur l’admissibilité et non sur le poids. Toutefois, si ce raisonnement avait pour objet de justifier le poids accordé par la Section d’appel des réfugiés, il n’est pas clair pourquoi et comment l’âge du document permet une telle justification, et ce, même si la Section d’appel des réfugiés déclare également que ce document ne contient aucune information concernant la date de naissance ou la nationalité de la demanderesse. Enfin, la Section d’appel des réfugiés constate que le document ne comporte aucune caractéristique de sécurité.

[19]           La jurisprudence établit qu’il doit y avoir un motif quelconque ou un élément de preuve pour réfuter la présomption voulant que des documents délivrés par un gouvernement soient valides. Comme l’a indiqué le juge Zinn dans l’affaire Chen c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1133 [Chen] :

10        La Cour a de façon constante décidé qu’il existe une présomption selon laquelle les documents provenant des autorités étrangères sont ce qu’ils sont censés être : Ramalingam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. No 10 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 5, et Manka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 522 (C.F.), au paragraphe 8. Par conséquent, dans la question soumise à la SPR, il faut se demander : quels éléments de preuve ont été produits afin de renverser cette présomption de validité? Les seules observations faites par la SPR étaient qu’il est facile de se procurer des documents officiels frauduleux en Chine et que la citation à comparaître « ne comporte aucune caractéristique de sécurité, mis à part une estampille rouge ».

[20]           En outre, pour réfuter la présomption de validité, les éléments de preuve ou les motifs invoqués pour douter des documents ne doivent pas se limiter à des remarques dans le cartable national de documentation que des documents frauduleux sont généralement disponibles au Nigeria (Chen, aux paragraphes 12 et 13; Cai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 577, au paragraphe 17; Lin c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 157, aux paragraphes 53 et 54; Cheema c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 224, au paragraphe 7).

[21]            Dans Chen, le juge Zinn a également observé que le tribunal doit fournir des motifs ou des éléments de preuve pour mettre en doute l’absence de caractéristiques de sécurité, avant de conclure que la présomption de validité est réfutée.

11        En ce qui a trait à la question des caractéristiques de sécurité, il n’y a pas d’élément de preuve dans le dossier — et la SPR n’en cite aucun — qui révèle que le document devrait avoir des caractéristiques de sécurité supplémentaires. De cela, je tire l’inférence que la SPR a supposé que le document pouvait être plus facilement contrefait qu’un document qui a des caractéristiques de sécurité élevées. Toutefois, même si cela était vrai, il ne s’agit pas d’une preuve que ce document était frauduleux.

[22]           Dans cette affaire, la Section d’appel des réfugiés a admis les documents. Même si ses motifs ne l’indiquent pas clairement, il semble que, dans une certaine mesure, elle met en doute leur authenticité. Cependant, si c’est le cas, elle ne fournit aucune raison ou preuve pour réfuter la présomption que ce nouvel élément de preuve, des documents délivrés par un gouvernement, n’est pas valide. Elle ne traite pas non plus ce qui semble constituer des caractéristiques de sécurité sur l’acte de naissance et le certificat d’origine. La Cour a déjà soutenu que l’existence de timbres officiels constitue une caractéristique de sécurité aux fins de l’évaluation de l’authenticité (Dai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 723, au paragraphe 27; voir également : Elhassan c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1247, au paragraphe 22; Ru c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 935, au paragraphe 21; Zheng c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 877, au paragraphe 18).

[23]           Je mentionne également qu’il ne s’agit pas d’un cas où la Section d’appel des réfugiés a déterminé, en s’appuyant sur le témoignage du demandeur devant la Section de la protection des réfugiés, qu’un nouvel élément de preuve n’avait aucune valeur probante en raison des contradictions et des incohérences dans le témoignage du demandeur (voir Rasheed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 587, au paragraphe 24).

[24]           Il est évident que la suffisance des motifs ne constitue pas un motif en soi pour annuler une décision à la suite d’un examen judiciaire et un tribunal de révision doit d’abord chercher à la compléter avant de tenter de la contrecarrer (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre­Neuve­et­Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 12 à 17 [Newfoundland Nurses]). Cependant, le décideur a dû avoir une base raisonnable sur laquelle s’appuyer pour prendre cette décision (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, aux paragraphes 53, 55 et 56).

[25]           Dans cette affaire, les motifs invoqués par la Section d’appel des réfugiés dans son évaluation et sa pondération des nouveaux documents ne me permettent pas de comprendre pourquoi, dans ces circonstances, elle ne leur a accordé aucun poids. En conséquence, leur traitement me paraît incompréhensible et, par conséquent, déraisonnable. La conclusion de la Section d’appel des réfugiés voulant que la demanderesse ne soit pas parvenue à établir son identité est fondée sur son évaluation du passeport de la demanderesse, la seule pièce d’identité qui a été évaluée, et sur le témoignage de la demanderesse concernant ce document. Cette évaluation aurait­elle été différente si d’autres documents d’identification avaient été évalués correctement, il est impossible de le savoir. Par conséquent, il va de soi que l’évaluation de l’identité de la demanderesse par la Section d’appel des réfugiés est également déraisonnable.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.      La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Section d’appel des réfugiés est annulée et l’affaire est renvoyée à un tribunal différent pour nouvel examen;

2.      Aucune question de portée générale n’est proposée par les parties et aucune n’est soulevée;

3.      Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Cecily Y. Strickland »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2891-15

 

INTITULÉ :

AMUDAT OLAYEMI ADESIDA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 29 février 2016

 

COMPARUTIONS :

Godwin Oware

 

Pour la demanderesse

 

Bridget A. O’Leary

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cabinet d’avocats Oware

Avocat­procureur

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.