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Date : 20160318


Dossier : IMM-1145-16

Référence : 2016 CF 337

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 mars 2016

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

CYNTHIA ANOKWURU­NKEMKA

BENITA ANOKWURU NKEMKA

demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               VU la requête présentée par les demanderesses qui sollicitaient une ordonnance sursoyant à l’exécution de la mesure de renvoi le 19 mars 2016;

[2]               ET VU les éléments de preuve et les observations contenus dans les dossiers de la requête fournis par les demanderesses et le défendeur, ainsi que les observations orales faites par les avocats des parties lors de l’audience relative à la requête de sursis qui s’est tenue par téléconférence le 18 mars 2016 à 21 h 30;

[3]               ET VU les aspects procéduraux de la requête en sursis et l’importance de respecter les trois conditions du critère énoncé dans l’arrêt Toth c. Canada (Citoyenneté et Immigration), (1998) 86 NR 302 (CAF), à savoir (i) qu’il existe une question sérieuse à trancher, (ii) que les demanderesses subiraient un préjudice irréparable si la mesure de renvoi était exécutée, et (iii) que la balance des inconvénients associés à la délivrance d’une telle ordonnance milite en faveur des demanderesses, je ne puis conclure que les demanderesses respectent ces exigences pour les motifs suivants.

[4]               Tout d’abord, la demande de contrôle judiciaire sous­jacente déposée le 16 mars 2016 qui conteste « l’ordre de renvoi » et « l’avis de renvoi » mentionnés dans la demande comporte une lacune. La Cour a statué que ce type de décisions ne peut pas être soumis à un contrôle (voir l’arrêt Bergman c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2010 CF 1129, aux paragraphes 16 et 18, qui présentent un résumé complet du critère juridique applicable à cette question de procédure).

[5]               Je constate que, dans ce dossier, on avait demandé à un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs de reporter le renvoi et que l’agent avait rendu sa décision quelques heures avant l’audience relative à la requête en sursis, et que la décision avait été communiquée à la Cour pendant une pause à l’audience. Les demandes auraient pu donner lieu à un contrôle judiciaire compte tenu de cette demande de report de renvoi et être ensuite rejetées (ou même être réputées rejetées) étant donné la décision tardive rendue par l’agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs. Elles ne l’ont pas été.

[6]               Cependant, même si je suis d’avis que la demande de contrôle judiciaire sous­jacente avait été présentée pour contester la décision formelle de rejeter la demande de report de renvoi, je ne puis conclure que le critère à trois volets a été respecté. Par conséquent, je ne suis pas en mesure d’accorder le sursis.

[7]               Tout d’abord, je constate qu’un critère plus rigoureux s’applique aux questions sérieuses lorsqu’un demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision d’un agent d’exécution de la loi de refuser d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour reporter un renvoi, comme il a été statué par la Cour dans l’arrêt Baron c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2009 CAF 81, aux paragraphes 51 et 66 (arrêt Baron).

[8]               Les décisions de la Cour invoquées par les demanderesses (deux décisions non publiées, c’est­à­dire des décisions ne comportant aucune référence neutre) et par le défendeur (une décision) peuvent toutefois être interprétées de deux façons pour trancher la question sérieuse soulevée en l’espèce, à savoir si l’interdiction d’un an au sujet de la présentation d’une demande d’examen des risques avant renvoi commence à la date à laquelle la demande d’asile a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés (SPR) ou la Section d’appel des réfugiés (SAR). D’une façon ou d’une autre, il semble que les tribunaux n’ont pas rendu de conclusion sur cette question, mais qu’ils pourraient le faire dans un avenir rapproché.

[9]               Cependant, le deuxième volet du critère relatif au préjudice irréparable n’a pas été établi en l’espèce. Le préjudice sous­jacent allégué a, à mon avis, été analysé en profondeur par deux tribunaux – la SPR et la SAR (qui a rejeté la demande d’autorisation de contrôle judiciaire qui lui avait été présentée). Aucun nouvel élément de preuve à l’égard d’un nouveau préjudice irréparable n’a été présenté dans la présente requête. Par exemple, la preuve d’ordre médical produite a été présentée à la SPR et à la SAR. Un récent courriel de la mère des demanderesses décrit les mêmes risques que ceux qui avaient été soulevés devant ces deux tribunaux, qui avaient conclu que les demanderesses ne risquaient pas d’être persécutées au Nigeria, comme elles l’alléguaient.

[10]           Enfin, je ferai un autre commentaire. Pour en revenir à l’autre question soulevée dans l’arrêt Baron, il a été stipulé que ni les agents d’exécution ni d’ailleurs les tribunaux ne devraient encourager ou récompenser ceux qui n’ont pas une « attitude irréprochable ». La Cour a rejeté de nombreuses requêtes en sursis pour des motifs d’équité. La SPR, et ensuite la SAR, ont conclu que l’attitude des demanderesses n’était pas irréprochable. En effet, la SPR a constaté que les demanderesses avaient essayé d’induire en erreur un professionnel de la santé qui avait fourni des éléments de preuve. Aucun des éléments de preuve présentés par les demanderesses dans le cadre de la présente requête en sursis ne portait sur cette malheureuse histoire ou n’avait été présenté pour tenter de fournir des explications.

[11]           Selon la décision de la SPR, les demanderesses avaient déjà induit en erreur un professionnel de la santé et avaient également omis de se présenter à une entrevue à cet égard avec un agent d’exécution de la loi et avaient par la suite été arrêtées. Cela s’ajoute aux questions qui ont été tranchées par la SPR et la SAR.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente requête soit rejetée.

« Alan S. Diner »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-1145-16

 

INTITULÉ :

CYNTHIA ANOKWURU­NKEMKA, BENITA ANOKWURU NKEMKA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 18 mars 2016

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

Le juge Diner

 

DATE DES MOTIFS :

Le 18 mars 2016

 

COMPARUTIONS :

Mme Mbong Alvira Akinyemi

 

Pour les demanderesses

 

M. Julian Jubenville

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mbong Elvira Akinyemi

Avocate­procureure

Toronto (Ontario)

 

Pour les demanderesses

 

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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