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Date : 20160915


Dossier : T-892-16

Référence : 2016 CF 1048

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 15 septembre 2016

En présence de monsieur le juge Harrington

ENTRE :

ADE OLUMIDE

demandeur

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               À la fin de l’audience d’un appel interjeté par M. Olumide contre trois décisions de la protonotaire Tabib, j’ai fait part de mon intention de rejeter l’appel, avec dépens de 700 $ adjugés aux défendeurs, le tout avec motifs à suivre. Voici donc les motifs.

[2]               D’après ce que j’ai pu comprendre de la déclaration, il est allégué que l’alinéa 67(4)c) de la Loi électorale du Canada est inconstitutionnel, et, par conséquent, une action est intentée contre le Procureur général pour omission de remédier aux lacunes de cette législation ou de l’abroger. L’alinéa 67(4)c) de la Loi prévoit que si on se porte candidat à une élection pour un parti politique, la déclaration qui doit être présentée au président d’élection doit inclure « un acte écrit, signé par les personnes autorisées par le parti politique à soutenir des personnes qui désirent se porter candidats, énonçant que la personne qui désire se porter candidat est soutenue par le parti ».

[3]               M. Olumide souhaite se présenter pour le Parti conservateur, mais il n’a pas été soutenu.

[4]               La présente action a fait l’objet d’une gestion particulière et la protonotaire Tabib a été affectée comme responsable de la gestion de l’instance.

[5]               Le litige porte sur l’ordonnance qu’elle a rendue le 16 août 2016, et non le 17 août comme l’allègue M. Olumide, une directive émise le 18 août 2016, et une autre ordonnance rendue le 6 septembre 2016.

[6]               L’avocat des intimés/défendeurs a affirmé que je ne devrais pas entendre l’appel puisqu’ils venaient juste de déposer une requête en vertu de l’article 40 de la Loi sur les Cours fédérales visant à faire déclarer M. Olumide plaideur quérulent et à obtenir une ordonnance lui interdisant d’engager ou de continuer d’autres instances devant la Cour, sauf avec autorisation. Néanmoins, j’ai décidé d’entendre l’appel. La requête visant à faire déclarer que M. Olumide a agi de façon vexatoire a été présentée en vertu de l’article 369 des Règles des Cours fédérales. Les délais dont dispose M. Olumide pour répondre ne sont pas échus.

[7]               J’ai dit à M. Olumide dès le début que je ne tiendrais pas compte des irrégularités procédurales et des défauts de déposer dans les délais et que j’aborderais la directive comme une ordonnance, puisqu’il était d’avis que la protonotaire Tabib avait émis une directive plutôt qu’une ordonnance afin de protéger sa décision du processus d’appel.

[8]               À mon avis, les trois décisions relevaient bien de la compétence du juge chargé de la gestion de l’instance. Elles étaient en réalité des ordonnances fixant un calendrier, et n’étaient pas des décisions ayant une influence déterminante sur l’issue de la cause. Les décisions n’étaient pas fondées sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits (Merck & Co., Inc. c. Apotex Inc., [2004] 2 RCF 459).

[9]               Par ailleurs, même si les décisions avaient une influence déterminante sur l’issue de la cause, ce qui n’est pas le cas, la norme de contrôle à appliquer maintenant par la Cour fédérale sur des appels visant les ordonnances émises par les protonotaires est la même norme de contrôle que celle des tribunaux de première instance, c.-à-d. que la norme applicable aux questions purement de droit est la norme de la décision correcte et suivant la norme de contrôle applicable aux conclusions de fait, ces conclusions ne peuvent être infirmées que s’il est établi que le juge de première instance a commis une « erreur manifeste et dominante » tel qu’il est énoncé dans Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 RCS 235 (Corporation de soins de la santé Hospira v. Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215).

[10]           Dans son ordonnance du 16 août, la protonotaire Tabib a remarqué que les défendeurs avaient annoncé qu’ils pourraient introduire une requête en vertu de l’article 40 de la Loi sur les Cours fédérales. Néanmoins, M. Olumide a insisté sur le fait qu’il devrait être autorisé à présenter la requête en jugement par défaut en cours en vertu de l’article 210 et la requête en aveu sur une question de fait en vertu de l’article 256.

[11]           Elle a dit :

[traduction] La présente ordonnance régit strictement le calendrier selon lequel les requêtes respectives des parties devront être présentées et entendues. Ce calendrier n’est pas destiné à régir ou à restreindre toute autre instance entre les parties devant la Cour ou devant tout autre tribunal.

[12]           Dans sa directive du 18 août 2016, la protonotaire a fait preuve de sagesse en demandant au greffe de refuser le dépôt d’un document présenté par M. Olumide puisqu’il n’était pas conforme à l’ordonnance du 16 août.

[13]           L’ordonnance du 6 septembre traite de l’intention exprimée par M. Olumide de renoncer à sa requête en jugement par défaut en vertu de l’article 210, et de présenter plutôt une requête en détermination d’une question de droit, c.-à-d. la validité de l’alinéa 67(4)c) de la Loi électorale du Canada, conformément à l’article 220. Elle a ensuite exposé l’historique de l’affaire en indiquant qu’une fois que l’affaire fait l’objet d’une gestion d’instance, le délai applicable pour une défense est décidé par le juge chargé de la gestion de l’instance. Compte tenu des circonstances, la procédure n’était pas close en raison d’un défaut de déposer une défense; il était par conséquent prématuré de déposer un avis de demande d’admission de fait en vertu de l’article 255 pour que le défaut de répondre ne déclenche pas l’admission réputée des faits conformément à l’article 256.

[14]           Le raisonnement de la protonotaire est sage et irréprochable.

[15]           M. Olumide s’était représenté lui-même, comme il était en droit de le faire. Le fait qu’il s’était représenté lui-même n’excuse ni ne justifie ses allégations scandaleuses et non fondées contre tout le monde. Il a continué d’alléguer que le Parti conservateur était raciste, bien qu’il ait été sévèrement pris à partie pour cette allégation par la juge Trudel de la Cour d’appel fédérale dans Olumide c. Parti Conservateur du Canada, 2015 CAF 218.

[16]           Il a accusé la protonotaire Tabib et d’autres membres de la Cour d’agir de manière frauduleuse et partiale. Selon lui, la protonotaire Tabib avait commis environ vingt-sept actes de fraude.

[17]           Il avait menacé (ou était-ce une promesse?) de m’amener devant le Conseil canadien de la magistrature si je rendais une décision défavorable à son sujet. À la fin de ses observations, j’ai informé l’avocat des défendeurs que je n’avais pas besoin de l’entendre, sauf quant à la question des dépens. Il a très modestement proposé que les dépens soient adjugés à 700 $. Lorsqu’il a été invité à répondre, M. Olumide a dit que je ne devrais pas adjuger de dépens à une bande d’escrocs.

[18]           Je lui ai signifié que s’il avait été avocat, je l’aurais dénoncé au Barreau. Il m’a invité à émettre une ordonnance exposant les raisons pour lesquelles il ne devrait pas être condamné pour outrage au tribunal. Je ne l’ai pas fait, mais a posteriori, j’aurais peut-être dû le faire.


ORDONNANCE

L’appel est rejeté, avec dépens en faveur des défendeurs établis à 700 $ tout inclus.

« Sean Harrington »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-892-16

 

INTITULÉ :

ADE OLUMIDE c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 SEPTEMBRE 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

DATE :

LE 15 SEPTEMBRE 2016

 

COMPARUTIONS :

Ade Olumide

121, Scottwood Grove

Dunrobin (Ontario)

 

Le demandeur

POUR SON PROPRE COMPTE

Daniel Caron

Ministère de la Justice

Ottawa (Ontario)

Pour les défendeurs

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ade Olumide

Le demandeur

POUR SON PROPRE COMPTE

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour les défendeurs

 

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