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Date : 20160712


Dossier : T-498-15

Référence : 2016 CF 769

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 12 juillet 2016

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

LA BANDE SIPEKNE’KATIK

demanderesse

et

JEANETTE PAUL

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   INTRODUCTION

[1]               La bande Sipekne’katik, anciennement la bande Shubenacadie (la demanderesse ou la bande), demande le contrôle judiciaire d’une décision de l’arbitre Peter Lederman, c.r. (l’arbitre) en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7. Dans sa décision datée du 5 mars 2015, l’arbitre a conclu que Jeanette Paul (la défenderesse) avait été congédiée injustement et a ordonné à la demanderesse de lui verser le salaire qui lui était dû pour la période du 3 septembre 2013 au 5 mars 2015.

II.                PARTIES

[2]               La demanderesse est une « bande » au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I-5.

[3]               La défenderesse, membre de la bande, a été embauchée à titre de directrice du Programme d’éducation postsecondaire par la demanderesse le 4 janvier 2011.

III.             HISTORIQUE PROCÉDURAL

[4]               Le 11 juin 2015, la demanderesse a déposé un avis de requête en vue de radier l’affidavit de la défenderesse ou, subsidiairement, d’obtenir une prorogation du délai pour mener les contre-interrogatoires. Par une ordonnance du protonotaire Morneau datée du 20 août 2015, la requête a été accueillie en partie et une prorogation du délai pour réaliser les contre-interrogatoires a été ordonnée.

IV.             LA PREUVE

[5]               Dans la présente demande de contrôle judiciaire, la preuve se compose des documents contenus dans le dossier certifié du tribunal et des affidavits déposés par les parties.

[6]               La demanderesse a déposé l’affidavit de M. Matthew Horton, son ancien codirecteur. La défenderesse a déposé son propre affidavit, sur lequel elle a été contre-interrogée. La transcription du contre-interrogatoire se trouve dans le dossier de demande déposé par la demanderesse.

[7]               Dans son affidavit, la défenderesse a décrit la suspension et l’enquête qui ont mené à son congédiement. Elle prétend avoir respecté toutes les politiques en place au moment où elle était en poste.

V.                FAITS ET PROCÉDURES

[8]               La défenderesse a été embauchée par la demanderesse le 4 janvier 2012 à titre de directrice du Programme d’éducation postsecondaire. Son rôle était d’offrir un soutien financier aux membres de la bande faisant des études de niveau postsecondaire.

[9]               Selon le contrat de travail daté du 24 février 2011, la défenderesse relevait directement du directeur des Finances. Ce contrat prévoyait également que la défenderesse n’avait aucun pouvoir financier indépendant ni aucune capacité d’autoriser des dépenses. L’« Annexe A » du contrat de travail décrit les responsabilités de la défenderesse.

[10]           Le 19 septembre 2012, la défenderesse a reçu une lettre de réprimande pour un incident mettant en cause une dispute avec un client, durant lequel elle a affublé ce dernier de noms vulgaires et a discuté de renseignements privés dans un contexte public. En pièces jointes à la lettre de réprimande, il y avait deux lettres datées du 10 août 2012 et du 16 août 2012, rédigées par le client impliqué dans l’incident et par Anne Walker, gestionnaire des Services aux étudiants au campus Truro du Collège communautaire de la Nouvelle-Écosse, respectivement.

[11]           Au printemps 2013, des anomalies au département des études postsecondaires ont été portées à l’attention de M. Horton. Ce dernier a parlé de ces préoccupations à M. Nathan Sack, directeur des Opérations, au conseiller juridique de la demanderesse et au Conseil de bande.

[12]           La défenderesse a été suspendue avec solde le 8 août 2013 pendant qu’un examen du Programme d’éducation postsecondaire était réalisé. On lui a dit que la demanderesse avait des préoccupations concernant son rendement. On lui a rappelé qu’elle devrait se conformer à la politique de gestion du personnel pendant qu’elle était suspendue.

[13]           Par une lettre datée du 19 août 2013, M. Nathan Sack a informé la défenderesse que plusieurs irrégularités avaient été relevées dans l’administration du Programme d’éducation postsecondaire. Cette lettre soulevait plusieurs questions sur les mesures particulières prises par la défenderesse. Elle indiquait également qu’en l’absence d’explications satisfaisantes, les irrégularités constitueraient un motif valable pour imposer une mesure disciplinaire, notamment un congédiement.

[14]           Les questions visaient l’approbation d’allocations à des élèves particuliers sans document à jour, l’approbation d’allocations de subsistance et d’allocations pour des manuels scolaires à la défenderesse pour la période allant de mai 2012 à juillet 2013 alors qu’elle n’était pas inscrite aux cours, de nombreuses demandes de chèque pour les mêmes factures et le paiement de frais non autorisés pour la fille de la défenderesse.

[15]           La demanderesse a demandé des réponses par écrit avant le 31 août 2013.

[16]           Enfin, dans la lettre du 19 août, la demanderesse a indiqué que les courriels et les messages textes envoyés par la défenderesse aux membres du Conseil de bande depuis sa suspension constituaient de l’insubordination.

[17]           La défenderesse a envoyé une lettre de réponse le 26 août 2013. Elle a d’abord mentionné que l’ensemble du processus était inéquitable pour elle, compte tenu du fait qu’on lui refusait l’accès à ses dossiers. Elle a indiqué qu’en raison d’un trouble médical, sa mémoire à court terme et sa capacité à se souvenir de l’information étaient affectées. Ce trouble médical était étayé d’une lettre d’un psychologue clinicien.

[18]           La défenderesse a soutenu que le processus était très stressant et qu’elle était victime de discrimination en fonction de sa situation familiale.

[19]           La défenderesse a ensuite déclaré que, lorsqu’elle a été embauchée pour la première fois, elle n’était pas responsable des factures et avait accès à un comité d’études chargé de confirmer les décisions du Programme. Elle a laissé entendre que l’adjoint administratif du Programme d’éducation postsecondaire était responsable de classer et de traiter les factures et que les problèmes relatifs à ces deux questions devaient lui être adressés. Par ailleurs, l’adjoint administratif relevait directement du directeur des Opérations et, par conséquent, elle n’était pas responsable de ses activités.

[20]           La défenderesse a ensuite abordé chacune des questions. Dans ses réponses, elle a fait mention de renseignements qui auraient pu être retracés si elle avait eu accès à son bureau et à ses courriels.

[21]           La défenderesse a indiqué que le département de l’Éducation était en voie de transférer ses dossiers vers un système informatisé. Elle a prétendu que tous les documents manquants à l’appui se trouvaient dans l’ordinateur et que le directeur des Opérations n’avait pas dû vérifier le fichier le plus récent.

[22]           Dans sa lettre de réponse, la défenderesse a également mentionné qu’un certain nombre des irrégularités soulevées avaient déjà été examinées par le Conseil de bande. Elle a décrit les demandes répétées de clarification comme étant du harcèlement. En réponse aux questions concernant la raison pour laquelle elle a demandé des chèques, la défenderesse a dit qu’elle n’était pas autorisée à en demander.

[23]           Dans sa conclusion, la défenderesse a indiqué qu’elle avait l’impression de devoir se conformer à des normes plus élevées que les autres employés. Elle a attribué cette perception de traitement différent à sa position sociale parce qu’elle [traduction] « n’appartenait pas à la bonne famille ».

[24]           N’étant pas satisfaite de la réponse de la défenderesse, la demanderesse lui a envoyé une lettre de congédiement le 3 septembre 2013.

[25]           Dans cette lettre, la demanderesse a énuméré les raisons suivantes pour justifier le congédiement :

–     autorisation inappropriée de paiements à elle-même et à des membres de sa famille, constituant un abus de confiance et un manquement à un devoir de fiduciaire;

–     défaut de comptabiliser des paiements autorisés à des étudiants;

–     défaut de tenir des dossiers à jour;

–     insubordination à la suite de la suspension;

–     refus de répondre aux demandes de la bande;

–     défaut d’assumer la responsabilité de ses actes.

[26]           Cette lettre se concluait en invitant la défenderesse à venir discuter de la question à une réunion du Conseil de bande le 24 septembre 2013.

[27]           La défenderesse a répondu par une lettre datée du 15 septembre 2013 dans laquelle elle a indiqué qu’elle avait l’intention d’assister à la réunion du Conseil de bande du 24 septembre afin de contester les raisons données pour justifier son congédiement. Elle a également indiqué que le chef et le Conseil lui avaient dit de traiter les factures même si elle n’avait pas les documents nécessaires et que, par le passé, d’autres avaient traité des paiements sans qu’elle le sache.

[28]           La défenderesse a assisté à la réunion du Conseil de bande le 24 septembre 2013. Le procès-verbal de la réunion montre que la question de son congédiement a fait l’objet de discussions à huis clos. Le Conseil a voté en faveur du maintien du congédiement de la défenderesse.

[29]           Entre la date de la suspension de la défenderesse et le 15 septembre 2015, M. Nathan Sack a fait de nombreuses allégations selon lesquelles la défenderesse l’avait harcelé. Le 9 septembre 2013, il a envoyé un courriel à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à propos de quatre allégations de harcèlement de la part de la défenderesse. Le 15 septembre 2013, il a transféré trois captures d’écran de son compte Facebook à la GRC. Il a également transféré au conseiller juridique de la bande un courriel que la défenderesse aurait envoyé à un autre membre de la bande à propos de sa suspension.

[30]           Le 30 octobre 2013, la défenderesse a déposé une série de plaintes officielles au Conseil de la bande contre M. Nathan Sack.

[31]           La défenderesse a déposé une plainte en vertu de l’article 240 du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, le 5 octobre 2013. Dans sa plainte, elle a soutenu avoir été congédiée injustement, avoir dû se conformer à des normes plus élevées que les autres employés, avoir été victime de discrimination en fonction de sa situation familiale et avoir été victime de harcèlement sexuel par d’autres employés. Elle a également nié avoir autorisé tout paiement inapproprié.

[32]           L’arbitre a été nommé en vertu de l’article 242 du Code canadien du travail, et une audience a été tenue le 5 décembre 2014 et le 16 janvier 2015. Ces audiences n’ont pas été enregistrées. M. Horton et M. Earl Sack, un conseiller de la bande, ont témoigné pour le compte de la demanderesse. La défenderesse a elle aussi témoigné.

VI.             DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[33]           L’arbitre a noté que le fardeau de la preuve reposait sur l’employeur, qui devait démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, le congédiement était justifié. Il a ensuite examiné en détail la preuve de M. Horton et de M. Earl Sack.

[34]           L’arbitre a commenté la preuve et les observations de la défenderesse, déclarant ceci : [traduction] « Je ne veux pas avoir l’air méchant envers Mme Paul, mais je dois faire remarquer que sa capacité à présenter sa propre défense et à cibler les questions pertinentes n’était pas particulièrement impressionnante. »

[35]           L’arbitre a ensuite examiné le rapport de vérification judiciaire Meyers Norris Penny daté du 21 avril 2014 et présenté par la défenderesse en tant qu’élément de preuve. Le rapport avait été demandé par le conseiller juridique de la bande afin d’enquêter sur le congédiement d’un autre employé et la perte alléguée de fonds. L’arbitre a conclu qu’il y avait des lacunes importantes dans la tenue des dossiers et la comptabilité de plusieurs programmes administrés par la bande.

[36]           L’arbitre s’est reporté à quelque 260 documents présentés par la défenderesse. Pour la plupart, ces documents provenaient de son compte de courriel personnel. Parmi eux, l’arbitre a trouvé deux documents particulièrement importants.

[37]           Le premier que l’arbitre a commenté était une lettre de M. Jerry Sack, ancien chef du Conseil de bande, à l’intention de Développement des ressources humaines Canada, en date du 22 janvier 2014. Dans cette lettre, M. Jerry Sack a affirmé que la nouvelle direction du bureau du Conseil de bande exigeait de la défenderesse qu’elle respecte des normes plus élevées que ce qui avait précédemment été convenu ou que ce qui lui avait été communiqué. Il a ajouté avoir informé la défenderesse que, tant qu’elle travaillait aux [traduction] « formations en cours », elle recevrait une allocation de subsistance.

[38]           Le deuxième document était une plainte à la Commission canadienne des droits de la personne datée du 7 novembre 2013, déposée par la défenderesse en vertu des articles 7 et 14 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6. Cette plainte n’a pas été traitée par la Commission canadienne des droits de la personne parce qu’elle pouvait être traitée par un arbitre nommé en vertu de l’article 240 du Code canadien du travail.

[39]           L’arbitre s’est penché sur la plainte en matière de droits de la personne. Il a conclu que celle-ci n’était pas fondée. Il a jugé qu’aucun élément de preuve n’appuyait les allégations de harcèlement sexuel. Il a par ailleurs conclu que, bien que les liens familiaux soient un élément essentiel de la vie sur la réserve Indian Brook, il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour prouver la discrimination.

[40]           En ce qui concerne la question du congédiement injuste, l’arbitre a indiqué que la question la plus importante était l’allégation de paiements frauduleux à la défenderesse et à sa fille. Quant à l’allocation de subsistance que la défenderesse s’est accordée à elle-même, l’arbitre a conclu que l’ancien chef Jerry Sack avait autorisé des paiements. Il était convaincu qu’aucune fraude n’avait été établie et a déclaré qu’il ne croyait pas [traduction] « qu’il s’agisse d’un cas évident de “fraude” ou de quelque chose de semblable ».

[41]           L’arbitre a accepté la preuve de la défenderesse selon laquelle elle a traité sa fille comme n’importe quel autre membre de la bande. Il a conclu que ces types de dépenses avaient été payés pour d’autres membres de la bande par le passé et que l’on avait demandé à la défenderesse de traiter les paiements même lorsque des documents étaient manquants.

[42]           L’arbitre a noté que la défenderesse a répété à plusieurs reprises que tous les dossiers manquants se trouvaient sur son ordinateur. M. Horton a témoigné qu’il n’avait pas vérifié l’ordinateur de la défenderesse. Compte tenu de cet élément de preuve, l’arbitre a accepté la preuve irréfutée de la défenderesse selon laquelle tous les dossiers étaient à jour et complets.

[43]           L’arbitre a conclu que la bande n’avait pas appliqué sa propre politique de mesure disciplinaire progressive. Aucun effort n’a été déployé pour rencontrer la défenderesse afin de vérifier ses dossiers et de s’assurer qu’elle savait ce que l’on attendait d’elle. Il a conclu que les étapes requises afin de justifier un congédiement pour incompétence n’avaient pas été suivies.

[44]           La défenderesse a été embauchée en fonction d’un système dans lequel des conseillers intervenaient directement dans les décisions concernant chaque étudiant. M. Horton n’a aucunement tenté de travailler avec la défenderesse pour s’assurer que les nouvelles normes étaient comprises.

[45]           L’arbitre a jugé que la défenderesse avait été congédiée injustement. Il a, par la suite, examiné les recours disponibles en vertu du paragraphe 242(2) du Code canadien du travail.

[46]           Il a tenu compte de l’animosité personnelle entre la défenderesse et les dirigeants de la bande, y compris du fait que la défenderesse avait déposé une plainte contre M. Nathan Sack et que des membres de sa famille avaient fait des commentaires méprisants à son sujet sur Facebook. À la lumière de cette animosité, il a conclu qu’une bonne relation de travail ne pouvait pas être rétablie et que la réintégration n’était pas une option viable.

[47]           L’arbitre a accordé une indemnisation d’un montant équivalant au salaire de la défenderesse à partir de la date de son congédiement, le 3 septembre 2013, jusqu’à la date de l’ordonnance, le 3 mars 2013.

VII.          LES QUESTIONS EN LITIGE

[48]           La présente demande soulève les quatre questions suivantes :

1.      L’affidavit de la demanderesse est-il recevable?

2.      Quelle est la norme de contrôle applicable?

3.      L’arbitre a-t-il manqué à l’obligation d’équité procédurale en se fondant sur une question qui n’avait pas été soulevée ou abordée par les parties?

4.      L’indemnité équivalant à 18 mois de salaire accordée par l’arbitre était-elle déraisonnable dans les circonstances?

VIII.       OBSERVATIONS

A.                Observations de la demanderesse

[49]           À titre de question préliminaire, la demanderesse conteste la recevabilité de l’affidavit déposé par la défenderesse dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire.

[50]           La demanderesse soutient que la défenderesse a joint à son affidavit environ 350 pages de nouveaux éléments qui n’ont pas été présentés à l’arbitre.

[51]           Elle fait valoir que la Cour fédérale ne peut examiner que les éléments de preuve dont le décideur initial disposait, à moins qu’il n’existe aucun autre moyen de contester la décision. La demanderesse s’est fondée sur les décisions rendues dans Association des Crabiers Acadiens Inc. c. Canada (Procureur Général) (2005), 300 F.T.R. 1, aux paragraphes 18, 20 et 21, et dans Spidel c. Canada (Procureur général) (2011), 390 F.T.R. 182, aux paragraphes 10 et 12, pour appuyer ses arguments.

[52]           La demanderesse soutient que les paragraphes suivants sont irrecevables parce qu’ils contiennent des éléments dont l’arbitre ne disposait pas :

-          paragraphe 1, dernière phrase;

-          paragraphe 2, dernière phrase;

-          paragraphes 5 à 7;

-          paragraphes 10 à 15;

-          paragraphes 18 à 20;

-          Annexe C de l’affidavit.

[53]           La demanderesse fait également valoir que l’affidavit de la défenderesse contient des énoncés non pertinents, des ouï-dire irrecevables, un argument juridique et des déclarations abusives. S’appuyant sur la décision rendue dans Duyvenbode v. Canada (Attorney General), 2009 FCA 120, au paragraphe 2, elle soutient que les éléments suivants sont irrecevables :

-          paragraphes 4 à 9;

-          paragraphes 15 et 16;

-          paragraphe 20;

-          pièce 2 de l’affidavit;

-          lettre non signée de Jerry Sack, datée du 22 mai 2008 à la pièce 8;

-          pièces 12 et 13 de l’affidavit.

[54]           Elle soutient que notre Cour ne devrait pas tenir compte des éléments de preuve irrecevables.

[55]           La demanderesse fait valoir que la norme de contrôle des questions d’équité procédurale est celle de la décision correcte, se fondant sur les décisions rendues dans Sketchley c. Canada (Procureur général), [2006] 3 C.A.F. 392, aux paragraphes 52 à 57 (CAF), et S.C.F.P. c. Ontario (Canadian Region), [2003] 1 R.C.S. 539, aux paragraphes 100 à 103.

[56]           La demanderesse allègue que le choix de recours de l’arbitre est susceptible de révision en fonction de la norme de la décision raisonnable, citant la décision rendue dans Payne c. Banque de Montréal (2013), 443 N.R. 253 (C.A.F.), au paragraphe 34.

[57]           La demanderesse soutient que l’arbitre a manqué à l’équité procédurale en tranchant la plainte de la défenderesse d’après une question qui n’avait pas été soulevée par l’une ou l’autre des parties. Cette question était celle de savoir si l’ancien chef Jerry Sack avait préalablement autorisé la défenderesse à recevoir des allocations de subsistance.

[58]           Dans le cadre d’un arbitrage en vertu de la partie III du Code canadien du travail, l’obligation d’équité procédurale inclut le droit de connaître la preuve à réfuter, le droit de produire des éléments de preuve et le droit de présenter des observations pour se défendre; voir la décision rendue dans Lahnalampi c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1136, au paragraphe 33.

[59]           La demanderesse soutient également que l’arbitre a commis une erreur en se fondant sur la lettre du 22 janvier 2014 parce qu’aucun témoin n’avait identifié la lettre ni confirmé son authenticité.

[60]           La demanderesse fait valoir que la déclaration de la défenderesse en contre-interrogatoire, selon laquelle elle avait obtenu la permission de M. Jerry Sack de recevoir des allocations de subsistance, était un commentaire isolé. Ce commentaire n’était pas suffisant pour aviser la demanderesse qu’une approbation préalable était possiblement la question clé permettant de trancher la plainte de la défenderesse.

[61]           La demanderesse soutient que l’arbitre était tenu de préciser si la question lui avait été soumise à bon droit avant de la trancher; voir la décision rendue dans Canada Post v. Pollard et al. (2008), 382 N.R. 173 (C.A.F.), aux paragraphes 6, 36 et 37. Elle ajoute que si un décideur soulève une question de sa propre initiative, celle-ci doit être présentée aux parties; voir Lahnalampi, précitée, au paragraphe 38.

[62]           La demanderesse prétend qu’en soulevant la question de l’approbation préalable, l’arbitre a dépassé une limite et a pris parti pour la défenderesse. Elle soutient que l’arbitre n’est pas resté neutre et que cela a entraîné un manquement à l’équité procédurale.

[63]           La demanderesse allègue que ce manquement lui a causé un préjudice. Elle ajoute que les conclusions de l’arbitre n’ont pas été testées dans le cadre du processus contradictoire et qu’il s’agit d’une erreur susceptible de révision; voir la décision rendue dans Rodaro v. Royal Bank of Canada (2002), 59 O.R. (3d) 74 (C.A. Ont.), aux paragraphes 62et 63. Si la demanderesse avait été mise au courant, elle aurait présenté des éléments de preuve et des arguments juridiques à l’égard de cette question.

[64]           La demanderesse conteste également le caractère raisonnable de l’indemnisation accordée par l’arbitre. Elle soutient que l’objectif de l’indemnité accordée en vertu du paragraphe 242(4) du Code canadien du travail est de replacer le plaignant dans sa position antérieure; voir la décision rendue dans O’Brien v. Muhuau Innu First Nation, [2005] C.L.A.D. No. 14, au paragraphe 42.

[65]           Selon la demanderesse, l’indemnité appropriée aurait été une indemnité de préavis. Le montant de l’indemnité, dans des circonstances similaires, équivaut à un mois de salaire et d’avantages sociaux pour chaque année de service, plus des montants nominaux pour les frais juridiques, la perte de réputation ou l’anxiété; voir la décision O’Brien, précitée.

[66]           La demanderesse soutient que les motifs de l’arbitre ne fournissent pas de justification transparente et intelligible qui permettrait aux parties de comprendre comment il en est arrivé à cette indemnité. Ni la décision ni le dossier n’appuient l’indemnité accordée.

[67]           Enfin, la demanderesse indique que l’indemnité accordée ne tient pas compte des facteurs atténuants. Un demandeur qui a été congédié injustement a droit de recouvrer des dommages-intérêts, mais seulement dans la mesure où il a pris des mesures raisonnables pour éviter d’accumuler des pertes de salaire et d’autres pertes; voir la décision rendue dans Red Deer College c. Michaels, [1976] 2 R.C.S. 324, à la page 331. L’arbitre n’a pas tenu compte des allocations d’étudiant et de l’aide sociale que la défenderesse a reçues depuis son congédiement.

B.                 Observations de la défenderesse

[68]           La défenderesse n’a pas présenté d’observation sur la recevabilité de son affidavit ou sur les normes de contrôle applicables.

[69]           Dans ses observations orales, la défenderesse a indiqué avoir contre-interrogé M. Horton à l’audience devant l’arbitre concernant la lettre du 22 janvier 2014. Elle a déclaré que la question avait été soulevée alors qu’elle interrogeait M. Horton à propos du fait qu’il avait [traduction] « bloqué » ses prestations d’assurance-emploi.

[70]           En ce qui concerne la question du caractère raisonnable de l’indemnité accordée, la défenderesse soutient qu’elle n’a pas demandé de réparation pécuniaire, mais plutôt une réintégration. Elle a fait valoir que l’indemnité accordée ne l’indemnisait pas adéquatement pour l’humiliation publique et les souffrances qu’elle a subies.

IX.             ANALYSE

[71]           La première question à aborder est la recevabilité de l’affidavit de la défenderesse.

[72]           Dans la décision Duyvenbode, précitée, la Cour d’appel fédérale a déclaré ceci au paragraphe 2 : [traduction] « Un affidavit doit être fondé sur des faits dont le déposant a personnellement connaissance. Son objectif est de présenter des faits qui sont pertinents dans le cadre du conflit, sans commentaire ni explication. » Le paragraphe 81(2) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), permet à la Cour de tirer des conclusions défavorables lorsqu’un affidavit est fondé sur des croyances.

[73]           Je ne suis pas entièrement en accord avec les observations de la demanderesse selon lesquelles les paragraphes suivants contiennent de l’information dont l’arbitre ne disposait pas : paragraphe 1, dernière phrase; paragraphe 5; et paragraphe 7.

[74]           Je suis d’accord avec la demanderesse pour dire que les paragraphes suivants de l’affidavit de la défenderesse contiennent des éléments nouveaux : paragraphe 2, dernière phrase; paragraphes 10, 13 à 15 et 18; et les pièces 2 à 4 qui sont jointes à l’affidavit.

[75]           J’abonde dans le sens de la demanderesse en ce qui concerne le fait que le paragraphe 15 n’est pas pertinent. Je conviens également que les paragraphes 4 à 6, 8 et 9 constituent des arguments juridiques inappropriés.

[76]           Bien que la demanderesse ait initialement soutenu que les segments irrecevables devraient être radiés, elle a également proposé une autre réparation, soit que l’affidavit demeure au dossier, mais qu’on lui accorde peu de poids.

[77]           Étant donné les arguments avancés et les parties irrecevables de l’affidavit de la défenderesse, j’exercerai mon pouvoir discrétionnaire et laisserai l’affidavit au dossier, mais je n’accorderai aucun poids aux éléments irrecevables.

[78]           La deuxième question à aborder est la norme de contrôle applicable. Les questions d’équité procédurale sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte; voir Sketchley, précitée, aux paragraphes 52 à 57, et Établissement de Mission c. Khela, [2014] 1 R.C.S. 502, au paragraphe 79.

[79]           Le choix de recours de l’arbitre est susceptible de contrôle selon la norme du caractère raisonnable; voir Payne, précitée, au paragraphe 34.

[80]           La norme de la décision raisonnable commande que celle-ci soit justifiable, transparente et intelligible, et qu’elle fasse partie des issues possibles acceptables; voir la décision Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47.

[81]           Un arbitre nommé en vertu du Code canadien du travail a une obligation d’équité procédurale envers les parties; voir la décision Cardinal c. Directeur de l’Établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643. Dans le cadre d’un arbitrage en vertu de la partie III du Code canadien du travail, l’obligation d’équité procédurale inclut le droit de connaître la preuve à réfuter, le droit de produire des éléments de preuve et le droit de présenter des observations pour se défendre; voir la décision rendue dans Lahnalampi, précitée, au paragraphe 33.

[82]           Dans Tervita Corporation c. Commissaire de la concurrence (2013), [2014] 2 R.C.F. 352, aux paragraphes 71 et 72, inf. pour d’autres motifs [2015] 1 R.C.S. 161, la Cour d’appel fédérale a examiné la situation où un décideur soulevait des questions qui n’ont pas été abordées par les parties.

[83]           La Cour a conclu que dans le cadre normal d’une instance, les parties sont en droit de voir le différend tranché en fonction des seules questions soulevées dans les actes de procédure. Lorsqu’un tribunal déborde le cadre des actes de procédure, il risque de priver une des parties d’une possibilité équitable de traiter des questions de preuve connexes. Cependant, un tribunal peut trancher une affaire en fonction d’une question qui n’est pas énoncée dans l’acte de procédure [traduction] « si aucune partie à l’instance n’est prise par surprise ou ne subit de préjudice ».

[84]           Dans Wolf Lake First Nation c. Young (1997), 130 F.T.R. 115, au paragraphe 35, le juge Nadon (tel était alors son titre) a conclu que le rôle d’un arbitre nommé en vertu de l’article 242 du Code canadien du travail consiste à jouer en quelque sorte « le rôle d’un juge et à ne pas descendre dans l’arène comme un procureur de la poursuite ou de la défense ».

[85]           À mon avis, les principes énoncés dans Tervita, précitée, s’appliquent également à un arbitre nommé en vertu de l’article 242 du Code canadien du travail. En jugeant la plainte de la défenderesse en fonction d’une question qui n’avait pas été clairement établie comme étant une « question » et sans donner à la demanderesse l’occasion de répondre à cette question à l’aide d’éléments de preuve ou d’arguments, l’arbitre a manqué aux principes de l’équité procédurale. Il s’agit d’une erreur susceptible de révision.

[86]           La question de savoir si M. Jerry Sack a donné à la défenderesse la permission de recevoir des allocations de subsistance et des allocations pour frais n’a pas été soulevée dans les lettres échangées entre les parties durant l’enquête et le processus de congédiement.

[87]           La défenderesse, dans sa lettre datée du 26 août 2013, a répondu aux questions concernant l’allocation de subsistance en mentionnant la lettre de son psychologue scolaire et en déclarant que tous les étudiants avaient droit à ces fonds. Elle a indiqué que ses travaux étaient en cours et que l’Université s’efforçait de trouver des mesures d’accommodement pour son invalidité.

[88]           La plainte de la défenderesse ne fait aucune mention du fait que M. Jerry Sack ou quelqu’un d’autre aurait préalablement approuvé ses allocations de subsistance.

[89]           En l’absence d’une transcription de l’audience tenue devant l’arbitre, les seules références disponibles concernant la question de l’approbation préalable sont la décision faisant l’objet du contrôle et l’affidavit de M. Horton.

[90]           L’arbitre a dit que, durant le contre-interrogatoire, la défenderesse a témoigné avoir reçu les allocations parce qu’elle était toujours considérée comme une étudiante à plein temps et que M. Jerry Sack les avait approuvées avant 2013. M. Horton, dans l’affidavit que la demanderesse a déposé dans le cadre de la présente instance, a déclaré qu’en aucun moment dans son témoignage la défenderesse n’a indiqué avoir reçu l’approbation de M. Jerry Sack.

[91]           Dans son affidavit, M. Horton a décrit l’audience devant l’arbitre. Il a déclaré avoir été interrogé et contre-interrogé les deux jours de l’audience. Il a affirmé qu’en aucun moment on ne lui a posé des questions sur le fait que M. Jerry Sack aurait autorisé la défenderesse à recevoir des allocations de subsistance et des allocations pour des manuels de cours alors qu’elle ne suivait aucun programme d’études postsecondaires.

[92]           M. Horton a également indiqué que M. Earl Sack n’a pas fait mention d’une approbation quelconque. Enfin, il a déclaré que la défenderesse n’avait pas soulevé la question de l’approbation préalable ni fait mention d’une lettre de M. Jerry Sack lorsqu’elle a présenté sa preuve pour son propre compte devant l’arbitre.

[93]           D’après les éléments qui se trouvent au dossier, je suis en accord avec la demanderesse que l’arbitre a enfreint la règle audi alteram partem en tranchant l’affaire en fonction du fait que l’allocation de subsistance de la défenderesse avait été approuvée. L’arbitre a remplacé la question centrale, qui était de savoir si la défenderesse était une étudiante à plein temps admissible à une allocation, par la question de savoir si M. Jerry Sack avait approuvé les dépenses.

[94]           À mon avis, l’arbitre a manqué à l’équité procédurale en soulevant la question pour la première fois dans sa décision. La demanderesse a subi un préjudice des suites de ce manquement parce qu’elle n’a pas eu l’occasion de présenter des éléments de preuve ou des observations à cet égard.

[95]           Même si ce manquement constitue un fondement suffisant pour accueillir la demande de contrôle judiciaire, je commenterai brièvement la deuxième erreur susceptible de révision alléguée par la demanderesse.

[96]           Le paragraphe 242(4) du Code canadien du travail est libellé ainsi :

242(4) S’il décide que le congédiement était injuste, l’arbitre peut, par ordonnance, enjoindre à l’employeur :

242(4) Where an adjudicator decides pursuant to subsection (3) that a person has been unjustly dismissed, the adjudicator may, by order, require the employer who dismissed the person to

a) de payer au plaignant une indemnité équivalant, au maximum, au salaire qu’il aurait normalement gagné s’il n’avait pas été congédié;

(a) pay the person compensation not exceeding the amount of money that is equivalent to the remuneration that would, but for the dismissal, have been paid by the employer to the person;

b) de réintégrer le plaignant dans son emploi;

(b) reinstate the person in his employ; and

c) de prendre toute autre mesure qu’il juge équitable de lui imposer et de nature à contrebalancer les effets du congédiement ou à y remédier.

(c) do any other like thing that it is equitable to require the employer to do in order to remedy or counteract any consequence of the dismissal.

 

[97]           L’arbitre avait un large pouvoir discrétionnaire lui permettant d’accorder une réparation en vertu du paragraphe 242(4). L’objectif de la réparation est d’indemniser l’employé congédié injustement et non de punir l’employeur; voir la décision Banque de Montréal c. Sherman (2012), 423 F.T.R. 286.

[98]           La jurisprudence de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale insiste sur le fait qu’un arbitre a de larges pouvoirs de redressement lui permettant d’accorder une « réparation » à un employé qui a été congédié injustement; voir les décisions rendues dans Murphy v. Purolator Courier Ltd. et al. (1993), 164 N.R. 150, et Chalifoux v. Driftpile First Nation et al. (2002), 299 N.R. 259 (C.A.F.).

[99]           L’alinéa 242(4)a) prévoit une indemnité équivalant, au maximum, au salaire que la défenderesse aurait normalement gagné si elle n’avait pas été congédiée injustement. La réparation accordée par l’arbitre en l’espèce était la réparation maximale qu’il était possible d’accorder en vertu du Code canadien du travail. Contrairement à ce que la demanderesse a fait valoir dans ses arguments, le pouvoir conféré à l’arbitre en vertu l’alinéa 242(4)a) du Code canadien du travail ne se limite pas au montant de l’indemnité de départ ou de préavis qui est dû à la défenderesse; voir les décisions rendues dans Young v. Wolf Lake Band, précitée, et Swindler v. Saskatoon Tribal Council Urban First Nations Services Inc., [2003] C.L.A.D. No. 345.

[100]       Cependant, l’arbitre n’a pas fourni de motifs quant à la façon dont il est arrivé à sa décision d’accorder l’indemnité maximale prévue au paragraphe 242(4) du Code canadien du travail. Étant donné l’omission de ce point crucial, la décision de l’arbitre ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable susmentionnée.

[101]       Les motifs de l’arbitre n’indiquent pas qu’il a tenu compte des facteurs atténuants relatifs aux pertes de la défenderesse. Ils n’abordent pas non plus la question de la faute de la défenderesse.

[102]       La décision de l’arbitre d’accorder 18 mois de salaire n’est pas transparente et intelligible.

[103]       Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’arbitre est annulée et l’affaire est renvoyée devant un autre arbitre aux fins de nouvel examen.

[104]       La demanderesse n’a pas demandé de dépens dans le cadre de la présente instance. Conformément au pouvoir discrétionnaire qui m’est conféré à l’article 400 des Règles des Cours fédérales, je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie, que la décision de l’arbitre soit annulée et que l’affaire soit renvoyée devant un autre arbitre aux fins de nouvel examen. Conformément au pouvoir discrétionnaire qui m’est conféré à l’article 400 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

« E. Heneghan »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-498-15

 

INTITULÉ :

BANDE SIPEKNE’KATIK C. JEANETTE PAUL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 9 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 12 juillet 2016

 

COMPARUTIONS :

Ronald A. Pink, c.r.

Nathan Sutherland

 

Pour la demanderesse

 

Jeanette Paul

 

Pour la défenderesse

(EN SON PROPRE NOM)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pink Larkin

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour la demanderesse

 

 

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