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Date : 20160407


Dossiers : IMM-2916-15

Référence : 2016 CF 380

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 avril 2016

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

SAIDA AIDA IBRAHIM

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La demanderesse a présenté une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés (SAR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié confirmant la décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) qui a rejeté sa demande d’appel. La SAR a confirmé la décision de la SPR en se fondant uniquement sur ses conclusions au sujet de la crédibilité de la demanderesse. Plus particulièrement, la SAR a statué que la demanderesse n’était pas crédible lorsqu’elle a affirmé qu’elle subirait de la persécution au Kenya en raison d’un mariage arrangé et de sa conversion au christianisme.

Contexte

[2]               Le 5 septembre 2008, la demanderesse est arrivée au Canada pour commencer ses études au College of New Caledonia, en Colombie-Britannique. Elle a terminé ses études en avril 2012 et elle est ensuite restée au Canada grâce à un permis de travail.

[3]               En février 2014, la demanderesse mentionne qu’elle a appris que son père avait fait des arrangements pour qu’elle marie un homme vivant au Kenya. La demanderesse a informé son père qu’elle ne pratiquait pas l’islam et qu’elle songeait à se convertir au christianisme. Le père de la demanderesse lui a dit qu’elle était une honte pour sa famille et sa communauté.

[4]               La demanderesse soutient avoir peur de retourner au Kenya en raison du mariage arrangé et, surtout du risque que le mariage puisse être empreint de violence puisqu’il est « fondé sur le pouvoir ». Elle mentionne également avoir peur d’être persécutée en raison de sa foi chrétienne.

[5]               En mai 2014, la demanderesse soutient s’être convertie au christianisme et elle soutient également qu’elle a été baptisée le 24 décembre 2014. Le 26 novembre 2014, la demanderesse a présenté une demande d’asile sur place au Canada.

[6]               Le 10 février 2015, la demande d’asile de la demanderesse a été rejetée par la SPR. Dans une décision rendue oralement, la SPR a soutenu que la demanderesse n’était pas crédible lorsqu’elle soutenait s’être convertie au christianisme, qu’on exerçait de la pression sur elle pour qu’elle fasse un mariage arrangé, et qu’elle craignait d’être persécutée par son père et la communauté. La SPR a également soutenu que la lenteur de la demanderesse à présenter une demande d’asile a miné sa présumée crainte subjective de persécution : bien qu’elle ait été informée du mariage arrangé proposé en février 2014, elle n’a pas présenté une demande d’asile avant le mois de novembre de la même année. Finalement, la SPR a soutenu que la demanderesse n’a pas fourni une preuve documentaire convaincante pour corroborer sa crainte de persécution. À titre subsidiaire, la SPR a soutenu que la demanderesse avait une possibilité de refuge intérieur à Nairobi.

[7]               La demanderesse a interjeté appel à la SAR de la décision de la SPR en se fondant sur plusieurs arguments. Le premier motif d’appel mentionné dans son mémoire déposé auprès de la SAR était la conclusion de la SPR relative à la crédibilité; notamment, que « le tribunal a rejeté les demandes de la demanderesse puisque, entre autres choses, elle n’était pas une témoin crédible ». La SAR, qui a finalement accepté les conclusions de la SPR, a effectué l’appel seulement en ce qui concerne cette question.

[8]               Dans l’appel, la demanderesse n’a présenté aucune nouvelle preuve, mais elle a fait reposer son appel sur le dossier présenté à la SPR.

[9]               Dans l’appel, la SAR était d’accord avec la demanderesse à savoir que trois des motifs que la SPR a formulés relativement à sa détermination de la crédibilité ne pouvaient pas appuyer cette conclusion. Premièrement, la SAR n’a tiré aucune conclusion négative relativement au manque de preuve documentaire au sujet du mari potentiel ou des plans de mariage. Deuxièmement, elle n’a tiré aucune conclusion négative du témoignage de la demanderesse mentionnant qu’elle pouvait choisir de ne pas se marier. Troisièmement, elle n’a tiré aucune conclusion négative du témoignage de la demanderesse mentionnant que son père ne l’a jamais maltraité et que sa mère appuyait son choix de ne pas se marier.

[10]           La SAR était d’accord avec la conclusion globale de la SPR au sujet de la crédibilité de la demanderesse en fonction de la preuve suivante.

[11]           Premièrement, elle a trouvé que le témoignage de la demanderesse semblait parfois avoir été préparé et qu’à d’autres moments, il était vague et peu convaincant. Plus particulièrement, elle a trouvé que son explication de la raison de sa conversion au christianisme était vague et peu convaincante.

[12]           Deuxièmement, la SAR a accordé peu d’importance à une lettre du Révérend David Elliot, datée du 3 juillet 2014, qui était écrite sur du papier à en-tête de l’église baptiste Knollwood (Knollwood Baptist Church) située à London, en Ontario. Elle a conclu que la lettre semble être une lettre envoyée aux nouveaux fidèles de l’église et elle a mentionné que cette lettre ne fournit pas la preuve que la demanderesse fréquentait l’église de façon assidue ni qu’elle s’est convertie au christianisme.

[13]           Troisièmement, la SAR n’a accordé aucune importance aux deux bulletins du service hebdomadaire de l’église baptiste Knollwood que la demanderesse a déposés en preuve puisqu’ils ne fournissent aucune preuve de la conversion au christianisme de la demanderesse.

[14]           Quatrièmement, la SAR a accordé peu d’importance à la trousse d’étude intitulée « Believer’s Baptism » (Baptême du croyant). La SAR a mentionné que la trousse d’étude n’avait pas été remplie, mais elle reconnaît qu’elle a été signée et datée par la demanderesse le 24 décembre 2014, et qu’elle était accompagnée d’une note manuscrite mentionnant « 6:15-bathing suit, towel, 6:30pm-service » (18 h 15, maillot de bain, serviette et 18 h 30, service). La SAR a accordé peu d’importance à ces documents puisque la demanderesse n’a pas fourni un bulletin pour le baptême, alors qu’elle a fourni des bulletins pour d’autres services moins importants de l’église, et puisqu’elle n’a pas fourni un certificat de baptême.

[15]           Cinquièmement, la SAR a accordé peu d’importance à une lettre de Muriel Goodridge, datée du 17 janvier 2015, une lettre qui mentionnait que Mme Goodridge connaît la demanderesse depuis novembre 2014, moment où la demanderesse est devenue membre de l’église baptiste Knollwood. Mme Goodridge mentionne que la demanderesse a été baptisée le 24 décembre 2014. La SAR a accordé peu d’importance à cette lettre puisqu’elle n’a pas été affirmée solennellement et que l’identification de l’auteur de la lettre n’a pas été fournie. La SAR mentionne également que la demanderesse « n’a fourni aucune preuve convaincante qu’elle a été baptisée » et que « la lettre de Mme Goodridge atteste uniquement de la participation de la demanderesse aux activités de l’église au Canada; la lettre n’atteste pas des motivations de la demanderesse ».

[16]           Sixièmement, la SAR a accordé peu d’importance à une lettre provenant de la sœur de la demanderesse, laquelle mentionne, entre autres choses, que le père de la demanderesse prévoit la marier à un homme musulman âgé. La SAR a accordé peu d’importance à cette lettre puisqu’elle n’est pas affirmée solennellement, que l’identité de l’auteur de la lettre n’a pas été fournie et que la demanderesse n’est pas identifiée dans la lettre. La SAR a également exprimé les préoccupations suivantes au sujet du format de la lettre :

La salutation de la lettre est « Dearest siz ». Toutefois, « Dearest » est écrit sur une ligne et le mot « siz » est écrit sur la ligne suivante, avec un alinéa et à l’aide d’un stylo différent. La SAR mentionne également que la signature de l’auteur est « Your loving sis », [signature illisible]. La SAR trouve cela déraisonnable que l’auteur de la lettre réfère à sa sœur en utilisant « siz » et ensuite « sis ».

La SAR trouve peu plausible l’explication de la demanderesse sur la raison de l’envoi de cette lettre, puisqu’elle communique fréquemment avec sa sœur au moyen de Facebook. La demanderesse soutient que sa sœur a communiqué au moyen d’une lettre, au lieu de Facebook, puisqu’elle avait peur que quelqu’un pirate son compte Facebook. Cette explication est appuyée par la lettre, laquelle mentionne [traduction] « voici l’histoire que j’allais te raconter sur Facebook, mais j’ai senti le besoin de t’écrire une lettre à la place, pour des raisons de sécurité ». La SAR n’a pas trouvé cette explication plausible. Bien qu’il y ait une preuve que le gouvernement kenyan surveille les sites Web, il n’y a aucune preuve qu’il serait intéressé par le mariage arrangé de la demanderesse.

[17]           Septièmement, la SAR a accordé peu de valeur à une lettre envoyée par la mère de la demanderesse. La lettre mentionne notamment que le père de la demanderesse [traduction] « insiste toujours pour te marier à un vieil homme »  et que, bien que la mère de demanderesse soutienne la décision de sa fille de ne pas se marier, elle ne peut rien faire. La SAR accorde peu d’importance à cette lettre puisqu’elle n’est pas datée ni affirmée solennellement, aucune pièce d’identité n’a été fournie pour l’auteur de la lettre et la demanderesse n’est pas mentionnée dans la lettre. La SAR a également observé ce qui suit :

La signature de l’auteur est « mum ». Bien que ne soit pas une experte en graphologie, la SAR observe que l’écriture du mot « mum » est considérablement différente de celle du restant de la lettre. La salutation se lit comme suit « Dearest Daughter ». Les mots « Daughter », dans la salutation, et « mum », dans la signature, semblent être écrits à l’aide d’un stylo différent de celui utilisé pour le restant de la lettre.

[18]           Huitièmement, la SAR a conclu que le délai de la demanderesse à présenter une demande d’asile a semé le doute relativement à sa crainte subjective. Le père de la demanderesse lui a parlé du mariage arrangé en février 2014 et elle s’est convertie au christianisme en mai 2014. Néanmoins, elle n’a pas présenté une demande d’asile avant le 26 novembre 2014. La SAR n’a pas accepté les explications de la demanderesse à savoir que son visa de travail était encore valide lorsqu’elle a présenté sa demande et, dans tous les cas, elle ne savait pas qu’elle avait le droit de présenter une demande jusqu’à peu de temps avant de le faire. La SAR a conclu qu’en tant que femme instruite qui s’exprime bien en anglais, la demanderesse aurait pu s’informer au sujet du processus de demande de reconnaissance du statut de réfugié. La SAR a également conclu que le comportement dilatoire de la demanderesse n’était pas celui d’une personne qui craint pour sa vie.

[19]           Neuvièmement, la SAR a trouvé suspect que la demanderesse se convertisse au christianisme peu après avoir appris que son père souhaitait la marier à un homme musulman plus âgé, et que tout cela s’est déroulé alors qu’elle était une résidente temporaire du Canada. Elle a conclu que cette coïncidence a nui à la crédibilité de la demanderesse.

Questions en litige

[20]           La demanderesse a soulevé deux questions : (1) Savoir si la SAR a violé son droit à l’équité procédurale et (2) savoir si l’évaluation par la SAR des preuves menant à la conclusion relative à la crédibilité était raisonnable.

Analyse

A.                Équité procédurale

[21]           La demanderesse soutient que la neuvième preuve (paragraphe 19 ci-dessus) sur laquelle la SAR s’est fiée pour maintenir la conclusion relative à la crédibilité était une nouvelle question et que la SAR se devait de confronter la demanderesse avec ses préoccupations, mais ne l’a pas fait.

[22]           Lorsqu’elle traite cet aspect de la preuve, la SAR explique clairement dans sa décision que la découverte de cette coïncidence n’était pas une conclusion formulée par la SPR, et elle n’a pas non plus été soulevée par la demanderesse dans son appel :

Bien que cela n’ait pas été mentionné dans les actes de procédures d’appel ou dans la décision du membre de la SPR, la SAR mentionne que pendant l’audience, la demanderesse s’est fait demander de commenter la coïncidence relative à la chronologie des événements qui ont mené à sa demande d’asile.

[23]           Comme le demandeur le mentionne, et que la SAR le confirme, la SPR a posé des questions à la demanderesse au sujet de la coïncidence présumée; toutefois, elle n’a pas formulé de conclusion hâtive relativement à cette preuve.

[24]           La demanderesse soutient qu’elle n’avait pas le droit de savoir si cette réponse serait utilisée par la SAR afin de répondre à ses préoccupations. Elle dépend de la décision de la juge Kane dans Ching c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 725 [Ching], et en particulier l’énoncé au paragraphe 71 :

Dans le cas où elle décidera d’aller de l’avant avec la nouvelle question, il paraît évident que l’équité procédurale l’obligera à aviser la ou les parties intéressées, ainsi qu’à leur donner la possibilité de présenter des observations.

[25]           Une référence à l’énoncé du juge Hughes dans Husian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 684 [Husian] au paragraphe 10 :

Le fait est que si la SAR décide de se plonger dans le dossier afin de tirer d’autres conclusions de fond, elle devrait prévenir les parties et leur donner la possibilité de formuler des observations.

[26]           Je conclus que ces deux autorités se distinguent des faits mentionnés ici. Dans ces deux cas, la SAR est allée au-delà des questions dont elle était saisie; attendu que dans ce cas, elle ne l’a pas fait. Dans le présent dossier, la question n’a pas changé et la SAR n’a pas exploré une nouvelle question; plutôt, l’évaluation des preuves par la SAR se rapportant à la question soulevée par la demanderesse différait de l’évaluation par la SPR.

[27]           Dans la décision Ching, la SPR a conclu de façon générale que le demandeur était crédible. Cette conclusion relative à la crédibilité n’était pas une question en litige pour la SAR. Néanmoins, la SAR, de sa propre initiative, a soulevé la question de la crédibilité de la demanderesse. La juge Kane, avec raison, a trouvé que cela constituait un manquement à l’équité procédurale puisque cela était une « nouvelle » question et que le demandeur n’aurait aucune raison de croire qu’elle serait examinée par la SAR lors de l’appel.

[28]           Les faits dans la décision Husian sont semblables. La SPR a conclu que le demandeur n’a pas réussi à établir son identité. Il n’avait aucune pièce d’identité et il a été conclu que ni lui ni sa grand-tante n’étaient des témoins crédibles. Il semble que selon les très brefs motifs que la SAR, selon sa propre appréciation du dossier, a utilisés pour conclure de façon erronée qu’il n’y avait pas de preuves que le demandeur appartenait au clan Dhawarawayne. En outre, elle a également commenté les différences d’orthographe du nom du demandeur dans différents documents et mentionné « j’ai aussi relevé d’autres erreurs ». Le juge Hughes a décrit ses erreurs comme étant « d’autres conclusions de fond ».

[29]           En l’espèce, une conclusion essentielle de la SPR est que le motif de l’appel présenté à la SAR est sa conclusion que les preuves de la demanderesse au sujet de sa conversion au christianisme, son mariage arrangé et sa crainte, n’étaient pas crédibles. La SAR s’est opposée à certaines des conclusions sur lesquelles la SPR s’est fiée pour conclure qu’elle n’était pas crédible, en a accepté d’autres, et, dans un cas, s’est fiée à un échange entre le membre de la SPR et la demanderesse lors de l’audience au sujet de la chronologie des événements, et a conclu qu’ils étaient trop fortuits pour être crédibles.

[30]           Contrairement aux décisions Ching et Husian, la SAR ne soulevait pas une nouvelle question; au contraire, elle examinait la question soulevée par la demanderesse, soit la conclusion qu’elle n’était pas crédible au sujet de sa conversion, de son mariage arrangé et de sa crainte. Elle aussi a trouvé qu’elle n’était pas crédible. Elle avait le droit, et était obligée d’examiner et d’évaluer les preuves depuis le début. C’est ce qu’elle a fait. Le fait qu’elle a perçu certaines preuves différemment n’est pas une raison de contester la décision pour des motifs d’équité lorsqu’aucune nouvelle question n’a été soulevée.

B.                 Caractère raisonnable de la décision

[31]           Je suis d’accord avec la demanderesse que la SAR a tiré des conclusions négatives de l’incapacité de la preuve à inclure certains renseignements ou caractéristiques dont l’inclusion attendue n’était pas raisonnable : Osman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 921 aux paragraphes 37 à 39; Taha c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1675 au paragraphe 9). Néanmoins, cette preuve avait peu ou pas de valeur probante convaincante. Par exemple, la mise à l’écart de la lettre de Mme Goodridge sur la base que « la lettre n’atteste pas des motivations de la demanderesse » était déraisonnable puisque Mme Goodridge ne peut pas prétendre connaître les motivations de la demanderesse pour aller à l’église. De plus, la mise à l’écart des lettres de la mère et de la sœur de la demanderesse sur la base qu’elles n’étaient pas affirmées solennellement est déraisonnable puisqu’il n’y a aucune preuve qu’elles ont été rédigées aux fins du litige. Plus particulièrement, la lettre de la sœur de la demanderesse est datée du 3 juin 2014, et par conséquent, a été rédigée plusieurs mois avant la demande d’asile de la demanderesse.

[32]           D’un autre côté, les observations de la SAR au sujet de l’utilisation d’un stylo de couleur différente, et d’autres anomalies dans les lettres provenant de la famille, sont raisonnables et diminuent grandement la valeur probante de ces lettres. Je n’accepte pas que la SAR ait entrepris un examen microscopique des preuves de la demanderesse à la recherche de preuves des incohérences.

[33]           La mise à l’écart de la lettre de Mme Goodridge par la SAR puisque l’auteur de la lettre n’est pas identifié est déraisonnable et inexacte. L’auteur de la lettre est identifié : il s’agit de Muriel Goodridge. Sa signature est sur la lettre et elle est identifiée comme étant membre de la Knollwood Baptist Church de London, en Ontario. Néanmoins, je suis d’accord avec la SAR que cette lettre est peu utile quand vient le temps d’établir si la demanderesse est membre de l’église ou si elle s’est convertie au christianisme. Il était raisonnable de s’attendre à ce qu’une preuve plus convaincante, comme un certificat de baptême ou un bulletin de l’église mentionnant cette cérémonie, soit disponible et cela aurait, sans aucun doute, grandement contribué à corroborer le témoignage de la demanderesse.

[34]           La demanderesse a également contesté la conclusion de la SAR que son délai à présenter sa demande a également nui à sa crédibilité relative à sa crainte. Je ne suis pas convaincu. Il y a eu un délai important, et le fait que la demanderesse avait encore le droit de travailler au Canada ne lui accordait pas le droit de rester au Canada après l’expiration de son visa. Par conséquent, il n’était pas déraisonnable de s’attendre qu’une personne qui craint de retourner dans son pays d’origine prenne des mesures efficaces et en temps utile pour régulariser son statut au Canada afin de ne pas avoir à retourner dans son pays.

[35]           Bien qu’elle soit imparfaite, je ne suis pas convaincu que l’évaluation de la preuve par la SAR était déraisonnable. La demande doit être rejetée.

Question à certifier

[36]           La demanderesse a proposé la question à certifier suivante : « Lorsque la SAR soulève des questions de crédibilité qui n’avaient pas été soulevées précédemment, est-ce que la SAR doit convoquer une audience pour permettre à la demanderesse de répondre? »

[37]           Je suis d’accord avec la demanderesse que la question proposée ne serait pas déterminante dans l’issue d’un appel puisque, comme je l’ai conclu, la SAR n’a pas soulevé une question de crédibilité qui n’avait pas déjà été soulevée, comme ce fut le cas dans la décision Ching. Au contraire, la question de crédibilité était clairement placée devant la Cour et elle examinait toutes les preuves lors de la détermination à savoir si la conclusion relative à la crédibilité était fondée. Ce faisant, elle s’est fiée à des preuves sur lesquelles la SPR ne s’est pas fiée, mais cela est le risque qu’une personne prend lorsqu’elle interjette un appel. Si une cour d’appel était liée par les conclusions formulées par le décideur d’origine, l’appel serait principalement pro forma.


JUGEMENT

LA COUR REJETTE la demande. Aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

imm-2916-15

 

INTITULÉ :

SAIDA AIDA IBRAHIM c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 24 mars 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 7 avril 2016

 

COMPARUTIONS :

Kingsley I. Jesuorobo

Pour la demanderesse

 

Hillary Adams

Pour le défendeur

.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kingsley I. Jesuorobo

Avocat-procureur

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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