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Date : 20160512


Dossier : T-616-15

Référence : 2016 CF 538

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 12 mai 2016

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

DARCEY NOGA

demanderesse

et

JAZZ AVIATION S.E.C., TERRY GREEN ET SUZANNE ASSEFF

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue par la Commission canadienne des droits de la personne [la Commission] rejetant la plainte pour motif de discrimination déposée par la demanderesse à l’endroit de son ancien employeur, Jazz Aviation S.E.C., aux termes du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6 [la Loi].

I.                   Contexte

[2]               Darcey Noga [la demanderesse] a été employée par Jazz Aviation S.E.C. [la défenderesse, ou Jazz] du 7 décembre 1999 au 22 juillet 2008 en tant qu’agente de bord.

[3]               Le 28 août 2002, la demanderesse a reçu un diagnostic psychiatrique de graves troubles mentaux et s’est fait prescrire un arrêt de travail.

[4]               Moins d’un mois après ce diagnostic, la défenderesse a avisé la demanderesse qu’elle avait pris un rendez-vous pour un examen médical indépendant en son nom, examen auquel elle s’est présentée.

[5]               La demande de prestations d’invalidité totale déposée par la demanderesse auprès de la Financière Manuvie, l’assureur de la défenderesse, a été approuvée jusqu’au 2 août 2007, date à laquelle Manuvie a mis fin aux prestations de la demanderesse, jugeant qu’elle n’était plus dans l’incapacité totale d’effectuer les tâches essentielles d’un poste, tel qu’il était défini dans son contrat collectif. Elle a porté cette décision en appel, qui a été rejeté en décembre 2007.

[6]               À la fin du mois d’août et au début du mois de septembre 2007, un spécialiste en réadaptation professionnelle de Manuvie a communiqué avec la demanderesse concernant sa participation à la réadaptation. Les faits sont nébuleux à savoir si la demanderesse devait communiquer avec Manuvie pour commencer sa réadaptation et si elle s’est conformée ou non au processus de réadaptation.

[7]               Dans une lettre destinée à la demanderesse datée du 8 février 2008, la défenderesse alléguait que cette dernière avait refusé de se présenter à la réadaptation professionnelle, et lui offrait des tâches modifiées dans le cadre d’un poste sédentaire en tant que vérificatrice de l’entretien cabine effectué par les agents de bord. Jazz lui a donc demandé de se présenter au bureau de Toronto le 18 février 2008, soit dix jours après la date de la lettre. La lettre se terminait ainsi :

[traduction]

Darcy [sic], si nous n’avons pas de vos nouvelles d’ici le lundi 18 février, nous considérerons que vous avez abandonné votre poste chez Jazz et nous mettrons fin à votre emploi en conséquence.

[8]               Le 14 février 2008, la demanderesse a répondu à la lettre par l’intermédiaire de son avocat, expliquant que la réadaptation professionnelle offerte n’était pas un service, mais plutôt un simple cartable de documentation. Elle en appelait également de la décision de Manuvie de mettre fin à ses prestations. La lettre précisait que la demanderesse n’avait pas abandonné son emploi chez Jazz, mais qu’elle était toujours inapte au travail.

[9]               La défenderesse a répondu, dans une nouvelle lettre, que la demanderesse avait effectivement abandonné son emploi chez Jazz, tant par sa non-participation au processus de réadaptation professionnelle qu’en raison du rejet de son appel par Manuvie. Elle a offert à la demanderesse une dernière chance de commencer un travail aux services au sol le 10 mars 2008.

[10]           Le 6 mars 2008, la demanderesse a envoyé à la défenderesse une lettre médicale de son psychiatre traitant datée du 13 novembre 2007. Cette lettre décrivait le diagnostic de la demanderesse, les symptômes qui y sont associés et son plan de traitement. Aucune conclusion quant à la capacité de la demanderesse à retourner au travail ne s’y trouvait, autre qu’il était possible que cela prenne plus d’un an, à partir de la date de la lettre.

[11]           Le 5 mai 2008, la défenderesse a envoyé une lettre au syndicat de la demanderesse, mettant fin à son emploi pour motif d’abandon. Cette lettre ajoutait qu’elle pourrait rétablir la relation d’emploi en fournissant, dans un délai de 30 jours, des renseignements médicaux indiquant qu’elle était [traduction] « totalement invalide » à l’emploi. Le syndicat a communiqué à la demanderesse cette requête demandant de fournir plus de renseignements médicaux, sans quoi on mettrait fin à son emploi.

[12]           Le 29 mai 2008, la défenderesse a envoyé par courriel un questionnaire à la demanderesse, devant être rempli par son médecin traitant afin de clarifier son statut médical actuel. Ce questionnaire sollicitait notamment des renseignements à propos des conclusions objectives étayant le diagnostic de la demanderesse, de sa capacité à occuper un emploi régulier, y compris un emploi avec tâches modifiées, de sa capacité à s’acquitter des fonctions de vérificatrice de l’entretien cabine effectué par les agents de bord et de son pronostique dans un avenir prévisible.

[13]           En réponse à ce questionnaire, la demanderesse a envoyé une lettre médicale datée du 22 mai 2008 par télécopieur au numéro qu’elle croyait être le numéro confidentiel du télécopieur du Dr Neal Sutton, le médecin consultant de la défenderesse qui avait pour tâche d’évaluer l’aptitude au travail de la demanderesse. Bien que la lettre médicale de la demanderesse ne répondait pas exactement aux 17 questions, son psychiatre y réitérait qu’elle souffrait d’une maladie mentale accompagnée de symptômes concomitants importants. La lettre indiquait ce qui suit :

[traduction]

Certains progrès ont été observés, mais conformément à ma déclaration faite dans la lettre du 13 novembre 2007, Mme Noga est toujours inapte au travail.

De plus, en raison des signes précurseurs de progrès, quitter Saskatoon en ce moment nuirait au traitement de Mme Noga. Elle présente encore un comportement considérablement évitant, et son réseau de soutien est situé à Saskatoon. Il est probable qu’un déménagement à l’extérieur de la ville annulerait les progrès réalisés au cours des huit derniers mois.

[14]           La demanderesse a proposé que le Dr Sutton discute directement avec son psychiatre traitant.

[15]           En réponse à cette offre, la défenderesse a demandé à obtenir l’ensemble du dossier médical de la demanderesse. Cette dernière a refusé de donner suite à cette demande, invoquant qu’une telle requête était trop générale et portait atteinte à sa vie privée.

[16]           Par conséquent, dans une lettre datée du 22 juillet 2008, la défenderesse a informé la demanderesse qu’elle mettait fin à son emploi [la lettre de cessation d’emploi]. Cette lettre énonçait ce qui suit :

[traduction]

La présente lettre constitue un avis de cessation de votre emploi chez Jazz en date de ce jour, soit le 22 juillet 2008, en raison de votre défaut de vous présenter au travail à la suite d’une absence et d’avoir omis de produire la documentation nécessaire pour justifier cette absence de votre lieu de travail. Nous en avons donc conclu que vous abandonnez votre poste chez Jazz […].

Après examen, et sur avis du Dr Sutton, Jazz a décidé de décliner votre offre de mettre en communication les deux médecins praticiens. Toutefois, il vous a été demandé de permettre, par consentement écrit, au Dr Sutton d’examiner votre dossier médical clinique et de tirer une conclusion indépendante de vos restrictions et limites actuelles. Cette offre a été transmise à votre syndicat, et Jazz a reçu comme réponse que vous ne consentiez pas à la divulgation de votre dossier clinique pour en permettre l’examen par le Dr Sutton […].

Puisque les renseignements que vous avez fournis à ce jour sont insuffisants et que vous avez rejeté nos tentatives subséquentes de régler cette question, nous ne voyons aucune raison de reporter notre décision. Nous n’avons pas de motif de croire que nous obtiendrons maintenant ou dans un avenir rapproché les renseignements qui permettraient de clarifier votre situation.

[17]           La demanderesse a déposé une plainte à la Commission le 15 juillet 2009, alléguant que la décision de la défenderesse de mettre fin à son emploi est un acte discriminatoire fondé sur une déficience et contrevient au paragraphe 3(1) et à l’article 7 de la Loi.

[18]           La plainte est demeurée inactive pendant la procédure de grief initiée par le syndicat de la demanderesse. L’enquête de la Commission a été réactivée le 4 janvier 2011 et un enquêteur a été désigné pour préparer un rapport aux termes des paragraphes 43(1) et 44(1) de la Loi.

[19]           Le rapport d’enquête [le rapport] était détaillé. Pour le préparer, l’enquêteur a examiné toute la documentation déposée par les parties et a interrogé la demanderesse ainsi que quatre témoins de la défenderesse : Mme Suzanne Asseff (gestionnaire des relations de travail en 2007 et 2008), Mme Joan Morant (infirmière en santé du travail), Mme Joslyn Dicks (ancienne présidente du Syndicat des agents de bord du Canada [SABC]) et le Dr Sutton (médecin consultant de la défenderesse). La Commission n’a interrogé aucun des témoins proposés par la demanderesse (son médecin et son père), jugeant qu’ils n’avaient pas de connaissances directement liées à la plainte et que les renseignements recherchés avaient déjà été fournis par les témoins interrogés et par la documentation.

[20]           La Commission a conclu que la cessation d’emploi de la demanderesse par la défenderesse semblait être liée à sa maladie mentale. En raison de sa maladie, la demanderesse était incapable de travailler; elle a informé la défenderesse de sa condition. La défenderesse a néanmoins mis un terme à son emploi le 22 juillet 2008, la demanderesse n’étant pas retournée au travail dix mois après la cessation de ses prestations d’invalidité.

[21]           Par conséquent, la Commission a entrepris une évaluation afin de déterminer si la défenderesse pouvait raisonnablement justifier ses actions et démontrer qu’il ne s’agissait pas d’une discrimination basée sur un motif illicite.

[22]           La Commission a noté que les motifs donnés par la défenderesse pour justifier la cessation d’emploi de la demanderesse étaient : (i) le défaut de la demanderesse de fournir des renseignements médicaux objectifs pour justifier son absence prolongée; (ii) le défaut de la demanderesse de participer au processus de réadaptation professionnelle de Manuvie.

[23]           Le rapport soulignait ce qui suit dans son évaluation du premier motif (la suffisance des renseignements médicaux) :

  1. De 2002 à 2007, la défenderesse a reçu des mises à jour de la part de Manuvie concernant l’état de la demanderesse. Après avoir été avisée en août 2007 que Manuvie ne considérait plus la demanderesse comme étant totalement invalide à l’emploi, la défenderesse s’est enquise auprès de Manuvie des restrictions de la demanderesse aux fins de prise de mesures d’adaptation. Manuvie a informé la défenderesse de son évaluation des capacités de la demanderesse et des emplois jugés appropriés pour sa situation.
  2. La défenderesse a donc établi que des tâches sédentaires au sol, comme celles qui étaient associées au poste de vérificatrice de l’entretien cabine effectué par les agents de bord, étaient conformes aux restrictions de la demanderesse communiquées par Manuvie. Les tâches, exécutées au rythme de la demanderesse, impliquaient l’observation de la propreté des appareils. Par conséquent, la défenderesse a déterminé que la demanderesse était absente sans autorisation et l’a avisé de se présenter à Toronto pour commencer à s’acquitter de ses nouvelles fonctions. À ce moment, la demanderesse n’avait pas informé la défenderesse de sa phobie des germes. La défenderesse a fait valoir que si elle l’avait fait, ses tâches auraient été ajustées.
  3. La défenderesse a déclaré n’avoir ménagé aucun effort pour obtenir des renseignements médicaux objectifs de la part de la demanderesse afin de clarifier le type de tâches qu’elle aurait été en mesure d’exécuter. Il s’est avéré difficile de déterminer la démarche appropriée puisque la demanderesse soutenait qu’elle était inapte au travail, mais que Manuvie avait plutôt déterminé qu’elle était en mesure d’exécuter certaines tâches.
  4. Mme Morant, infirmière en santé du travail, a déclaré que les renseignements médicaux reçus du psychiatre de la demanderesse n’étayaient pas la prolongation de son absence et ne fournissaient pas d’autres renseignements que ceux déjà au dossier de Manuvie lorsque la compagnie avait déterminé que la demanderesse n’était pas totalement invalide.
  5. Le Dr Sutton a conclu que les renseignements médicaux de la demanderesse qu’il avait examinés, soit uniquement la lettre médicale du 22 mai 2008, n’étaient pas objectifs, ne démontraient pas d’anormalités mesurables et ne répondaient pas au questionnaire. Ces renseignements n’étaient pas suffisants pour lui permettre de formuler des recommandations concernant la capacité de la demanderesse à reprendre le travail avec des tâches modifiées.
  6. La demanderesse a expliqué que son psychiatre avait refusé de répondre au questionnaire puisqu’il avait répondu à ces questions dans ses lettres du 7 novembre 2007 et du 22 mai 2008 et qu’à son avis, il avait donné suffisamment de renseignements médicaux sur l’incapacité de travailler de la demanderesse.
  7. L’information entourant ce que le Dr Sutton savait et ce qu’il a demandé à la demanderesse est contradictoire. Sa note à la Commission indique qu’il ne croyait pas qu’on lui avait demandé de parler au médecin de la demanderesse et que si on le lui avait demandé, il l’aurait fait avec le consentement écrit de la demanderesse. En outre, le Dr Sutton a déclaré à l’enquêteur qu’il ne se rappelait pas avoir demandé le dossier médical, même si la demanderesse soutenait qu’il avait demandé à examiner l’ensemble de son dossier. De plus, selon l’expérience de Mme Morant, le Dr Sutton ne demande généralement pas les notes du dossier médical. Elle n’avait aucune idée pourquoi il aurait fait une telle demande dans cette affaire.
  8. La demanderesse a exprimé de graves préoccupations relativement à la protection de sa vie privée entourant l’utilisation de ses renseignements médicaux et leur protection par la défenderesse. Le fait que des professionnels non médecins y auraient accès la préoccupait. La demanderesse a fait part de cette préoccupation à Mme Dicks, l’ancienne présidente du SABC, qui l’a rencontrée pour discuter des mesures d’adaptation possibles.

[24]           Le rapport expliquait la politique de gestion de la défenderesse quant aux dossiers de réadaptation, laquelle a été mise en place pour aider à déterminer les mesures d’adaptation appropriées en fonction des restrictions et des limites des employés souffrant d’invalidité. La politique d’accommodement temporaire de la défenderesse a pour but d’offrir des mesures d’adaptation raisonnables sans contrainte excessive. Lorsque des renseignements médicaux suffisants indiquent qu’il y a des restrictions de travail permanentes, il est possible d’offrir des mesures d’adaptation permanentes moyennant des évaluations médicales supplémentaires.

[25]           La défenderesse soutient que la demanderesse a fait obstruction au processus de mesures d’adaptation en refusant de participer à ces politiques par son refus de consentir à ce que Manuvie divulgue à la défenderesse tous les renseignements médicaux.

[26]           Dans le cadre de l’enquête entourant le second motif allégué par la défenderesse pour justifier la cessation d’emploi de la demanderesse, soit son défaut de participer au processus de réadaptation, le rapport souligne les positions contradictoires des parties. La défenderesse soutient que la demanderesse n’a pas répondu à l’offre de Manuvie de participer aux services de réadaptation professionnelle. Pour sa part, la demanderesse allègue que Manuvie ne lui a jamais offert de services de réadaptation professionnelle et qu’elle lui a simplement fourni un cartable traitant de la recherche d’emploi. La preuve contradictoire soulevée par l’enquête démontre ce qui suit :

  1. Le 22 août 2007, Manuvie a envoyé une lettre à la demanderesse l’informant qu’elle allait recevoir un ensemble de recherche d’emploi professionnel et qu’elle pourrait communiquer avec un membre du bureau de la réadaptation si elle avait des questions.
  2. Le 4 septembre 2007, une nouvelle lettre de Manuvie indiquait une fois de plus qu’elle allait envoyer l’ensemble à la demanderesse. Cette lettre mentionnait également que la demanderesse avait reçu un appel à la fin du mois d’août pour se faire offrir du soutien en réadaptation professionnelle dans le cadre de sa recherche d’emploi. Elle disposait de dix jours pour répondre à cette offre.
  3. Le 12 septembre 2007, une autre lettre a été envoyée par Manuvie dans le but de mettre à jour le plan de réadaptation professionnelle de la demanderesse et pour lui indiquer qu’elle recevrait une trousse à consulter pour l’aider à faciliter ses efforts de retour à l’emploi. La lettre précisait qu’elle pouvait communiquer avec le responsable de la réadaptation si elle avait besoin d’aide supplémentaire avec la trousse ou si elle souhaitait obtenir de plus amples renseignements.
  4. Mme Morant, qui a parlé avec la demanderesse le 19 octobre 2007, croit que cette dernière savait qu’elle devait faire un suivi auprès de Manuvie concernant les services de réadaptation.

[27]           À la suite de l’examen de tous les éléments qui précèdent, le rapport a conclu que les éléments de preuve suggéraient que la défenderesse avait donné une justification raisonnable de ses actions et avait démontré que la cessation d’emploi n’était pas un prétexte pour une discrimination fondée sur un motif illicite.

[28]           Le rapport indiquait également que les efforts de la défenderesse pour déterminer la nature des limitations reliées à l’emploi de la demanderesse et son offre de coordonner son retour à l’emploi progressif en tant que vérificatrice de l’entretien cabine effectué par les agents de bord suggéraient qu’elle s’était déchargée de son devoir d’offrir des mesures d’adaptation. Malgré ses nombreux efforts, la défenderesse n’a pas été en mesure de déterminer la nature exacte de l’état de la demanderesse en vue d’y répondre au moyen de ses politiques en matière de mesures d’adaptation. En outre, la demanderesse n’a pas avisé la défenderesse de l’existence de restrictions liées à sa capacité à exécuter le travail adapté offert.

[29]           La Commission n’a pas non plus découvert de preuve indiquant que la défenderesse aurait violé la vie privée et la confidentialité des renseignements médicaux de la demanderesse.

[30]           Enfin, la Commission a conclu qu’en dépit de la preuve contradictoire à savoir si la demanderesse devait poser un acte ou décider de participer à la réadaptation professionnelle, l’ensemble de la preuve suggère qu’elle savait qu’elle devait assurer un certain suivi du processus auprès de l’agent responsable de son dossier à Manuvie, ce qu’elle a omis de faire.

[31]           En vertu du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la Loi, la Commission recommandait de rejeter la plainte pour les motifs suivants : (i) la preuve ne soutenait pas les allégations de la plainte et (ii) son instruction n’était pas justifiée.

[32]           Au mois d’août 2013, la Commission a fourni une copie du rapport aux parties et les a invitées à lui faire part de leurs observations, ce que la demanderesse a fait le 10 septembre 2013 et que la défenderesse a fait le 21 août 2013 [les réponses initiales].

[33]           La Commission a communiqué à chacune des parties la réponse initiale de l’autre partie et les a invitées à y répondre, ce qu’elles ont fait respectivement le 3 octobre 2013 et le 4 octobre 2013 [les réponses subséquentes].

[34]           De novembre 2011 à mai 2012, la Commission a renvoyé les parties en conciliation en vue d’en arriver à un règlement, mais cette tentative s’est soldée par un échec. Le 30 septembre 2014, la Commission a fait suivre aux parties le rapport de conciliation, auquel elles ont été invitées à répondre en suivant le même processus que pour le rapport. La demanderesse a déposé sa réponse initiale le 6 novembre 2014, à laquelle la défenderesse a répondu le 9 décembre 2014. La demanderesse n’a reçu une copie de cette réponse que le 11 mai 2015.

[35]           La Commission a rejeté la plainte de la demanderesse dans une lettre datée du 23 mars 2015 [la décision]. Pour rendre sa décision, la Commission a examiné le rapport et les observations déposés en réponse. Elle a rejeté la plainte aux termes du sous-alinéa 44(3)b)(i) de la Loi, concluant qu’en prenant toutes les circonstances en considération, la preuve ne soutenait pas les allégations de la plainte et que son instruction n’était pas justifiée.

[36]           Conformément à la décision Canada (Procureur général) c. Sketchley, 2005 CAF 404, au paragraphe 37, comme la décision ne fournit pas de raisons détaillées à l’appui de la décision, le rapport constitue les motifs de la décision de la Commission de rejeter la plainte de la demanderesse.

II.                Questions en litige

[37]           Les questions en litige sont les suivantes :

  1. La commission a-t-elle manqué à l’équité procédurale en préparant le rapport d’enquête et en concluant qu’il n’était pas justifié d’instruire la plainte?
  2. La décision de la commission était-elle déraisonnable?

III.             Norme de contrôle

[38]           La qualité et la rigueur d’une enquête sur laquelle la Commission base sa décision sont une question d’équité procédurale, et la norme de contrôle est celle de la décision correcte (Forster c. Canada (Procureur général), 2006 CF 787, au paragraphe 47 [Forster]).

[39]           La commission bénéficie d’une grande latitude dans l’exécution de ses fonctions d’examen préalable et dans l’interprétation de la preuve permettant de conclure si la plainte doit être instruite (Loi, alinéas 44(3)a) et 44(3)b)). La décision de ne pas renvoyer une plainte au Tribunal est discrétionnaire et révisable sous la norme de la décision raisonnable (Cooper c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 RCS 854, au paragraphe 53; Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] ACF no 181, aux paragraphes 55 à 57 [Slattery], confirmé par [1996] ACF no 385 (CAF)).

IV.             Analyse

[40]           Les dispositions pertinentes de la Loi se retrouvent à l’annexe A des présentes.

A.                La commission a-t-elle manqué à l’équité procédurale en préparant le rapport d’enquête et en concluant qu’il n’était pas justifié d’instruire la plainte?

[41]           La demanderesse fait valoir que l’enquête de sa plainte par la Commission était lacunaire et constitue un déni de son droit à l’équité procédurale (Forster, précitée, au paragraphe 47).

[42]           La réponse initiale de la demanderesse au rapport détaille plusieurs de ses lacunes, qui n’ont pas été examinées ou prises en considération par la suite, y compris :

  1. le défaut de l’enquêteur d’interroger les témoins de la demanderesse;
  2. le défaut du rapport de fournir à la Commission une justification de sa décision concernant la crédibilité et les omissions de l’enquête;
  3. le défaut d’enquêter sur la preuve contradictoire de la défenderesse ou d’évaluer celle-ci, notamment : (i) l’incertitude quant à savoir si le Dr Sutton a demandé ou non à obtenir le dossier médical complet de la demanderesse et (ii) la déclaration de la défenderesse selon laquelle [traduction] « sur l’avis du Dr Sutton », elle a rejeté l’offre faite par la demanderesse de mettre en contact le psychiatre et le médecin consultant alors que le rapport indique que le Dr Sutton n’était pas au courant d’une telle offre et que, le cas échéant, il l’aurait normalement acceptée.
  4. le défaut d’examiner la teneur du programme de réadaptation professionnelle de Manuvie, ayant pour conséquence que la prétention de la défenderesse concernant la participation de la demanderesse a été acceptée pour justifier l’acte discriminatoire à son égard.

[43]           La Cour a confirmé qu’en prenant la décision d’entreprendre une conciliation ou de diriger l’affaire vers une audience devant le Tribunal, le décideur administratif a le devoir de s’assurer que sa décision est fondée sur des renseignements suffisants, recueillis dans le cadre d’une enquête adéquatement menée (Watt c. Canada (Procureur général), 2006 CF 619, au paragraphe 18). Une décision atteinte à partir d’une enquête lacunaire sera elle-même lacunaire puisque la Commission ne dispose pas d’un nombre suffisant de renseignements pertinents pour exercer à bon droit son pouvoir discrétionnaire (El-Helou c. Service administratif des tribunaux judiciaires, 2012 CF 1111, au paragraphe 92).

[44]           Récemment, dans la décision Bergeron c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 160 au paragraphe 74, la Cour d’appel fédérale a décrit ce qu’elle considère être une enquête approfondie. Essentiellement, un enquêteur n’a pas à se pencher sur tous les aspects possibles puisque les intérêts d’un plaignant doivent être pesés par rapport aux intérêts de la Commission dans un système efficace sur le plan administratif. Ce n’est que dans les cas « [d’]omissions déraisonnables », de défaut d’enquêter une « preuve manifestement importante » ou d’enquête « manifestement déficiente » que le droit à l’équité procédurale sera violé (Slattery, précitée, aux paragraphes 56 et 57).

[45]           La défenderesse fait valoir que l’ensemble des prétendues omissions de l’enquête avait été présenté à la Commission lorsqu’elle a rendu sa décision finale. Par conséquent, la Commission a tranché que les prétendues lacunes ne l’autorisaient pas à invalider la conclusion de l’enquêteur; il faut faire preuve de retenue à l’égard de cette décision.

[46]           Dans le contexte du rejet de la plainte de la demanderesse par la Commission à la suite d’une enquête aux termes de l’article 41, qui constitue une décision administrative de nature discrétionnaire, le devoir d’équité n’est pas élevé, considérant « [qu’i]l n’est pas nécessaire, pendant le processus d’enquête, que soient respectés tous les principes de justice naturelle à l’égard du plaignant » (Shaw c. Gendarmerie royale canadienne, 2013 CF 711, au paragraphe 32 [Shaw]).

[47]           En l’espèce, l’enquête est détaillée et approfondie. Le rapport est volumineux et expose la preuve, y compris la preuve contradictoire, découverte au cours de l’enquête. L’enquêteur a examiné toute la documentation déposée et a interrogé cinq individus dans le cadre de la préparation du rapport.

[48]           La décision de l’enquêteur de ne pas interroger les témoins suggérés par la demanderesse n’était pas inéquitable sur le plan de la procédure, surtout en tenant compte de la grande latitude dont bénéficie la Commission pour contrôler sa procédure. De plus, l’enquêteur était en droit de conclure que les témoins suggérés ne pourraient fournir des éléments de preuve nouveaux et probants différents de ce à quoi il avait déjà accès. Comme le fait valoir la défenderesse, la demanderesse n’a aucunement le droit de choisir les témoins à interroger (Shaw, précitée, au paragraphe 32).

[49]           Dans la décision Slattery précitée, la Cour fédérale souligne qu’il « faut faire montre de retenue judiciaire à l’égard des organismes décisionnels administratifs qui doivent évaluer la valeur probante de la preuve et décider de poursuivre ou non les enquêtes ». Par conséquent, « [c]e n’est que lorsque des omissions déraisonnables se sont produites, par exemple lorsqu’un enquêteur n’a pas examiné une preuve manifestement importante, qu’un contrôle judiciaire s’impose » (paragraphe 56). En d’autres termes, l’intervention de la Cour par voie de contrôle judiciaire sur une question d’équité procédurale est limitée aux situations où se retrouvent « des erreurs d’enquête qui sont à ce point fondamentales que les observations complémentaires des parties ne peuvent y remédier » (Sketchley, précitée, au paragraphe 38).

[50]           En l’espèce, la demanderesse connaissait les allégations soulevées à son égard, soit les recommandations de l’enquêteur, et les arguments auxquels elle devait répondre se trouvaient dans le rapport (Khapar c. Air Canada, 2014 FC 138, au paragraphe 56). La demanderesse a eu l’occasion de répondre à deux reprises, soit au départ puis en réponse aux observations de la défenderesse. Elle a profité de ces deux occasions pour faire de longues observations portant à l’attention de la Commission ce qui, selon elle, constituait des lacunes et des écarts dans le rapport. La décision mentionne que la Commission a pris en considération le rapport et l’ensemble des observations déposées en réponse. À mon avis, toutes les omissions du rapport ont été corrigées d’un point de vue d’équité procédurale par l’occasion donnée à la demanderesse d’attirer l’attention de la Commission sur celles-ci avant qu’une décision finale ne soit rendue.

B.                 La décision de la commission était-elle déraisonnable?

[51]           La demanderesse soutient que la conclusion de Commission, selon laquelle la cessation d’emploi n’est pas fondée sur sa déficience, est déraisonnable puisqu’il s’agit de la seule raison pouvant être soutenue par les éléments de preuve.

[52]           De plus, la demanderesse fait valoir qu’aucun élément de preuve n’a été présenté à la Commission démontrant qu’elle a omis de participer au programme de réadaptation, ce qui est l’un des motifs justifiant la cessation de son emploi. Elle soutient plutôt que des éléments de preuve non contestés suggèrent le contraire, c’est-à-dire qu’elle a participé au programme dans toute la mesure possible. Conséquemment, la décision de la Commission se fonde sur une conclusion de fait erronée, contredite par les éléments de preuve qui lui ont été présentés.

[53]           En outre, la demanderesse est d’avis que la preuve présentée à la Commission démontre qu’elle a fait des efforts considérables pour fournir à la défenderesse les renseignements médicaux nécessaires pour évaluer son incapacité. Le Dr Sutton, médecin consultant de la défenderesse, a uniquement reçu les évaluations médicales envoyées à la défenderesse. Par conséquent, ce n’est pas la faute de la demanderesse si son évaluation se fonde sur des renseignements incomplets. Par ailleurs, la réticence de la demanderesse à fournir à la défenderesse son dossier médical complet ne devrait pas être retenue contre elle.

[54]           Le rapport examine la preuve concernant l’exigence de la participation par la demanderesse au programme de réadaptation professionnelle de Manuvie et reconnaît qu’il y a une preuve contradictoire à savoir si la demanderesse devait prendre des mesures ou plutôt prendre une décision, et conclut finalement que [traduction] « les éléments de preuve suggèrent que la demanderesse savait qu’elle avait certaines obligations, dont, à tout le moins, d’assurer un suivi auprès de l’agent responsable de son dossier chez Manuvie, ce qu’elle a omis de faire ».

[55]           En outre, l’allégation de la demanderesse selon laquelle l’enquêteur n’a pas reconnu ses efforts pour fournir les renseignements médicaux nécessaires n’est pas soutenue par la preuve. Le rapport examine en détail les différents échanges de demande de renseignements médicaux entre la demanderesse et la défenderesse : l’enquêteur y explique le questionnaire, l’offre faite par la demanderesse de mettre son psychiatre en contact avec le Dr Sutton, souligne que ce dernier ne se souvient pas de cette demande et que lui ou la défenderesse a demandé à avoir accès à l’ensemble du dossier médical, ce que la demanderesse a refusé d’autoriser. Ces observations ont donc mené l’enquêteur à conclure que la défenderesse était dans l’impossibilité d’établir la nature exacte de l’état de la demanderesse pour y répondre par des mesures d’adaptation.

[56]           La simple présence d’une preuve contradictoire dans un rapport ne démontre pas que l’enquêteur a fait fi de la preuve. Comme la Cour l’a énoncé dans Shaw précitée, au paragraphe 25 « [l]’enquêteur n’est pas tenu de mentionner tous les éléments de preuve qui lui ont été soumis. » La conclusion de l’enquêteur et de la Commission n’est pas déraisonnable, particulièrement considérant la grande latitude donnée à la Commission dans ses fonctions d’administration et d’examen préalable et dans l’interprétation de la suffisance de la preuve pour établir si une plainte doit être instruite ou non. Il convient de faire preuve de déférence envers la Commission en ce qui concerne l’évaluation de la valeur probante de la preuve et sa décision finale d’instruire l’affaire ou non (Slattery, précitée, au paragraphe 57).

[57]           L’enquêteur a conclu à partir des divers éléments de preuve que les renseignements médicaux fournis par la demanderesse étaient insuffisants pour que le médecin consultant de la défenderesse puisse adéquatement évaluer son état fonctionnel, et qu’elle n’a pas coopéré aux tentatives de la défenderesse d’obtenir plus de renseignements médicaux. Je suis conscient que le rejet de la plainte de la demanderesse risque bien d’empêcher toute réparation judiciaire future pour le préjudice qu’elle allègue. Toutefois, après examen de la décision et des renseignements présentés à la Commission, la conclusion de la Commission selon laquelle l’explication de la défenderesse au soutien de ses actions n’était pas un prétexte pour agir de façon discriminatoire, et par conséquent sa conclusion selon laquelle une instruction n’était pas justifiée, est raisonnable et soutenue par des motifs transparents et compréhensibles.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.                  La demande est rejetée.

2.                 En raison des faits de l’espèce, je n’adjuge aucuns dépens.

« Michael D. Manson »

Juge


ANNEXE A

Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6)

Motifs de distinction illicite

3 (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

Prohibited grounds of discrimination

3 (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for an offence for which a pardon has been granted or in respect of which a record suspension has been ordered.

Emploi

7 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

 

Employment

7 It is a discriminatory practice, directly or indirectly,

(a) to refuse to employ or continue to employ any individual, or

(b) in the course of employment, to differentiate adversely in relation to an employee,

on a prohibited ground of discrimination.

Enquête

Nomination de l’enquêteur

43 (1) La Commission peut charger une personne, appelée, dans la présente loi, « l’enquêteur «, d’enquêter sur une plainte.

Investigation

Designation of investigator

43 (1) The Commission may designate a person, in this Part referred to as an “investigator”, to investigate a complaint.

Rapport

44 (1) L’enquêteur présente son rapport à la Commission le plus tôt possible après la fin de l’enquête.

Report

44 (1) An investigator shall, as soon as possible after the conclusion of an investigation, submit to the Commission a report of the findings of the investigation.

Idem

(3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

a) peut demander au président du Tribunal de désigner, en application de l’article 49, un membre pour instruire la plainte visée par le rapport, si elle est convaincue :

(i) d’une part, que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci est justifié,

(ii) d’autre part, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la plainte en application du paragraphe (2) ni de la rejeter aux termes des alinéas 41c) à e);

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié,

(ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

Idem

(3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

(a) may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry under section 49 into the complaint to which the report relates if the Commission is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is warranted, and

(ii) that the complaint to which the report relates should not be referred pursuant to subsection (2) or dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e); or

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

(ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-616-15

 

INTITULÉ :

DARCEY NOGA c. JAZZ AVIATION S.E.C., TERRY GREEN ET SUZANNE ASSEFF

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Saskatoon (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 3 mai 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DU JUGEMENT :

LE 12 MAI 2016

 

COMPARUTIONS :

Marcus Davies

Pour la demanderesse

Rebecca Saturley

Pour les défendeurs

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BAINBRIDGE JODOUIN CHEECHAM

Saskatoon (Saskatchewan)

Pour la demanderesse

Stewart McKelvey

Halifax (Nouvelle-Écosse)

Pour les défendeurs

 

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