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Date : 20160226


Dossier : T-2574-14

Référence : 2016 CF 252

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 26 février 2016

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

SYNDICAT DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DES POSTES

demandeur

et

SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision de l’agent d’appel, Michael Wiwchar [l’agent d’appel] du Tribunal de santé et sécurité au travail Canada datée du 27 novembre 2014.

[2]               La décision de l’agent d’appel annule une décision précédente d’une agente de santé et de sécurité trouvant la défenderesse, la Société canadienne des postes [SCP], en contravention des exigences en matière d’inspection de la sécurité comme cela est établi à l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail, LRC 1985, ch. L-2.

[3]               La demande est rejetée pour les motifs qui suivent.

I.                   Contexte

[4]               Les faits sous-jacents ne sont pas contestés. Le résumé suivant est tiré de la décision de l’agent d’appel.

[5]               Le demandeur, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes [le STTP], est l’agent négociateur accrédité pour un groupe d’employés comprenant des facteurs de partout au Canada. Le demandeur représente également les employés membres du comité local conjoint de la santé et de la sécurité [CLCSS]. La défenderesse, la SCP, a compétence exclusive en ce qui concerne l’établissement et l’exploitation de services postaux au Canada.

[6]               En juillet 2012, les représentants du CLCSS du STTP ont proposé, lors d’une réunion du comité au dépôt de Burlington (Ontario) [le dépôt de Burlington] que les inspections des itinéraires individuels des facteurs soient effectuées dans le cadre du programme de prévention des risques dans le lieu de travail [PPRLT]. Ils estimaient que le lieu de travail comprenait des zones publiques lorsqu’un facteur livrait du courrier. Toutefois, en refusant de donner suite à cette demande, la défenderesse a mentionné qu’en vertu du PPRLT, les agents de livraison signalaient tout risque détecté en cours d’itinéraire à leur superviseur.

[7]               En août 2012, Ressources humaines et Développement des compétences Canada [RDDCC], comme on appelait cet organisme à l’époque, a reçu une plainte d’une représentante du CLCSS du STTP au dépôt de Burlington dans laquelle il était indiqué que le lieu de travail n’était inspecté qu’en partie, à savoir que seul le bâtiment physique faisait l’objet d’une inspection, alors que les itinéraires des facteurs devraient aussi être inspectés. Une agente de santé et de sécurité [SST] s’est présentée à l’établissement pour faire une enquête relativement à cette plainte.

A.                Décision de l’agente de SST

[8]               En examinant la plainte, l’agente de SST a relevé quatre contraventions à la partie II du Code canadien du travail et elle a demandé à la défenderesse de mettre fin à ces contraventions et de prendre des mesures pour empêcher la continuation des contraventions ou leur répétition. La présente demande de contrôle judiciaire s’applique uniquement à la contravention no 1.

[9]               Au sujet de la contravention no 1, l’agente de SST conclut que, en vertu de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail, la défenderesse a omis de veiller à ce que le CLCSS inspecte chaque mois tout ou partie du lieu de travail, de façon que chaque partie du lieu de travail soit inspectée au moins une fois par année. La conclusion relative à la contravention indique que l’activité d’inspection du CLCSS est limitée au bâtiment du dépôt de Burlington.

[10]           L’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail se lit comme suit :

125. (1) Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève :

[...]

(z.12) de veiller à ce que le comité local ou le représentant inspecte chaque mois tout ou partie du lieu de travail, de façon que celui-ci soit inspecté au complet au moins une fois par année;

125. (1) Without restricting the generality of section 124, every employer shall, in respect of every work place controlled by the employer and, in respect of every work activity carried out by an employee in a work place that is not controlled by the employer, to the extent that the employer controls the activity,

[...]

(z.12) ensure that the work place committee or the health and safety representative inspects each month all or part of the work place, so that every part of the work place is inspected at least once each year;

[11]           La défenderesse a présenté un appel en vertu du paragraphe 146(1) du Code canadien du travail de l’instruction émise par l’agente de SST prétendant qu’elle a erré en citant quatre contraventions au Code canadien du travail.

B.                 Observations pertinentes pour l’agent d’appel

[12]           En ce qui concerne la contravention visée par la présente demande, la question à laquelle l’agent d’appel est confronté était l’interprétation du « lieu de travail » au sens de l’expression utilisée dans l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail.

[13]           La défenderesse, alors appelante, a affirmé que l’adoption par l’agente de SST d’une interprétation du « lieu de travail » de façon large de manière à ce qu’elle s’applique à tous les points de remise de facteurs, cela engendrera des situations absurdes. La défenderesse a fourni des éléments de preuve à l’appui de cette position.

[14]           La défenderesse a soutenu que l’agent d’appel devrait plutôt interpréter cette expression en fonction de l’objet et du contexte du paragraphe en cause en examinant ses dispositions dans leur ensemble, en tenant compte de la place de l’alinéa 125(1)z.12) dans le paragraphe 125(1) du Code canadien du travail et dans le cadre du régime législatif. La défenderesse a également soutenu que l’interprétation de l’alinéa 125(1)z.12) devrait être régie par deux facteurs : 1) la nature des lieux eux-mêmes et 2) la capacité de l’employeur à exercer son autorité sur le lieu en cause ou sur toute tâche dangereuse accomplie dans ce lieu. La défenderesse a affirmé qu’elle n’a pas autorité sur les points de livraison réels ni aucune emprise sur les dangers pouvant se manifester aux emplacements que la décision de l’agente de SST a définis comme étant un lieu de travail. La défenderesse a affirmé que l’agent d’appel devrait également considérer la question d’autorité comme étant centrale lorsqu’il s’agit de déterminer ce qui constitue un lieu de travail pour l’application du paragraphe 125(1).

[15]           En revanche, le demandeur, alors intimé, a fait valoir que les objectifs liés à la partie II du Code canadien du travail et la jurisprudence appuient une interprétation plus large de l’expression « lieu de travail » et que l’on reconnaît dans de nombreuses décisions de tribunaux qu’un « lieu de travail » n’est pas nécessairement un seul lieu, un lieu intérieur ou un lieu stationnaire. De plus, le demandeur a indiqué que bien qu’un lieu de travail qui ne relève pas de la défenderesse, elle exerce son autorité sur la tâche et par conséquent, les obligations en vertu du paragraphe 125(1) s’appliqueraient. Le demandeur a également fait valoir que l’interprétation de l’alinéa 125(1)z.12) de la défenderesse serait indûment restrictive et irait à l’encontre de l’objectif de la loi.

II.                Décision faisant l’objet du contrôle

[16]           En rendant une décision, l’agent d’appel a modifié l’instruction de l’agente de SST en suspendant les contraventions nos 1, 2 et 4 et en modifiant la contravention no 3 (Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2014 TSSTC 22 [la décision]). Encore une fois, seule la contravention no 1 est visée par la présente demande.

[17]           L’agent d’appel a abordé la question soulevée par la contravention no 1 est celle de savoir si l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail s’applique à tous les endroits où les facteurs accomplissent leur travail, y compris chaque point de remise et les itinéraires.

[18]           Pour traiter la question, l’agent d’appel a examiné deux questions : 1) le sens de « lieu de travail » en vertu du Code canadien du travail et plus précisément si l’itinéraire d’un facteur et ses points de remise constituent un « lieu de travail » au sens du paragraphe 125(1) du Code canadien du travail; et 2) s’il existe une obligation pour l’employeur d’exercer son autorité sur un lieu de travail avant que les obligations d’effectuer une inspection prévues à l’alinéa 125(1)z.12) ne s’appliquent.

[19]           À l’égard de la première question, l’agent d’appel a trouvé que l’objet de la législation sur la santé et la sécurité est de prévenir les accidents et les blessures et que conformément à l’article 12 de la Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21, l’expression « lieu de travail » doit être interprétée de manière large. L’agent d’appel s’est fondé sur Mowat Express c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier du Canada (FTQ – CTC), 1er juin 1993, décision no 94-004, pour conclure que le « lieu de travail » d’un facteur comprend des endroits à l’extérieur du bâtiment physique qu’est le dépôt de Burlington et que le « lieu de travail » comprend les points de remise et les itinéraires d’un facteur.

[20]           D’accord avec la position du demandeur sur la nécessiter d’adopter une définition large du « lieu de travail », l’agent d’appel a considéré la nature des obligations imposées en vertu de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail.

[21]           Après avoir examiné la formulation du paragraphe 125(1), l’agent d’appel conclut, au paragraphe 93, que les obligations énoncées dans l’article du Code canadien du travail « sont axées sur la notion d’autorité » :

93.       Il existe une distinction claire entre les lieux de travail placés sous l’entière autorité de l’employeur et ceux qui ne le sont pas. Une simple lecture de l’énoncé des obligations révèle clairement que : (i) certaines obligations s’appliquent à tout employeur, peu importe s’il a autorité sur le lieu de travail et pourvu qu’il ait autorité sur toute tâche accomplie, et que (ii) d’autres obligations ne peuvent être exécutées si l’employeur n’a pas autorité complète sur le lieu de travail physique.

[22]           L’agent d’appel déclare ensuite aux paragraphes 95 et 96 :

95.       Les mots employés au début du paragraphe 125(1) m’indiquent que le législateur l’a ainsi rédigé afin de s’assurer que l’employeur est lié dans toute la mesure possible par les obligations découlant du Code et de son Règlement. Certains des alinéas du paragraphe 125(1) renvoient à des obligations qui ne peuvent être remplies que dans un lieu de travail placé sous l’entière autorité de l’employeur. De même, d’autres alinéas confèrent une obligation à tout employeur, peu importe s’il a autorité ou non sur le lieu de travail, pourvu qu’il ait entière autorité sur la tâche en cause. L’alinéa 125(1)t) fournit un exemple de cela, comme suit :

t) de veiller à ce que l’équipement — machines, appareils et outils — utilisé par ses employés pour leur travail soit conforme aux normes réglementaires de santé, de sécurité et d’ergonomie, et sécuritaire dans tous les usages auxquels il est destiné;

96.       À mon avis, l’obligation d’inspecter prévue à l’alinéa z.12) appartient à la première catégorie, puisque l’obligation d’inspecter le lieu de travail vise à permettre le recensement de risques et à créer une possibilité d’éliminer tout risque éventuel ou de faire le nécessaire pour qu’il soit éliminé. Et cela ne peut être accompli sans l’exercice d’une autorité complète sur le lieu de travail.

[23]           En jugeant que l’alinéa 125(1)z.12) ne s’applique pas aux endroits où un facteur accomplit son travail à l’extérieur du bâtiment physique, l’agent d’appel fait remarquer, au paragraphe 100 de la décision, que la défenderesse « a créé un grand nombre d’outils d’évaluation, de politiques et de programmes servant à évaluer et à promouvoir la santé et la sécurité de ses employés pour chacun des éléments de leur travail ».

III.             Dispositions législatives pertinentes

[24]           Les parties pertinentes du Code canadien du travail et du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, DORS/86-304 [le Règlement] sont reproduites à l’annexe « A » des présents jugement et motifs.

IV.             Observations du demandeur

[25]           Le demandeur sollicite une ordonnance de certiorari annulant la décision de l’agent d’appel à l’égard de la contravention no 1 et rétablissant la conclusion de l’agente de SST selon laquelle la défenderesse contrevient à l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail.

[26]           Le demandeur soutient que l’interprétation de l’alinéa 125(1)z.12) par l’agent d’appel manque de justification et d’intelligibilité en raison d’incohérences internes dans les motifs. Le demandeur soutient que la décision n’appartient pas aux issues possibles acceptables compte tenu des restrictions imposées par le libellé, l’esprit et l’objet du Code canadien du travail et de l’interprétation des faits par le décideur.

[27]           Le demandeur soutient qu’en raison de la conclusion selon laquelle : 1) les itinéraires et points de remise des facteurs font partie du lieu de travail aux fins du paragraphe 125(1); 2) la défenderesse a autorité sur les tâches liées au travail en cours d’itinéraire et aux points de remise des facteurs jusqu’à la façon dont les facteurs effectuent les itinéraires; 3) la défenderesse peut prendre des mesures pour recenser et éliminer les risques en cours d’itinéraire et aux points de remise des facteurs, l’agent d’appel ne pourrait pas logiquement conclure que l’alinéa 125(1)z.12) n’oblige pas la SCP à réaliser des inspections annuelles des itinéraires et des points de remise. L’incapacité de l’agent d’appel à concilier ses conclusions de fait avec sa définition restreinte de l’« autorité » a donné lieu à une décision dépourvue de justification.

[28]           Le demandeur soutient que l’objectif de la législation sur la santé et la sécurité est de préserver la santé et la sécurité des travailleurs, et que cela est bien établi dans la jurisprudence. Par conséquent, tout doute ou toute ambiguïté découlant du langage utilisé par la SCP doit être résolu de façon à favoriser la protection des employés. Le demandeur souligne ensuite que l’agent d’appel a bien interprété l’expression « lieu de travail » dans les paragraphes 122(1) et 125(1) du Code canadien du travail pour inclure les itinéraires et les points de remise de facteur.

[29]           Le demandeur aborde ensuite l’examen du paragraphe 125(1) du Code canadien du travail par l’agent d’appel. Le demandeur soutient qu’à la simple lecture du paragraphe, les tâches mentionnées au paragraphe 125(1) s’appliquent à la fois lorsqu’un employeur exerce une autorité sur le lieu de travail et lorsque l’employeur n’exerce pas d’autorité sur le lieu de travail, mais sur la tâche accomplie.

[30]           En se fondant sur la décision de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt R v. Huggins, 2010 ONCA 746, au paragraphe 17, 326 DLR (4th) 720, le demandeur soutient que le décideur ne devrait pas restreindre l’application de la loi en raison d’une conviction selon laquelle l’application est difficilement réalisable, puisque le caractère pratique de l’application de la loi est décidé par le législateur et non par un décideur administratif ou les cours. De plus, le demandeur soutient que le nombre limité de cas où l’application d’une disposition se traduirait par une absurdité ne s’applique pas ici puisque personne ne peut conclure qu’exiger que les employeurs respectent toutes les obligations du paragraphe 125(1), dans la mesure de l’autorité qu’ils ont sur une tâche liée au travail, donnerait lieu à des conséquences ridicules ou inéquitables qui sont incompatibles avec l’objet de la loi (Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27, au paragraphe 27).

[31]           Le demandeur soutient également, ou subsidiairement que l’agent d’appel a adopté de façon déraisonnable une interprétation indûment restrictive du terme « autorité ». Le demandeur soutient que la détermination de l’« autorité » était limitée aux circonstances où un employeur a un accès exclusif ou le droit de modifier le lieu de travail physique conjointement à la décision de l’agent d’appel selon laquelle l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail s’applique uniquement lorsque l’autorité exercée par un employeur sur un lieu de travail écarte l’obligation de la défenderesse d’inspecter les lieux de travail afin de recenser les risques et de prendre des mesures pour les éliminer. Le demandeur soutient que l’importante autorité fonctionnelle exercée par la défenderesse sur les itinéraires et les points de remise des facteurs équivaut à un niveau d’autorité exercé sur le lieu de travail qui est suffisant pour faire entrer en jeu l’obligation prévue par le paragraphe 125(1), même si l’agent d’appel n’a pas commis d’erreur susceptible de révision en concluant que l’obligation s’applique uniquement lorsqu’un employeur exerce une autorité sur un lieu de travail.

[32]           Enfin, le demandeur soutient qu’une interprétation du paragraphe 125(1) qui dispense les employeurs fédéraux du recensement des risques pour la sécurité et de leur élimination sur un lieu de travail où ils n’ont pas d’accès exclusif est contraire au régime du Code canadien du travail. Le demandeur soutient que le paragraphe 125(1) cherche à améliorer, et non à déroger au devoir général des employeurs en vertu de l’article 124 du Code canadien du travail de veiller à la sécurité sur le lieu de travail.

[33]           Le demandeur conteste également l’utilisation par la défenderesse d’exemples hypothétiques relatifs à d’autres lieux de travail sous réglementation fédérale et d’éléments de preuve relatifs à des employés de la SCP qui prennent le taxi jusqu’à leurs itinéraires et qui prennent leurs repas durant la journée de travail. Le demandeur soutient qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve devant de la Cour relativement à ces exemples pour justifier leur utilisation pour l’interprétation du Code canadien du travail et, par conséquent, l’accent devrait être mis uniquement sur les itinéraires et les points de remise de Burlington.

V.                Observations de la défenderesse

[34]           La défenderesse soutient que l’interprétation de l’agent d’appel du paragraphe 125(1) et de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail appartenait aux issues possibles acceptables et était appuyée par les éléments de preuve qui lui ont été présentés et que, par conséquent, elle était raisonnable.

[35]           Au début de ses observations orales, la défenderesse a fait remarquer que la position du demandeur selon laquelle la partie II du Code canadien du travail est un texte législatif concernant le bien-être public qui, par conséquent, nécessite généralement une interprétation large et téléologique n’était pas contestée. Toutefois, en se fondant sur l’arrêt Blue Mountain Resorts Ltd v. Bok, 2013 ONCA 75, au paragraphe 26, 114 OR (3d) 321 [Blue Mountain Resorts], la défenderesse soutient qu’une interprétation large et généreuse du Code canadien du travail ne nécessite pas une interprétation illimitée.

[36]           La défenderesse a estimé que le paragraphe 125(1) du Code canadien du travail nécessite de déterminer en premier lieu si l’endroit en question est un lieu de travail. Toutefois, contrairement au demandeur, la défenderesse soutient que lors de l’évaluation des tâches et des obligations imposées par le paragraphe 125(1), la conclusion qu’un endroit est un « lieu de travail » ne met pas fin à l’enquête. La défenderesse soutient plutôt que les obligations imposées par le paragraphe 125(1) différeront dans la mesure où l’employeur a autorité, ou non, sur le lieu de travail ou, subsidiairement, s’il n’a autorité que sur la tâche liée au travail.

[37]           La défenderesse conteste également la position du demandeur voulant qu’en interprétant le paragraphe 125(1), l’agent d’appel aurait dû porter son attention uniquement sur les itinéraires de facteur de l’emplacement de Burlington. La défenderesse soutient qu’une enquête sur l’interprétation du paragraphe 125(1) nécessite non seulement l’évaluation de la destination des employés, mais aussi de la façon dont ils s’y rendent.

[38]           La défenderesse établit ensuite les éléments de preuve qu’elle a présentés à l’agent d’appel relativement aux employés de la SCP du dépôt de Burlington et aux employés de la SCP en général afin de démontrer les ramifications de la conclusion selon laquelle l’alinéa 125(1)z.12) s’applique de la façon que le demandeur a soulevé. Par exemple, la défenderesse soutient que l’interprétation du demandeur inclurait une obligation d’inspecter les transports en commun utilisés pour amener le facteur au point de départ de son itinéraire puisque plusieurs facteurs se rendent à leur premier point de remise en utilisant les transports en commun ou un taxi.

[39]           La défenderesse, en s’appuyant de nouveau sur Blue Mountain Resorts, au paragraphe 38, soutient qu’il était également approprié pour l’agent d’appel de tenir compte de circonstances hypothétiques lors de l’évaluation de l’incidence de l’interprétation de l’alinéa 125(1)z.12) proposée par le demandeur. La défenderesse soutient que ces circonstances hypothétiques touchant l’Agence Parcs Canada, le Conseil national de recherches et la Gendarmerie royale du Canada démontrent l’absurdité potentielle de l’interprétation de l’alinéa 125(1)z.12) comme nécessitant que les employeurs sous réglementation fédérale effectuent des inspections à des lieux de travail où l’employeur n’exerce aucune autorité.

[40]           La défenderesse soutient que l’agent d’appel reconnaît de façon raisonnable la nécessité de la notion d’autorité pour l’application de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail en étant d’accord avec la position de la défenderesse selon laquelle la SCP ne pourrait pas faire respecter l’exigence de veiller à ce que tous les bâtiments et structures permanents et temporaires répondent aux normes prescrites pour les structures qui ne lui appartiennent pas et qu’elle n’a pas le droit de modifier. En s’interrogeant sur les absurdités possibles découlant de la conclusion qu’un lieu de travail se situe partout où une personne effectue du travail, l’approche de l’agent d’appel de ne pas adopter une interprétation étroite du lieu de travail comme la Cour d’appel de l’Ontario l’a fait dans Blue Mountain Resorts, mais plutôt de se concentrer sur l’élément sur lequel l’employeur a autorité a mené à une conclusion raisonnable et logique semblable.

[41]           La défenderesse soutient également que l’agent d’appel n’a pas perdu de vue l’obligation de l’employeur d’assurer la protection de la santé et de la sécurité des employés et a tenu compte des éléments de preuve qui lui ont été présentés démontrant que la défenderesse a plusieurs politiques et programmes en place pour gérer les risques à l’extérieur et liés à la livraison du courrier, mentionnant en particulier le PPRLT. La défenderesse a souligné que le renvoi de l’agent d’appel au paragraphe 100 de la Décision relative au PPRLT était une conclusion implicite selon laquelle la SCP cherche efficacement à se conformer à la partie XIX du Règlement, et que la conformité a dissipé les préoccupations de l’agent d’appel relativement à l’identification des risques qui pourraient découler de l’interprétation adoptée concernant l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail.

VI.             Questions en litige

[42]           La seule question soulevée dans la présente demande est de savoir si l’interprétation du paragraphe 125(1) et donc de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail par l’agent d’appel était raisonnable. Plus précisément, la Cour demande si la conclusion de l’agent d’appel voulant que les obligations en vertu de l’alinéa 125(1)z.12) s’appliquent uniquement aux lieux de travail où l’employeur exerce une autorité et appartiennent aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

VII.          Norme de contrôle

[43]           Les parties conviennent que la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique à la décision de l’agent d’appel, y compris l’interprétation et l’application de l’alinéa 125(1)z.12) du Code canadien du travail, puisque l’agent d’appel interprétait sa loi constitutive, un domaine dans lequel il a une expertise considérable (Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes c. Société canadienne des postes, 2011 CAF 24, aux paragraphes 17, 18 et 28, 330 DLR (4th) 729).

[44]           En concluant que la décision doit être examinée selon la norme de contrôle de la décision raisonnable, la Cour tient compte de la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Commission canadienne des droits de la personne, 2013 CAF 75, au paragraphe 14, 444 NR 120. Dans cette décision, la Cour d’appel établit que dans le contexte de l’examen d’une décision qui touche l’interprétation d’une loi, les issues possibles acceptables peuvent être relativement restreintes puisque « [l]a décision du Tribunal porte principalement sur une question d’interprétation d’un texte législatif, une question limitée par le texte, le contexte et l’objet de la loi. »

VIII.       Analyse

A.                Interprétation législative

[45]           Lors de l’examen d’une décision interprétant une disposition législative, il est utile de commencer par examiner le principe sous-jacent principal de l’interprétation législative selon la jurisprudence de la Cour suprême du Canada. Dans l’arrêt Bell ExpressVU Limited Partnership c. Rex, [2002] 2 RCS 559 [Bell ExpressVU], une décision unanime de la Cour, le juge Iacobucci dit ce qui suit aux paragraphes 26 et 27 :

26        Voici comment, à la p. 87 de son ouvrage Construction of Statutes (2e éd. 1983), Elmer Driedger a énoncé le principe applicable, de la manière qui fait maintenant autorité :

[traduction] Aujourd’hui il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

Notre Cour a à maintes reprises privilégié la méthode moderne d’interprétation législative proposée par Driedger, et ce dans divers contextes [sources omises]. Je tiens également à souligner que, pour ce qui est de la législation fédérale, le bien-fondé de la méthode privilégiée par notre Cour est renforcé par l’art. 12 de la Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I‑21, qui dispose que tout texte « est censé apporter une solution de droit et s’interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet ».

27        Cette méthode reconnaît le rôle important que joue inévitablement le contexte dans l’interprétation par les tribunaux du texte d’une loi [Non souligné dans l’original]. Comme l’a fait remarquer avec perspicacité le professeur John Willis dans son influent article intitulé « Statute Interpretation in a Nutshell » (1938), 16 R. du B. can. 1, p. 6, [traduction] « les mots, comme les gens, prennent la couleur de leur environnement ». Cela étant, lorsque la disposition litigieuse fait partie d’une loi qui est elle-même un élément d’un cadre législatif plus large, l’environnement qui colore les mots employés dans la loi et le cadre dans lequel celle-ci s’inscrit sont plus vastes [Non souligné dans l’original]. En pareil cas, l’application du principe énoncé par Driedger fait naître ce que notre Cour a qualifié, dans R. c. Ulybel Enterprises Ltd., [2001] 2 R.C.S. 867, 2001 CSC 56, de « principe d’interprétation qui présume l’harmonie, la cohérence et l’uniformité entre les lois traitant du même sujet ».

[46]           Dans Bell ExpressVU, aux paragraphes 29 à 30, le juge Iacobucci a ensuite abordé la question de l’ambiguïté dans une disposition législative :

29        Qu’est‑ce donc qu’une ambiguïté en droit? Une ambiguïté doit être « réelle » (Marcotte, précité, p. 115). Le texte de la disposition doit être [traduction] « raisonnablement susceptible de donner lieu à plus d’une interprétation » (Westminster Bank Ltd. c. Zang, [1966] A.C. 182 (H.L.), p. 222, lord Reid). Il est cependant nécessaire de tenir compte du « contexte global » de la disposition pour pouvoir déterminer si elle est raisonnablement susceptible de multiples interprétations. Sont pertinents à cet égard les propos suivants, prononcés par le juge Major dans l’arrêt CanadianOxy Chemicals Ltd. c. Canada (Procureur général), [1999] 1 R.C.S. 743, par. 14 : « C’est uniquement lorsque deux ou plusieurs interprétations plausibles, qui s’harmonisent chacune également avec l’intention du législateur, créent une ambiguïté véritable que les tribunaux doivent recourir à des moyens d’interprétation externes » (je souligne), propos auxquels j’ajouterais ce qui suit : « y compris d’autres principes d’interprétation ».

30        Voilà pourquoi on ne saurait conclure à l’existence d’une ambiguïté du seul fait que plusieurs tribunaux — et d’ailleurs plusieurs auteurs — ont interprété différemment une même disposition. Autant il serait inapproprié de faire le décompte des décisions appuyant les diverses interprétations divergentes et d’appliquer celle qui recueille le « plus haut total », autant il est inapproprié de partir du principe que l’existence d’interprétations divergentes révèle la présence d’une ambiguïté. Il est donc nécessaire, dans chaque cas, que le tribunal appelé à interpréter une disposition législative se livre à l’analyse contextuelle et téléologique énoncée par Driedger, puis se demande si [traduction] « le texte est suffisamment ambigu pour inciter deux personnes à dépenser des sommes considérables pour faire valoir deux interprétations divergentes » (Willis, loc. cit., p. 4-5).

[47]           De plus, dans Rizzo & Rizzo Shoes Ltd (Re), [1998] 1 RCS 27, au paragraphe 27, le juge Iacobucci, s’exprimant de nouveau par écrit pour une Cour suprême du Canada unanime, aborde le principe d’interprétation législative évitant les conséquences absurdes :

27        Selon un principe bien établi en matière d’interprétation législative, le législateur ne peut avoir voulu des conséquences absurdes. D’après Côté, op. cit., on qualifiera d’absurde une interprétation qui mène à des conséquences ridicules ou futiles, si elle est extrêmement déraisonnable ou inéquitable, si elle est illogique ou incohérente, ou si elle est incompatible avec d’autres dispositions ou avec l’objet du texte législatif (aux pp. 430 à 432). Sullivan partage cet avis en faisant remarquer qu’on peut qualifier d’absurdes les interprétations qui vont à l’encontre de la fin d’une loi ou en rendent un aspect inutile ou futile (Sullivan, Construction of Statutes, op. cit., à la p. 88).

B.                 Caractère raisonnable de la décision

[48]           Selon ces principes d’interprétation législative, je vais maintenant examiner le caractère raisonnable de l’interprétation de l’agent d’appel du paragraphe 125(1) et de l’alinéa 125(1)z.12) dans le contexte plus large du Code canadien du travail.

[49]           Comme il est indiqué ci-dessus, le demandeur soutient qu’il était déraisonnable de la part de l’agent d’appel de conclure que les obligations décrites au paragraphe 125(1) ne s’appliquent pas de façon égale aux employeurs qui exercent une autorité sur le lieu de travail ou sur une tâche accomplie sur un lieu de travail. En toute déférence, je ne suis pas d’accord.

[50]           En interprétant le paragraphe 125(1) du Code canadien du travail, l’agent d’appel devait tenir compte des mots du paragraphe 125(1) dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit du Code canadien du travail (Bell ExpressVU, aux paragraphes 26 et 27).

[51]           Dans ce cas, l’agent d’appel a examiné attentivement le paragraphe 125(1) du Code canadien du travail et, après avoir conclu que le lieu de travail des facteurs de la SCP comprend des endroits à l’extérieur du bâtiment physique où l’employeur a autorité et comprend des points de remise et des itinéraires, il a ensuite examiné les obligations précises énumérées au paragraphe 125(1) du Code canadien du travail. Il mentionne que le paragraphe établit une distinction claire entre les lieux de travail placés sous l’entière autorité de l’employeur et ceux qui ne le sont pas. Il conclut également à la lumière d’une simple lecture du paragraphe que toutes les obligations ne s’appliquent pas lorsque l’employeur n’a pas autorité sur le lieu de travail. Pour le démontrer, il mentionne l’obligation énoncée à l’alinéa 125(1)a), nécessitant que tous les ouvrages et bâtiments permanents et temporaires soient conformes aux normes réglementaires et il conclut qu’il s’agit d’une obligation dont un employeur ne peut s’acquitter que dans le cas où l’employeur a autorité sur le lieu de travail physique et peut donc en modifier les bâtiments. Il compare cela à l’obligation mentionnée à l’alinéa 125(1)t), de veiller à ce que l’équipement — machines, appareils et outils — utilisé par ses employés pour leur travail soit sécuritaire, mentionnant que cette obligation peut être satisfaite lorsque l’employeur a autorité sur le lieu de travail et lorsque l’employeur a uniquement autorité sur la tâche accomplie. C’est en tenant compte de ce fait que l’agent d’appel conclut que l’obligation relative à l’inspection à l’alinéa 125(1)z.12) s’impose uniquement lorsque l’employeur a autorité sur le lieu de travail, étant donné que l’inspection mentionnée à l’alinéa 125(1)z.12) vise le recensement des risques et la possibilité de les éliminer. L’agent d’appel conclut donc que cela nécessite d’avoir autorité sur le lieu de travail.

[52]           Le demandeur soutient que cette interprétation ne démontre pas le besoin d’une interprétation large et généreuse du Code canadien du travail et que le simple fait qu’une interprétation puisse être perçue par un décideur comme étant difficilement réalisable n’est pas suffisant pour lui permettre d’en limiter l’application. En l’espèce, je suis d’avis que l’agent d’appel a adopté une interprétation raisonnable du paragraphe 125(1) et de l’alinéa 125(1)z.12), selon une lecture harmonieuse des mots dans leur contexte. La conclusion de l’agent d’appel voulant que l’employeur puisse uniquement remplir certaines obligations imposées par le paragraphe lorsqu’il a autorité sur le lieu de travail n’est pas dictée par une évaluation du caractère réalisable, mais est plutôt une conclusion selon laquelle l’objectif sous-jacent de l’alinéa 125(1)z.12) peut seulement être atteint lorsque l’employeur est en mesure de recenser les risques et de les éliminer. Comme il est indiqué par la Cour d’appel de l’Ontario dans Blue Mountain Resorts, aux paragraphes 26 et 27, une interprétation généreuse des lois relatives au bien-être public ne peut pas justifier le prolongement de la portée de la loi au-delà de l’intention du législateur :

26.       [traduction] Cette approche généreuse de l’interprétation des lois relatives au bien-être public n’exige toutefois pas une interprétation illimitée de leurs dispositions.

27.       [traduction] Un des problèmes avec ce qui est autrement une approche compréhensible de l’interprétation de la loi relative au bien-être public est qu’un langage général, à première vue, peut parfois mener à l’adoption de définitions trop générales. Ceci peut prolonger la portée de la loi bien au-delà de ce que le législateur avait prévu et fournir au ministère responsable de la réglementation un mandat beaucoup plus vaste que ce qui est nécessaire pour mettre en application l’objet de la loi.

[53]           Dans le cadre du présent contrôle, je ne dois pas déterminer si l’interprétation de l’agent d’appel était correcte, mais plutôt si l’interprétation était raisonnable en gardant à l’esprit que les issues raisonnables et acceptables peuvent être relativement restreintes. En l’espèce, je suis convaincu que l’interprétation de l’agent d’appel était raisonnable.

[54]           De même, je ne peux pas accepter la position du demandeur voulant que l’agent d’appel a adopté une interprétation déraisonnable de la notion d’« autorité » en tenant compte du paragraphe 125(1) du Code canadien du travail. Comme le mentionne l’agent d’appel, les parties n’ont pas contesté le fait que l’employeur n’exerce pas un contrôle physique sur les points de remise ou les itinéraires. Parallèlement, il n’y a eu aucune contestation relativement au fait que plusieurs points de remise sont des propriétés privées. Par conséquent, il n’était pas déraisonnable pour l’agent d’appel de conclure qu’un employeur n’avait pas autorité sur le lieu de travail et qu’à ce titre, il ne pouvait pas effectuer une inspection et réaliser l’objet qui sous-tend l’alinéa 125(1)z.12). Les exemples hypothétiques provenant du dossier et que la défenderesse a fournis précédemment appuyaient cette interprétation (Blue Mountain Resorts, au paragraphe 38).

[55]           De plus, je suis d’avis que la conclusion de l’agent d’appel voulant que la défenderesse exerce une importante autorité sur la tâche accomplie n’est pas intrinsèquement incohérente avec la décision ni ne mine le caractère raisonnable de la décision. L’agent d’appel précise que le paragraphe 125(1) établit une distinction claire entre l’autorité exercée sur un lieu de travail et l’autorité exercée sur une tâche accomplie. Il a trouvé que cette distinction était importante et valable pour l’interprétation du paragraphe 125(1). Ayant conclu que le paragraphe faisait la distinction entre l’autorité sur le lieu de travail et l’autorité sur une tâche accomplie, et ayant déterminé que l’autorité sur le lieu de travail était un facteur déterminant pour les obligations imposées par l’alinéa 125(1)z.12), il n’était pas nécessaire, à mon avis, que l’agent d’appel aborde la question de l’autorité de l’employeur sur la tâche accomplie.

[56]           Évidemment, pour être raisonnable, l’interprétation ne doit pas non plus contredire l’objectif législatif du Code canadien du travail, la protection de la santé et de la sécurité des employés. Le demandeur soutient que c’est exactement ce que la décision fait. Toutefois, je suis convaincu que la décision reflète une considération contextuelle du paragraphe 125(1) respectant l’esprit du Code canadien du travail qui reconnaît et promeut le principe sous-jacent du Code canadien du travail. L’article 124 impose un devoir général à chaque employeur de veiller à la protection de ses employés en matière de santé et de sécurité au travail. Le paragraphe 125(1) du Code canadien du travail complète au lieu de restreindre ce devoir général [Laroche c. Canada (Procureur général), 2011 CF 1454, au paragraphe 8, 401 FTR 287]. Une interprétation limitant n’importe laquelle des obligations mentionnées au paragraphe 125(1) ne limite pas le devoir plus général mentionné à l’article 124 ni ne mine ou contrevient à l’objet du Code. La décision ne touche pas non plus, à l’égard de l’alinéa 125(1)z.12), la partie XIX du Règlement lié aux obligations de l’employeur relativement à la création et à la mise en œuvre d’un programme de prévention des risques.

[57]           Je reconnais que l’agent d’appel n’a pas fait précisément référence à l’article 124 du Code canadien du travail ni à la partie XIX du Règlement dans son analyse, mais cela ne me mène pas à conclure que la disposition n’a pas été examinée. Comme le juge LeBel a statué de façon unanime pour la Cour suprême du Canada dans Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), [2013] 2 RCS 559, au paragraphe 57, citant Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, [2011] 3 RCS 654 : « la décision que le décideur administratif rend sur le fond peut suggérer une interprétation particulière de la disposition législative en question, même si le décideur ne s’est pas prononcé expressément sur le sens de cette disposition ». Je suis satisfait que le rôle de l’article 124 du Code canadien du travail et de la partie XIX du Règlement était implicite dans l’interprétation du paragraphe 125(1) et de l’alinéa 125(1)z.12) de l’agent d’appel. C’est ce qui est reflété dans la conclusion, au paragraphe 100 de la décision :

100 Quoi qu’il en soit, la preuve a permis de démontrer que Postes Canada a créé un grand nombre d’outils d’évaluation, de politiques et de programmes servant à évaluer et à promouvoir la santé et la sécurité de ses employés pour chacun des éléments de leur travail. Le PPRLT est un exemple notoire de programme assorti d’un protocole servant à recenser et à signaler les risques détectés aux points de remise. À mon avis, ce programme illustre à la perfection la façon dont le Code et son Règlement sont mis en œuvre pour préserver la santé et la sécurité d’employés qui accomplissent toutes sortes de tâches dans toutes sortes de lieux de travail [Non souligné dans l’original].

IX.             Conclusion

[58]           Selon moi, la décision reflète que la préservation des dispositions générales du Code canadien du travail était prépondérante dans l’interprétation du Code canadien du travail de l’agent d’appel. Il a implicitement reconnu que l’adoption de l’interprétation restrictive de la défenderesse de l’expression « lieu de travail » pourrait atténuer les effets de réparation du Code canadien du travail. L’agent d’appel a reconnu que le législateur souhaitait accorder la protection la plus vaste possible aux employés, y compris ceux qui travaillent à un endroit où l’employeur pourrait ne pas avoir d’autorité. À mon avis, l’interprétation de l’agent d’appel du paragraphe 125(1) et de l’alinéa 125(1)z.12) démontre une sensibilité visant à préserver la nature générale des obligations de l’employeur de veiller à la santé et à la sécurité de ses employés sans imposer d’obligations à l’employeur dont il ne serait pas en mesure de s’acquitter.

[59]           Je suis convaincu que la décision de l’agent d’appel est justifiée, transparente et intelligible, et appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47). La demande est par conséquent rejetée, avec dépens à la défenderesse.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.      La demande est rejetée.

2.      Les dépens sont adjugés en faveur de la défenderesse.

« Patrick Gleeson »

Juge


Annexe « A »

Code canadien du travail, L.R.C. 1985, ch. L-2

122. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente partie.

« lieu de travail » Tout lieu où l’employé exécute un travail pour le compte de son employeur.

122.1 La présente partie a pour objet de prévenir les accidents et les maladies liés à l’occupation d’un emploi régi par ses dispositions.

124. L’employeur veille à la protection de ses employés en matière de santé et de sécurité au travail.

125. (1) Dans le cadre de l’obligation générale définie à l’article 124, l’employeur est tenu, en ce qui concerne tout lieu de travail placé sous son entière autorité ainsi que toute tâche accomplie par un employé dans un lieu de travail ne relevant pas de son autorité, dans la mesure où cette tâche, elle, en relève :

a) de veiller à ce que tous les ouvrages et bâtiments permanents et temporaires soient conformes aux normes réglementaires;

b) d’installer des dispositifs protecteurs, garde-fous, barrières et clôtures conformes aux normes réglementaires;

c) selon les modalités réglementaires, d’enquêter sur tous les accidents, toutes les maladies professionnelles et autres situations comportant des risques dont il a connaissance, de les enregistrer et de les signaler aux autorités désignées par les règlements;

d) d’afficher à un endroit bien en vue, accessible à tous les employés :

(i) le texte de la présente partie,

(ii) l’énoncé de ses consignes générales en matière de santé et de sécurité au travail,

(iii) les imprimés réglementaires concernant la santé et la sécurité et ceux que précise le ministre;

e) de mettre à la disposition des employés, de façon que ceux-ci puissent y avoir effectivement accès sur support électronique ou sur support papier une copie des règlements d’application de la présente partie qui sont applicables au lieu de travail;

f) lorsque les règlements d’application de la présente partie sont mis à la disposition des employés sur support électronique, de veiller à ce que ceux-ci reçoivent la formation nécessaire

pour être en mesure de les consulter et de mettre à leur disposition, sur demande, une version sur support papier;

g) de tenir, selon les modalités réglementaires, des dossiers de santé et de sécurité;

h) de fournir les installations de premiers soins et les services de santé réglementaires;

i) de fournir les installations sanitaires et personnelles réglementaires;

j) de fournir, conformément aux normes réglementaires, de l’eau potable;

k) de veiller à ce que les véhicules et l’équipement mobile que ses employés utilisent pour leur travail soient conformes aux normes réglementaires;

l) de fournir le matériel, l’équipement, les dispositifs et les vêtements de sécurité réglementaires à toute personne à qui il permet l’accès du lieu de travail;

m) de veiller à ce que soient conformes aux normes réglementaires l’utilisation, le fonctionnement et l’entretien :

(i) des chaudières et des réservoirs sous pression,

(ii) des escaliers mécaniques, ascenseurs et autres dispositifs destinés au transport des personnes ou du matériel,

(iii) de l’équipement servant à la production, à la distribution ou à l’utilisation de l’électricité,

(iv) des brûleurs à gaz ou à pétrole ou autres appareils générateurs de chaleur,

(v) des systèmes de chauffage, de ventilation et de conditionnement de l’air;

n) de veiller à ce que l’aération, l’éclairage, la température, l’humidité, le bruit et les vibrations soient conformes aux normes réglementaires;

o) de se conformer aux normes réglementaires en matière de prévention des incendies et de mesures d’urgence;

p) de veiller, selon les modalités réglementaires, à ce que les employés puissent entrer dans le lieu de travail, en sortir et y demeurer en sécurité;

q) d’offrir à chaque employé, selon les modalités réglementaires, l’information, la formation, l’entraînement et la surveillance nécessaires pour assurer sa santé et sa sécurité;

r) d’entretenir, conformément aux normes réglementaires, les dispositifs protecteurs, garde-fous, barrières et clôtures qui y sont installés;

s) de veiller à ce que soient portés à l’attention de chaque employé les risques connus ou prévisibles que présente pour sa santé et sa sécurité l’endroit où il travaille;

t) de veiller à ce que l’équipement — machines, appareils et outils — utilisé par ses employés pour leur travail soit conforme aux normes réglementaires de santé, de sécurité et d’ergonomie, et sécuritaire dans tous les usages auxquels il est destiné;

u) de veiller à ce que le lieu de travail, les postes de travail et les méthodes de travail soient conformes aux normes réglementaires d’ergonomie;

v) d’adopter et de mettre en oeuvre les normes et codes de sécurité réglementaires;

w) de veiller à ce que toute personne admise dans le lieu de travail connaisse et utilise selon les modalités réglementaires le matériel, l’équipement, les dispositifs et les vêtements de sécurité réglementaires;

x) de se conformer aux instructions verbales ou écrites qui lui sont données par le ministre ou l’agent d’appel en matière de santé et de sécurité des employés;

y) de veiller à ce que la santé et la sécurité des employés ne soient pas mises en danger

par les activités de quelque personne admise dans le lieu de travail;

z) de veiller à ce que les employés qui exercent des fonctions de direction ou de gestion reçoivent une formation adéquate en matière de santé et de sécurité, et soient informés des responsabilités qui leur incombent sous le régime de la présente partie dans la mesure où ils agissent pour le compte de l’employeur;

z.01) de veiller à ce que les membres du comité d’orientation, ainsi que les membres du comité local ou le représentant, reçoivent la formation réglementaire en matière de santé et de sécurité, et soient informés des responsabilités qui leur incombent sous le régime de la présente partie;

z.02) de répondre sans délai à tout rapport fait au titre de l’alinéa 126(1)g);

z.03) en consultation avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, d’élaborer et de mettre en œuvre un programme réglementaire de prévention des risques professionnels — en fonction de la taille du lieu de travail et de la nature des risques qui s’y posent —, y compris la formation des employés en matière de santé et de sécurité, et d’en contrôler l’application;

z.04) relativement aux risques propres à un lieu de travail et non couverts par un programme visé à l’alinéa z.03), en consultation avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, d’élaborer et de mettre en oeuvre un programme réglementaire de prévention de ces risques, y compris la formation des employés en matière de santé et de sécurité relativement à ces risques, et d’en contrôler l’application;

z.05) de consulter le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, en vue de planifier la mise en oeuvre des changements qui peuvent avoir une incidence sur la santé et la sécurité au travail, notamment sur le plan des procédés et des méthodes de travail;

z.06) de consulter le comité local ou le représentant pour la mise en oeuvre des changements qui peuvent avoir une incidence sur la santé et la sécurité au travail, notamment sur le plan des procédés et des méthodes de travail;

z.07) de mettre à la disposition du comité d’orientation et du comité local les installations, le matériel et le personnel dont ils ont besoin dans le lieu de travail;

z.08) de collaborer avec le comité d’orientation et le comité local ou le représentant pour l’exécution des responsabilités qui leur incombent sous le régime de la présente partie;

z.09) en consultation avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, d’élaborer des orientations et des programmes en matière de santé et de sécurité;

z.10) de répondre par écrit aux recommandations du comité d’orientation, du comité local ou du représentant dans les trente jours suivant leur réception, avec mention, le cas échéant, des mesures qui seront prises et des délais prévus à cet égard;

z.11) de fournir au comité d’orientation, ainsi qu’au comité local ou au représentant, copie de tout rapport sur les risques dans le lieu de travail, notamment sur leur appréciation;

z.12) de veiller à ce que le comité local ou le représentant inspecte chaque mois tout ou partie du lieu de travail, de façon que celui-ci soit inspecté au complet au moins une fois par année;

z.13) selon les besoins, d’élaborer et de mettre en oeuvre, en consultation — sauf en cas d’urgence — avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, un programme de fourniture de matériel, d’équipement, de dispositifs ou de vêtements de protection personnels, et d’en contrôler l’application;

z.14) de prendre toutes les précautions nécessaires pour que soient portés à l’attention de toute personne — autre qu’un de ses employés — admise dans le lieu de travail les risques connus ou prévisibles auxquels sa santé et sa sécurité peuvent être exposées;

z.15) de tenir au besoin avec le représentant des réunions ayant pour objet la santé et la sécurité au travail;

z.16) de prendre les mesures prévues par les règlements pour prévenir et réprimer la violence dans le lieu de travail;

z.17) d’afficher en permanence dans un ou plusieurs endroits bien en vue et fréquentés par ses employés les nom, numéro de téléphone au travail et lieu de travail des membres des comités locaux et des représentants;

z.18) de fournir, dans les trente jours qui suivent une demande à cet effet ou dès que possible par la suite, les renseignements exigés soit par un comité d’orientation en vertu des paragraphes 134.1(5) ou (6), soit par un comité local en vertu des paragraphes 135(8)

ou (9), soit par un représentant en vertu des paragraphes 136(6) ou (7);

z.19) de consulter le comité local ou le représentant pour la mise en oeuvre et le contrôle d’application des programmes élaborés en consultation avec le comité d’orientation.

122. (1) In this Part,

“work place” means any place where an employee is engaged in work for the employee’s employer;

122.1 The purpose of this Part is to prevent accidents and injury to health arising out of, linked with or occurring in the course of employment to which this Part applies.

124. Every employer shall ensure that the health and safety at work of every person employed by the employer is protected.

125. (1) Without restricting the generality of section 124, every employer shall, in respect of every work place controlled by the employer and, in respect of every work activity carried out by an employee in a work place that is not controlled by the employer, to the extent that the employer controls the activity,

(a) ensure that all permanent and temporary buildings and structures meet the prescribed standards;

(b) install guards, guard-rails, barricades and fences in accordance with prescribed standards;

(c) investigate, record and report in the manner and to the authorities as prescribed all accidents, occupational diseases and other hazardous occurrences known to the employer;

(d) post in a conspicuous place accessible to every employee

(i) a copy of this Part,

(ii) a statement of the employer’s general policy concerning the health and safety at work of employees, and

(iii) any other printed material related to health and safety that is prescribed or that may be directed by the Minister;

(e) make readily available to employees for examination, in printed or electronic form, a copy of the regulations made under this Part that apply to the work place;

(f) if a copy of the regulations is made available in electronic form, provide appropriate training to employees to enable them to have access to the regulations and, on the request of an employee, make a printed copy of the regulations available;

(g) keep and maintain in prescribed form and manner prescribed health and safety records;

(h) provide prescribed first-aid facilities and health services;

(i) provide prescribed sanitary and personal facilities;

(j) provide, in accordance with prescribed standards, potable water;

(k) ensure that the vehicles and mobile equipment used by the employees in the course of their employment meet prescribed standards;

(l) provide every person granted access to the work place by the employer with prescribed safety materials, equipment, devices and clothing;

(m) ensure that the use, operation and maintenance of the following are in accordance with prescribed standards:

(i) boilers and pressure vessels,

(ii) escalators, elevators and other devices for moving persons or freight,

(iii) all equipment for the generation, distribution or use of electricity,

(iv) gas or oil burning equipment or other heat generating equipment, and

(v) heating, ventilation and air-conditioning systems;

(n) ensure that the levels of ventilation, lighting, temperature, humidity, sound and vibration are in accordance with prescribed standards;

(o) comply with prescribed standards relating to fire safety and emergency measures;

(p) ensure, in the prescribed manner, that employees have safe entry to, exit from and occupancy of the work place;

(q) provide, in the prescribed manner, each employee with the information, instruction, training and supervision necessary to ensure their health and safety at work;

(r) maintain all installed guards, guard-rails, barricades and fences in accordance with prescribed standards;

(s) ensure that each employee is made aware of every known or foreseeable health or safety hazard in the area where the employee works;

(t) ensure that the machinery, equipment and tools used by the employees in the course of their employment meet prescribed health, safety and ergonomic standards and are safe under all conditions of their intended use;

(u) ensure that the work place, work spaces and procedures meet prescribed ergonomic standards;

(v) adopt and implement prescribed safety codes and safety standards;

(w) ensure that every person granted access to the work place by the employer is familiar with and uses in the prescribed circumstances and manner all prescribed safety materials, equipment, devices and clothing;

(x) comply with every oral or written direction given to the employer by the Minister or an appeals officer concerning the health and safety of employees;

(y) ensure that the activities of every person granted access to the work place do not endanger the health and safety of employees;

(z) ensure that employees who have supervisory or managerial responsibilities are adequately trained in health and safety and are informed of the responsibilities they have under this Part where they act on behalf of their employer;

(z.01) ensure that members of policy and work place committees and health and safety representatives receive the prescribed training in health and safety and are informed of their responsibilities under this Part;

(z.02) respond as soon as possible to reports made by employees under paragraph 126(1) (g);

(z.03) develop, implement and monitor, in consultation with the policy committee or, if there is no policy committee, with the work place committee or the health and safety representative, a prescribed program for the prevention of hazards in the work place appropriate to its size and the nature of the hazards in it that also provides for the education of employees in health and safety matters;

(z.04) where the program referred to in paragraph (z.03) does not cover certain hazards unique to a work place, develop, implement and monitor, in consultation with the work place committee or the health and safety representative, a prescribed program for the prevention of those hazards that also provides for the education of employees in health and safety matters related to those hazards;

(z.05) consult the policy committee or, if there is no policy committee, the work place committee or the health and safety representative to plan the implementation of changes that might affect occupational health and safety, including work processes and procedures;

(z.06) consult the work place committee or the health and safety representative in the implementation of changes that might affect occupational health and safety, including work processes and procedures;

(z.07) ensure the availability in the work place of premises, equipment and personnel necessary for the operation of the policy and work place committees;

(z.08) cooperate with the policy and work place committees or the health and safety representative in the execution of their duties under this Part;

(z.09) develop health and safety policies and programs in consultation with the policy committee or, if there is no policy committee, with the work place committee or the health and safety representative;

(z.10) respond in writing to recommendations made by the policy and work place committees or the health and safety representative within thirty days after receiving them, indicating what, if any, action will be taken and when it will be taken;

(z.11) provide to the policy committee, if any, and to the work place committee or the health and safety representative, a copy of any report on hazards in the work place, including an assessment of those hazards;

(z.12) ensure that the work place committee or the health and safety representative inspects each month all or part of the work place, so that every part of the work place is inspected at least once each year;

(z.13) when necessary, develop, implement and monitor a program for the provision of personal protective equipment, clothing, devices or materials, in consultation, except in emergencies, with the policy committee or, if there is no policy committee, with the work place committee or the health and safety representative;

(z.14) take all reasonable care to ensure that all of the persons granted access to the work place, other than the employer’s employees, are informed of every known or foreseeable health or safety hazard to which they are likely to be exposed in the work place;

(z.15) meet with the health and safety representative as necessary to address health and safety matters;

(z.16) take the prescribed steps to prevent and protect against violence in the work place;

(z.17) post and keep posted, in a conspicuous place or places where they are likely to come to the attention of employees, the names, work place telephone numbers and work locations of all of the members of work place committees or of the health and safety representative;

(z.18) provide, within thirty days after receiving a request, or as soon as possible after that, the information requested from the employer by a policy committee under subsecla tion 134.1(5) or (6), by a work place committee under subsection 135(8) or (9) or by a health and safety representative under subsection 136(6) or (7); and

(z.19) consult with the work place committee or the health and safety representative on the implementation and monitoring of programs developed in consultation with the policy committee.

Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, DORS/86-304 :

19.1 (1) L’employeur, en consultation avec le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant et avec la participation du comité ou du représentant en cause, élabore et met en oeuvre un programme de prévention des risques professionnels — y compris ceux liés à l’ergonomie —, en fonction de la taille du lieu de travail et de la nature des risques qui s’y posent, et en contrôle l’application. Ce programme comporte les éléments suivants:

a) le plan de mise en oeuvre;

b) la méthode de recensement et d’évaluation des risques;

c) le recensement et l’évaluation des risques;

d) les mesures de prévention;

e) la formation des employés;

f) l’évaluation du programme.

(2) [Abrogé, DORS/2009-84, art. 2]

19.2 (1) L’employeur doit :

a) élaborer un plan de mise en oeuvre qui fait état de l’échéance de chacune des étapes de l’élaboration et de la mise en oeuvre du programme de prévention;

b) contrôler le déroulement de la mise en oeuvre des mesures de prévention;

c) vérifier à intervalles réguliers l’échéancier prévu au plan de mise en oeuvre et, au besoin, le modifier.

(2) Dans le cadre de la mise en oeuvre du programme de prévention, l’employeur veille à ce que les risques liés à l’ergonomie soient recensés et évalués et à ce qu’ils soient éliminés ou réduits, conformément au paragraphe 19.5(1), autant qu’il est raisonnablement possible de le faire et que toute personne désignée pour recenser et évaluer les risques liés à l’ergonomie ait reçu la formation et l’entraînement nécessaires.

19.3 (1) L’employeur élabore une méthode de recensement et d’évaluation des risques, y compris ceux liés à l’ergonomie, en tenant compte des documents et renseignements suivants :

a) tout rapport d’enquête de situation comportant des risques;

b) le registre de premiers soins et le registre de blessures légères;

c) les programmes de protection de la santé dans le lieu de travail;

d) tout résultat d’inspection du lieu de travail;

e) tout élément signalé par l’employé au titre des alinéas 126(1)g) ou h) de la Loi et tout rapport fait par l’employé au titre de l’article 15.3;

f) tout rapport, toute étude et toute analyse de l’État ou de l’employeur sur la santé et la sécurité des employés;

g) tout rapport présenté sous le régime du Règlement sur les comités de sécurité et de santé et les représentants;

h) le registre des substances dangereuses;

i) tout autre renseignement pertinent, y compris tout renseignement lié à l’ergonomie.

(2) La méthode de recensement et d’évaluation des risques comporte les éléments suivants:

a) la marche à suivre et l’échéancier pour recenser et évaluer les risques;

b) la tenue d’un registre des risques;

c) l’échéancier de révision et, au besoin, de modification de la méthode.

19.4 L’employeur recense et évalue les risques professionnels, y compris ceux liés à l’ergonomie, conformément à la méthode élaborée aux termes de l’article 19.3 et en tenant compte des éléments suivants :

a) la nature du risque;

a.1) dans le cas de risques liés à l’ergonomie, tout facteur lié à l’ergonomie tel que :

(i) les exigences physiques des tâches, le milieu de travail, les méthodes de travail et l’organisation du travail ainsi que les circonstances dans lesquelles les tâches sont exécutées,

(ii) les caractéristiques des matériaux, des biens, des personnes, des animaux, des choses et des espaces de travail ainsi que les particularités des outils et de l’équipement;

b) le niveau d’exposition des employés au risque;

c) la fréquence et la durée de l’exposition des employés au risque;

d) les effets, réels ou potentiels, de l’exposition sur la santé et la sécurité des employés;

e) les mesures qui ont été prises pour prévenir le risque;

f) tout élément signalé par l’employé au titre des alinéas 126(1)g) ou h) de la Loi et tout rapport fait par l’employé au titre de l’article 15.3;

g) tout autre renseignement pertinent.

19.5 (1) Afin de prévenir les risques, y compris ceux liés à l’ergonomie, qui ont été recensés et évalués, l’employeur prend toute mesure de prévention selon l’ordre de priorité suivant :

a) l’élimination du risque, notamment par la mise au point de mécanismes techniques pouvant comprendre des aides mécaniques et la conception ou la modification d’équipement en fonction des attributs physiques de l’employé;

b) la réduction du risque, notamment par son isolation;

c) la fourniture de matériel, d’équipement, de dispositifs ou de vêtements de protection personnels;

d) l’établissement de procédures administratives, telles que celles relatives à la gestion des durées d’exposition aux risques et de récupération ainsi qu’à la gestion des régimes et des méthodes de travail.

(2) À titre de mesure de prévention, l’employeur élabore et met en oeuvre un programme d’entretien préventif afin d’éviter toute défaillance pouvant présenter un risque pour les employés.

(3) L’employeur veille à ce que les mesures de prévention ne constituent pas un risque en soi et tient compte de leurs répercussions sur le lieu de travail.

(4) Les mesures de prévention doivent comprendre la marche à suivre pour parer :

a) dans les meilleurs délais, à tout risque nouvellement recensé;

b) aux risques liés à l’ergonomie qui sont recensés lors de la planification de la mise en oeuvre de changements au milieu de travail, aux tâches ou à l’équipement utilisé pour les exécuter ou aux pratiques ou méthodes de travail.

(5) L’employeur veille à ce que toute personne désignée pour mettre en oeuvre les mesures de prévention des risques liés à l’ergonomie ait reçu la formation et l’entraînement nécessaires.

19.6 (1) L’employeur offre à chaque employé une formation en matière de santé et de sécurité — y compris une formation en matière d’ergonomie — qui porte notamment sur les éléments suivants :

a) le programme de prévention mis en oeuvre aux termes de la présente partie pour prévenir les risques à l’égard de l’employé, notamment la méthode de recensement et d’évaluation des risques et les mesures de prévention qui ont été prises par l’employeur;

b) la nature du lieu de travail et des risques qui s’y posent;

c) l’obligation qu’a l’employé de signaler les éléments mentionnés aux alinéas 126(1)g) ou h) de la Loi et celle de faire rapport au titre de l’article 15.3;

d) les dispositions de la Loi et du présent règlement.

(2) L’employeur offre la formation :

a) chaque fois qu’il a accès à de nouveaux renseignements sur les risques dans le lieu de travail;

b) peu de temps avant que l’employé soit affecté à une nouvelle tâche ou qu’il soit exposé à un nouveau risque.

(3) L’employeur révise le programme de formation et, au besoin, le modifie :

a) au moins tous les trois ans;

b) chaque fois que les conditions relatives aux risques sont modifiées;

c) chaque fois qu’il a accès à de nouveaux renseignements sur les risques dans le lieu de travail.

(4) Chaque fois que l’employé reçoit la formation, l’employeur et l’employé attestent par écrit que la formation a été offerte ou reçue, selon le cas.

(5) L’employeur tient, sur support papier ou informatique, un registre de la formation reçue par chaque employé et le conserve pendant les deux ans qui suivent la date à laquelle l’employé cesse d’être exposé à un risque.

19.7 (1) L’employeur évalue l’efficacité du programme de prévention — y compris ses éléments liés à l’ergonomie — et, au besoin, le modifie :

a) au moins tous les trois ans;

b) chaque fois que les conditions relatives aux risques sont modifiées;

c) chaque fois qu’il a accès à de nouveaux renseignements sur les risques dans le lieu de travail.

(2) L’évaluation de l’efficacité du programme de prévention est fondée sur les documents et renseignements suivants :

a) les conditions relatives au lieu de travail et aux tâches accomplies par les employés;

b) tout rapport d’inspection du lieu de travail;

c) tout rapport d’enquête de situation comportant des risques;

d) toute vérification de sécurité;

e) le registre de premiers soins et toute statistique sur les blessures, y compris les inscriptions au registre et statistiques relatives aux soins et blessures liés à l’ergonomie;

f) toute observation formulée par le comité d’orientation et le comité local, ou le représentant, concernant l’efficacité du programme de prévention;

g) tout autre renseignement pertinent.

19.8 (1) Dans le cas où l’évaluation de l’efficacité du programme de prévention prévue à l’article 19.7 a été effectuée, l’employeur rédige un rapport d’évaluation.

(2) L’employeur garde les rapports d’évaluation du programme de façon qu’ils soient facilement accessibles pendant les six ans qui suivent la date du rapport.

19.1 (1) The employer shall, in consultation with and with the participation of the policy committee, or, if there is no policy committee, the work place committee or the health and safety representative, develop, implement and monitor a program for the prevention of hazards, including ergonomics-related hazards, in the work place that is appropriate to the size of the work place and the nature of the hazards and that includes the following components:

(a) an implementation plan;

(b) a hazard identification and assessment methodology;

(c) hazard identification and assessment;

(d) preventive measures;

(e) employee education; and

(f) a program evaluation.

(2) [Repealed, SOR/2009-84, s. 2]

19.2 (1) The employer shall

(a) develop an implementation plan that specifies the time frame for each phase of the development and implementation of the prevention program;

(b) monitor the progress of the implementation of the preventive measures; and

(c) review the time frame of the implementation plan regularly and, as necessary, revise it.

(2) In implementing the prevention program, the employer shall ensure that ergonomics-related hazards are identified and assessed and that they are eliminated or reduced, as required by subsection 19.5(1), as much as is reasonably possible and that any person assigned to identify and assess ergonomics-related hazards has the necessary instruction and training.

19.3 (1) The employer shall develop a hazard identification and assessment methodology, including an identification and assessment methodology for ergonomics related hazards, taking into account the following documents and information:

(a) any hazardous occurrence investigation reports;

(b) first aid records and minor injury records;

(c) work place health protection programs;

(d) any results of work place inspections;

(e) any employee reports made under paragraph 126(1)(g) or (h) of the Act or under section 15.3;

(f) any government or employer reports, studies and tests concerning the health and safety of employees;

(g) any reports made under the Safety and Health Committees and Representatives Regulations;

(h) the record of hazardous substances; and

(i) any other relevant information, including ergonomics-related information.

(2) The hazard identification and assessment methodology shall include

(a) the steps and time frame for identifying and assessing the hazards;

(b) the keeping of a record of the hazards; and

(c) a time frame for reviewing and, if necessary, revising the methodology.

19.4 The employer shall identify and assess the hazards

in the work place, including ergonomics-related hazards, in accordance with the methodology developed under section 19.3 taking into account

(a) the nature of the hazard;

(a.1) in the case of ergonomics-related hazards, all ergonomics-related factors such as

(i) the physical demands of the work activities, the work environment, the work procedures, the organization of the work and the circumstances in which the work activities are performed, and

(ii) the characteristics of materials, goods, persons, animals, things and work spaces and the features of tools and equipment;

(b) the employees’ level of exposure to the hazard;

(c) the frequency and duration of employees’ exposure to the hazard;

(d) the effects, real or apprehended, of the exposure on the health and safety of employees;

(e) the preventive measures in place to address the hazard;

(f) any employee reports made under paragraph 126(1)(g) or (h) of the Act or under section 15.3; and

(g) any other relevant information.

19.5 (1) The employer shall, in order to address identified and assessed hazards, including ergonomics-related hazards, take preventive measures to address the assessed hazard in the following order of priority:

(a) the elimination of the hazard, including by way of engineering controls which may involve mechanical aids, equipment design or redesign that take into account the physical attributes of the employee;

(b) the reduction of the hazard, including isolating it;

(c) the provision of personal protective equipment, clothing, devices or materials; and

(d) administrative procedures, such as the management of hazard exposure and recovery periods and the management of work patterns and methods.

(2) As part of the preventive measures, the employer shall develop and implement a preventive maintenance program in order to avoid failures that could result in a hazard to employees.

(3) The employer shall ensure that any preventive measure shall not in itself create a hazard and shall take into account the effects on the work place.

(4) The preventive measures shall include steps to address

(a) newly identified hazards in an expeditious manner; and

(b) ergonomics-related hazards that are identified when planning implementation of change to the work environment or to work duties, equipment, practices or processes.

(5) The employer shall ensure that any person assigned to implement ergonomics-related prevention measures has the necessary instruction and training.

19.6 (1) The employer shall provide health and safety education, including education relating to ergonomics, to each employee which shall include the following:

(a) the hazard prevention program implemented in accordance with this Part to prevent hazards applicable to the employee, including the hazard identification and assessment methodology and the preventive measures taken by the employer;

(b) the nature of the work place and the hazards associated with it;

(c) the employee’s duty to report under paragraphs 126(1)(g) and (h) of the Act and under section 15.3; and

(d) an overview of the Act and these Regulations.

(2) The employer shall provide education to an employee

(a) whenever new hazard information in respect of a hazard in the work place becomes available to the employer; and

(b) shortly before the employee is assigned a new activity or exposed to a new hazard.

(3) The employer shall review the employee education program, and, if necessary, revise it

(a) at least every three years;

(b) whenever there is a change in conditions in respect of the hazards; and

(c) whenever new hazard information in respect of a hazard in the work place becomes available to the employer.

(4) Each time education is provided to an employee, the employee shall acknowledge in writing that they received it, and the employer shall acknowledge in writing that they provided it.

(5) The employer shall keep, in paper or computerized form, records of the education provided to each employee, which shall be kept for a period of two years after the employee ceases to be exposed to a hazard.

19.7 (1) The employer shall evaluate the effectiveness of the hazard prevention program, including its ergonomics- related components, and, if necessary, revise it

(a) at least every three years;

(b) whenever there is a change in conditions in respect of the hazards; and

(c) whenever new hazard information in respect of a hazard in the work place becomes available to the employer.

(2) The evaluation of the effectiveness of the prevention program shall be based on the following documents and information:

(a) conditions related to the work place and the activities of the employees;

(b) any work place inspection reports;

(c) any hazardous occurrence investigation reports;

(d) any safety audits;

(e) first aid records and any injury statistics, including records and statistics relating to ergonomics-related first aid and injuries;

(f) any observations of the policy and work place committees, or the health and safety representative, on the effectiveness of the prevention program; and

(g) any other relevant information.

19.8 (1) If a program evaluation has been conducted under section 19.7, the employer shall prepare a program evaluation report.

(2) The employer shall keep readily available every program evaluation report for six years after the date of the report.

Loi d’interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21

12. Tout texte est censé apporter une solution de droit et s’interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet.

12. Every enactment is deemed remedial, and shall be given such fair, large and liberal construction and interpretation as best ensures the attainment of its objects.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

T-2574-14

 

INTITULÉ :

SYNDICAT DES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DES POSTES c. SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 OCTOBRE 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

 

DATE :

LE 26 FÉVRIER 2016

 

COMPARUTIONS :

M. Paul Cavalluzzo

 

Pour le demandeur

 

M. Stephen Bird

 

Pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cavalluzzo Shilton McIntyre Cornish LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Bird Richard

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour la défenderesse

 

 

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