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Date : 20160525


Dossier : IMM-5667-15

Référence : 2016 CF 569

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Fredericton (Nouveau-Brunswick), le 25 mai 2016

En présence de monsieur le juge Bell

ENTRE :

KAI ZHAN LIANG

requérant

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

intimé

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               Le requérant, Kai Zhang Liang, par l’intermédiaire de son avocat, Lawrence Wong, demande le réexamen d’une décision que j’ai rendue le 24 mars 2016 dans laquelle je rejette sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire. Les faits entourant cette requête pour réexamen aux termes du paragraphe 397(1) des Règles des Cours fédérales sont particuliers.

[2]               Dans un affidavit au soutien de la requête pour réexamen, un avocat associé du cabinet d’avocat de Me Wong a affirmé s’être présenté au bureau d’enregistrement des actes de Vancouver, y avoir pris en photo le dossier de Cour et en avoir conclu qu’il n’y avait [traduction] « aucune annotation, aucun feuillet autoadhésif, aucune écriture manuscrite, ni aucun autre signe pouvant laisser croire qu’il a été lu ». Il affirme d’ailleurs qu’il n’a pas [traduction] « vu la signature d’un des juges de la Cour fédérale ». Curieusement, il souligne ceci : [traduction] « Je n’y ai vu aucun signe physique démontrant que le dossier a été lu. » La position initiale du requérant, rejetée à l’audience du 20 mai 2016 sur cette cause, est que je n’ai pas lu le dossier. Bien entendu, si tel était le cas, cela serait une grave violation de mon serment de fonction. À l’audience, Me Wong n’a pas poursuivi sa prétention selon laquelle je n’aurais pas lu le dossier et a simplement fait valoir que ledit dossier avait été placé dans la « mauvaise pile ». Essentiellement, Me Wong prétend que le bien-fondé de l’affaire était tel que tout juge raisonnable aurait accueilli la demande d’autorisation, et que le personnel du bureau d’enregistrement des actes aurait donc possiblement placé le dossier « autorisation accueillie » à l’endroit réservé aux « autorisations rejetées ». En somme, Me Wong soutient qu’il y a eu soit un acte répréhensible grave de la part de l’un des juges de Sa Majesté, soit une négligence grave de la part du personnel du bureau d’enregistrement des actes.

[3]               L’affidavit au soutien de la requête pour réexamen révèle des lacunes à plusieurs niveaux. Premièrement, il présume qu’un juge annotera la copie d’un dossier auquel le public a accès. Deuxièmement, il semble également présumer qu’un juge annotera un document de cour plutôt qu’un cahier d’audience. Troisièmement, il réfère à des commentaires d’un employé du bureau d’enregistrement dont on ne connaît pas le nom et concernant du matériel qui aurait été en ma possession pendant le délibéré sur la demande d’autorisation. Ces commentaires, selon lesquels l’associé de Me Wong a observé et photographié le même dossier (c’est-à-dire les mêmes feuilles de papier) que celui que j’avais en ma possession pendant mes délibérations, sont inexacts.

[4]               Dans le cadre d’une requête en vertu du paragraphe 397(1) des Règles des Cours fédérales, mon rôle est d’établir si j’ai négligé quoi que ce soit. Une telle requête ne tient pas lieu d’appel. En raison de la gravité des allégations de Me Wong, j’ai consulté le greffe à Ottawa. Comme preuve que ses techniques d’enquête sont inadéquates et, à mon avis, inappropriées, j’y ai récupéré l’ordonnance que j’ai signée. La section dactylographiée de l’ordonnance mentionne ce qui suit : [traduction] « La demande d’autorisation et de contrôle judiciaire est, par conséquent, rejetée. » Juste au-dessus de cette partie dactylographiée se trouve la date, [traduction] « le 24 mars 2016 », que j’ai écrite à la main. Immédiatement après cette section dactylographiée se trouve ma signature, « B. Richard Bell », que j’ai moi-même apposée au document. Sous ma signature, écrits de ma main, se trouvent les mots [traduction] « Juge CF », signifiant « juge de la Cour fédérale ».

[5]               Rien n’a été négligé. Le personnel du bureau d’enregistrement des actes n’a pas placé le dossier dans la « mauvaise pile ». Cette requête pour réexamen est rejetée.

[6]               L’intimé demande des dépens de 1 000 $, à être personnellement déboursés par l’avocat du requérant, Me Wong. L’intimé fait valoir que la requête est sans fondement et constitue de surcroît une attaque à [traduction] « l’intégrité de la Cour et du personnel du bureau d’enregistrement des actes, en plus d’être une insulte au principe d’immunité judiciaire et de confidentialité des délibérations ». Dans ses observations écrites, lesquelles constituent un document public, Me Wong, un fonctionnaire judiciaire, déclare que l’examen du [traduction] « dossier de cour, des couvertures physiques du dossier et du dossier en tant que tel n’a révélé aucune trace physique ou notes écrites pouvant montrer que le dossier a été examiné par un juge ». Cette déclaration publique faite par un fonctionnaire judiciaire est inexacte. La signature manuscrite d’un juge ainsi que la mention manuscrite de la date et de l’identité de la cour constituent une preuve à première vue que le dossier a été examiné par un juge.

[7]               Dans les circonstances, je conclus que l’attaque envers l’intégrité de la Cour, basée sur des spéculations, des insinuations et des vérifications inexactes au bureau d’enregistrement des actes, constitue une raison spéciale conformément à l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés (Règles en matière d’immigration) pour donner lieu à des dépens. Pour ces motifs, je suis d’avis que cette procédure a été déposée à tort et sans fondement valable aux termes du paragraphe 404(1) des Règles des Cours fédérales. Dans les circonstances, je suis d’accord avec l’avocat de l’intimé qu’il s’agit d’une situation appropriée pour ordonner des dépens à l’encontre du requérant (article 22) et enjoindre à Me Wong de payer lui-même les dépens conformément à l’alinéa 404(1)a) des Règles des Cours fédérales.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.                  Que la requête soit rejetée avec dépens payables par le requérant à l’intimé établis au montant de 1 000 $.

2.                  Que Me Lawrence Wong, avocat du requérant, paie personnellement les dépens du requérant.

3.                  Il n’y a pas d’ordonnance aux termes du paragraphe 404(3) des Règles des Cours fédérales.

« B. Richard Bell »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5667-15

 

INTITULÉ :

KAI ZHAN LIANG c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

(TENUE PAR VOIE DE TÉLÉCONFÉRENCE) :

 

Fredericton (Nouveau-Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 20 mai 2016

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE BELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 25 mai 2016

 

COMPARUTIONS :

Lawrence Wong

 

Pour le requérant

Timothy Fairgrieve

Chantelle Coulson

 

Pour l’intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lawrence Wong & Associates

Avocats

Richmond (Colombie-Britannique)

 

Pour le requérant

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour l’intimé

 

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