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Date : 20161017


Dossier : IMM-1089-16

Référence : 2016 CF 1148

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 17 octobre 2016

En présence de monsieur le juge Campbell

ENTRE :

RUSTAM KHAMDAMOV

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La présente demande porte sur la demande d’asile du demandeur qui allègue qu’en sa qualité de citoyen du Kirghizistan, il sera exposé à plus qu’une simple possibilité de persécution au sens de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) et à un risque probable au sens de l’article 97 s’il devait retourner dans son pays. La demande du demandeur repose sur son ethnicité ouïghoure et son militantisme politique au Kirghizistan.

[2]               Pour étayer sa demande, le demandeur a fourni un exposé extraordinairement détaillé dans son Fondement de la demande d’asile, lequel est cité dans l’annexe ci-jointe.

[3]               La Section de la protection des réfugiés (SPR) a conclu que le demandeur avait bien prouvé son identité en tant qu’Ouïghour, elle a rejeté sa demande jugeant que ses allégations d’abus par les autorités n’étaient pas crédibles et que le dossier ne renfermait pas suffisamment d’éléments de preuve pour confirmer que la discrimination à laquelle il serait exposé au Kirghizistan augmente le niveau de risque de persécution.

[4]               Le demandeur a interjeté appel de la décision de la SPR auprès de la Section d’appel des réfugiés (SAR) qui, dans sa décision du 23 février 2016 faisant actuellement l’objet d’un contrôle, l’a rejeté. La SAR a conclu que la question déterminante dans la demande du demandeur portait sur l’engagement politique du demandeur qui milite pour la cause ouïghoure (au paragraphe 17 de la décision). En ce qui concerne cette question, la SAR a rejeté la demande de protection du demandeur en raison d’une conclusion négative quant à sa crédibilité. Outre le problème de crédibilité, la SAR a également rejeté la demande du demandeur en s’appuyant sur les éléments de preuve documentaire concernant la situation dans le pays.

[5]               Je conclus que la question centrale pour se prononcer sur la présente demande de contrôle judiciaire consiste à déterminer si la conclusion négative de la SAR quant à sa crédibilité est défendable en fait et en droit.

I.                   Le processus décisionnel de la SAR relativement à la question de la crédibilité

[6]               La décision de la SAR a été rendue avant celle de la Cour d’appel fédérale dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Huruglica, 2016 CAF 93. En conséquence, au paragraphe 10 de sa décision, la SAR a appliqué la décision du juge Phelan de la Cour fédérale (2014 CF 799) de la manière suivante :

La SAR reconnaîtra et respectera les conclusions de la SPR relatives à la crédibilité et elle fera preuve de déférence à l’égard des conclusions de la SPR relatives à la crédibilité au regard desquelles la SPR dispose d’un avantage particulier pour tirer ses conclusions.

[7]               Le paragraphe 17 de la décision renferme la première déclaration faite par la SAR concernant le bien-fondé de l’appel :

La SAR a conclu que la question déterminante dans la demande du demandeur portait sur l’engagement politique du demandeur qui milite pour la cause ouïghoure. La SPR a conclu que les allégations du demandeur relativement à son militantisme politique n’étaient pas crédibles.

[8]               Après avoir conclu que la SPR avait erré en tranchant une question secondaire, à savoir que le demandeur savait ou aurait dû savoir que son codemandeur n’était pas ouïghour, la SAR a poursuivi son analyse de la conclusion de la SPR sur la crédibilité sous le titre « Failure to Tender Documents » (omission de fournir des documents). On trouvera aux paragraphes 21 et 22 de la décision les premiers énoncés qui figurent sous ce titre, à savoir :

[traduction] La SPR a tiré une conclusion défavorable du fait que le demandeur n’avait pas fourni de documents ou de dossiers prouvant ses allégations, plus particulièrement, le fait qu’il milite pour la cause ouïghoure et qu’il a été arrêté par la police, puis libéré sous réserve de l’obligation de se présenter régulièrement aux autorités.

Le demandeur prétend que la conclusion de la SPR est illogique. Il soutient qu’il est illogique de supposer qu’une personne qui a été détenue illégalement et battue ou invitée à verser des pots-de-vin puisse obtenir facilement des certificats et des documents. Il affirme également que la SPR n’a pas tenu compte de la documentation sur le pays dont elle était saisie, laquelle corrobore ses allégations de détention illégale et de corruption, particulièrement au Kirghizistan, comme l’indiquent les Country Reports on Human Rights Practices (rapports sur les pratiques en matière de droits de la personne) de 2014, datés du 25 juin 2015.

[Renvoi omis.]

[9]               Au paragraphe 23 de la décision, la SAR aborde la question de la corroboration de la manière suivante :

[traduction] La SAR n’est pas convaincue par l’argument de l’appelant à cet égard. La SAR note que l’appelant a déclaré qu’il avait été arrêté, puis libéré la dernière fois à condition de se présenter aux autorités toutes les deux semaines et de ne pas quitter le pays. L’appelant affirme qu’il s’est présenté toutes les deux semaines, tel que cela était exigé, jusqu’à ce qu’il quitte le pays. Dans son témoignage, il a expliqué qu’il n’avait pas de documents lui permettant de confirmer sa détention et le fait qu’il devait se présenter parce que ses arrestations étaient illégales. Toutefois, la SAR mentionne que le demandeur n’allègue nulle part dans son Fondement de la demande d’asile que les arrestations étaient illégales. En fait, dans l’annexe A du document sur les antécédents, il déclare qu’il a été arrêté parce qu’il était accusé de séparatisme. Même s’il est vrai qu’il allègue qu’il a été libéré sans que des accusations ne soient portées après avoir versé un pot-de-vin, la SAR conclut que cela ne constitue pas une preuve en soi que les arrestations étaient illégales ou qu’elles n’avaient pas été documentées d’une manière quelconque.

[Non souligné dans l’original.]

[Renvoi omis.]

[10]           La SAR s’est ensuite penchée sur la crédibilité du demandeur en tirant une série de conclusions d’invraisemblance.

[11]           Le paragraphe 24 se lit comme suit :

[traduction] Le demandeur cite des documents sur le pays qui confirment que la police a fréquemment recours à de fausses accusations afin d’obtenir des pots-de-vin en échange de la libération. La SAR conclut que les allégations du demandeur portent à croire que ses arrestations allaient au-delà d’un simple stratagème en vue de recueillir des pots-de-vin. Selon elle, si les arrestations en question n’avaient eu d’autre but que le versement de pots-de-vin, il n’aurait pas été nécessaire, contrairement à ce qu’allègue le demandeur, de l’obliger à se présenter aux autorités. En outre, s’il était réellement obligé de se présenter aux autorités, la SAR estime qu’il est raisonnable de s’attendre à ce que cette obligation soit documentée d’une manière quelconque afin de vérifier qu’il se présentait aux autorités, tel que cela était requis. La SAR estime que l’absence de documents corroborant ces faits mine ses allégations selon lesquelles il a été arrêté et il était tenu de se présenter aux autorités.

[Non souligné dans l’original.]

[12]           Les paragraphes 25 et 26 sont rédigés comme suit :

[traduction] La SAR conclut, en s’appuyant sur les allégations du demandeur, qu’il a obtenu un passeport valide lorsqu’il était sous surveillance policière et les forces de l’ordre et tenu de se présenter régulièrement à la police. Il allègue également qu’on lui a ordonné de ne pas quitter le pays. La SAR conclut que, vu les circonstances, il est raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur n’ait pas obtenu un passeport qui lui aurait permis de quitter le pays s’il était sous surveillance policière. La SAR note que les documents sur le pays qui se trouvent dans le dossier indiquent que l’on peut refuser de délivrer un passeport aux personnes qui présentent son profil.

L’article 46 de la loi sur la migration des Kirghizes (loi de 2000 sur la migration extérieure) expose les circonstances dans lesquelles les citoyens du Kirghizistan peuvent se voir refuser un passeport. Les passeports peuvent être refusés temporairement ou saisis si, entre autres, une personne connaît des secrets d’État, a été accusée, poursuivie ou condamnée dans une affaire criminelle, si des poursuites au civil ont été intentées contre elle, si elle a des obligations légales non résolues ou si elle ne s’est pas acquittée de ces obligations (par exemple, une pension alimentaire), si elle est considérée comme un danger par un tribunal ou si elle a fourni des renseignements inexacts. Les personnes appelées au service militaire ne reçoivent pas de nouveau passeport; mais les autorités ne confisquent pas, en raison du service militaire, ceux qui ont déjà été délivrés (Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [CISR] 2006). [Dossier de la SPR, pièce 4, cartable national de documentation pour le Kirghizistan (le 17 juillet 2015), article 3.2]

[Non souligné dans l’original.]

[13]           Le paragraphe 28 se lit comme suit :

[traduction] La SAR fait remarquer que l’article 11 de la Section de la protection des réfugiés énonce qu’un demandeur doit produire des documents admissibles qui permettent de prouver son identité et les autres éléments de sa demande d’asile. S’il ne peut le faire, le demandeur doit indiquer la raison pour laquelle il n’a pas pu fournir les documents exigés et préciser quelles mesures il a prises pour tenter de les obtenir. Comme le demandeur allègue qu’il a été détenu et torturé et qu’il est poursuivi par les membres du service de police en raison de son militantisme politique, des documents admissibles établissant ces faits constitueraient un élément essentiel de la demande. La SAR estime qu’il est raisonnable que le demandeur fournisse des documents tels que des lettres, des affidavits assermentés, des articles de journaux, des photos qui confirment ses activités politiques, ainsi que les dossiers d’arrestation, les avis de détention ou de mise en liberté émis par le service de police pour corroborer les conséquences de ses activités politiques. En dépit des questions qui lui ont été posées au sujet de la présentation de documents, le demandeur n’a fourni aucune preuve indiquant qu’il a fait des efforts pour obtenir de tels documents et il n’en a pas présenté dans le présent appel. La SAR a jugé que l’appelant n’avait pas fourni de documents ou de témoignage persuasifs pour corroborer ses allégations à cet égard.

[Non souligné dans l’original.]

[14]           Mettant ses conclusions sur l’invraisemblance en application, la SAR a formulé ses conclusions aux paragraphes 29 et 33 :

[traduction] S’appuyant sur ce qui précède, la SAR conclut que les allégations du demandeur selon lesquelles il a été arrêté et obligé de se présenter à la police ne sont pas crédibles.

[…]

Nonobstant les conclusions indéfendables de la SPR, la SAR conclut, en s’appuyant sur les conclusions susmentionnées et sur la prépondérance des probabilités [sic], que les allégations du demandeur selon lesquelles il était un militant politique au Kirghizistan et qu’il risquait, et risque toujours, d’être persécuté pour son militantisme politique ne sont pas crédibles.

II.                Le droit sur la question de la crédibilité

[15]           Pour ce qui est de la question déterminante, à savoir effectuer une évaluation indépendante de la décision de la SPR, je conclus que le SAR devait évaluer le témoignage sous serment du demandeur conformément à la décision dans Valtchev c. Canada (Ministre de la citoyenneté et de l’immigration), 2001 CFPI 776, aux paragraphes 6 et 7 :

Le tribunal a fait allusion au principe posé dans l’arrêt Maldonado c. M.E.I., [1980] 2 C.F. 302 (C.A.), à la page 305, suivant lequel lorsqu’un revendicateur du statut de réfugié affirme la véracité de certaines allégations, ces allégations sont présumées véridiques sauf s’il existe des raisons de douter de leur véracité. Le tribunal n’a cependant pas appliqué le principe dégagé dans l’arrêt Maldonado au demandeur et a écarté son témoignage à plusieurs reprises en répétant qu’il lui apparaissait en grande partie invraisemblable. Qui plus est, le tribunal a substitué à plusieurs reprises sa propre version des faits à celle du demandeur sans invoquer d’éléments de preuve pour justifier ses conclusions.

Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu’il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l’invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c’est-à-dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s’attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le revendicateur le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu’il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les revendicateurs proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu’on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu’on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur. [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22].

[Non souligné dans l’original.]

III.             Analyse de la conclusion de la SAR selon la loi

A.                Corroboration

[16]           En appliquant la décision dans Maldonado, pour que la SAR puisse exiger que le demandeur produise des éléments de preuve corroborant sa demande, elle devait tout d’abord trouver des raisons de douter de la véracité de son témoignage sous serment. J’estime que l’erreur cardinale dans la décision de la SAR réside dans le fait qu’elle n’a pas respecté ce simple point de droit. Plutôt que de déterminer clairement la raison en lien avec la preuve pour réfuter la présomption que le demandeur disait la vérité lorsqu’il a présenté son témoignage, la SAR a cherché une corroboration dans une analyse circulaire erronée. En d’autres termes, le fait que le demandeur n’ait pas déposé d’éléments de preuve documentaire corroborants à l’appui de sa demande a conduit la SAR à conclure qu’il s’agissait d’une raison de douter du témoignage sous serment du demandeur, et que de ce fait, le demandeur devait produire une preuve corroborante pour éviter que sa demande soit rejetée. Je conclus qu’à elle seule, cette erreur fait en sorte que la décision de la SAR n’est pas raisonnable.

[17]           En outre, quoi qu’il en soit, pendant qu’elle cherchait une corroboration, la SAR a tiré des conclusions invraisemblables qui ne peuvent être défendues en droit. L’analyse ci-après traite chacune des conclusions précitées dans la Section I de ces motifs.

B.                 Invraisemblance

[18]           En ce qui concerne le paragraphe 23, le demandeur a choisi le terme [traduction] « illégal » pour qualifier la conduite de la police parce que, de son point de vue, celle-ci cherchait à réprimer ses activités de militantisme non conformes au droit du pays. L’importance que la SAR a accordée au choix de termes du demandeur montre qu’elle n’était pas disposée à admettre le point de vue du demandeur. Quoi qu’il en soit, je conclus que l’effort consacré au choix de termes ne peut se traduire par une conclusion défavorable concernant la crédibilité du demandeur.

[19]           La déclaration au paragraphe 24 n’est rien de plus qu’une spéculation non étayée.

[20]           Quant aux paragraphes 25 et 26, la SAR a conclu qu’il était invraisemblable que, étant un militant politique, le demandeur puisse se procurer un passeport et l’utiliser pour quitter le pays. Selon la décision dans Valtchev, pour en venir à une conclusion d’invraisemblance, la SAR devait appliquer la preuve documentaire montrant que le demandeur n’aurait pas pu obtenir un passeport pendant la période où il se livrait à des activités politiques.

[21]           À mon avis, les éléments de preuve sur lesquels s’est appuyée la SAR ne confirment pas que, s’il était surveillé par la police, le demandeur n’aurait pas pu obtenir un passeport lui permettant de quitter le pays. Je conclus que la preuve offerte montre seulement qu’il n’aurait peut-être pas obtenu de passeport. Il n’en reste pas moins qu’il a obtenu un passeport. Je conclus que les éléments de preuve sur lesquels la SAR s’est appuyée ne confirment pas, selon la prépondérance des probabilités, la conclusion d’invraisemblance avancée.

[22]           En ce qui concerne la déclaration au paragraphe 28, le demandeur a déposé un témoignage sous serment selon lequel il était impossible de satisfaire les attentes de la SAR. En ce qui concerne les lettres, les affidavits, les articles de journaux et les photos, le demandeur a déclaré dans son témoignage qu’il ne pouvait en déposer aucun. En ce qui concerne le fait qu’il n’ait pas obtenu les divers dossiers de la police, le demandeur invoque comme raison qu’il est déraisonnable et illogique de s’attendre à ce qu’il soumette une telle demande à ses persécuteurs. J’estime qu’il n’existe aucun fondement sur lequel la SAR peut s’appuyer pour conclure qu’il était invraisemblable que le demandeur ne puisse pas se conformer à ses attentes et que son incapacité à le faire appuie une conclusion défavorable relativement à sa crédibilité.

IV.             Conclusion

[23]           Pour les motifs décrits ci-dessus, je conclus que la conclusion de la SAR, en ce qui concerne la crédibilité du demandeur, repose sur une erreur fondamentale mixte de fait et de droit qui fait en sorte que la décision faisant l’objet du contrôle est déraisonnable.


JUGEMENT

LA COUR infirme la décision à l’examen, et l’affaire est renvoyée aux fins de réexamen à un tribunal différemment constitué.

Il n’a aucune question à certifier.

« Douglas R. Campbell »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-1089-16

 

INTITULÉ :

RUSTAM KHAMDAMOV c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 octobre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge Campbell

 

DATE DES MOTIFS :

Le 17 octobre 2016

 

COMPARUTIONS :

John Cintosun

Pour le demandeur

 

Meva Motwani

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John Cintosun

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur

 

 


Annexe

[Dossier du tribunal, aux pages 202 à 208]

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