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Date : 20170111


Dossier : T-2044-15

Référence : 2017 CF 23

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 11 janvier 2017

En présence de madame la juge St-Louis

ENTRE :

DE WOLF MARITIME SAFETY B.V.

demanderesse

et

TRAFFIC-TECH INTERNATIONAL INC.

défenderesse (requérante)

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               La présente instance constitue la seconde étape de la requête en vue d’une décision préliminaire sur des points de droit déposée par Traffic-Tech International Inc. (Traffic-Tech) en application de l’article 22 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, et de l’alinéa 220(1)a) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [Règles des Cours fédérales].

[2]               Le 17 août 2016, le protonotaire Morneau, rendant une décision à la première étape en vertu du paragraphe 220(2) des Règles des Cours fédérales, a accueilli la requête, et ordonné que la Cour statue sur les deux points présentés par Traffic-Tech.

II.                Contexte

[3]               En décembre 2015, la demanderesse, De Wolf Maritime Safety B.V. (De Wolf), a introduit une action contre la défenderesse, Traffic-Tech, puis a signifié et déposé sa déclaration initiale in personam, qu’elle a ensuite modifiée en septembre 2016.

[4]               En résumé, De Wolf prétend que Traffic-Tech a omis de transporter sa cargaison dans la cale, que la perte découle du défaut de Traffic-Tech de procéder de manière sécuritaire au transport, au soin, au déchargement, au stockage et à la livraison de sa cargaison en bon état. Elle prétend en outre que Traffic-Tech a manqué à ses obligations contractuelles et a fait preuve de négligence grave et, point important en l’espèce, que Traffic-Tech n’est pas autorisée à invoquer les exonérations ou limitations prévues par les Règles de La Haye-Visby, qui constituent l’annexe 3 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6 (Loi sur la responsabilité en matière maritime).

[5]               De Wolf demande que Traffic-Tech soit condamnée conjointement et solidairement à lui verser la somme de 71 706,00 € (ou l’équivalent canadien de 98 896,92 $ au taux de 1,3792 en vigueur le 23 juin 2015), plus les intérêts et les frais, et à toute autre mesure de réparation que la Cour pourrait juger appropriée dans les circonstances. Ce montant représente la valeur des marchandises expédiées de Vancouver à Rotterdam, marchandises perdues à la mer et qui ne sont par conséquent jamais arrivées au port de livraison.

[6]               Dans sa défense, Traffic-Tech allègue qu’en vertu du connaissement et des Règles de La Haye-Visby, sa responsabilité à l’égard de De Wolf peut se limiter à un montant ne dépassant pas 666,67 unités de compte par colis ou unité, ou 2 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus élevée étant applicable, que les dommages réclamés sont excessifs et représentent des dommages indirects, et que De Wolf n’a pris aucune mesure adéquate pour atténuer ces dommages.

III.             Faits

[7]               Selon leur exposé conjoint des faits, les parties conviennent que pendant la période en question, De Wolf était la propriétaire et la consignataire d’une cargaison décrite comme étant [traduction] « un Zodiac en une pièce avec des pièces de rechange », placée dans un conteneur (TCLU4132019/3269653), lui-même chargé à bord du navire Cap Jackson à Vancouver, au Canada, pour être livré à Rotterdam, aux Pays-Bas.

[8]               Le conteneur a été transporté en vertu d’un connaissement portant le numéro 40020710, émis par Traffic-Tech le 6 décembre 2014. Le connaissement n’indiquait pas que le conteneur renfermant la cargaison serait transporté « en pontée », alors que la cargaison a été, en fait, ainsi transportée.

[9]               Le conteneur a été perdu durant le voyage, n’est pas arrivé à Rotterdam, et la perte encourue par De Wolf s’élève à 71 706,00 € ou 98 896,92 $ CA, au taux de change de 1,3792 calculé le 23 juin 2015.

[10]           À l’audience, les parties ont également confirmé que la nature et la valeur des marchandises n’avaient pas été déclarées par l’expéditeur avant l’envoi, ni inscrites sur le connaissement.

IV.             Points de droit

[11]           Les deux points de droit dont est saisie la Cour sont les suivants :

1.                  Est-ce que le transport non déclaré de la cargaison en pontée en vertu du connaissement de Traffic-Tech empêche la défenderesse d’invoquer les Règles de La Haye-Visby?

2.                  Dans la négative, quelles sont les limitations applicables au contrat de transport en vertu des Règles de La Haye-Visby?

V.                Observations des parties

A.                Traffic-Tech (défenderesse et requérante)

(1)               Les marchandises endommagées sont des « marchandises », telles que définies dans les Règles de La Haye-Visby.

[12]           Traffic-Tech s’appuie d’abord sur la définition de « marchandises » prévue à l’article Ic) des Règles de La Haye-Visby pour affirmer qu’elle s’applique en l’espèce. Comme ladite définition exclut « la cargaison qui, par le contrat de transport, est déclarée comme mise sur le pont et, en fait, est ainsi transportée », il s’ensuit que la cargaison qui n’est pas déclarée comme mise sur le pont par le contrat de transport n’est pas exclue.

[13]           Les parties conviennent que le connaissement ne portait aucune indication que la cargaison serait transportée en pontée. Par conséquent, Traffic-Tech affirme qu’étant donné que la cargaison perdue n’était pas déclarée par contrat comme étant transportée en pontée, elle constituait donc des « marchandises ». Puisque la cargaison était en fait des « marchandises », la réclamation entre dans le champ d’application des Règles de La Haye-Visby. Selon Traffic-Tech, cette interprétation donne plus de souplesse au transporteur, alors que la position de De Wolf va à l’encontre de la réalité commerciale des expéditions par conteneur, alors qu’environ 30 % des conteneurs sont arrimés en ponté.

(2)               La responsabilité du transporteur est limitée par les dispositions prévues dans les Règles de La Haye-Visby.

[14]           Convaincue que les Règles de La Haye-Visby s’appliquent, Traffic-Tech s’en remet ensuite à l’article IV(5)a) des mêmes Règles pour affirmer que le transporteur comme le navire ne seront « en aucun cas » responsables pour une somme supérieure à la limite prévue dans la convention, et à l’article IV bis des mêmes Règles reproduit en annexe, qui prescrit que ces limites sont applicables à toute action contre le transporteur, que l’action soit fondée sur la responsabilité contractuelle ou sur une responsabilité extracontractuelle.

[15]           Traffic-Tech affirme que la seule exception à la limite prévue à l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby est celle prévue à l’article IV(5)e) qui a trait aux dommages résultant « d’un acte ou d’une omission du transporteur qui a eu lieu soit avec l’intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu’un dommage en résulterait probablement ».

[16]           À cet égard, Traffic-Tech affirme que l’article IV(5)e) n’est pas en jeu en l’espèce, puisque l’allégation de négligence grave de De Wolf n’est pas étayée par une affirmation ou un élément de preuve selon lesquels le dommage a été en fait causé avec l’intention de provoquer un dommage ou avec conscience qu’un dommage surviendrait. De plus, elle affirme que quoi qu’il en soit, l’article IV(5)e) nécessite un seuil plus élevé qu’une négligence grave, et qu’aucun élément de preuve, de quelque nature que ce soit, n’a été avancé en l’espèce, puisque les points sur lesquels la Cour doit se pencher sont strictement des points de droit. Elle aborde de la même manière l’allégation de mauvaise foi soulevée par De Wolf, affirmant que la mauvaise foi ne peut être présumée et qu’une simple omission sur le connaissement ne peut constituer de la mauvaise foi. Autrement dit, Traffic-Tech affirme que le but de la présente audience est de statuer sur des points de droit, et non d’examiner l’intention des parties ou un état d’esprit en particulier.

[17]           Enfin, Traffic-Tech soutient que les cours canadiennes n’ont pas encore examiné la question de savoir si les limitations prévues aux Règles de La Haye-Visby s’appliquent au transport non déclaré en pontée. Toutefois, elle fait référence à un arrêt de la Cour d’appel d’Angleterre et du Pays de Galles dans lequel cette question a été abordée (Daewoo Heavy Industries Ltd et al v Klipriver Shipping Ltd et al, [2003] EWCA Civ 451 (The Kapitan Petko Voivoda)), dans le contexte des anciennes Règles de La Haye, dont la disposition serait analogue à l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby. Cet arrêt cadrerait avec les nouvelles réalités de l’industrie de l’expédition commerciale moderne, en particulier en ce qui a trait à l’expédition par conteneurs, pour laquelle les risques d’un transport en pontée sont considérablement réduits.

(3)               Conclusion

[18]           Ainsi, la réponse de Traffic-Tech à la première question est négative, en ce sens que le transport non déclaré de la cargaison en pontée en vertu du connaissement de Traffic-Tech ne l’empêche pas d’invoquer les Règles de La Haye-Visby.

[19]           Quant à la deuxième question, Traffic-Tech affirme qu’elle peut se prévaloir des limitations prévues dans les Règles de La Haye-Visby, que le montant doit être calculé conformément à l’article IV(5)a) des mêmes règles, que la seule exception à la mention « en aucun cas » est celle prévue à l’article IV(5)e), qui n’est pas en jeu en l’espèce. La perte réclamée par De Wolf ne peut donc pas excéder 666,67 unités de compte par colis, ou 2 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus élevée étant applicable.

B.                 De Wolf (demanderesse)

(1)               Le défaut de déclarer le transport en pontée prive Traffic-Tech du droit d’invoquer toute limitation de responsabilité.

[20]           Dans son mémoire, De Wolf aborde la première question de façon différente par rapport à la question tranchée par la Cour. De Wolf demande en particulier si le transport non déclaré de la cargaison en pontée en vertu du connaissement empêche la défenderesse d’invoquer les limitations de responsabilité du transporteur prévues dans les Règles de La Haye-Visby. De Wolf souligne le fait qu’elle n’a jamais été avisée que sa cargaison conteneurisée serait arrimée sur le pont du navire, et qu’elle en a été avisée uniquement une fois informée de sa perte. Elle soutient que le transport non déclaré en pontée empêche Traffic-Tech d’invoquer les limitations de responsabilité prévues dans les Règles de La Haye-Visby.

[21]           De Wolf fait état des risques particuliers associés à une cargaison en pontée, et des mesures additionnelles qui doivent être prises afin de protéger et d’assurer les marchandises ainsi transportées, et invoque le fait que le transport en pontée constitue, en vertu de l’article III(2) des Règles de La Haye-Visby, un arrimage incorrect. Ainsi, De Wolf soutient que lorsque le lieu d’arrimage n’est pas indiqué sur un connaissement, c’est-à-dire un connaissement net, il est entendu que les marchandises doivent être transportées en cale. Il est donc incorrect de les transporter en pontée sans le déclarer auparavant.

[22]           Plus précisément, De Wolf affirme d’abord que les Règles de La Haye-Visby s’appliquent, mais pas la limitation de responsabilité. En fait, De Wolf soutient, contrairement à la position de Traffic-Tech, que ce défaut de déclarer le transport en pontée des marchandises la prive du droit d’invoquer toute limitation de responsabilité. Conclure autrement reviendrait à récompenser le transporteur pour avoir failli à ses obligations de déclarer l’arrimage en pontée, en violation du contrat, et contrairement à l’obligation de bonne foi prévue à l’article 1c) des Règles de La Haye-Visby.

[23]           De Wolf s’appuie sur l’assertion du professeur William Tetley selon laquelle le transporteur ne peut se prévaloir de la limitation s’il a omis de déclarer l’arrimage en pontée, en particulier à la lumière de l’obligation de bonne foi maintenant incluse dans le droit canadien des contrats en common law (Bhasin c. Hrynew, 2014 CSC 71). De Wolf affirme que Traffic-Tech ne devrait pas bénéficier des Règles de La Haye-Visby puisqu’elle a agi de mauvaise foi en arrimant les marchandises en pontée, en violation du connaissement. En fait, selon De Wolf, si Traffic-Tech avait agi de bonne foi, elle aurait indiqué l’arrimage en pontée sur le connaissement et, à ce titre, n’aurait pas bénéficié des Règles de La Haye-Visby.

[24]           Deuxièmement, De Wolf affirme que l’expression « en aucun cas » de l’article IV(5)a) fait référence aux situations énumérées à l’article IV(2), reproduit en annexe. De Wolf s’appuie ici sur l’assertion du professeur Tetley selon laquelle [traduction] « ces termes ne devraient pas être interprétés de façon à signifier que la limitation quant aux colis s’applique lorsque le transporteur omet de prouver son droit à une exonération totale de responsabilité en vertu de l’une ou l’autre des exceptions prévues aux articles 4(2)a) à q) » (William Tetley, Marine Cargo Claims, 4th ed (Cowansville : Les Éditions Yvon Blais, 2008, à la page 1587).

[25]           De Wolf écarte la jurisprudence anglaise sur laquelle s’appuie Traffic-Tech, soulignant que les tribunaux canadiens ne sont pas liés par les décisions des tribunaux d’Angleterre, que le professeur Tetley a qualifié la décision de [traduction] « déplorable et sans fondement », et que la décision a été rendue en vertu des anciennes Règles de La Haye. De Wolf affirme que la Cour ne peut s’appuyer sur l’affaire The Kapitan Petko Voivoda, puisque l’article IV(5) des Règles de La Haye-Visby comporte une exception à la limitation de responsabilité (article IV(5)e)) qui n’était pas incluse dans les anciennes Règles de La Haye. Elle écarte également l’arrêt St-Siméon Navigation Inc. c. Couturier & Fils Limitée, [1974] RCS 1176 [St-Siméon], où il y avait une clause liberté (liberty clause), c’est-à-dire une clause donnant liberté d’arrimer en pontée, et où il n’y avait pas de violation du contrat de transport, de même que l’arrêt Timberwest v Gearbulk, 2001 BCSC 882, où le propriétaire de la cargaison était au courant que son chargement serait transporté en pontée et non en cale. Toutefois, en l’espèce, De Wolf affirme que puisque le connaissement ne comportait pas de clause liberté, elle n’était pas au courant que son chargement pouvait être arrimé en pontée.

[26]           Troisièmement, De Wolf affirme que l’arrimage des marchandises en pontée constitue une négligence grave.

(2)               Le contrat de transport est régi par la common law.

[27]           Comme le contrat de transport entre les parties n’est pas assujetti aux limitations prévues dans les Règles de La Haye-Visby, De Wolf allègue que l’affaire doit être tranchée en fonction des principes de la common law canadienne, qui ont été intégrés au droit maritime canadien, en vertu desquels il n’y a pas de limitation de la responsabilité.

(3)               Conclusion

[28]           En conclusion, De Wolf répond à la première question par l’affirmative, en ce sens que les Règles de La Haye-Visby s’appliquent. Toutefois, le transport en pontée non déclaré de la cargaison empêche Traffic-Tech d’invoquer les limitations de responsabilité prévues dans les mêmes Règles de La Haye-Visby.

[29]           En ce qui concerne la deuxième question, De Wolf affirme qu’en raison de sa mauvaise foi ou de sa négligence grave, ou parce que les termes « en aucun cas » de l’article IV(5)a) font référence aux situations énumérées à l’article IV(2), Traffic-Tech ne peut invoquer la limitation de responsabilité prévue dans les Règles de La Haye-Visby; puisque la common law s’applique, elle a droit au montant de ses pertes réelles, sans limitation.

VI.             Analyse

A.                Est-ce que le transport non déclaré de la cargaison en pontée en vertu du connaissement de Traffic-Tech empêche la défenderesse d’invoquer les Règles de La Haye-Visby?

[30]           Pour les motifs exposés ci-après, la Cour se range aux arguments de Traffic-Tech et répond à la première question par la négative. En conséquence, le fait que Traffic-Tech ait procédé au transport non déclaré des marchandises de De Wolf en pontée ne l’empêche pas d’invoquer les Règles de La Haye-Visby.

[31]           Ce point de droit est tranché grâce à l’examen des dispositions légales pertinentes, de la définition de « marchandises » en vertu des Règles de La Haye-Visby, et de la jurisprudence canadienne et internationale.

(1)               Dispositions légales

[32]           La Convention internationale pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement, mieux connue sous l’appellation de Règles de La Haye, a été conclue à Bruxelles le 25 août 1924. Elle a été modifiée en 1968 par le Protocole portant modification de la Convention internationale pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement, pour devenir les Règles de La Haye-Visby. Les Règles de La Haye ont été intégrées au droit canadien par la Loi canadienne sur le transport des marchandises par eau, LC 1936, c 49. Par la suite, les Règles de La Haye-Visby ont pris effet d’abord au moyen de l’article 7 de la Loi sur le transport des marchandises par eau, LC 1993, c 21, puis ensuite au moyen de l’article 43 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, étant insérées à l’annexe 3 de ladite loi. Les Règles de La Haye et les Règles de La Haye-Visby peuvent en l’espèce être collectivement citées comme les Règles, sauf lorsqu’il est nécessaire de faire référence à une convention précise.

[33]           Les Règles de La Haye-Visby ont force de loi au Canada à l’égard des contrats de transport de marchandises par eau conclus entre les différents États, de même qu’à l’égard de contrats de transport de marchandises par eau d’un lieu au Canada à un autre lieu au Canada, à moins qu’ils ne soient pas assortis d’un connaissement et qu’ils stipulent que les Règles ne s’appliquent pas (Loi sur la responsabilité en matière maritime, article 43). Elles précisent les responsabilités, obligations, droits et exonérations du transporteur quant au chargement, à la manutention, à l’arrimage, au transport, à la garde, aux soins et au déchargement des marchandises couvertes par un contrat de transport par eau (Règles de La Haye-Visby, article II).

(2)               Définition de « marchandises » à l’article 1c) des Règles de La Haye-Visby

[34]           Les biens, objets et marchandises exclus de la définition de marchandises ne sont pas assujettis aux Règles de La Haye-Visby, alors qu’au contraire, les biens et objets inclus dans la définition y seront assujettis. L’article Ic) des Règles de La Haye-Visby, comme l’article Ic) des Règles de La Haye, définit les « marchandises » comme comprenant les « biens, objets, marchandises et articles de nature quelconque, à l’exception des animaux vivants et de la cargaison qui, par le contrat de transport, est déclarée comme mise sur le pont et, en fait, est ainsi transportée » (non souligné dans l’original).

[35]           Conformément à la définition qui précède, pour qu’une cargaison ne soit pas considérée comme des « marchandises », elle doit non seulement être transportée en pontée, mais il doit également être fait mention dans le contrat de transport qu’elle est ainsi transportée. Le défunt professeur William Tetley confirme que [traduction] « ni le transporteur ni l’expéditeur ne peuvent bénéficier des Règles ou y être assujettis, à la condition que : a) le connaissement indique à première vue que les marchandises sont transportées en pontée; b) la cargaison est en fait transportée en pontée » (Tetley, à la page 1569).

[36]           Par conséquent, les Règles de La Haye-Visby s’appliqueront à la cargaison transportée en cale alors que le connaissement indique que la cargaison est transportée en pontée, et vice versa (Julian Cooke et al, Voyage Charters, 4th ed (London : Lloyd’s Shipping Law Library, 2014), à la page 1018).

[37]           En l’espèce, il n’est pas contesté que le connaissement ne mentionnait pas le transport en pontée, et que les marchandises ont été transportées en pontée. Comme l’une des deux conditions n’est pas satisfaite, la cargaison ne peut être exclue de la définition de « marchandises », et est par conséquent assujettie aux Règles de La Haye-Visby.

(3)               Jurisprudence

[38]           La jurisprudence confirme cette interprétation. Dans Grace Plastics Ltd c. Le Bernd Wesch II, [1971] CF 273 [Grace Plastics], la demanderesse a acheté deux réacteurs et certains équipements et a pris des arrangements avec un transitaire pour les expédier au Canada. Le contrat entre le transitaire et la compagnie maritime indiquait que les réacteurs seraient transportés en pontée et le reste du chargement en cale, mais quatre colis ont été en fait chargés sur le pont avec les deux réacteurs, avec le consentement du transitaire. La Cour a appliqué la définition de « marchandises » prévue à l’article I des anciennes Règles de La Haye pour décider que le contrat de transport n’indiquait pas le transport de trois colis sur le pont. Par conséquent, selon la Cour, ces trois colis ne sont pas visés par [traduction] « l’exception de la définition de “marchandises” prévue dans les Règles de La Haye, même si l’agent du transitaire à Hambourg a par la suite accepté qu’ils soient ainsi transportés » (Grace Plastics, au paragraphe 14). Au contraire, comme le contrat de transport prévoyait le transport des deux réacteurs de 70 tonnes en pontée, et comme ils ont été ainsi transportés, le contrat de transport n’était pas régi par les Règles de La Haye pour ce qui est de ces deux réacteurs.

[39]           Dans St-Siméon, la Cour a conclu « que l’on va à l’encontre des Règles en stipulant que des marchandises chargées en pontée sont censées être déclarées comme étant ainsi chargées, même lorsque la mention n’est pas faite » (St-Siméon, à la page 1179). En fait, dans St-Siméon, le transporteur s’est appuyé sur une clause du connaissement stipulant non-responsabilité pour les marchandises chargées en pontée. La clause prévoyait que les marchandises « peuvent être arrimées sur ou sous le pont à la discrétion du voiturier; et lorsqu’elles sont chargées en pontée elles sont, en vertu de cette disposition, censées être déclarées comme étant ainsi chargées en pontée, et ceci même si aucune mention spécifique à cet effet n’appert à la face de ce connaissement. Relativement aux marchandises chargées en pontée ou déclarées comme étant ainsi chargées à la face de ce connaissement, le voiturier n’assume aucune responsabilité quant aux pertes, avaries ou aux retards [...] ». Cette disposition a été jugée contraire à la Loi sur le transport des marchandises par eau, LRC 1952, c 291, et aux Règles, et par conséquent sans effet. Ainsi, pour qu’une cargaison puisse être exclue de la définition de « marchandises », il doit être indiqué dans le contrat de transport qu’elle est transportée en pontée en plus d’être ainsi transportée.

[40]           De la même façon, lorsque, selon le connaissement, « une partie » de la cargaison devait être transportée en pontée, on a conclu que les Règles s’appliquaient. Cette indication ne permettait pas d’identifier avec suffisamment de précision quelles parties de la cargaison devaient être transportées en cargo, et il a donc été impossible pour les parties d’évaluer leurs risques et leurs responsabilités pour l’avenir. En fait, dans Timberwest v Gearbulk, 2001 BCSC 882, la Cour devait décider si le bois expédié était considéré comme des « marchandises » en vertu des Règles. Si le bois était des « marchandises », les clauses d’exclusion seraient sans effet. L’indication « Stowage: 86% OD 14% UD » (Arrimage : 86 en pontée, 14 % en cale) était incluse dans les connaissements. La Cour a appliqué une interprétation rigoureuse de la définition de « marchandises » prévue dans les Règles de La Haye-Visby. Le juge d’instance a conclu que les pourcentages indiqués sur les connaissements n’étaient pas fiables à l’égard de chaque chargement, et que l’absence d’indication précisant quels colis étaient transportés en pontée et quels colis étaient transportés en cale rendait impossible toute détermination de la valeur de la cargaison transportée en pontée. Le juge a conclu que les clauses d’exclusion inscrites sur les connaissements n’étaient pas valides ni applicables. Cet arrêt a été confirmé par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans Timberwest Forest Ltd v Gearbulk Pool Ltd, 2003 BCCA 39 [Timberwest], au paragraphe 46 :

[traduction]

À mon avis, les conclusions auxquelles en est venu le juge d’instance reflètent une interprétation de la définition de « marchandises » qui s’accorde avec la nécessité d’une efficacité commerciale pratique, en ce sens que la certitude est nécessaire aux parties à une transaction commerciale, afin de pouvoir évaluer leurs risques respectifs et décider du prix approprié pour leurs marchandises et services. Il ne s’agit pas d’une interprétation qui engendre une [traduction] « limitation plus importante » [de la liberté de contrat] que celle qu’exige le libellé utilisé », pour citer le juge McFarlane J.A. dans H.B. Contracting Ltd. v Northland Shipping, (1962) Co. Ltd. (1971), 24 D.L.R. (3d) 209, au paragraphe 215 (B.C.C.A.).

[41]           Dans les affaires mentionnées ci-dessus, l’exclusion incluse dans la définition de « marchandises » a été interprétée de façon rigoureuse. L’application rigoureuse des deux conditions des Règles (contrat de transport stipulant que la cargaison est transportée en pontée et cargaison transportée de fait en pontée) a profité aux expéditeurs, parce qu’elle a rendu sans effet les clauses d’exclusion, aux frais des transporteurs.

[42]           Bien que la situation en l’espèce soit différente, en ce sens que le connaissement ne contenait aucune clause de non-responsabilité, les décisions rendues dans St-Siméon et Timberwest, de même que dans Grace Plastics, devraient néanmoins prévaloir.

(4)               Conclusion

[43]           Le chargement conteneurisé de De Wolf constitue bien des « marchandises » au sens des Règles, puisque même s’il a été transporté en pontée, le contrat de transport n’indiquait pas qu’il serait ainsi transporté. La Cour répond par conséquent à la première question par la négative.

B.                 Dans la négative, quelles sont les limitations applicables au contrat de transport en vertu des Règles de La Haye-Visby?

[44]           Ayant répondu à la première question par la négative, la Cour se penche maintenant sur la seconde question. Pour les motifs exposés ci-après, la Cour estime que la limitation de responsabilité prévue à l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby s’applique à la situation en l’espèce.

(1)               Dispositions légales

[45]           L’article IV(2) des Règles de La Haye-Visby exonère complètement le transporteur et le navire pour perte ou dommage résultant ou provenant des situations énumérées à l’article, comme des faits de guerre ou d’ennemis publics, entre autres.

[46]           De l’autre côté, l’article IV(5)a) prescrit une limite à la responsabilité du transporteur et du navire, lesquels ne seront « en aucun cas » responsables de pertes ou dommages pour un montant supérieur à la limite indiquée, alors que l’article IV(5)e) prescrit que ni le transporteur ni le navire n’auront le droit de bénéficier de cette limitation de responsabilité « s’il est prouvé que le dommage résulte d’un acte ou d’une omission du transporteur qui a eu lieu soit avec l’intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu’un dommage en résulterait probablement ».

[47]           Il y a lieu de reproduire l’article IV(5)a) :

À moins que la nature et la valeur des marchandises n’aient été déclarées par le chargeur avant leur embarquement et que cette déclaration n’ait été insérée dans le connaissement, le transporteur comme le navire ne seront en aucun cas responsables des pertes ou dommages des marchandises ou concernant celles-ci pour une somme supérieure à 666,67 unités de compte par colis ou unité, ou 2 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus élevée étant applicable (non souligné dans l’original).

(2)               Doctrine et jurisprudence

[48]           Le défunt professeur Tetley a estimé que le transport non autorisé en ponté constituait une violation de contrat d’une telle importance qu’elle pouvait amener le transporteur à perdre le droit de bénéficier de l’exonération ou de la limitation de responsabilité prévue à l’article IV des Règles de La Haye-Visby. Il a estimé que lorsque les marchandises sont transportées en pontée sans indication à cet effet, « le transporteur ne peut invoquer la limitation de responsabilité prévue au contrat ou dans les Règles de La Haye, et qui pourrait lui être profitable, parce qu’il y a eu inexécution fondamentale du contrat » (Tetley, à la page 1581). Le professeur Tetley a notamment fait référence à l’affaire St-Siméon, pour laquelle la Cour suprême a écrit :

Le principe même de la législation dont il s’agit, le but des Règles qui y sont annexées, c’est d’empêcher les armateurs de stipuler une responsabilité moindre que celle qui y est prévue. Il faut donc dire que sans la mention prescrite, une stipulation de non-responsabilité pour une cargaison en pontée est sans effet, comme l’ont décidé M. le Juge Pilcher dans Svenska Traktor c Maritime Agencies, [[1953] 2 A11 E.R. 570], et M. le Juge en chef Jackett dans Grace Plastics Ltd c Le Bernd Wesch II, [[1971] F.C. 273].

[49]           Le professeur Tetley a également fait référence à la jurisprudence américaine, notamment à l’affaire Searoad Shipping Co v EI DuPont de Nemours, 361 F2d 833 (5th Cir 1966) [Searoad], où le transporteur a été jugé responsable pour une perte survenue alors que les marchandises étaient arrimées en pontée malgré l’émission d’un connaissement net : [traduction] « Il n’y a aucune justification légale à cet arrimage en pontée d’une cargaison expédiée en vertu d’un connaissement net pour une cargaison transportée en cale, et cet arrimage équivalait à une déviation liant l’armateur pour la perte qui a été directement causée par l’arrimage en pontée » (Searoad, au paragraphe 16). Il a également fait référence à l’affaire Encyclopaedia Britannica v Hong Kong Producer, 422 F2d 7 (2d Cir 1969), où le fait qu’un conteneur ait été transporté en pontée sans indication à cet effet sur le connaissement a été considéré comme une déviation privant le transporteur de la limite de 500 $ par colis prévue par la Carriage of Goods by Sea Act des États-Unis.

[50]           La Cour d’Angleterre et du Pays de Galles, dans l’affaire The Kapitan Petko Voivoda, a émis une opinion différente. Elle a plutôt conclu que le transport non autorisé en pontée constitue une violation de contrat sans caractéristiques spéciales ajoutées, et a estimé que l’applicabilité des clauses d’exception et de limitation était une question d’interprétation du contrat. Elle a conclu que le transport non autorisé en pontée n’exclut pas l’application des Règles de La Haye ni, plus particulièrement, la limitation de responsabilité prévue à l’article IV(5). De plus, la Cour a conclu que l’arrimage en pontée en violation de contrat ne pouvait être assimilé à une déviation du voyage contractuel ou à l’entreposage de marchandises dans un entrepôt autre que celui convenu à l’origine, et que le devoir de la Cour dans un tel cas [traduction] « est de simplement interpréter le contrat conclu entre les parties » (au paragraphe 15). Les termes anglais « in any event » de l’article IV(5)a) sont interprétés de manière à signifier « in every case » (au paragraphe 16), ce qui amène la Cour à conclure que même si le transporteur a transporté une cargaison en pontée en violation d’un contrat régi par les anciennes Règles de La Haye, il pouvait [traduction] « tirer avantage de la règle 5 de l’article IV pour limiter sa responsabilité pour la perte ou le dommage de la cargaison » (au paragraphe 1).

[51]           Il convient de souligner que dans l’affaire The Kapitan Petko Voivoda, la décision a été rendue en vertu des anciennes Règles de La Haye. Comme l’a indiqué Simon Baughen dans l’ouvrage Shipping Law, 3rd ed (London UK: Cavendish Publishing Ltd, 2004), à la page 143, [traduction] « [u]ne des retombées potentielles de cet arrêt, c’est qu’en vertu des Règles de La Haye, un transporteur sera quand même en droit de limiter sa responsabilité dans des circonstances pour lesquelles, en vertu des Règles de La Haye-Visby, il aurait perdu le droit de limiter sa responsabilité en application de l’article IV(5)e) ».

[52]           Ce cas a également été examiné au Canada dans Grace Plastics, alors que la même interprétation a prévalu et que l’article IV(5)a) a été appliqué littéralement. Comme il a été mentionné précédemment, en l’espèce, quatre colis ont été chargés en pontée, malgré qu’ils étaient supposés être arrimés en cale. Certains des colis ont été endommagés, par suite du défaut de mettre le navire en état de navigabilité (article III(1) des Règles). La Cour a estimé que la demanderesse pouvait [traduction] « prendre jugement à l’égard de chacun de ces articles pour le montant correspondant à la perte réelle ou 500 $ », faisant par là référence à l’article IV(5) des anciennes Règles de La Haye (Grace Plastics, au paragraphe 48). Pour rendre sa décision, la Cour s’est également appuyée sur l’affaire Falconbridge Nick Mines Ltd v Chimo Shipping Ltd, [1969] 2 Ex CR 261, au paragraphe 66 :

[traduction]

Par conséquent, dans l’éventualité où les Règles s’appliquaient au tracteur et à l’ensemble générateur, la situation m’apparaît telle : si la perte résultait du mauvais état de navigabilité du chaland, causé par un manque de diligence raisonnable de la part du voiturier pour mettre le bâtiment en bon état de navigabilité, le transporteur ne peut se prévaloir des exceptions à l’immunité prévues à la règle 2 de l’article IV; cependant, la limitation de la responsabilité prévue à la règle 5, où les termes « en aucun cas » sont utilisés, s’applique.

[53]           Si nous collons au « sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but » (Convention de Vienne sur le droit des traités, [1980] R.T. Can no 37, paragraphe 31(1); voir également J.D. Irving, Limited c. Siemens Canada Limited, 2016 CF 287, au paragraphe 32), interprétant par la présente les termes employés comme l’a fait la Cour d’Angleterre et du Pays de Galles, il semble clair que les termes anglais « in any event » utilisés à l’article IV(5)a) signifient « in every case » et couvrent le présent litige. On peut également déduire la même chose du libellé en français « en aucun cas responsable », lequel peut se traduire en anglais par l’expression « in no way responsible ». Ni le libellé de l’article IV(5)a) ni le contexte de l’article ne laisse croire que les termes « in any event » font référence aux situations énumérées à l’article IV(2). Ainsi, la seule exception à la règle de limitation énoncée à l’article IV(5)a) est celle prévue à l’article IV(5)e), dont il sera question plus loin.

[54]           De Wolf affirme que la mauvaise foi devrait empêcher un transporteur de profiter des avantages prévus aux Règles de La Haye-Visby. Toutefois, la Cour ne dispose d’aucun élément de preuve montrant que Traffic-Tech a réellement agi de mauvaise foi, puisque les parties ne peuvent déposer d’éléments de preuve dans la présente instance. Par conséquent, la Cour n’a pas à décider si Traffic-Tech a agi ou non de mauvaise foi.

[55]           Enfin, concernant la question de l’inexécution fondamentale, la Cour suprême du Canada a clairement énoncé que « le temps est venu de donner le coup de grâce au principe de l’inexécution fondamentale » (Tercon Contractors Ltd. c. Colombie-Britannique (Transports et Voirie), 2010 CSC 4, au paragraphe 62). La Cour souligne que le professeur Tetley a associé l’arrimage non autorisé en pontée à une inexécution fondamentale du contrat dans son ouvrage intitulé Marine Cargo Claims, publié en 2008, soit deux ans avant la décision susmentionnée de la Cour suprême du Canada. Interpréter les termes « in any event » comme signifiant « in every case » est donc compatible avec l’exclusion du principe de l’inexécution fondamentale du droit canadien.

[56]           De Wolf affirme que Traffic-Tech ne peut invoquer le droit à la limitation de responsabilité prévue à l’article IV(5)a), s’appuyant pour cela sur l’article IV(5)e) des Règles de La Haye-Visby. Traffic-Tech affirme que cette exception n’est pas en jeu, puisque, même si De Wolf allègue que les dommages ont été causés par la négligence de Traffic-Tech, [traduction« l’instance ne contient aucune allégation ni aucun élément de preuve selon lesquels les dommages ont été causés avec l’intention de la part du défendeur de provoquer un dommage, ou avec la conscience qu’un dommage en résulterait » (mémoire des faits et du droit du défendeur, au paragraphe 23).

[57]           La Cour se range aux arguments de Traffic-Tech puisqu’une fois encore, il ne revient pas à la Cour de décider si l’article IV(5)e) s’applique en l’espèce, étant donné qu’il faudrait pour ce faire évaluer les faits.

(3)               Conclusion

[58]           Traffic-Tech peut invoquer la limitation de responsabilité prévue à l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby, malgré le transport non autorisé en pontée. Par conséquent, les limitations applicables au contrat de transport en vertu des Règles de La Haye-Visby ne doivent pas dépasser « 666,67 unités de compte par colis ou unité, ou 2 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus élevée étant applicable », conformément à l’article IV(5)a).

[59]           Il ne revient pas à la Cour de décider si l’exception prévue à l’article IV(5)e) s’applique, ou de se pencher sur la question.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.      Le transport non déclaré de la cargaison en pontée en vertu du connaissement de Traffic-Tech n’empêche pas la défenderesse d’invoquer les Règles de La Haye‑Visby.

2.      Les limitations applicables au contrat de transport sont celles prévues à l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby. La limitation applicable au connaissement est 666,67 unités de compte par colis ou unité, ou 2 unités de compte par kilogramme de poids brut des marchandises perdues ou endommagées, la limite la plus élevée étant applicable, en vertu de l’article IV(5)a) des Règles de La Haye-Visby.

3.      Des dépens sont accordés à la défenderesse (requérante).

« Martine St-Louis »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-2044-15

 

INTITULÉ :

DE WOLF MARITIME SAFETY B.V. c. TRAFFIC‑TECH INTERNATIONAL INC.

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 23 novembre 2016

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LA JUGE ST-LOUIS

DATE DES MOTIFS :

Le 11 janvier 2017

COMPARUTIONS :

Me Isabelle Pillet

Me Matthew Hamerman

Pour la DEMANDERESSE

Me Jean-François Bilodeau

Me Jordi Montblanch

Pour la DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

De Man Pillet

Montréal (Québec)

Pour la DEMANDERESSE

Robinson Sheppard Shapiro

Montréal (Québec)

Pour la DÉFENDERESSE


Annexe

Règles de la Haye-Visby, art IV(2), IV bis, constituant l’annexe 3 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, LC 2001, c 6

Hague-Visby Rules, art IV(2), IV bis, being Schedule 3 of the Marine Liability Act, SC 2001, c 6

Article IV

Article IV

Droits et exonérations

Rights and Immunities

[…]

[…]

2 Ni le transporteur ni le navire ne seront responsables pour perte ou dommage résultant ou provenant :

2 Neither the carrier nor the ship shall be responsible for loss or damage arising or resulting from

a) des actes, négligence ou défaut du capitaine, marin, pilote ou des préposés du transporteur dans la navigation ou dans l’administration du navire;

(a) act, neglect, or default of the master, mariner, pilot or the servants of the carrier in the navigation or in the management of the ship;

b) d’un incendie, à moins qu’il ne soit causé par le fait ou la faute du transporteur;

(b) fire, unless caused by the actual fault or privity of the carrier;

c) des périls, dangers ou accidents de la mer ou d’autres eaux navigables;

(c) perils, dangers and accidents of the sea or other navigable waters;

d) d’un « acte de Dieu »;

(d) act of God;

e) de faits de guerre;

(e) act of war;

f) du fait d’ennemis publics

(f) act of public enemies;

g) d’un arrêt ou contrainte de prince, autorité ou peuple ou d’une saisie judiciaire;

(g) arrest or restraint of princes, rulers or people, or seizure under legal process;

h) d’une restriction de quarantaine;

(h) quarantine restrictions;

i) d’un acte ou d’une omission du chargeur ou propriétaire des marchandises, de son agent ou représentant;

(i) act or omission of the shipper or owner of the goods, his agent or representative;

j) de grèves ou lock-out ou d’arrêts ou entraves apportés au travail, pour quelque cause que ce soit, partiellement ou complètement

(j) strikes or lock-outs or stoppage or restraint of labour from whatever cause, whether partial or general;

k) d’émeutes ou de troubles civils;

(k) riots and civil commotions;

l) d’un sauvetage ou tentative de sauvetage de vies ou de biens en mer;

(l) saving or attempting to save life or property at sea;

m) de la freinte en volume ou en poids ou de toute autre perte ou dommage résultant de vice caché, nature spéciale ou vice propre de la marchandise;

(m) wastage in bulk or weight or any other loss or damage arising from inherent defect, quality or vice of the goods;

n) d’une insuffisance d’emballage;

(n) insufficiency of packing;

o) d’une insuffisance ou imperfection de marques;

(o) insufficiency or inadequacy of marks;

p) de vices cachés échappant à une diligence raisonnable;

(p) latent defects not discoverable by due diligence;

q) de toute autre cause ne provenant pas du fait ou de la faute du transporteur ou du fait ou de la faute des agents ou préposés du transporteur, mais le fardeau de la preuve incombera à la personne réclamant le bénéfice de cette exception et il lui appartiendra de montrer que ni la faute personnelle ni le fait du transporteur n’ont contribué à la perte ou au dommage.

(q) any other cause arising without the actual fault and privity of the carrier, or without the fault or neglect of the agents or servants of the carrier, but the burden of proof shall be on the person claiming the benefit of this exception to show that neither the actual fault or privity of the carrier nor the fault or neglect of the agents or servants of the carrier contributed to the loss or damage.

Article IV bis

Article IV bis

Application des exonérations et limitations

Application of Defences and Limits of Liability

1 Les exonérations et limitations prévues par les présentes règles sont applicables à toute action contre le transporteur en réparation de pertes ou dommages à des marchandises faisant l’objet d’un contrat de transport, que l’action soit fondée sur la responsabilité contractuelle ou sur une responsabilité extracontractuelle.

1 The defences and limits of liability provided for in these Rules shall apply in any action against the carrier in respect of loss or damage to goods covered by a contract of carriage whether the action be founded in contract or in tort.

2 Si une telle action est intentée contre un préposé du transporteur, ce préposé pourra se prévaloir des exonérations et des limitations de responsabilité que le transporteur peut invoquer en vertu des présentes règles.

2 If such an action is brought against a servant or agent of the carrier (such servant or agent not being an independent contractor), such servant or agent shall be entitled to avail himself of the defences and limits of liability which the carrier is entitled to invoke under these Rules.

3 L’ensemble des montants mis à la charge du transporteur et de ses préposés ne dépassera pas dans ce cas la limite prévue par les présentes règles.

3 The aggregate of the amounts recoverable from the carrier, and such servants and agents, shall in no case exceed the limit provided for in these Rules.

4 Toutefois le préposé ne pourra se prévaloir des dispositions du présent article, s’il est prouvé que le dommage résulte d’un acte ou d’une omission de ce préposé qui a eu lieu soit avec l’intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu’un dommage en résulterait probablement.

4 Nevertheless, a servant or agent of the carrier shall not be entitled to avail himself of the provisions of this Article, if it is proved that the damage resulted from an act or omission of the servant or agent done with intent to cause damage or recklessly and with knowledge that damage would probably result.

 

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