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Date : 20161014


Dossier : T-1540-15

Référence : 2016 CF 1133

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 14 octobre 2016

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

ITKA DALFEN

demanderesse

et

BANQUE DE MONTRÉAL

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               Le 25 juillet 2016, la Cour a fait droit à la requête de la Banque de Montréal en vue d’obtenir la radiation de la déclaration modifiée d’Itka Dalfen, conformément à l’article 221 des Règles des Cours fédérales. DORS/98-106 (décision Dalfen v. Bank of Montreal, 2016 FC 869). La Cour a autorisé les parties à présenter leurs observations écrites sur les dépens dans un délai de 30 jours. Les parties ont présenté leurs observations le 24 août 2016.

[2]               Le bref historique procédural de ce recours collectif proposé peut se résumer comme suit : Mme Dalfen a produit une déclaration le 14 septembre 2015 désignant la Banque de Montréal et Sa Majesté la Reine comme défenderesses. Le 8 mars 2016, Mme Dalfen a déposé une déclaration modifiée. Le 16 mars 2016, la Banque de Montréal a sollicité une ordonnance en radiation de la déclaration modifiée. Le 18 mars 2016, la Cour a accordé à Mme Dalfen l’autorisation de se désister de sa demande présentée contre la Couronne. Le 25 juillet 2016, la Cour a accueilli la requête de la Banque de Montréal en vue d’obtenir la radiation de la déclaration modifiée de Mme Dalfen.

[3]               La Banque de Montréal a eu gain de cause dans sa requête en vue d’obtenir la radiation de la déclaration modifiée de Mme Dalfen et devrait normalement avoir droit aux dépens (décision Paradis Honey Ltd. c. Canada (Procureur général), 2014 CF 215, au paragraphe 122). En dépit de la durée relativement courte de la présente instance, la Banque de Montréal affirme avoir engagé des frais de 108 000 $. La Banque de Montréal demande à se faire indemniser pour tous ces frais judiciaires. À titre subsidiaire, la Banque de Montréal sollicite des dépens de 65 000 $ qui selon elle, sont comparables aux dépens partie-partie qui seraient adjugés par la Cour supérieure de justice de l’Ontario. La Banque de Montréal n’a pas fourni de mémoire de frais provisoire ni d’éléments de preuve à l’appui pour justifier sa demande de dépens extraordinaire.

[4]               Mme Dalfen soutient qu’aucuns dépens ne devraient être adjugés à la Banque de Montréal pour les raisons suivantes : a) le recours collectif proposé a potentiellement profité à de nombreux clients de la Banque, mais uniquement à Mme Dalfen; b) l’intérêt pécuniaire de Mme Dalfen est négligeable si on le compare à celui du recours collectif proposé dans son ensemble; c) les questions juridiques étaient nouvelles; d) la Banque de Montréal est en meilleure position pour absorber les dépens; e) Mme Dalfen a encouragé la détermination efficace de la question de la compétence par requête écrite sans preuve, contre-interrogatoire ni comparution.

[5]               L’adjudication des dépens, y compris le montant, est une question qui relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour (paragraphe 400(1); arrêt Canada (Procureur général) c. Rapiscan Systems Inc., 2015 CAF 97, au paragraphe 10). En décidant de l’adjudication des dépens, la Cour est guidée par les facteurs énoncés au paragraphe 400(3). Les facteurs potentiellement pertinents en l’espèce comprennent les suivants :

           le résultat de l’instance;

           l’importance et la complexité des questions en litige;

           toute offre écrite de règlement;

           la charge de travail;

           le fait que l’intérêt public dans la résolution judiciaire de l’instance justifie une adjudication particulière des dépens;

           la conduite d’une partie qui a eu pour effet d’abréger ou de prolonger inutilement la durée de l’instance.

[6]               L’adjudication de frais judiciaires n’a lieu que dans des circonstances exceptionnelles, y compris dans le cas d’une conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante (arrêt Québec (Procureur général) c. Lacombe, 2010 CSC 38, au paragraphe 67). En l’absence de facteurs particuliers, les dépens sont en général taxés en conformité avec le tarif B des Règles (arrêt Wihksne c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 356, au paragraphe 11; décision Dimplex North America Ltd c. CFM Corporation 2006 CF 1403, aux paragraphes 8 à 12, conf. par 2007 CAF 278.

[7]               La Banque de Montréal n’a pas pu démontrer de conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante de la part de Mme Dalfen. Elle n’a pas non plus avancé de facteurs particuliers qui justifieraient une dérogation au tarif habituel.

[8]               L’adjudication récente de dépens à la suite d’une requête couronnée de succès en vue d’obtenir la radiation d’une déclaration à un stade préliminaire offre une fourchette habituelle allant de 500 $ à 2 500 $ (voir, p. ex., les décisions Bouchard v Canada, 2016 FC 983; Dickson v Canada, 2016 FC 836 et Olumide c. Canada, 2016 CF 558). Même dans des cas où des dépens élevés ont été adjugés pour réprimander une partie n’ayant pas eu gain de cause pour une conduite inappropriée, l’adjudication était modeste en comparaison. Dans la décision Thompson Bey v Kershman, 2016 FC 1093, la protonotaire Tabib a radié la déclaration du demandeur au motif qu’elle était vexatoire, scandaleuse, frivole et constituait un abus de procédure. Elle a adjugé des dépens de 5 000 $. Dans la décision Shebib c. Canada, 2016 CF 539, le juge Hughes a adjugé 5 000 $ à chaque groupe de défendeurs dans une affaire où il a conclu que les demandeurs avaient été négligents et même insouciants relativement à la désignation des défendeurs.

[9]               Appliquant les facteurs pertinents en l’espèce énoncés au paragraphe 400(3), la requête de la Banque de Montréal en vue d’obtenir la radiation de la déclaration de Mme Dalfen a été entièrement accueillie. Les questions en litige étaient d’une complexité modérée. Bien que l’affaire ait potentiellement transcendé les seuls intérêts de Mme Dalfen, son bien-fondé était douteux et l’intérêt public était également faible. La Banque de Montréal a offert de régler l’affaire en permettant un désistement sans frais. La charge de travail était modeste. L’estimation des dépens Mme Dalfen sur la base d’une indemnisation substantielle d’environ 5 000 $ est considérablement plus raisonnable que l’estimation de la Banque de Montréal de plus de 100 000 $. La conduite des parties est un facteur neutre.

[10]           Compte tenu de ce qui précède et des décisions antérieures de la Cour dans des affaires comparables, des dépens forfaitaires de 2 000 $ sont adjugés à la Banque de Montréal.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que des dépens forfaitaires de 2 000 $ soient payés à la Banque de Montréal.

« Simon Fothergill »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1540-15

 

INTITULÉ :

ITKA DALFEN c. BANQUE DE MONTRÉAL

 

Ordonnance ET motifs :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 14 octobre 2016

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Kenneth M. Alexander

Henry Juroviesky

 

Pour la DEMANDERESSE

 

Nathan J. Shaheen

Pour la DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Henry Juroviesky

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour  LA DEMANDERESSE

 

Bennett Jones LLP

Toronto (Ontario)

Pour la DÉFENDERESSE

 

 

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