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Date : 20160718

Dossier : T-133-15

Référence : 2016 CF 816

[TRADUCTION FRANÇAISE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 18 juillet 2016

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

LA BANDE INDIENNE DE COLDWATER ET LE CHEF LEE SPAHAN, AGISSANT EN SA QUALITÉ DE CHEF AU NOM DE TOUS LES MEMBRES DE LADITE BANDE

demandeurs

et

LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU DÉVELOPPEMENT DU NORD

ET KINDER MORGAN CANADA INC.

défendeurs

ORDONNANCE

[1]               Par jugement et motifs confidentiels en date du 20 mai 2016, la Cour a rejeté la demande de contrôle judiciaire introduite par la Bande indienne de Coldwater (Coldwater) et son chef Lee Spahan (ci-après collectivement désignés « les demandeurs »), avec dépens en faveur du ministre des Affaires indiennes et du Développement du Nord (le ministre) et Kinder Morgan Canada Inc. (Kinder Morgan).

[2]               Le jugement et les motifs publics correspondants sont en date du 30 mai 2016.

[3]               Par directive émise le 20 mai 2016, la Cour a invité les parties à déposer des observations écrites sur les dépens dans le cas où elles n’arriveraient pas à s’entendre sur le montant des dépens à payer aux défendeurs.

[4]               Les demandeurs soutiennent dans leurs observations, en date du 1er juin 2016, que chacune des parties devrait supporter ses propres dépens. Invoquant la décision Lax Kw’alaams Indian Band c. Canada, [2009] 3 C.N.L.R. 172 (CSCB), ils font valoir que le caractère inédit de leur demande et son importance publique justifient une ordonnance en ce sens. La présente affaire était inédite, expliquent-ils, en raison de [TRADUCTION] « l’absence de précédent jurisprudentiel directement applicable à cette situation ».

[5]               Les demandeurs avancent également que l’instance mettait en cause une question d’importance publique, soit l’étendue des obligations du ministre envers les Premières Nations s’agissant de la cession d’intérêts afférents aux réserves.

[6]               Enfin, les demandeurs soutiennent que, dans le cas où des dépens seraient prononcés contre eux, leur montant devrait être symbolique.

[7]               Le ministre demande dans ses observations, en date du 13 juin 2016, une ordonnance lui octroyant des dépens – calculés en fonction de la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles) – d’un montant de 16 750,49 $, taxes et débours compris. Il affirme que la présente affaire ne justifie aucunement qu’on s’écarte de la règle générale voulant que les dépens suivent le sort du principal.

[8]               Le ministre soutient que la présente instance ne présente pas de caractère inédit : elle comportait seulement l’application de principes de droit constants aux faits de l’espèce.

[9]               Le ministre rappelle en outre que l’exception fondée sur l’intérêt public à la règle générale voulant que les dépens suivent le sort du principal ne s’applique pas au cas où la partie qui a introduit l’instance a un intérêt pécuniaire dans l’issue du litige; voir les décisions Harris c. Canada (1re inst.) (2001), [2002] 2 R.C.F. 484, au paragraphe 22, et McEwing et al. c. Canada (Procureur général) (2013), 439 F.T.R. 149. Le principal motif qui a incité les demandeurs à introduire la présente demande, explique-t-elle, était le désir d’une indemnisation plus élevée de la servitude afférente au pipeline.

[10]           Kinder Morgan avait au départ demandé l’octroi de dépens sur la base d’une indemnité complète. Dans ses observations écrites, en date du 13 juin 2016, elle sollicite une ordonnance lui accordant des dépens et débours d’un montant de 18 701,19 $, taxés selon le nombre d’unités en fonction de la colonne III du tarif B.

[11]           Kinder Morgan soutient que les demandeurs n’ont pas introduit un litige d’intérêt public, aux motifs que la présente affaire ne soulevait pas de questions transcendant les intérêts immédiats des parties et que les demandeurs avaient un intérêt pécuniaire dans l’issue de leur demande.

[12]           Les demandeurs contestent dans leurs observations en réplique, datées du 20 juin 2016, la prise en compte par Kinder Morgan des frais de déplacement de ses avocats. Ils invoquent sur ce point la décision Truehope Nutritional Support Ltd. c. Canada (Procureur général), 2013 CF 1153 (O.T.).

[13]           Les demandeurs font aussi valoir que Kinder Morgan a inclus à tort la durée des pauses dans le nombre des heures de présence à la Cour. Ils affirment en outre que le mémoire de frais du ministre devrait être réduit à un niveau conforme au milieu de la colonne III, soit à 54,75 unités.

[14]           J’aimerais d’abord formuler quelques observations sur la thèse des demandeurs selon laquelle chacune des parties devrait supporter ses propres dépens.

[15]           Le jugement prononcé le 20 mai 2016 rejetait la demande de contrôle judiciaire avec dépens. La directive émise à la même date invitait les parties à présenter des observations écrites sur les dépens, dans le cas où elles ne pourraient s’entendre sur les dépens à payer aux défendeurs. À mon avis, les demandeurs ont indûment rouvert le débat sur le point de savoir s’il convenait d’accorder des dépens aux défendeurs.

[16]           En tout état de cause, on ne m’a pas convaincue que la présente demande de contrôle judiciaire aurait mis en jeu des questions de droit ou des principes juridiques de caractère inédit, qui transcenderaient les intérêts immédiats des parties. Je constate l’absence de facteurs d’intérêt public qui suffiraient à justifier une exception à la règle générale voulant que les dépens suivent le sort du principal.

[17]           L’article 400 des Règles dispose que l’octroi des dépens relève entièrement du pouvoir discrétionnaire de la Cour. En outre, l’article 407 des mêmes Règles porte que les dépens partie-partie sont taxés en conformité avec la colonne III du tarif B, sauf ordonnance contraire de la Cour.

[18]           J’examinerai maintenant les observations des demandeurs concernant les mémoires de frais des défendeurs.

[19]           Premièrement, je ne souscris pas à la thèse des demandeurs selon laquelle Kinder Morgan aurait commis une irrégularité en prenant en compte dans le calcul des honoraires de ses avocats les frais de déplacement supportés par ceux-ci pour participer à l’audience.

[20]           Les demandeurs invoquent sur ce point la décision Truehope, précitée. Or, dans cette décision, l’officier taxateur a refusé d’octroyer les frais de déplacement des avocats au motif qu’un officier taxateur n’a pas compétence pour accepter de son propre chef la prise en compte des services à taxer relatifs aux déplacements, au titre du tarif B des Règles.

[21]           Exerçant mon pouvoir discrétionnaire à cet égard, je fais droit à cette réclamation de 420,00 $.

[22]           Deuxièmement, les demandeurs contestent le calcul proposé par Kinder Morgan du temps de présence à la Cour.

[23]           À mon avis, il y a lieu d’exclure les pauses repas du calcul du temps d’audience; voir les décisions Estensen c. Canada (Procureur général), 2009 CF 152 (O.T.), et Mercury Launch & Tug Ltd. c. Texada Quarrying Ltd., 2009 CF 331 (O.T.).

[24]           Cependant, je ne crois pas qu’il conviendrait d’omettre les brèves suspensions d’audience dans le calcul du temps de présence à la Cour.

[25]           Exerçant mon pouvoir discrétionnaire à cet égard, je réduis les éléments 14 a) et b), relatifs aux honoraires d’avocat, du mémoire de frais de Kinder Morgan pour les porter à 4,5 heures pour le premier jour et à 6 heures pour le deuxième, selon un taux de 3 unités par heure. En conséquence, l’élément 14 a) sera taxé à raison de 31,5 unités, et l’élément 14 b), à raison de 15,75 unités.

[26]           Enfin, les demandeurs soutiennent que les dépens du ministre devraient être réduits au niveau du milieu de la colonne III. Cet argument me paraissant valable, les dépens du ministre seront réduits à un montant correspondant à 55,25 unités.

[27]           En conséquence, Kinder Morgan a droit à des dépens totalisant 18 076,44 $, taxes et débours compris, et le ministre a droit à des dépens fixés à la somme de 14 949,74 $, taxes et débours également compris.

LA COUR ORDONNE QUE soient versés à Kinder Morgan Canada Inc. des dépens totalisant 18 076,44 $, taxes et débours compris, et au ministre des Affaires indiennes et du Développement du Nord des dépens fixés à la somme de 14 949,74 $, taxes et débours également compris.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

T-133-15

 

INTITULÉ :

LA BANDE INDIENNE DE COLDWATER ET LE CHEF LEE SPAHAN, AGISSANT EN SA QUALITÉ DE CHEF AU NOM DE TOUS LES MEMBRES DE LADITE BANDE c. LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU DÉVELOPPEMENT DU NORD ET KINDER MORGAN CANADA INC.

LIEU DE L’AUDIENCE :

vancouver (colombie-britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LES 18 ET 19 NOVEMBRE 2015

 

OrdONNANCE :

LA JUGE heneghan

 

DATE DES MOTIFS :

LE 18 JUILLET 2016

 

COMPARUTIONS :

Matthew Kirchner

Michelle Bradley

POUR LES DEMANDEURS

 

Maureen Killoran, c.r.

Thomas Gelbman

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(KINDER MORGAN)

James Mackenzie

Ronald Lauenstein

POUR LE DÉFENDEUER

(MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU DÉVELOPPEMENT DU NORD)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ratcliff & Company, s.r.l.

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Osler Hoskin & Harcourt, s.r.l.

 

POUR LA DÉFENDERESSE

(KINDER MORGAN)

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEur

(MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU DÉVELOPPEMENT DU NORD)

 

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