Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20160318


Dossier : IMM-3159-15

Référence : 2016 CF 330

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 mars 2016

En présence de monsieur le juge Boswell

ENTRE :

LOAN THI THANH LE

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

APRÈS avoir entendu la demande de contrôle judiciaire à Toronto (Ontario), le 11 février 2016;

APRÈS avoir examiné les documents déposés devant la Cour, dont le dossier certifié du tribunal, et entendu les arguments et les observations des parties;

APRÈS avoir différé une décision concernant la présente affaire;

ET APRÈS avoir conclu que la demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 [la Loi] devrait être rejetée pour les motifs suivants :

[1]               La demanderesse, Loan Thi Tranh Le, est une citoyenne ayant la double nationalité canado­vietnamienne. Elle a épousé Trung Van Vu le 19 décembre 2009, au Vietnam. Elle a rencontré M. Vu en février 2006, alors qu’elle rendait visite à sa famille au Vietnam. Ils sont devenus amis, et la demanderesse s’est rendue au Vietnam de façon régulière pour voir M. Vu; ils ont entamé une relation amoureuse à la fin de 2008 ou au début de 2009. Après leur mariage, en décembre 2009, la demanderesse a présenté une demande de parrainage pour M. Vu, en avril 2010. M. Vu a été interrogé à Hanoï le 20 juillet 2011, et le 10 août 2011, la demande a été refusée sur la foi que le mariage n’était pas authentique. La demanderesse a interjeté appel de ce refus auprès de la Section d’appel de l’immigration (SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada. Le 16 juin 2015, après trois jours d’audiences, la SAI a rejeté l’appel.

[2]               La SAI a établi que la question faisant l’objet de l’appel consistait à déterminer si M. Vu était exclu du regroupement familial aux termes du paragraphe 4(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (DORS/2002­227), du fait que le mariage visait principalement l’obtention d’un statut ou d’un privilège en vertu de la Loi et qu’il n’était pas authentique. Lorsqu’elle a évalué l’authenticité du mariage, la SAI a examiné nombre de facteurs, notamment la façon dont la relation a évolué, sa durée et l’intention des parties. La SAI a conclu que les éléments de preuve concernant la relation de 2006 jusqu’au mariage en décembre 2009 étaient insuffisants et incohérents. Elle a indiqué que la demanderesse et M. Vu avaient respectivement présenté des témoignages imprécis, qui comportaient chacun de nombreuses incohérences et qui ne concordaient pas. De plus, la SAI a conclu que certains éléments des témoignages de vive voix étaient invraisemblables, et que ni la demanderesse ni M. Vu n’avaient donné d’explication satisfaisante quant aux éléments de preuve incohérents.

[3]               Les parties, tout comme la Cour, reconnaissent que la norme applicable au contrôle judiciaire de la décision de la SAI repose sur le caractère raisonnable. En conséquence, la Cour ne devrait pas intervenir si la décision de la SAI est intelligible, transparente, justifiable et défendable au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau­Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47). Les motifs répondent à ces critères s’ils « permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables » (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre­Neuve­et­Labrador [Conseil du Trésor], 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708, au paragraphe 16). Il n’appartient pas à cette Cour de réévaluer les éléments de preuve présentés à la SAI ni de substituer l’issue qui serait à son avis préférable (Canada [Citoyenneté et Immigration] c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, aux paragraphes 59 et 61).

[4]               À la lumière de cette norme de contrôle, la principale question à trancher est donc la suivante : la conclusion de la SAI, à savoir que le mariage de la demanderesse n’était pas authentique, était­elle raisonnable?

[5]               En l’espèce, la décision de la SAI est raisonnable. Les nombreuses incohérences qu’a relevées la SAI, notamment concernant ce qui s’est passé le jour où la demanderesse a rencontré M. Vu, le début de leur relation amoureuse et le moment de la demande en mariage, ne sont pas sans importance ou superflues, tel que le soutient la demanderesse. Au contraire, en raison de ces incohérences et d’autres incohérences contenues dans les éléments de preuve, la SAI a raisonnablement conclu que les témoignages de la demanderesse et de M. Vu n’étaient pas crédibles et que le mariage n’était donc pas authentique. Il est bien établi que l’on doit faire preuve de retenue à l’égard des conclusions d’un tribunal tel que la SAI lorsqu’il est question de crédibilité.

[6]               De plus, tel que l’affirme la demanderesse, la SAI n’a pas réalisé d’examen minutieux des faits entourant la question de l’authenticité du mariage, et s’est donc fondée sur les incohérences relevées dans les témoignages de la demanderesse et de M. Vu pour formuler des conclusions déraisonnables sur l’authenticité de leur relation. Bien que la SAI ait formulé des conclusions négatives sur une question accessoire relative au lien entre la demanderesse et son cousin au Vietnam, les autres conclusions négatives, comme celles qui se rapportent à l’origine de la relation, étaient clairement étayées par des éléments de preuve et liées aux aspects fondamentaux de l’authenticité du mariage. Par ailleurs, la SAI a de toute évidence pris en compte et raisonnablement évalué le peu d’éléments de preuve dont elle disposait en ce qui concerne l’interdépendance financière de la demanderesse et de M. Vu.

[7]               En l’espèce, la décision de la SAI est intelligible, transparente, justifiable et défendable au regard des faits et du droit. Les motifs de la SAI permettent à la Cour de comprendre pourquoi la SAI a rendu cette décision, et la conclusion de la SAI selon laquelle le mariage de la demanderesse et de M. Vu n’est pas authentique fait partie des issues acceptables.

[8]               La demande de contrôle judiciaire de la demanderesse est donc rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question à certifier, alors aucune question n’est certifiée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question de portée générale à certifier.

« Keith M. Boswell »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3159-15

 

INTITULÉ :

LOAN THI THANH LE c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 11 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BOSWELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 18 mars 2016

 

COMPARUTIONS :

Adrienne Smith

 

Pour la demanderesse

 

Rachel Hepburn Craig

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jordan Battista LLP

Avocats­procureurs

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.