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Date : 20161104


Dossier : IMM-1990-16

Référence : 2016 CF 1237

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 4 novembre 2016

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

HAO WU

BINYAN CAO

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié datée du 18 avril 2016 dans laquelle elle a conclu que les demandeurs  n’étaient pas des réfugiés au sens de la Convention ou des personnes ayant besoin de protection et que leur demande était dépourvue d’un minimum de fondement (la décision). La présente demande a été présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27. (la LIPR).

I.                   CONTEXTE

[2]               Hao Wu (la demanderesse) et son époux Binyan Cao (le demandeur) sont tous deux des citoyens de la Chine âgés de 30 ans. Ils ont une fille. Les demandeurs ont présenté une demande d’asile sur la base de leur pratique du Falun Gong. Ils affirment qu’ils ont commencé à pratiquer le Falun Gong chez eux en août 2014. Puis, en novembre de cette année-là, ils se sont joints à un groupe de pratique. Ils sont partis en vacances au Canada en provenance de Chine le 23 septembre 2015 et, le 5 octobre, le Bureau de la sécurité publique (le BSP) avait fait une descente dans le lieu de rencontre de leur groupe de pratique.

[3]               Le 7 octobre, la mère de la demanderesse (la mère), qui était au domicile des demandeurs pour s’occuper de leur fille, a reçu la visite du BSP. Le BSP a fouillé la maison, a déclaré que les demandeurs étaient recherchés pour leur participation au Falun Gong, et qu’ils ne pouvaient pas s’échapper. La mère a dit au BSP que les demandeurs étaient à l’étranger. Le BSP a rendu visite à la mère à nouveau à deux reprises, mais n’a laissé aucun document, comme une convocation. Il a toutefois demandé à la mère de dire aux demandeurs de communiquer avec le BSP à leur retour en Chine.

II.                LA DÉCISION

[4]               La SPR n’a pas accepté la preuve des demandeurs selon laquelle le BSP ne leur avait laissé aucun document. La SPR a conclu que cela était en contradiction avec la documentation sur la situation du pays qui indique que les autorités émettent des assignations dans le cadre des enquêtes criminelles, y compris celles liées à l’appartenance à des cultes comme le Falun Gong. La SPR a admis que la pratique de laisser des documents n’était pas toujours respectée, mais a conclu que les trois visites et la perquisition au domicile démontraient que le BSP était très intéressé par les demandeurs. Dans ces circonstances, la SPR a conclu qu’une assignation ou un mandat aurait été laissé.

[5]               La SPR a jugé invraisemblable que le BSP ait rendu visite à la mère trois fois. La SPR a relevé que le BSP, étant donné son accès à la banque de données du Bouclier d’or aurait dû savoir que les demandeurs avaient quitté le pays avant leur première visite à la m. La SPR a donc conclu que le BSP n’avait pas demandé où étaient les demandeurs et n’avait pas averti la mère que ceux-ci ne pourraient pas s’échapper.

[6]               Pour ces motifs, la SPR a conclu que le BSP n’avait jamais rendu visite à la mère.

[7]               La SPR a également conclu que les demandeurs n’avaient jamais participé à un groupe de pratique du Falun Gong. La SPR a conclu que le témoignage du demandeur concernant les mesures de sécurité prises pendant la pratique du Falun Gong était « incohérent et circulaire.» Il a déclaré que le groupe n’avait pas pratiqué le cinquième exercice parce que les membres auraient eu à enlever leurs chaussures et à s’asseoir à même le sol. Cela aurait rendu la fuite difficile si la séance avait fait l’objet d’une descente du BSP. Il a reconnu que la pratique à domicile était sécuritaire. La SPR n’a pas accepté que les demandeurs avaient pris les risques associés à la pratique de groupe alors qu’ils pouvaient pratiquer en toute sécurité à la maison.

[8]               Les demandeurs ont produit une lettre de la mère, qui n’était ni authentifiée ni notariée. Elle a confirmé l’information contenue dans leur formulaire Fondement de la demande d’asile et dans leur déposition orale. Cependant, la SPR a relevé que la mère n’ayant pas été appelée à comparaître comme témoin, elle ne pouvait donc pas évaluer la crédibilité de ses déclarations. Par conséquent, la SPR a accordé très peu d’importance à la lettre. Il y a lieu de noter que seule la mère aurait pu donner une preuve originale concernant les visites du BSP. Le témoignage des demandeurs sur cette question n’était que du ouï-dire, basé sur le compte rendu des événements de la mère.

[9]               Les demandeurs ont aussi présenté une lettre concernant leur pratique du Falun Gong au Canada. L’auteur a indiqué qu’il a rencontré les demandeurs pendant qu’ils pratiquaient ensemble dans un parc. Il a déclaré que peu après leur arrivée, ceux-ci semblaient être de véritables praticiens expérimentés. La SPR a accordé très peu d’importance à cette lettre parce que son auteur n’avait pas été appelé à témoigner. La SPR a conclu que la pratique des demandeurs au Canada n’était pas sincère, mais était une fabrication pour appuyer leur demande d’asile.

[10]           Enfin, la SPR a conclu que la demande n’avait aucun fondement crédible.

III.             COMMENTAIRES ET CONCLUSIONS

[11]           La SPR a conclu que le BSP n’avait jamais rendu visite à la mère et n’était nullement intéressé par les demandeurs, puisqu’ils n’avaient jamais participé à un groupe de pratique en Chine. Elle a aussi conclu que la participation dans un tel groupe au Canada n’était pas sincère. À mon avis, les faits sont en mesure d’appuyer ces conclusions. Il n’était pas déraisonnable de conclure que le BSP aurait laissé des documents après une perquisition domiciliaire et trois visites. En outre, il n’était pas déraisonnable de douter que le BSP s’était rendu à leur domicile. Étant donné son accès à la banque de données du Bouclier d’or, le BSP aurait su peu de temps après la descente que les demandeurs n’étaient pas en Chine. Par ailleurs, la seule raison pour laquelle le BSP s’intéressait aux demandeurs était leur participation au groupe de pratique. Une fois que la SPR a rejeté cette preuve parce que le demandeur ne pouvait pas décrire de façon cohérente pourquoi les demandeurs avaient pris les risques liés à la pratique de groupe, il n’y avait aucune raison pour le BSP de manifester un quelconque intérêt vis-à-vis des demandeurs.

[12]           Elle a aussi conclu que le rejet par la SPR des lettres de la mère et du praticien du Falun Gong au Canada était raisonnable. La mère était le seul témoin en mesure d’apporter la preuve originale concernant les visites du BSP et le praticien de Toronto était probablement disponible pour témoigner. La SPR était en droit de rejeter les lettres de personnes non assermentées lorsque les demandeurs ont omis de les citer pour livrer leur témoignage.

[13]           Par conséquent, la conclusion qu’il n’existait aucun élément de preuve crédible ou digne de foi qui pouvait soutenir la demande des demandeurs était aussi raisonnable.

IV.             CERTIFICATION

[14]           Aucune question n’a été posée aux fins de certification.

 


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire.

« Sandra J. Simpson »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-1990-16

 

INTITULÉ :

HAO WU, BINYAN CAO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 1 er novembre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :

Le 4 novembre 2016

COMPARUTIONS :

Mohamed Mahdi

 

Pour les demandeurs

Tessa Cheer

 

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kaminker Weinstock Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

Pour le défendeur

 

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