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Date : 20160419


Dossier : T-987-15

Référence : 2016 CF 427

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 19 avril 2016

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

GARNET MEECHES

demandeur

et

GEORGE ASSINIBOINE, MARVIN DANIELS, BARB ESAU, ROBERT FRANCIS, GEORGE MEECHES, LIZ MERRICK, HAROLD MYERION, ANNETTE PETERS, DENNIS PETERS, MARSHALL PRINCE, THERESA SANDERSON, CHRIS YELLOWQUILL ET LA BANDE INDIENNE DE LONG PLAIN NO 287 ÉGALEMENT CONNUE SOUS LE NOM DE PREMIÈRE NATION DE LONG PLAIN

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision du comité d’appel en matière d’élections de la Première Nation de Long Plain (le comité d’appel), datée du 12 mai 2015 (la décision), en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7. La décision visée par le contrôle judiciaire concerne l’élection du 9 avril 2015 (l’élection) de la Première Nation de Long Plain et l’éligibilité d’un candidat à un poste du conseil.

II.                Contexte

[2]               Le demandeur, Garnet Meeches, est membre de la Première Nation de Long Plain (Long Plain) et s’est présenté sans succès à l’élection pour un poste de conseiller. M. Meeches a perdu d’une voix.

[3]               Le demandeur fait valoir que le défendeur, Chris Yellowquill, n’était pas un candidat éligible et n’aurait pas dû être autorisé à briguer un siège au conseil.

[4]               La défenderesse, Long Plain, est une bande au sens de la Loi sur les Indiens, L.R.C 1985, ch. I-5.

[5]               Les défendeurs Liz Merrick, Barb Esau, Marvin Daniels et George Meeches ont été élus à titre de conseillers lors de l’élection. Ils s’opposent, de concert avec Long Plain, à la demande de contrôle judiciaire.

[6]               Les défendeurs Dennis Peters, Robert Francis, George Assiniboine, Theresa Sanderson, Marshall prince, Annette Peters, Harold Myerion, et Chris Yellowquill avaient également brigué sans succès les quatre postes de conseillers. Ils ne s’opposent pas à la demande.

[7]               Les élections de Long Plain sont régies par la Long Plain First Nation Election Act (Loi électorale de la Première Nation de Long Plain) (la Loi électorale), qui est un code coutumier promulgué par Long Plain en 2001 et modifié en 2008. La Loi électorale prévoit que le gouvernement de Long Plain doit se composer d’un chef et de quatre conseillers élus pour un mandat de trois ans.

[8]               Sur la question de l’éligibilité des candidats, l’article 3.1 de la Loi électorale exige ce qui suit :

[traduction]

a)                  le candidat n’a pas été et n’est pas disqualifié en vertu de la Loi électorale;

b)                  le candidat n’a pas été déclaré coupable d’un acte criminel dans les huit mois suivant la date de la déclaration de culpabilité;

c)                  le candidat a réussi son test de dépistage des drogues;

d)                 le candidat a au moins terminé la 12e année de scolarité ou a au moins acquis une expérience de cinq ans dans le cadre de sa participation communautaire, et fournit une lettre de référence d’un autre membre de la tribu;

e)                  le candidat a payé un montant non remboursable de 250 $.

[9]               Les articles 9 à 12 de la Loi électorale décrivent le processus de mise en candidature des candidats. L’article 9.5 exige que les candidats éventuels subissent un test de dépistage de drogues et fassent l’objet d’une vérification du casier judiciaire et du registre des cas d’enfants maltraités (article 9.5). L’article 9.6 stipule ce qui suit :

[traduction]

Les vérifications du casier judiciaire qui n’ont pas expiré, les vérifications du registre des cas d’enfants maltraités et les résultats des tests de dépistage de drogues doivent être soumis à l’agent électoral 14 jours avant les mises en candidature. AUCUNE EXCEPTION.

[10]           Le 15 février 2015, l’agent électoral a publié un avis de réunion de candidature invitant les membres de Long Plain à se faire désigner comme candidats à l’élection. M. Yellowquill a présenté sa déclaration de candidature 14 jours avant la réunion de candidature, le 5 mars 2015, mais il n’a ni présenté les vérifications nécessaires et les résultats du test ni payé les frais de 250 $.

[11]           Le 13 mars 2015, l’agent électoral a rejeté la demande de mise en candidature de M. Yellowquill au motif que les frais de 250 $ n’avaient pas été payés.

[12]           Lors de la réunion de mise en candidature, le 19 mars 2015, M. Yellowquill a payé les frais et a fourni un [traduction] « rapport des résultats de vérification du casier judiciaire » (qui indique une correspondance possible avec une condamnation inscrite au casier judiciaire), une confirmation d’un test de dépistage de drogues aux résultats négatifs et une lettre confirmant qu’il avait demandé une vérification du registre des cas d’enfants maltraités.

[13]           L’agent électoral n’a pas permis à M. Yellowquill de participer à la réunion de mise en candidature. Le 20 mars 2015, M. Yellowquill a fait appel de ce refus devant le comité d’appel.

[14]           Le 22 mars 2015, l’agent électoral a provisoirement confirmé la candidature de M. Yellowquill, en attendant la réception de sa vérification finale du casier judiciaire et du registre des cas d’enfants maltraités.

[15]           Le 23 mars 2015, le comité d’appel a accueilli l’appel lié à la candidature de M. Yellowquill, estimant qu’il avait satisfait aux exigences de mise en candidature.

[16]           L’élection de Long Plain s’est tenue le 9 avril 2015. Le demandeur ainsi que M. Yellowquill n’ont pas été élus à un poste au sein du conseil. La cinquième place du demandeur a été confirmée par un nouveau dépouillement.

[17]           L’article 17 de la Loi électorale stipule que tout candidat ou électeur a le droit de faire appel des résultats d’une élection dans les sept jours suivant les élections en raison de pratiques électorales qui contreviennent à la Loi électorale.

III.             Décision faisant l’objet du contrôle

[18]           Après l’élection, le demandeur a fait appel des résultats de celle-ci auprès du comité d’appel et a invoqué un certain nombre de motifs. Les motifs invoqués dans le présent contrôle judiciaire sont les arguments du demandeur selon lesquels les candidats ont été autorisés à présenter des accusés de réception des vérifications des antécédents plutôt que les résultats des vérifications eux-mêmes et que M. Yellowquill a été autorisé à se présenter comme candidat malgré son inéligibilité. Le demandeur soutient que le comité d’appel a commis une erreur en déterminant que M. Yellowquill remplissait les conditions pour se présenter à l’élection, car il n’a jamais fourni les vérifications requises, conformément aux articles 9.5 et 9.6 de la Loi électorale. Une audience d’appel a été demandée.

[19]           Le 12 mai 2015, le comité l’appel a déterminé qu’une audience d’appel n’était pas justifiée. Sur la question de l’éligibilité des candidats, le comité d’appel a conclu ce qui suit :

[traduction]

Au cours de notre enquête, nous avons appris que l’agent électoral n’avait pas pu recevoir la vérification du registre des cas d’enfants maltraités avant la date limite prescrite par la Loi, car les délais prescrits pour ce processus sont trop serrés; par conséquent, nous avons pris une décision qui permettait la participation à l’élection de 2015 d’un candidat qui n’avait pas effectivement produit sa vérification du registre des cas d’enfants maltraités. Le comité a trouvé des notes selon lesquelles tous les candidats élus avaient fourni des résultats finaux de vérification avant l’élection et qu’aucun candidat n’a été éloigné ou disqualifié du processus électoral.

L’agent électoral a reçu tous les documents requis avant que le nom de M. Yellowquill figure sur le bulletin de vote.

La Loi prévoit que l’avis de réunion de mise en candidature doit être publié 32 jours avant la réunion de mise en candidature et que les résultats de la vérification du casier judiciaire, du registre des cas d’enfants maltraités et du test de dépistage de drogues doivent être soumis 14 jours avant la réunion de mise en candidature, et ce, sans exception. Cependant, l’agent électoral avait en fait accepté un accusé de réception comme preuve que la vérification du registre des cas d’enfants maltraités avait été demandée, à condition que les résultats soient fournis avant l’impression des bulletins de vote. Il n’y a aucune disposition dans la Loi en ce qui concerne cette mesure; cependant, il est clair que le délai prescrit crée un désavantage injuste pour la participation aux élections des membres de tribus qui ne connaissent pas bien le processus électoral. La Loi est muette et présume que les candidats participent officieusement au processus électoral en demandant les vérifications et en effectuant le test de dépistage de drogues requis avant d’accepter formellement leur candidature. Un membre de tribu qui ne sait pas qu’il a été désigné comme candidat jusqu’au jour de la réunion de mise en candidature ne serait pas en mesure de se conformer aux exigences de la Loi. La Loi ne prévoit pas un processus équitable pour que les membres de tribus puissent participer aux élections tribales. En acceptant un accusé de réception, l’agent électoral a créé un processus de participation équitable sous réserve qu’un candidat réponde aux critères et si les critères n’avaient pas été respectés, le candidat aurait été éloigné ou disqualifié en tant que candidat à l’élection. Cette décision de l’agent électoral n’a pas eu d’incidence sur l’issue de l’élection de 2015.

[20]           Le comité d’appel a en fait recommandé une modification à la Loi électorale pour favoriser le traitement des vérifications du registre de cas d’enfants maltraités dans un délai qui peut être respecté.

[21]           Sur la question de savoir si M. Yellowquill était un candidat à l’élection inéligible, le comité d’appel a conclu qu’il [traduction] « a entendu l’appel » et a confirmé [traduction] « la décision ». On peut sans doute supposer que le comité d’appel faisait référence à sa précédente décision du 23 mars 2015 concluant que M. Yellowquill avait satisfait aux exigences de la mise en candidature.

IV.             Questions en litige

[22]           Le demandeur et les défendeurs ont soulevé un certain nombre de questions que j’ai résumé comme suit :

a)                  Le comité d’appel avait-il compétence pour statuer sur l’éligibilité des candidats?

b)                  La décision du comité d’appel était-elle déraisonnable?

V.                Norme de contrôle

[23]           Le demandeur soutient que la norme de la décision correcte est applicable, alors que les défendeurs estiment que la norme du caractère raisonnable est celle qui s’applique.

[24]           Les questions soulevées par le demandeur sont des questions de fait, des questions mixtes de fait et de droit et des questions concernant l’interprétation de la Loi électorale. La jurisprudence établit que la norme du caractère raisonnable s’applique à l’interprétation que fait un comité d’appel électoral de son règlement électoral : Orr c. Première nation de Fort McKay, 2012 CAF 269, au paragraphe 11; Jacko c. Cold Lake First Nation, 2014 CF 1108, au paragraphe 13 [Jacko]; Testawich c. Duncan’s First Nation, 2014 CF 1052, au paragraphe 16.

[25]           Par conséquent, les questions à trancher en l’espèce seront examinées dans le contexte du caractère raisonnable et de « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47; arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. La Cour ne devrait intervenir que si la décision du comité d’appel est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

VI.             Analyse

A.                Le comité d’appel avait-il compétence pour statuer sur l’éligibilité des candidats?

[26]           Les défendeurs soutiennent que cette demande de contrôle judiciaire a été déposée tardivement, car ce qui est vraiment contesté, c’est la décision d’autoriser M. Yellowquill à se présenter comme candidat. La décision autorisant M. Yellowquill à se présenter a été rendue le 23 mars 2015, et donc la présente demande, qui a été déposée le 12 juin 2015, l’a été après le délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.2(2) de la Loi sur les Cours fédérales. Les défendeurs soutiennent également que l’inéligibilité des candidats ne constitue pas un motif d’appel électoral aux termes de l’article 17.2 de la Loi électorale et que le comité d’appel n’avait pas compétence pour se prononcer sur ce motif.

[27]           Par ailleurs, le demandeur fait valoir qu’il conteste la décision du comité d’appel de confirmer les résultats de l’élection et donc que sa demande a été déposée dans les délais prescrits.

[28]           Je suis d’accord avec le demandeur. L’éligibilité du candidat et l’approbation des candidats par l’agent électoral ont forcément une incidence sur les résultats d’une élection et relèvent de la notion des [traduction] « pratiques électorales », comme le prévoit la Loi électorale. C’était aussi la conclusion de monsieur le juge Russell dans la décision Jacko, où il a conclu au paragraphe 73 :

Le fait qu’une personne puisse être déclarée inéligible par le directeur des élections au stade de la mise en candidature ne signifie pas qu’un appel fondé sur l’inéligibilité ne peut pas être formé devant le comité d’appel après une élection.

[29]           La possibilité d’un appel de mise en candidature en vertu de l’article 12 de la Loi électorale n’exclut pas l’inéligibilité des candidats comme motif d’appel en vertu de l’article 17. Les faits subséquents au sujet de l’inéligibilité d’un candidat ne peuvent survenir qu’après l’étape de la mise en candidature du processus électoral. En outre, un droit d’appel en vertu de l’article 17 revient à tout candidat ou électeur, alors que seul un candidat jugé inéligible par l’agent électoral a qualité pour interjeter appel de la mise en candidature en vertu de l’article 12.

[30]           J’en conclus donc que le comité d’appel avait compétence pour examiner l’éligibilité des candidats et que la demande a été déposée dans le délai prescrit.

B.                 La décision du comité d’appel était-elle déraisonnable?

[31]           Le demandeur soutient que l’agent électoral et le comité d’appel ont contrevenu à la Loi électorale quand ils ont permis à M. Yellowquill de se présenter comme candidat à l’élection. Étant donné que l’inéligibilité de M. Yellowquill aurait pu avoir une incidence importante sur les résultats de l’élection, le demandeur soutient que le comité d’appel a commis une erreur en confirmant ces résultats.

[32]           Plus précisément, le demandeur soutient que le comité d’appel a tiré des conclusions contradictoires quand il a conclu que [traduction] « les délais étaient trop serrés », malgré sa conclusion selon laquelle tous les candidats élus avaient présenté des résultats finaux de vérification avant l’élection. Seul M. Yellowquill n’a pas été en mesure de respecter les délais. En outre, le demandeur soutient que le comité d’appel a eu manifestement tort lorsqu’il a conclu que l’agent électoral avait « reçu tous les documents requis » avant que le nom de M. Yellowquill figure sur le bulletin de vote.

[33]           En ce qui concerne l’interprétation de la Loi électorale, le demandeur affirme que son libellé est clair et à caractère contraignant. Il affirme également qu’elle ne comporte aucune disposition qui prévoit un candidat « provisoire ». Le demandeur fait valoir que les articles 9.5 et 9.6 de la Loi électorale ne comportent aucune ambiguïté et qu’aucun facteur d’interprétation législative n’est nécessaire pour donner effet à leur bon sens commun. Les dispositions exigent qu’un candidat éventuel présente des vérifications avant sa mise en candidature. Elles ne prévoient aucune approbation « provisoire » d’un candidat si les vérifications ne sont pas fournies.

[34]           Une interprétation contraire de la Loi électorale est offerte dans l’affidavit de Mme Esau. Le demandeur fait valoir que l’affidavit de Mme Esau ne doit pas être pris en compte, car elle est une partie intéressée ayant un intérêt dans l’issue du litige. Je n’ai pas besoin d’examiner cet affidavit pour trancher la question.

[35]           Lors de l’audience, j’ai aussi refusé d’entendre les observations orales de M. Yellowquill, car il n’avait déposé aucune preuve pour exprimer son appui ou son opposition à la demande.

[36]           Par ailleurs, le défendeur fait valoir d’autre part que la bonne méthode d’interprétation, s’il n’y a aucune ambiguïté, est décrite dans l’arrêt Opitz c. Wrzesnewskyj 2012 CSC 55, au paragraphe 37 :

[37]      Il est bien établi dans la jurisprudence qu’une loi électorale jugée équivoque doit être interprétée de manière à favoriser la participation au scrutin : Haig c. Canada, [1993] 2 R.C.S. 995. Le juge Cory était dissident dans cette affaire, mais il a fait, aux p. 1049-1050, les observations suivantes auxquelles la juge L’Heureux‑Dubé a souscrit sans réserve au nom des juges majoritaires, à la p. 1028 :

Les tribunaux ont toujours reconnu l’importance fondamentale du vote ainsi que la nécessité d’interpréter d’une façon large les lois conférant ce droit. Cette méthode traditionnelle n’est pas seulement logique, mais elle est essentielle à la préservation des droits démocratiques. Ce principe a été bien exprimé dans l’arrêt Cawley c. Branchflower (1884), 1 B.C.R. (Pt. II) 35 (C.S.), dans lequel le juge Crease écrit, à la p. 37 :

[traduction] La loi accorde une protection jalouse au droit de vote et ne privera pas un électeur de ce droit si le texte législatif a été raisonnablement bien respecté. [...]   Ce sont les réalités qui comptent et non les détails techniques ou les simples formalités, sauf dans le cas où les formalités sont de par la loi, tout particulièrement en droit criminel, essentielles ou touchent l’objet même du différend.

Dans l’arrêt Re Lincoln Election (1876), 2 O.A.R. 316, le vice‑chancelier Blake tient des propos similaires, à la p. 323 :

[traduction] La Cour tient beaucoup à ce que la personne qui revendique le droit de vote puisse l’exercer, dans tous les cas où il y a eu un respect raisonnable de la loi lui donnant le droit qu’il veut exercer. Les simples questions de forme ou d’intérêt négligeable ne devraient pas permettre une atteinte à l’exercice du droit de vote par l’électeur...

On peut constater que les lois constitutives du droit de vote ont reçu une interprétation qui tend à accorder aux citoyens la possibilité d’exercer ce droit démocratique fondamental. Par ailleurs, il faut interpréter restrictivement les limites à l’exercice de ce droit et veiller à les circonscrire strictement. [Soulignement omis.]

[37]           Même si le demandeur soutient que le recours à cette méthode n’est pas nécessaire pour donner effet au libellé clair de la Loi électorale, dans ces circonstances, je suis d’accord avec le défendeur que toute ambiguïté doit être interprétée de manière à favoriser et à permettre la participation au processus électoral.

[38]           En se fondant sur cette hypothèse de base, la question est de savoir si le comité d’appel a interprété la Loi électorale de manière raisonnable.

[39]           Le comité d’appel a expliqué qu’il avait procédé comme il l’a fait par souci d’équité. La question dont il était saisi était de savoir si l’agent électoral avait le droit de permettre la participation de M. Yellowquill en l’absence d’une vérification du registre des cas d’enfants maltraités. Il a fait remarquer que même s’il n’y avait aucune disposition dans la Loi électorale qui permettait à l’agent électoral d’agir ainsi, les délais prescrits créent un désavantage injuste pour les membres de Long Plain qui ne connaissent pas bien le processus électoral. En acceptant un accusé de réception confirmant que M. Yellowquill avait demandé une vérification du registre des cas d’enfants maltraités, le comité d’appel a conclu que l’agent électoral avait créé un processus de participation équitable à l’élection.

[40]           Je ne peux pas dire que le comité d’appel a agi déraisonnablement en appuyant la candidature provisoire de M. Yellowquill. Même si le comité d’appel lui-même a constaté des irrégularités et des dérogations à la Loi électorale, cela seul ne rend pas sa décision déraisonnable.

[41]           L’article 1.9 confère à l’agent électoral le pouvoir de [traduction] « régir et de gérer » les procédures électorales en vertu de la Loi électorale. En concluant que l’agent électoral avait le droit d’assouplir les exigences strictes de la Loi pour permettre la participation de M. Yellowquill à l’élection, le comité d’appel a adopté une interprétation générale et souple de la Loi électorale qui est compatible avec le droit de vote. L’interprétation de la Loi électorale par le comité d’appel n’était pas déraisonnable.

VII.          Conclusion

[42]           Pour les motifs précités, je rejette la demande de contrôle judiciaire. La décision du comité d’appel appartenait aux issues raisonnables.

[43]           Les deux parties demandent une adjudication des dépens. Même si j’ai rejeté le présent contrôle judiciaire, je n’estime pas que le demandeur a été déraisonnable en présentant sa demande et ses arguments ne sont pas sans fondement. Le comité d’appel lui-même a fait remarquer qu’il y avait des dérogations à la Loi électorale, et l’appel a incité le comité d’appel à recommander des modifications. Pour ces motifs, je refuse d’accorder des dépens à l’encontre du demandeur.


JUGEMENT

LA COUR :

1.                  rejette la présente demande de contrôle judiciaire;

2.                  et chaque partie doit prendre en charge ses propres dépens.

« Ann Marie McDonald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-987-15

 

INTITULÉ :

GARNET MEECHES c. GEORGE ASSINIBOINE, MARVIN DANIELS, BARB ESAU, ROBERT FRANCIS, GEORGE MEECHES, LIZ MERRICK, HAROLD MYERION, ANNETTE PETERS, DENNIS PETERS, MARSHALL PRINCE, THERESA SANDERSON, CHRIS YELLOWQUILL ET LA BANDE INDIENNE DE LONG PLAIN NO 287 ÉGALEMENT CONNUE SOUS LE NOM DE PREMIÈRE NATION DE LONG PLAIN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

 

DATE :

Le 19 AVRIL 2016

 

COMPARUTIONS :

Anthony Lafontaine Guerra

 

Pour le demandeur

 

Harley Schachter

 

Pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Myers Weiberg LLP

Avocats

Winnipeg (Manitoba)

 

Pour le demandeur

 

Harley Schachter

Avocat

Winnipeg (Manitoba)

 

Pour les défendeurs

 

 

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