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Date : 20160829


Dossier : IMM-405-16

Référence : 2016 CF 978

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 29 août 2016

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

KRISHNA PRASAD POUDEL

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Le ministre a appelé de la décision positive de la Section de la protection des réfugiés (SPR) concernant la demande de protection qu’a déposée M. Poudel à la Section d’appel des réfugiés (SAR). La SPR a établi que M. Poudel était crédible et qu’il était, comme il l’a allégué, citoyen du Népal et qu’il serait en danger s’il y retournait.

[2]               Le ministre a présenté de nouveaux éléments de preuve qui ont soulevé des questions concernant à la fois la crédibilité et la nationalité de M. Poudel. Plus précisément, le ministre a présenté des données biométriques provenant des États-Unis et du Royaume-Uni qui ont permis de démontrer que M. Poudel a utilisé un passeport indien au nom de Sandil lorsqu’il a déposé des demandes de visa de non-immigrant en 2013 à New Delhi pour entrer aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les éléments de preuve ont démontré que des visas ont été délivrés à M. Poudel pour entrer aux États-Unis en décembre 2013 et en mai 2014. De plus, une recherche dans la base de données du Système de soutien des opérations des bureaux locaux (SSOBL) de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a révélé que M. Poudel a également fait une demande de visa temporaire au Canada depuis New Delhi en utilisant le nom Sandil, visa qu’il a obtenu en août 2013. Il a tenté d’entrer au Canada une seconde fois en septembre 2013, à l’aide d’un visa, mais s’est vu refuser l’entrée lorsque l’on a découvert qu’il était en possession de vidéos pornographiques d’enfants et d’autres vidéos de personnes ayant des rapports sexuels avec des animaux.

[3]               M. Poudel est entré au Canada en janvier 2015 en utilisant le passeport de Parmjeet Singh. Devant la SPR, il a déclaré sous serment qu’il n’était pas Parmjeet Singh mais bien Krishna Prasad Poudel. Il était en possession d’un passeport népalais à ce nom.

[4]               La SAR a autorisé l’appel du ministre, en concluant que [traduction] « si l’on se fonde sur l’ensemble des éléments de preuve, [M. Poudel] n’a pas réussi à fournir suffisamment de documents et de preuve fiables pour établir son identité, comme l’exigent l’article 106 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) » et la règle 11 des Règles de la Section de la protection des réfugiés »

[5]               M. Poudel indique qu’il n’y a qu’une seule question à se poser relativement à cette demande, à savoir [traduction] « est-ce que la SAR s’est trompée en concluant qu’[il] n’a pas réussi établir son identité? » Plus précisément, la question est de savoir si le fait que la SAR en soit venue à la conclusion que M. Poudel n’a pas réussi à établir son identité était une décision raisonnable si l’on tient compte du dossier qui lui a été présenté, parce que la norme de contrôle qui s’applique à la décision de la SAR est celle de la raisonnabilité.

[6]               M. Poudel soutient que la conclusion de la SAR, à savoir, [traduction] « selon la prépondérance des probabilités, le passeport indien au nom de Sandil utilisé par [M. Poudel] n’était pas un passeport frauduleux, mais plutôt un vrai passeport qui lui avait été délivré » est irraisonnable. La décision de la SAR repose, en partie, sur son observation que le passeport en question avait été examiné minutieusement par les autorités de l’Immigration d’au moins quatre pays lors du processus de demandes de visas et qu’il avait été examiné également par les organismes de contrôle frontalier de trois pays lorsqu’il a utilisé le passeport pour entrer dans ces pays. La SAR conclue qu’ [traduction« il est raisonnable de croire que si le passeport avait été frauduleux comme [M. Poudel] le prétend, au moins l’un des pays en cause aurait découvert qu’il s’agissait d’un passeport frauduleux ». Je ne suis pas convaincu que la conclusion de la SAR et le raisonnement sur lequel elle repose sont irraisonnables.

[7]               M. Poudel a présenté d’autres documents à la SAR pour établir et confirmer qu’il est un citoyen du Népal. La SAR n’y a accordé aucune valeur à la lumière des éléments de preuve de M. Poudel selon lesquels il a obtenu et utilisé des documents frauduleux par le passé et parce que la production de documents frauduleux au Népal est courante. Comme la SAR l’a également indiqué [traduction] « même si les documents présentés... sont de vrais documents, cela ne prouve pas qu’il ne les a pas obtenus de façon illégale ou qu’il n’a pas d’autres identités dans d’autres pays comme l’Inde ». Selon moi, ce raisonnement est irréprochable si l’on tient compte de la façon dont M. Poudel se procure et utilise ces documents lorsqu’il se rend dans d’autres pays.

[8]               Si M. Poudel avait divulgué ces autres documents d’identité et ses voyages à l’extérieur du Népal dans son formulaire Fondement de la demande d’asile ou lors de son audience devant la SPR, il aurait peut-être réussi à convaincre la SAR de son honnêteté. Mais il ne l’a pas fait, et la SAR n’a pas accepté son explication, à savoir que son conseiller lui avait dit d’attendre d’être devant la SPR pour en parler. À la lumière de ce conseil, il n’était pas irraisonnable de trouver que sa réponse, à savoir qu’il n’a pas divulgué cette information à la SPR parce qu’on ne lui a pas posé de questions à ce sujet, n’est pas crédible. Je suis d’accord avec la SAR, et cette conclusion n’est pas contestée par M. Poudel : son explication manque de crédibilité puisqu’il a signé un formulaire Fondement de la demande d’asile et qu’il a attesté que les renseignements fournis étaient [traduction] « complets, véridiques et exacts ».

[9]               Il n’est donc guère surprenant et très certainement pas irraisonnable, sachant que trois passeports différents ont été utilisés et que le demandeur n’a pas divulgué ce fait, que l’on juge que son identité n’a pas été établie.

[10]           Aucune des parties n’a proposé de question à certifier et il n’y en a aucune.


JUGEMENT

LA COUR rejette la demande, et aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-405-16

 

INTITULÉ :

KRISHNA PRASAD POUDEL c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 juillet 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 29 août 2016

 

COMPARUTIONS :

Michael Korman

Pour le demandeur

 

Veronica Cham

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Otis & Korman

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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