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Date : 20160726


Dossier : T-1765-15

Référence : 2016 CF 779

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 26 juillet 2016

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

OLEKSANDR PAKHARENKO

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS MODIFIÉS

I.                   INTRODUCTION

[1]               Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le demandeur) demande le contrôle judiciaire de la décision rendue par le juge de la citoyenneté Angelo Persichilli (le juge de la citoyenneté), qui a approuvé le 23 septembre 2015 la demande de citoyenneté de M. Oleksandr Pakharenco (le défendeur) en application du paragraphe 5(1) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29 (la Loi).

II.                LA PREUVE

[2]               Dans la présente instance, la preuve est composée du dossier certifié du tribunal et de plusieurs affidavits comme suit :

-          l’affidavit de Patricia D’Agostino, agente de la citoyenneté, qui a été signé le 10 novembre 2015 et a été déposé au nom du ministre demandeur;

-          l’affidavit du défendeur, qui a été signé le 16 décembre 2015;

-          l’affidavit d’Oleksandr Korolyov, qui a été signé le 15 décembre 2015 et a été déposé au nom du défendeur;

-          l’affidavit d’Olha Kachmar, assistante juridique de l’avocate du défendeur, qui a été signé le 18 décembre 2013; et

-          l’autre affidavit d’Olha Kachmar, qui a été signé le 29 février 2016.

III.             LE CONTEXTE

[3]               Les faits suivants sont tirés de la preuve déposée dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire.

[4]               Le défendeur est citoyen de l’Ukraine. Il est devenu résident permanent du Canada le 5 juillet 2003, soit le jour de son arrivée au pays.

[5]               Alors qu’il ne parvenait pas à trouver du travail au Canada, le défendeur est retourné en Ukraine en décembre 2003. Il y est resté jusqu’en novembre 2006.

[6]               Le défendeur est retourné au Canada le 26 novembre 2006 et il a vécu gratuitement chez un ami de la famille.

[7]               Le défendeur n’a pas travaillé au Canada de novembre 2006 à juillet 2013, date à laquelle il a été embauché comme conseiller aux ventes. Entre novembre 2006 et juillet 2013, alors qu’il était sans emploi, il a tenu des réunions d’affaires au nom de l’entreprise familiale, l’association ukrainienne « Plastics », au Canada. Il a prétendu avoir reçu un soutien financier de sa famille en Ukraine en plus d’avoir utilisé des fonds provenant de son compte bancaire ukrainien et des revenus provenant de biens immobiliers qu’il possède en Ukraine.

[8]               Le défendeur a soumis une demande de citoyenneté canadienne le 16 août 2011. La période pertinente de quatre ans, utilisée pour calculer la période de résidence, en application de l’alinéa 5(1)c) de la Loi, est comprise entre le 16 août 2007 et le 16 août 2011 (la période pertinente).

[9]               Dans sa demande, le défendeur a indiqué ne pas avoir passé de temps à l’extérieur du Canada au cours de la période pertinente allant du 16 août 2007 au 16 août 2011.

[10]           Le 8 novembre 2012, le défendeur a rempli un questionnaire sur la résidence dans le cadre de sa demande de citoyenneté. Dans ce questionnaire, il a dit qu’il était au chômage au Canada, mais qu’il participait aux activités de l’entreprise familiale, qu’il possédait des biens immobiliers en Ukraine, et qu’il avait produit des déclarations de revenus en Ukraine chaque année de la période concernée. Le défendeur a également dit qu’il ne s’était pas absenté du Canada au cours de la période pertinente.

[11]           Le 22 janvier 2013, le défendeur a remis à Citoyenneté et Immigration Canada un rapport sur ses antécédents de voyage du Système intégré d’exécution des douanes (rapport du SIED), lequel rapport était daté du 18 décembre 2012 et avait été délivré par l’Agence des services frontaliers du Canada. Ce rapport montrait que le défendeur était entré au Canada à partir des États-Unis le 10 septembre 2007, par le pont Peace à Fort Erie, en Ontario, à l’aide de sa carte de résident permanent. Dans son affidavit produit dans la présente instance, le défendeur a déclaré avoir fourni son passeport aux autorités frontalières américaines.

[12]           La copie de l’un des passeports du défendeur, qui se trouve dans le dossier certifié du tribunal, comprend une note datée du 31 octobre 2014, à savoir [traduction] « précédent passeport d’OSRP conservé par le gouvernement d’après les notes ». La copie du passeport indique que celui-ci expire en décembre 2021.

[13]           Dans une lettre datée du 31 octobre 2014, un agent de la citoyenneté a demandé une preuve documentaire supplémentaire à l’appui de la résidence du défendeur au Canada, en particulier des avis de cotisation de l’Agence du revenu du Canada et un sommaire des réclamations personnelles de soins de santé présentées dans la province pour la période concernée. L’agent a également demandé des explications quant à la façon dont le défendeur subvenait à ses besoins, des détails sur ses conditions de vie et de plus amples explications au sujet de son voyage aux États-Unis.

[14]           Le défendeur a répondu par lettre du 2 novembre 2014 et a inclus les documents suivants :

-          les avis de cotisation pour les années fiscales 2007 à 2011;

-          une lettre de la banque Expobank datée du 6 mai 2009, qui fait état d’un solde de 70 000 euros;

-          des relevés de compte de la Banque TD pour les périodes allant du 31 août 2008 au 30 novembre 2008, du 31 mai 2011 au 30 juin 2011 et du 31 juillet 2011 au 31 août 2011;

-          une copie de son permis de conduire délivré le 23 août 2011;

-          une copie de sa carte de résident permanent;

-          une copie d’une photo datée du 20 août 2011;

-          des lettres de personnes qui confirment sa résidence au Canada; et

-          une lettre de CIC datée du 5 mars 2014 qui indiquait que le défendeur satisfaisait à l’obligation de résidence prévue à l’article 28 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[15]           Le défendeur n’a pas inclus de sommaire des réclamations de soins de santé présentées dans la province (rapport de l’Assurance-santé de l’Ontario), ayant déclaré qu’il n’avait pas reçu de soins médicaux pendant la période pertinente. Cependant, il a inclus une note d’un médecin datée du 1er août 2013 relativement aux résultats d’un test d’allergie. Le test a été effectué en dehors de la période pertinente. La note a aussi été rédigée en dehors de la période pertinente.

[16]           Le défendeur a expliqué avoir utilisé l’argent de son compte bancaire ukrainien pour subvenir à ses besoins au Canada. Il a également dit avoir vécu gratuitement avec l’ami de son père au cours de la période pertinente.

[17]           Le défendeur a en outre expliqué que le rapport du SIED indiquait qu’il était revenu au Canada le 10 septembre 2007, contrairement à la position de l’agent de la citoyenneté dans sa lettre du 31 octobre 2014. Il a déclaré que le séjour avait duré deux jours, mais il n’a pas fourni de détails.

[18]           Le rapport du SIED indique que le défendeur est arrivé au Canada par le pont Peace à Fort Erie, en Ontario.

[19]           Le 17 décembre 2014, un agent de la citoyenneté a élaboré un modèle pour la préparation et l’analyse du dossier. L’agent en question a notifié ses préoccupations, à savoir que pendant la période pertinente le défendeur n’avait déclaré aucun revenu au Canada, n’avait pas produit de passeport original, et n’avait pas payé de loyer. L’agent était également préoccupé par le fait que le défendeur n’avait pas demandé de rapport auprès de l’Assurance-santé de l’Ontario.

[20]           L’agent a noté que des photocopies de deux passeports ukrainiens avaient été versées au dossier. Le premier passeport, qui avait été délivré le 13 juin 1998, avait expiré le 13 juin 2008. Quant au second passeport, il a été délivré le 12 décembre 2011 et sa date d’expiration est le 11 décembre 2021. L’agent a fait observer qu’une note dans le dossier indiquait que le passeport expiré en juin 2008 avait été « conservé » par le gouvernement.

[21]           Le rapport établi par l’agent de la citoyenneté en date du 17 décembre 2014 n’indique pas clairement quel gouvernement a conservé le passeport du défendeur.

[22]           Le défendeur a présenté un certificat, daté du 18 septembre 2015, de l’inspecteur principal du ministre des Affaires intérieures de l’Ukraine. Le certificat stipule que le défendeur a écrit au ministère des Affaires intérieures de l’Ukraine le 28 novembre 2011 pour signaler la perte de son passeport qui avait été délivré le 13 juin 1998.

[23]           Une audience a été tenue devant le juge de la citoyenneté le 22 septembre 2015.

IV.             DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[24]           Le juge de la citoyenneté a déterminé que la période de quatre ans pertinente allait du 16 août 2007 au 16 août 2011. Il a mentionné que la question en litige dont il était saisi consistait à savoir si le défendeur avait satisfait à l’obligation de résidence aux termes de l’alinéa 5(1)c) de la Loi. Il a conclu que le passeport du défendeur couvrait les quatre ans de la période pertinente. Il a déclaré que le passeport et le rapport du SIED ne soulevait pas de questions quant aux déclarations du défendeur.

[25]           Le juge de la citoyenneté a examiné la preuve présentée par le défendeur concernant sa vie au Canada.

[26]           Le juge de la citoyenneté a conclu que, contrairement aux notes inscrites dans le dossier du défendeur, le passeport dont la date d’expiration initiale était en juin 2008 était valide au-delà de la période pertinente, car il avait été prolongé jusqu’en novembre 2016. La juge de la citoyenneté a conclu que le passeport avait été perdu à Kiev, en Ukraine, et que le gouvernement n’en avait pas repris possession.

[27]           Le juge de la citoyenneté a évoqué les préoccupations de l’agent de la citoyenneté quant à l’insuffisance des documents présentés pour établir la résidence physique au Canada. Il a conclu que la plupart de ces préoccupations avaient été réglées à l’audience. Le juge de la citoyenneté a conclu qu’il n’avait pas d’argument pour contester la déclaration du défendeur quant au nombre de jours durant lesquels il avait été physiquement présent au Canada.

[28]           Le juge de la citoyenneté s’est référé au critère de résidence énoncé dans la décision Re Pourghasemi, (1993) 19 Imm. L.R. (2d) 259 (C.F. 1re inst.) Il a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le défendeur avait démontré qu’il avait résidé au Canada pendant le nombre de jours déclarés. Par conséquent, il a conclu que le défendeur avait satisfait à l’obligation de résidence aux termes de l’alinéa 5(1)c) de la Loi.

V.                LES ARGUMENTS

A.                Observations du ministre demandeur

[29]           Le ministre demandeur soutient que le rôle d’un juge de la citoyenneté consiste à corriger les lacunes décelées dans la preuve relative au caractère suffisant de la résidence du demandeur au Canada pendant la période pertinente. Il fait valoir que, si l’audience ne constitue pas une procédure accusatoire, un juge de la citoyenneté est tenu d’analyser les documents pour déterminer la véracité de la demande de résidence.

[30]           Le ministre demandeur dit qu’il incombe au défendeur de fournir des éléments de preuve objectifs pour démontrer qu’il satisfait aux conditions de résidence, en se fondant sur les décisions dans Vega c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1079, au paragraphe 13, et Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Diallo (2012), 424 FTR 156, au paragraphe 21.

[31]           Le ministre demandeur, en se fondant sur la décision dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Raphaël (2012), 417 F.T.R. 177, au paragraphe 24, fait valoir que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en omettant d’expliquer comment il a corrigé les lacunes dans la preuve. Il fait valoir que l’appréciation de la preuve par le juge de la citoyenneté manque de transparence et ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable.

[32]           Le ministre demandeur soutient également que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en acceptant la déclaration du défendeur selon laquelle il n’avait quitté le Canada que pendant deux jours au cours de la période pertinente, en dépit du manque d’éléments de preuve objectifs de résidence. Il fait valoir que le juge de la citoyenneté n’a pas reconnu que toutes les entrées au Canada étaient consignées dans le rapport du SIED et que le rapport ne suffisait pas à établir la résidence; voir les décisions dans Zhao c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 207, et Abu-Taleb c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1389.

[33]           Le ministre demandeur allègue en outre que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en déterminant que le passeport du défendeur couvrait les quatre ans de la période pertinente. Seule une photocopie du passeport délivré le 13 juin 1998 a été versée au dossier. Il fait valoir qu’il n’y avait aucun moyen de déterminer quand cette copie avait été faite et qu’il n’était pas possible d’évaluer les déplacements du défendeur au cours de la période pertinente.

[34]           Le ministre demandeur affirme que la copie du passeport du défendeur qui se trouve dans le dossier ne comprend aucun visa ou cachet d’entrée confirmant son voyage aux États-Unis en 2007. Il soutient que les citoyens ukrainiens doivent obtenir un visa pour entrer aux États-Unis. Il affirme que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en ne tenant pas compte de ce document manquant.

[35]           Le ministre demandeur soutient également que le juge de la citoyenneté n’a pas expliqué pourquoi il avait accepté la version donnée par le défendeur, à savoir que le passeport avait été perdu et non pas repris.

[36]           Enfin, le ministre demandeur soutient que le juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que le défendeur avait satisfait à l’obligation de résidence en l’absence de preuve concernant l’emploi, le loyer ou les soins de santé durant la période pertinente et compte tenu des éléments de preuve très limités concernant les activités bancaires au Canada. Il fait valoir qu’il n’y a aucune preuve quant à la façon dont le défendeur a utilisé son compte bancaire en Ukraine pour subvenir à ses besoins au Canada.

B.                 Les arguments du défendeur

[37]           Le défendeur soutient que la décision du juge de la citoyenneté est raisonnable.

[38]           Il affirme que le juge de la citoyenneté ne disposait d’aucun élément de preuve lui donnant à penser que les détenteurs de passeports ukrainiens devaient avoir un visa de visiteur pour entrer aux États-Unis et qu’on ne peut pas lui reprocher le fait qu’il n’y a pas de cachet d’entrée dans son passeport étant donné qu’il n’a aucun contrôle sur les agents frontaliers.

[39]           Le défendeur soutient en outre que cette question n’a pas été soulevée devant le juge de la citoyenneté.

[40]           Le défendeur affirme que la décision du juge de la citoyenneté était soutenue par une explication plausible et qu’il ne disposait d’aucune preuve allant à l’encontre de sa conclusion.

VI.             DISCUSSION

[41]           L’alinéa 5(1)c) de la Loi, tel qu’il était formulé à la date où le défendeur a présenté sa demande de citoyenneté canadienne, prévoit ce qui suit :

5.(1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who:

c) est un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

(c) is a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his or her application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

[42]           La question de savoir si un demandeur a satisfait aux conditions de résidence en vertu de la Loi est une question mixte de fait et de droit qui est assujettie à la norme de contrôle de la décision raisonnable; voir les décisions dans Huang c. Canada (Citoyenneté et Immigration) (2013), 22 Imm. L.R. (4th) 180 (C.F.), aux paragraphes 26 et 27, et Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Abdallah (2012), 417 F.T.R. 13 (C.F.), au paragraphe 8.

[43]           La norme de la décision raisonnable commande que celle-ci soit justifiable, transparente et intelligible, et qu’elle fasse partie des issues possibles acceptables; voir la décision Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47.

[44]           Les motifs d’une décision satisfont à la norme de la décision raisonnable s’ils sont clairs, précis et intelligibles et s’ils indiquent pourquoi la décision a été rendue; voir l’arrêt Dunsmuir, précité.

[45]           Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), [2011] 3 RCS 708, au paragraphe 15, la Cour suprême du Canada a indiqué ce qui suit :

La cour de justice qui se demande si la décision qu’elle est en train d’examiner est raisonnable du point de vue du résultat et des motifs doit faire preuve de « respect [à l’égard] du processus décisionnel [de l’organisme juridictionnel] au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 48). Cela signifie que les tribunaux ne doivent pas substituer leurs propres motifs, mais ils peuvent, s’ils le jugent nécessaire, examiner le dossier afin d’évaluer le caractère raisonnable de l’issue.

[46]           Je suis d’accord avec le ministre demandeur pour dire que la décision est déraisonnable puisqu’elle n’est pas transparente. La décision n’aborde pas l’insuffisance de la preuve et le dossier ne soutient pas la conclusion du juge de la citoyenneté.

[47]           La décision n’est ni justifiable ni intelligible, car elle ne permet pas à une instance révisionnelle de déterminer ce qui avait poussé le juge de la citoyenneté à être convaincu que la résidence avait été établie malgré l’absence de preuve documentaire indépendante.

[48]           Aucun élément de preuve au dossier n’étaye la déclaration du défendeur selon laquelle il n’avait voyagé à l’extérieur du Canada que pendant deux jours en 2007. Rien ne prouve non plus que le défendeur a été aidé financièrement par ses parents en Ukraine et aucune preuve ne confirme la date à laquelle la validité de son passeport a été prolongée de juin 2008 à novembre 2016.

[49]           Je suis d’accord avec le ministre demandeur que le juge de la citoyenneté n’a pas expliqué pourquoi il a privilégié la preuve du défendeur au sujet de son passeport perdu aux notes versées au dossier qui indiquent que le passeport a été retenu par le gouvernement.

[50]           Compte tenu de la preuve au dossier certifié du tribunal dont disposait le juge de la citoyenneté, je suis convaincue que la décision ne satisfait pas à la norme de contrôle pertinente. Le juge de la citoyenneté a fait de nombreuses erreurs, comme il a été expliqué précédemment, et ces erreurs justifient une intervention judiciaire.

[51]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un autre décideur pour nouvel examen. Aucune question n’est soulevée pour être certifiée.

[52]           Le ministre demandeur ne requiert pas de dépens dans la présente demande de contrôle judiciaire. Conformément au pouvoir discrétionnaire qui m’est conféré à l’article 400 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.


JUGEMENT

LA COUR accueille la demande de contrôle judiciaire, et l’affaire est renvoyée à un autre décideur afin que celui-ci procède à un nouvel examen. Conformément au pouvoir discrétionnaire qui m’est conféré à l’article 400 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens. Aucune question n’est soulevée pour être certifiée.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1765-15

 

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c. OLEKSANDRE PAKHARENKO

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 avril 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 13 juillet 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS MODIFIÉS :

Le 26 juillet 2016

COMPARUTIONS :

Alison Engel-Yen

 

Pour le demandeur

 

Inna Kogan

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Inna Kogan

Avocate

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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