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Date : 20160608


Dossier : IMM-5778-15

Référence : 2016 CF 642

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 8 juin 2016

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

REEM NABHANI

OSAMA SAAD MAHFOUDH BAMASAOOD

KOBALENTHIRA KANAGASUNTHARAM

MERVIN MAREKANI

RACHELLE NYAMOYA

YOAN SAMUEL NYAMOYA

INGRID NTAHIGIMA NZIKORUHIRO

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               Les sept demandeurs ont présenté une demande collective d’autorisation et de contrôle judiciaire. Ils demandent une ordonnance de mandamus visant à obliger la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la Commission) de tenir une audience à l’égard de leurs demandes d’asile dans les 60 jours suivant l’ordonnance de la Cour. Ils demandent également qu’il soit déclaré que l’article 159.9 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement) viole les obligations internationales du Canada, ainsi que l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11.

[2]               Par la présente requête, le défendeur demande que soit annulée la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire des demandeurs pour le motif que cette demande ne satisfait pas à l’article 302 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106. Le défendeur fait valoir que les demandeurs auraient dû présenter des demandes d’autorisation et de contrôle judiciaire distinctes.

[3]               L’article 302 s’énonce comme suit :

302      Sauf ordonnance contraire de la Cour, la demande de contrôle judiciaire ne peut porter que sur une seule ordonnance pour laquelle une réparation est demandée.

302      Unless the Court orders otherwise, an application for judicial review shall be limited to a single order in respect of which relief is sought.

[4]               Les demandeurs font valoir que leur demande collective soulève des questions de droit qui sont communes à chacune de leur demande d’asile, à savoir : le Canada manque-t-il à ses obligations internationales en ne statuant pas sur leur statut de réfugié au sens de la Convention, et la SPR respecte-t-elle l’objet de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, en ne déterminant pas leur statut.

[5]               Les faits et les circonstances des demandeurs doivent être pris en compte pour déterminer si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire afin d’autoriser une demande commune et déterminer s’il s’agit de la meilleure façon de trancher les questions en litige.

[6]               En l’espèce, les demandeurs proviennent de pays différents et les circonstances de chacun sont uniques. Reem Nabhani est un Palestinien né en Syrie; Osama Saad Mahfoudh Bamasaood est un citoyen du Yémen; Kobalenthira Kanagasuntharam est un citoyen du Sri Lanka et Mervin Marekani, Rachelle Nyamoya, Yoan Samuel Nyamoya et Ingrid Ntahigima Nzikoruhiro sont tous originaires du Burundi.

[7]               De plus, les demandes d’asile des demandeurs ont toutes été présentées à des dates différentes. La période de temps écoulé varie de six mois à soixante-quatre mois.

[8]               Les circonstances ayant donné lieu à ces délais varient d’un demandeur à l’autre. La demande d’asile de Reem Nabhani a été renvoyée à la Section d’appel des réfugiés (SAR) pour réexamen après l’accueil d’une demande de contrôle judiciaire, et la SAR a par la suite renvoyé de nouveau l’affaire à la SPR. Les demandes d’asile d’Osama Saad Mahfoudh Bamasaood et de Mervin Marekani ont été présentées avant l’entrée en vigueur de l’alinéa 159.9b) du Règlement. Quant à l’audience de Kobalenthira Kanagasuntharam, elle a été reportée, sur consentement, pour permettre à l’Agence des services frontaliers du Canada de présenter d’autres éléments de preuve. Enfin, les demandes d’asile de Rachelle Nyamoya et de Yoan Samuel Nyamoya ont été renvoyées à la SPR pour réexamen, après que leur demande de contrôle judiciaire a été accueillie.

[9]               Les demandeurs fondent leur demande d’ordonnance de mandamus sur l’ordonnance rendue dans l’affaire Idris c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (inédit, le 18 mai 2016, Dossier IMM-664-16) [Idris]. Cependant, dans l’affaire Idris, les demandeurs étaient tous des demandeurs d’asile érythréens dont les demandes étaient en instance devant la Commission depuis 2012. Leur demande de réparation découlait essentiellement des mêmes faits; tous les demandeurs étaient arrivés au Canada en provenance d’Érythrée en 2012 et tous avaient présenté leur demande d’asile la même année. Au moment où l’ordonnance a été rendue, leurs demandes d’asile étaient toutes en suspens depuis plus de trois ans.

[10]           Je suis d’avis que l’affaire Idris est différente, car les éléments communs dans cette affaire ne se présentent pas en l’espèce. En l’espèce, les pays d’origine des demandeurs diffèrent, leurs demandes d’asile ont été présentées à différentes périodes et dans des circonstances différentes, la période de temps écoulé varie de six mois à plus de cinq ans et les raisons de ces délais diffèrent.

[11]           La situation en l’espèce se rapproche davantage de celle présentée dans Kaur c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (inédit, le 27 septembre 2006, Dossier IMM-4404-06) [Kaur], où 38 demandeurs ont présenté une demande d’ordonnance de mandamus à l’égard de 38 différentes demandes de permis de travail temporaire. Or, dans Kaur, la Cour a conclu que les intérêts de la justice et de l’économie des ressources judiciaires ne permettaient pas d’autoriser les demandeurs à demander réparation au titre d’une demande unique.

[12]           En l’espèce, le bien-fondé de toute ordonnance de mandamus dépendrait des circonstances propres à chaque demandeur, y compris le temps écoulé et les raisons de ce délai. Ces circonstances devraient être évaluées séparément, ce qui vraisemblablement créerait une situation plus complexe qu’efficace, comme dans Kaur.

[13]           Je suis d’accord avec le défendeur que le droit à réparation des demandeurs dépend des faits qui sont propres à chaque affaire. Je suis d’avis que les situations des demandeurs n’ont pas suffisamment d’éléments en commun pour justifier la présentation d’une demande unique de contrôle judiciaire. J’accueille donc la requête du défendeur et annule la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la requête du défendeur soit accueillie et que la présente demande d’autorisation et de contrôle judiciaire soit annulée.

« Ann Marie McDonald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5778-15

 

INTITULÉ :

REEM NABHANI, OSAMA SAAD MAHFOUDH BAMASAOOD, KOBALENTHIRA KANAGASUNTHARAM, MERVIN MAREKANI, RACHELLE NYAMOYA, YOAN SAMUEL NYAMOYA, INGRID NTAHIGIMA NZIKORUHIRO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 mai 2016

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

 

DATE DES MOTIFS :

Le 8 juin 2016

 

COMPARUTIONS :

Raoul Boulakia

 

Pour les demandeurs

 

John Provart

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raoul Boulakia

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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