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Date : 20160420


Dossier : IMM-4543-15

Référence : 2016 CF 439

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 20 avril 2016

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

DRAGISLAV MIROSAVLJEVIC

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Le demandeur, citoyen serbe, présente une requête en annulation de la décision d’une agente lui refusant un visa de résident temporaire au motif qu’il lui est interdit d’entrer au Canada. Cette demande vise la décision sur la troisième demande de visa de résident temporaire du demandeur.

Contexte

[2]               En 2010, le demandeur a déposé une demande pour obtenir un visa de résident temporaire pour rendre visite à sa fille et à sa famille. Peu après avoir reçu cette demande, une agente envoya au demandeur une lettre relative à l’équité procédurale l’invitant à répondre aux préoccupations de l’agente relativement au fait qu’en tant que lieutenant-colonel de l’armée yougoslave, il était interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27. Cet alinéa stipule ce qui suit :

Emportent interdiction de territoire pour atteinte aux droits humains ou internationaux les faits suivants (...) occuper un poste de rang supérieur — au sens du règlement — au sein d’un gouvernement qui, de l’avis du ministre, se livre ou s’est livré au terrorisme, à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou commet ou a commis un génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à 6(5) de la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

[3]               Du 28 février 1998 au 7 octobre 2000, les gouvernements de la République fédérale de Yougoslavie et de la République de Serbie ont été désignés par le ministre aux fins de l’alinéa 35(1)b) de la Loi.

[4]               En réponse à cette lettre, le demandeur a fourni des explications sur son grade dans l’armée yougoslave. Il expliqua que durant la période où la Yougoslavie et la Serbie étaient des gouvernements désignés, il était assistant d’un directeur d’hôpital militaire. Dans une entrevue orale subséquente, il admit que [traduction] « si l’on considère seulement le rang, à titre de lieutenant-colonel, il occupait un poste se situant dans la moitié supérieure de la structure des grades. »  Il soutenait néanmoins que [traduction] « son poste ne se situait pas dans la moitié supérieure de l’organisation relativement à la hiérarchie de l’armée. »  En fonction des renseignements obtenus, l’agente autorisa la demande du demandeur. Elle conclut ce qui suit :

[traduction] Je suis convaincue qu’il n’est pas raisonnable de croire que la position du demandeur était considérée comme supérieure dans la hiérarchie de l’armée yougoslave pendant la période en question aux fins de l’alinéa 16e) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR). Considérant la description faite par le demandeur de la hiérarchie de l’armée et de ses officiers supérieurs, il n’occupait pas un poste situé dans la moitié supérieure de la hiérarchie de l’organisation militaire. De plus, ses responsabilités n’étaient pas de nature à influencer de façon significative les décisions et politiques des instances gouvernementales supérieures.

[5]               En 2011, le demandeur déposa une seconde demande de  visa de résident temporaire, qui fut examinée par la même agente lui ayant accordé sa demande en 2010. Toutefois, cette fois-ci, l’agente rejeta la demande. Dans ses notes du SMGC, elle explique les changements survenus entre 2010 et 2011. Elle affirme qu’en 2010, elle a accepté les allégations du demandeur selon lesquelles même si son rang se situait dans la moitié supérieure de la hiérarchie militaire, son influence sur le gouvernement en pouvoir était telle qu’on ne pouvait dire qu’il faisait partie de la moitié supérieure de l’organisation. En 2011, après avoir obtenu l’avis des conseillers juridiques de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), elle a renversé sa propre position en concluant que le rang du demandeur, situé dans la moitié supérieure de la hiérarchie militaire, était suffisant pour déterminer qu’il faisait partie de la moitié supérieure de l’organisation. Il était donc un [traduction] « responsable des forces armées » conformément à l’alinéa 16e) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, qui prévoit que les « responsables des forces armées » sont des personnes interdites de territoire en vertu du l’alinéa 35(1)b) de la Loi. L’agente conclut :

[traduction] Puisque le demandeur admet lui-même qu’il était lieutenant-colonel dans l’armée yougoslave pendant la période où la Yougoslavie a été un gouvernement désigné, et en l’absence du nombre exact de personnes œuvrant au sein l’armée à ce moment, il faut pour déterminer la hiérarchie d’une personne dans l’organisation évaluer la position du grade détenu en relation à la hiérarchie des grades de l’organisation pendant la période désignée et déterminer si ce grade faisait partie de la moitié supérieure de l’ensemble des grades. Ayant établi que le rang du demandeur faisait partie à cette époque de la moitié supérieure des grades de l’armée yougoslave, il est raisonnable de croire qu’il avait un poste de responsabilité tel que décrit à l’alinéa 16e) du RIPR. Le demandeur est donc interdit de territoire au Canada en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi et de l’alinéa 16e) du RIPR.

[6]               Avant de rendre sa décision, l’agente a informé le demandeur de ses préoccupations le 27 juin 2011 au cours d’un entretien téléphonique. Pendant cette conversation, le demandeur a donné des renseignements détaillés concernant son grade dans l’armée. Le 9 juin 2011, avant cet appel donc, un autre agent avait contacté le demandeur dans le but d’obtenir des renseignements sur les différents grades et la grandeur de l’armée yougoslave pendant la période concernée. Le demandeur avisa l’agent qu’il ne savait pas comment obtenir ces informations et qu’il ne serait pas en mesure de les lui fournir.

[7]               En 2015, le demandeur fit une demande de visa de résident temporaire, visée par la présente demande de contrôle judiciaire. Une fois de plus, le demandeur fournit des renseignements détaillés concernant son grade dans l’armée. Il fit également une demande d’exception au ministre, en vertu du paragraphe 42.1(1) de la Loi, dans l’éventualité où il serait considéré interdit de territoire.

[8]               Le 11 août 2015, l’agente rejeta la demande de visa de résident temporaire du demandeur, sans faire mention de sa demande d’exception ministérielle. L’agente conclut que le demandeur est [traduction]  « un membre d’une classe de personnes interdites de territoire tel que prévu par la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. » L’agente conclut plus spécifiquement que le demandeur est inadmissible en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi, puisqu’il a [traduction]  « occup[é] un poste de rang supérieur — au sens du règlement — au sein d’un gouvernement qui, de l’avis du ministre, se livre ou s’est livré au terrorisme, à des violations graves ou répétées des droits de la personne ou commet ou a commis un génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre au sens des paragraphes 6(3) à (5) de la   Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre ».

[9]               Le 18 août 2015, l’agente fournit des motifs additionnels à sa décision. Après avoir examiné la carrière du demandeur dans l’armée yougoslave, l’agente conclut ce qui suit :

[traduction] Le 12 août 2011, un visa de résident temporaire vous a été refusé puisque vous avez été déclaré interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi. Vous avez également joint à la présente demande datée du 11 février 2015 des observations, anticipant de recevoir une conclusion similaire.

Dans ces observations, vous contestez l’application qui a été faite par le passé de l’alinéa 35(1)b) de la Loi et de l’alinéa 16e) du règlement, prévoyant qu’ « occupent un poste de rang supérieur au sein d’une administration les personnes qui, du fait de leurs actuelles ou anciennes fonctions, sont ou étaient en mesure d’influencer sensiblement l’exercice du pouvoir par leur gouvernement ou en tirent ou auraient pu en tirer certains avantages, notamment : les responsables des forces armées (...) ».

En raison de votre grade de lieutenant-colonel, vous faisiez partie des 50 % supérieurs de l’armée, avez bénéficié des privilèges accordés aux personnes de ce rang et satisfaites donc à la définition de responsable des forces armées. Il ne nous est pas nécessaire d’établir que vous étiez en mesure d’exercer une influence l’exercice du pouvoir par votre gouvernement puisque vous déteniez un rang de responsable des forces armées.

Par conséquent, les renseignements que vous avez fournis ne modifient pas mon évaluation selon laquelle vous êtes interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la LIPR.

[10]           La décision de l’agente est en partie fondée sur un rapport sur l’interdiction de territoire rédigé par l’ASFC. Ce rapport décrit deux versions de la hiérarchie au sein de l’armée yougoslave : la première se base sur l’International Encyclopedia of Uniform Insignia (l’encyclopédie internationale des insignes d’uniforme) [Encyclopédie] et la seconde sur la preuve présentée par le demandeur. Ces deux versions ne sont pas nécessairement incompatibles puisqu’il est possible que la première reflète la hiérarchie officielle de l’ensemble de l’armée alors que la seconde décrit la hiérarchie comme elle était appliquée en pratique dans le cas particulier du demandeur. Ces versions sont comme suit :

Hiérarchie dans l’encyclopédie

1.         Général de l’armée

2.         Colonel-général

3.         Lieutenant-général

4.         Major-général

5.         Colonel

6.         Lieutenant-colonel (demandeur)

7.         Major

8.         Capitaine (1re classe)

9.        Capitaine

10.     Lieutenant

11.     Sous-lieutenant

12.     Adjudant-maître

13.     Adjudant

14.     Sergent-chef (1re classe)

15.     Sergent-chef

16.     Sergent (1re classe)

17.     Sergent

18.     Caporal-chef

19.     Caporal

20.     Soldat (1re classe)

21.     Soldat

Hiérarchie selon le demandeur

1.      Ministre de la Défense

2.      Général de haut niveau (responsable de la direction générale du service sanitaire)

3.      Général (responsable de l’école militaire)

4.      Colonel (responsable de l’école militaire)

5.      Lieutenant-colonel (demandeur)

6.      3 lieutenant-colonels (un responsable des finances, un responsable des questions techniques et un responsable de l’administration)

7.      142 employés non militaires

Questions en litige

[11]           Le demandeur soulève deux questions en litige à analyser.

1.                   Est-ce que l’agente a agi de façon inéquitable envers le demandeur en ne lui donnant pas l’occasion de répondre à ses préoccupations?

2.                   Est-ce que l’agente a commis une erreur en déterminant que le demandeur est interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi et est-ce que ses motifs étaient suffisants?

[12]           Les parties et la Cour reconnaissent que la norme de révision pour la première question en litige est celle de la décision correcte, alors que la seconde doit être analysée en regard du critère de la décision raisonnable.

[13]           Le demandeur demande également si l’agente a agi en dehors de sa compétence en mettant fin à la demande d’exception ministérielle. Toutefois, cette allégation est sans fondement puisque l’agente a déclaré dans son affidavit que cette demande était toujours en examen par un représentant du ministre et ne sera donc pas analysée.

Analyse

A.                Est-ce que l’agente a agi de façon inéquitable envers le demandeur en ne lui donnant pas l’occasion de répondre à ses préoccupations?

[14]           Le demandeur fait valoir que si l’agente était préoccupée par la possibilité qu’il y ait interdiction de territoire, cette dernière avait l’obligation de fournir au demandeur une occasion claire de répondre à cette préoccupation. Considérant les faits de l’espèce, je ne suis pas d’accord.

[15]           Le demandeur avait déjà fait deux demandes de visa de résident temporaire en 2010 et 2011 avant de déposer sa demande en 2015. Dans les deux demandes antérieures, la question principale était de déterminer si le demandeur était interdit de territoire en raison de son poste de rang supérieur en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi. En fait, la demande de 2011 a été rejetée précisément pour cette raison.

[16]           Étant donné son historique, le demandeur aurait dû comprendre qu’il était très probable que sa demande  de visa de résident temporaire de 2015 repose sur la qualification de son rang. Le demandeur a donc eu l’occasion de faire valoir son point de vue à ce sujet et  a profité de cette occasion. Comme il le dit dans son affidavit (relativement à sa demande de 2015) :

[traduction] J’avais également conscience que j’avais l’obligation de convaincre l’agente des visas que j’étais admissible à l’obtention de visa de résident temporaire et à entrer au Canada. C’est pourquoi j’ai joint à ma demande de visa de résident temporaire de 2015 la lettre d’avril 2010 ainsi qu’une lettre de présentation détaillée datée du 11 février 2015 (lettre de présentation de 2015), ces deux lettres expliquant clairement les responsabilités qui m’étaient échues dans mon poste d’assistant directeur et donnant des renseignements sur le poste de mon superviseur. [Non souligné dans l’original.]

[17]           Tous ces renseignements étant joints à la demande de 2015 du demandeur, l’agente ne considéra pas qu’il était nécessaire de donner une autre occasion au demandeur d’expliquer s’il était un officier de rang supérieur. Comme l’agente l’a souligné dans ses notes du SMGC, [traduction]  « puisque le demandeur principal a joint sa lettre relative à l’équité procédurale avec sa demande, il n’était pas nécessaire d’en obtenir une seconde. »  Dans ses motifs, l’agente déclare également :

[traduction] Le 12 août 2011, un visa de résident temporaire vous a été refusé puisque vous avez été déclaré interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi. Vous avez également joint à la présente demande datée du 11 février 2015 des observations, anticipant de recevoir une conclusion similaire. [Non souligné dans l’original.]

[18]           Demander à l’agente d’ajouter une étape supplémentaire en donnant explicitement l’occasion au demandeur de répondre à ce dont il avait déjà connaissance et à quoi il avait déjà répondu résulterait à élever le principe de l’équité procédurale au-dessus de son essence. Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 204, 195 DLR (4th) 422, au paragraphe 47 :

Les facteurs examinés ci-dessus [relativement au degré d’équité procédurale due par un agent des visas] doivent être mis en équilibre, non dans l’abstrait, mais dans le contexte factuel de l’affaire considérée. Pour déterminer si l’équité exigeait la communication d’une partie des documents secrets sur lesquels s’est fondé l’agent des visas, il faut donc aussi de se demander si la connaissance qu’avait l’intéressé de la nature des réserves de l’agent des visas lui permettait réellement d’y répondre. [Non souligné dans l’original.]

[19]           Le devoir d’équité procédurale d’un agent des visas se situe à l’extrémité inférieure du spectre (Fargoodarzi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 90, [2008] ACF no 133, au paragraphe 12) et ce seuil a été satisfait en l’espèce.

[20]           Le demandeur reproche également à l’agente de ne pas lui fait parvenir le rapport de l’ASFC déterminant qu’il faisait partie de la moitié supérieure de l’armée yougoslave. Là encore, je ne suis pas d’accord. Comme la Cour l’a soutenu dans la décision Nadarasa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1112, [2009] ACF no 1350, au paragraphe 25, la question pertinente est de savoir si le demandeur avait connaissance de cette information (et non du document) et a eu l’occasion d’y répondre.

[21]           La seule information intrinsèque de ce rapport concerne la hiérarchie de l’armée yougoslave pendant la période concernée. Cette information peut être consultée par le public dans l’Encyclopédie et le demandeur n’a pas indiqué quelles observations il aurait faites pour l’attaquer s’il en avait eu connaissance. Voir Khoshnavaz c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1134, 235 ACWS (3d) 1068, aux paragraphes 35 à 38. Plus important encore, le demandeur a servi dans l’armée yougoslave de 1972 à 2001 et a grimpé les échelons de l’organisation. Il est inconcevable qu’en 30 ans de service, le demandeur n’ait pas eu connaissance de la hiérarchie de l’armée yougoslave. Le demandeur n’a pas été surpris avec une nouvelle preuve. Il n’y a pas d’iniquité en l’espèce.

B.                 Est-ce que l’agente a commis une erreur en déterminant que le demandeur est interdit de territoire en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi et est-ce que ses motifs étaient suffisants?

[22]           Le demandeur soutient que l’agente a commis une erreur en déterminant qu’il était interdit de territoire uniquement en raison de sa position dans la hiérarchie de l’armée yougoslave, et ce, sans considérer l’influence réelle qu’il avait sur l’exercice du pouvoir de son gouvernement ou le nombre de personnes qui servaient en dessous ou au-dessus de son grade. Comme l’avocat l’a expliqué dans ses représentations orales, l’agente n’a pas pris en considération la hiérarchie réelle au sein de laquelle le demandeur travaillait.

[23]           Je ne suis pas convaincu que l’agente a ici commis une erreur. Il est vrai qu’elle n’a pas pris en considération l’influence réelle qu’avait le demandeur à titre de lieutenant-colonel. Elle n’avait toutefois pas l’obligation de le faire. Comme l’a souligné le défendeur, la Cour a constamment reconnu que la conclusion d’un agent selon laquelle le grade d’une personne se situe dans la moitié supérieure de l’organisation militaire est suffisante en soi pour établir qu’elle est « un responsable des forces armées » aux fins de l’alinéa 16e) du Règlement. La Cour a également reconnu que lorsqu’il a été déterminé qu’un intéressé « occupe un poste de rang supérieur  » selon l’article 16, il n’est pas nécessaire d’analyser son influence sur l’exercice du pouvoir par son gouvernement : Ali Al-Ani c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 30, 262 ACWS (3d) 458, aux paragraphes 2 et 12 à 21.

[24]           L’agente a conclu qu’en raison de son grade, le demandeur faisait partie de la moitié supérieure de l’armée yougoslave pendant la période concernée. Il ne ressort pas clairement des motifs de l’agente si elle en est arrivée à cette conclusion en prenant en considération le nombre de personnes en service au-dessus et au-dessus du demandeur, comme la jurisprudence suggère de le faire : Voir par exemple Lutfi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1391, [2005] ACF no 1703, au paragraphe 14. Toutefois, il a été noté que le demandeur a admis que [traduction] « par son rang de lieutenant-colonel, il se situait dans la moitié supérieure de la hiérarchie ». En l’absence de la preuve du contraire, il est convenable d’assumer que l’armée yougoslave est pyramidale, comptant plus de personnes à sa base qu’aux grades supérieurs.

[25]           En l’espèce, l’agente a examiné l’ensemble des grades de l’armée plutôt qu’uniquement l’unité du demandeur. Cette interprétation des dispositions des lois et règlements pertinents est raisonnable et a droit à la déférence de la Cour.

[26]           Pour ces motifs, je conclus que la décision de l’agente est juste et raisonnable et que cette demande doit être rejetée.

[27]           Le demandeur suggère qu’il serait approprié de certifier la question suivante :

En établissant que le demandeur occupait un poste de rang supérieur en vertu de l’alinéa 35(1)b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et de l’alinéa 16e) du Règlement, l’agente aurait-elle dû prendre en considération la structure organisationnelle spécifique à l’unité militaire dans laquelle servait le demandeur ou devait-elle plutôt examiner son rang à la lumière de la structure générale de l’armée?

[28]           Le défendeur s’oppose à la certification de cette question. Le ministre fait valoir qu’il n’y a pas de jurisprudence soutenant l’allégation du demandeur selon laquelle un agent devrait examiner une structure autre que celle de l’armée en général. Il soutient de plus que même si cela avait été le cas, la preuve déposée par le demandeur lui-même démontre qu’il y a plus de personnes sous lui qu’au-dessus. Donc même en analysant l’affaire sous cet angle, le demandeur aurait été déclaré interdit de territoire.

[29]           Je ne suis pas convaincu que la question proposée peut être certifiée. L’interprétation des dispositions faite par l’agente est raisonnable et les cours des plus hautes instances ont soutenu que puisqu’il s’agit de sa loi constitutive, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable. Je suis de plus d’accord avec le défendeur que la preuve du demandeur est telle qu’à l’intérieur de la structure où il servait, plus de personnes étaient sous lui qu’au-dessus et qu’en définitive, le résultat aurait été le même.


JUGEMENT

LA COUR rejette la demande, et aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4543-15

 

INTITULÉ :

DRAGISLAV MIROSAVLJEVIC c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 avril 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 20 avril 2016

 

COMPARUTIONS :

Beth Spratt

Pour le demandeur

 

John Loncar et Alex Kam

Pour le défendeur

.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cabinet de Beth Spratt

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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