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Date : 20170119


Dossier : T-184-16

Référence : 2017 CF 58

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 janvier 2017

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

DAN FANNON

demandeur

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Nature de la question

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par Dan Fannon (le demandeur) aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, concernant une décision rendue le 14 janvier 2016 par la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission), laquelle a établi qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la plainte du demandeur en application de l’alinéa 41(1)d) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H-6 (la LCDP) (la décision).

II.  Exposé des faits

[2]  Le demandeur est un parent non-gardien qui allègue que l’article 63 (déduction pour frais de garde d’enfants) et l’article 122.8 (crédits d’impôt pour la condition physique des enfants) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e supp) (la LIR) sont discriminatoires à son égard et à l’égard des autres parents non-gardiens de [traduction] « familles séparées ». Le demandeur a eu un enfant en 1998 et, aux termes d’une ordonnance judiciaire rendue en 2001, le demandeur a payé une pension alimentaire pour enfants et des dépenses spéciales pour son enfant. Ces [traduction] « dépenses spéciales » comprenaient notamment les frais de garde d’enfants (frais de garderie) et les frais liés à la condition physique de l’enfant.

[3]  L’enfant ne résidait pas avec le demandeur au cours des années 2007 et 2008; mais avec sa mère au cours. Ce fait n’est pas contesté.

[4]  Aux termes du paragraphe 63(3) de la LIR, le demandeur doit avoir résidé avec l’enfant au cours des années visées pour pouvoir déduire des frais de garde d’enfants. Le demandeur a déduit des frais de garde d’enfants pour les années 2007 et 2008. L’Agence du revenu du Canada (l’Agence) a établi de nouvelles cotisations par lesquelles elle a refusé les déductions au titre de frais de garde d’enfants du demandeur en tenant pour acquis que le demandeur ne résidait pas avec l’enfant au cours des années visées et que, par conséquent, il ne satisfaisait pas aux exigences du paragraphe 63(3).

[5]  Le demandeur a interjeté appel des nouvelles cotisations devant la Cour canadienne de l’impôt (la Cour de l’impôt), et à l’occasion dudit appel il a également contesté l’article 63 de la LIR comme étant discriminatoire en raison de la situation familiale et de l’état civil, en violation du paragraphe 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) et de la LCDP. Son appel a été rejeté. La Cour de l’impôt a conclu que « [...] la définition de “frais de garde d’enfants” donnée au paragraphe 63(3) de la Loi ne contrevient pas au paragraphe 15(1) de la Charte » : 2011 CCI 503. La Cour de l’impôt n’a pas abordé la question de savoir si le paragraphe 63(3) de la LIR contrevenait à la LCDP, en concluant qu’elle n’avait pas compétence pour le faire.

[6]  Le demandeur a sollicité le contrôle judiciaire de la décision du ministre du Revenu national de lui refuser la possibilité de déduire des frais de garde d’enfants au titre du paragraphe 63(3) de la LIR : 2012 CF 876. Dans une décision rendue le 11 juillet 2012, le juge Near (tel était alors son titre) a rejeté la demande du demandeur, en concluant que la décision ne pouvait être déraisonnable étant donné que le ministre avait simplement suivi et appliqué la législation. En ce qui a trait à l’allégation de discrimination concernant l’article 63, le juge Near a conclu que le demandeur n’avait pas satisfait au critère à deux volets établi par la Cour suprême du Canada pour l’examen des demandes fondées sur le paragraphe 15(1) de la Charte, dans l’arrêt R. c Kapp, 2008 CSC 41 [Kapp]. Le juge Near a souscrit à l’analyse de la Cour de l’impôt à l’égard de l’argument du demandeur relatif au paragraphe 15(1) de la Charte, sous la plume du juge Webb de la CCI (tel était alors son titre) :

[18]  [...] Le juge Webb a formulé les conclusions suivantes :

[13]  Par conséquent, il faut d’abord décider si le paragraphe 63(3) de la Loi « crée une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue ». L’appelant semble avoir soutenu que son groupe est composé des parents qui n’ont pas la garde de leur enfant, mais qui payent de frais de garderie et qui sont obligés de le faire en application d’une ordonnance judiciaire (ou d’une entente). Il semble proposer un groupe de comparaison composé des parents qui ont la garde de leur enfant et qui payent des frais de garderie en raison d’une entente conclue avec une garderie. Cependant, les dispositions de la Loi ayant trait aux frais de garde d’enfants ne tiennent pas compte de la personne qui a la garde de l’enfant, mais bien de celle avec qui l’enfant réside. Bien qu’il soit possible que la définition d’« enfant admissible » donnée au paragraphe 63(3) de la Loi permette à une personne qui n’est pas le parent de l’enfant d’avoir droit à une déduction au titre des frais de garde d’enfants, il n’est pas certain que l’on puisse ordonner à cette personne de payer des frais de garderie. Ainsi, compte tenu des dispositions de la Loi que l’appelant conteste et des groupes qu’il a proposés, le groupe de l’appelant est celui des parents qui payent des frais de garderie en application d’une ordonnance judiciaire (ou d’une entente) sans résider avec leur enfant, et le groupe de comparaison est celui des parents qui payent des frais de garde d’enfants (suivant une entente conclue avec une garderie) et qui résident avec leur enfant. Dans la Loi, la distinction pertinente est fondée sur le fait que la personne réside ou non avec l’enfant. Il ne fait aucun doute qu’il ne s’agit pas de l’un des motifs énumérés au paragraphe 15(1) de la Charte.

[...]

[15]  Le fait de résider ou non avec son enfant n’est pas une caractéristique qui est soit immuable, soit modifiable uniquement à un prix inacceptable du point de vue de l’identité personnelle. L’enfant qui réside avec un de ses parents pourrait aller résider avec l’autre parent. L’enfant pourrait cesser de résider avec le premier parent pour aller résider avec l’autre sans que cela représente un prix inacceptable du point de vue de l’identité personnelle pour l’un ou l’autre de ses parents. Par conséquent, je suis d’avis qu’il ne s’agit pas d’un motif analogue et que la définition de « frais de garde d’enfants » donnée au paragraphe 63(3) de la Loi ne contrevient pas au paragraphe 15(1) de la Charte.

[7]  Le demandeur a interjeté appel de cette décision à la Cour d’appel fédérale : 2013 CAF 99, laquelle a rejeté son appel en raison de l’absence d’un fondement factuel :

[5]  Pour obtenir gain de cause au sujet de sa prétention fondée sur la Charte, M. Fannon devait présenter des éléments de preuve permettant de démontrer que la condition prévue par la loi qui faisait obstacle à sa demande de déductions au titre des frais de garde d’enfants créait une distinction désavantageuse fondée sur un motif énuméré ou analogue, et que cette distinction créait un désavantage en perpétuant un préjugé ou en appliquant un stéréotype (Québec (Procureur général) c. A., 2013 CSC 5; R. c. Kapp, 2008 CSC 41). M. Fannon n’a présenté devant la Cour fédérale aucun élément de preuve qui porte sur ces questions. L’absence de fondement factuel est fatale à sa prétention fondée sur la Charte (Mackay c. Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357).

[6]  Monsieur Fannon fait également valoir que l’article 63 devrait être interprété de manière plus large que ne l’a fait le ministre en l’espèce, parce que, même si son fils ne résidait pas avec lui au cours de la période pendant laquelle les frais de garde d’enfants avaient été payés, sa demande de déductions au titre de ces frais est juste et raisonnable dans les circonstances et permet d’atteindre les objectifs de l’article 63. Malheureusement pour M. Fannon, il n’était pas loisible au ministre de ne pas tenir compte des conditions prévues par la loi quant à la déductibilité des frais de garde d’enfants. Si l’article 63 est trop restrictif pour permettre d’atteindre les objectifs dans les circonstances particulières de l’espèce, il appartient au législateur, et non au ministre ni à notre Cour, de remédier à la situation.

[8]  Ni notre Cour ni la Cour d’appel fédérale n’a examiné l’article 122.8 de la LIR en ce qui a trait aux crédits d’impôt pour la condition physique de l’enfant, ou on ne leur a pas demandé de le faire.

[9]  Le 14 décembre 2014, le demandeur a porté plainte devant la Commission en alléguant que l’article 63 (déductions pour frais de garde d’enfants) et l’article 122.8 (crédits d’impôt pour la condition physique des enfants) de la LIR sont discriminatoires envers les parents d’enfants de [traduction] « familles séparées » par rapport aux parents d’enfants de familles intactes, contrevenant ainsi à l’article 5 de la LCDP. Il allègue l’existence de politiques et de pratiques discriminatoires, fondées sur les motifs discriminatoires de [traduction] l’« état civil » et de la [traduction] « situation familiale ». Le demandeur a allégué ce qui suit :

[traduction]

3) Aux termes de la législation fiscale canadienne en vigueur, les parents qui n’ont pas la garde de leurs enfants ne peuvent pas déduire, dans leur déclaration de revenus, les frais de garde d’enfants ou les frais liés à la condition physique des enfants.

4) En application de certaines conditions, comme énoncé dans la législation fiscale canadienne, le parent qui a la garde des enfants est également privé de la déduction pour les frais de garde d’enfants ou pour les frais liés à la condition physique de leurs enfants. En application de ces conditions précises, une personne autre qu’un parent qui n’a pas payé ces frais est la seule personne admissible auxdites déductions.

5) À titre de parent, je ne peux tirer pleinement parti de la législation fiscale canadienne.

[10]  Dans ses observations, le demandeur a dressé une liste de groupes et de scénarios de comparaison, ainsi que de calculs mathématiques pour appuyer ses allégations de discrimination.

[11]  La Commission a invité les parties à présenter des observations quant à savoir si l’alinéa 41(1)d) de la LCDP pouvait s’appliquer [traduction], « puisque les questions liées aux droits de la personne soulevées dans ladite plainte avaient possiblement déjà fait l’objet d’un examen dans une autre procédure, notamment, devant la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale », soulignant que [traduction] « une plainte de cette nature pouvait être “vexatoire” au sens de la Loi ».

[12]  Par la suite, le personnel a préparé un rapport sur les articles 40 et 41 (le rapport 40-41), daté du 15 octobre 2015, lequel recommandait que la Commission n’examine pas la plainte du demandeur parce qu’elle était vexatoire en ce sens que [traduction] « l’ensemble de l’allégation de discrimination avait fait l’objet d’un examen à l’occasion des autres procédures ». En effet, les allégations auraient fait l’objet d’un examen à l’occasion des procédures précitées dont la Cour fédérale du Canada et la Cour d’appel fédérale ont été saisies.

[13]  Le personnel de la Commission a présenté le rapport 40-41aux parties, qui ont été invitées à présenter leurs thèses sur les questions en litige aux fins de décision aux termes de l’alinéa 41(1)d) de la LCDP. Plus précisément, les parties devaient argumenter sur la question de savoir si la plainte pouvait être considérée comme vexatoire du fait que notre Cour et la Cour d’appel fédérale s’étaient déjà prononcées sur la question des droits de la personne.

[14]  Le 9 novembre 2015, le demandeur a présenté une lettre à la Commission en réponse au rapport 40-41 (lettre de réponse). Dans cette lettre, il a exposé ses allégations de discrimination concernant les dispositions de la LIR portant sur les crédits d’impôt pour frais de garde d’enfants et pour la condition physique des enfants.

[15]  Dans sa lettre de réponse, le demandeur s’est dit convaincu du [traduction] « bien-fondé » de sa cause. Cet argument était fondé sur l’interprétation erronée du demandeur d’une lettre de l’Agence à la Commission, dont il n’a pas pris connaissance, dans laquelle l’Agence semblait faire une distinction entre le traitement d’une plainte aux termes de l’alinéa 41(1)d) et l’examen de son [traduction] « bien-fondé ». Je dois immédiatement rejeter cet argument parce que l’utilisation par un avocat du terme [traduction] « bien-fondé » dans ce contexte ne constitue aucunement une admission du [traduction] « bien-fondé » de la plainte du demandeur; l’emploi par l’avocat du terme [traduction] « bien-fondé » dans ce contexte pouvait également signifier [traduction] « absence de bien-fondé ».

[16]  Mais surtout, la lettre de réponse comprenait notamment l’affirmation exacte du demandeur portant que ni notre Cour ni la Cour d’appel fédérale n’avaient tranché la question du crédit d’impôt pour la condition physique des enfants aux termes de l’article 122.8 de la LIR.

[17]  Après avoir reçu ces observations, le personnel de la Commission a envoyé le rapport 40‑41 à la Commission pour qu’une décision soit rendue, sans que le rapport ait été révisé, et, plus précisément, sans mention des allégations de partialité. Le rapport était accompagné de la lettre de réponse déposée par le demandeur. Le 4 janvier 2016, la Commission a décidé de ne pas traiter la plainte en application de l’alinéa 41(1)d) de la LCDP. Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

III.  Décision

[18]  Le rapport 40-41 est considéré comme faisant partie intégrante des motifs de la Commission en l’espèce : Zulkoskey c Canada (Employment and Social Development), 2016 CF 268, au paragraphe 16 [Zulkoskey].

[19]  L’alinéa 41(1)d) de la LCDP dispose que la Commission ne statue pas sur une plainte lorsqu’elle est « d) [...] frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi; [...] ». À juste titre, la Commission a noté qu’une plainte peut être vexatoire si elle a déjà fait l’objet d’une décision dans une autre procédure portant essentiellement sur les mêmes questions, lorsque le plaignant a eu l’occasion de soulever toutes les questions pertinentes relatives aux droits de la personne et qu’il a épuisé tous les recours possibles en examen ou en appel.

[20]  Dans son analyse, la Commission affirme ce qui suit :

[traduction]

34.  La décision de la Cour d’appel fédérale de rejeter l’appel était fondée sur le fait que le plaignant n’avait fourni aucun renseignement pour appuyer ses allégations de discrimination. Elle a également examiné la question de savoir si la décision rendue par le ministre aux termes de l’article 63 de la Loi de l’impôt sur le revenu était raisonnable. Bien que le plaignant soit en désaccord avec la décision du ministre et avec les décisions de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale, les allégations de discrimination dans leur ensemble ont fait l’objet d’un examen dans les autres procédures.

35.  Il est également important de noter que la Cour d’appel fédérale a expressément abordé les allégations de discrimination contenues dans sa plainte. Au paragraphe 3 de sa décision, la Cour a déclaré ce qui suit : « [i]l (le plaignant) allègue que l’article 63 est discriminatoire à son égard en raison de son état civil, de sa situation de famille et d’un motif analogue, son lieu de résidence.

[...]

37.  Le plaignant soutient que la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ne peuvent examiner ses allégations de discrimination, puisqu’elles n’ont pas compétence pour le faire. Toutefois, la Loi canadienne sur les droits de la personne est une loi fédérale à l’égard de laquelle la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont toutes deux compétence. La Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont en outre pour mandat d’effectuer le contrôle judiciaire des décisions rendues par des ministères, y compris celles rendues par la Commission. Par conséquent, la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale avaient compétence pour examiner les questions des droits de la personne soulevées dans ladite plainte.

[Non souligné dans l’original.]

[21]  Pour conclure, la Commission a cité l’arrêt Canada (Procureur général) c Brown, 2001 CAF 385 [Brown] :

[traduction]

39.  Dans l’arrêt Brown, la Cour d’appel fédérale a annulé une conclusion d’un juge-arbitre selon laquelle une disposition de la Loi sur l’assurance-emploi contrevenait à la LCDP pour le motif que dans l’arrêt Sollback, la Cour d’appel fédérale avait déjà confirmé la disposition contestée à l’occasion d’une contestation aux termes de l’article 15(1) de la Charte. En l’espèce, la Cour d’appel fédérale a affirmé qu’il serait injustifiable de conclure qu’une disposition qui a déjà été jugée comme non discriminatoire aux termes de la Charte est discriminatoire aux termes de la LCDP. Par conséquent, étant donné que la Cour fédérale a conclu que les allégations du plaignant en l’espèce n’étaient pas discriminatoires aux termes de la Charte, la justice n’exige pas que la Commission traite la plainte.

[22]  La Commission a, par conséquent, décidé de ne pas se prononcer sur l’affaire du demandeur parce que l’allégation de discrimination [traduction] « dans son ensemble » avait déjà fait l’objet d’un examen dans les autres procédures.

IV.  Questions en litige

[23]  L’espèce soulève les questions suivantes :

  1. Certaines parties de l’affidavit du demandeur sont-elles inappropriées et devraient‑elles être radiées?

  2. Les conclusions de la Commission eu égard a) au crédit d’impôt pour la condition physique des enfants, ou b) à la déduction pour frais de garde d’enfants sont-elles raisonnables?

  3. La décision de la Commission est-elle viciée en raison d’un manquement à l’équité procédurale, notamment la partialité du personnel d’intervention préventive de la Commission?

  4. Quelle mesure faut-il accorder?

V.  Norme de contrôle

[24]  Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a conclu, aux paragraphes 57 et 62, qu’il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse pour arrêter la bonne norme de contrôle si « la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ». La norme de contrôle applicable à une décision rendue par la Commission est celle de la décision raisonnable : Bergeron c Canada (Procureur général), 2013 CF 301, au paragraphe 27 [Bergeron (CF)], Bergeron c Canada (Procureur général), 2015 CAF 160, l’autorisation d’interjeter appel à la CSC a été refusée, 36701 (le 14 avril 2016). Au paragraphe 39 de la décision Bergeron (CF), citant l’arrêt Canada (Procureur général) c Sketchley, 2005 CAF 404, au paragraphe 38, la Cour a affirmé ce qui suit : « Il ressort clairement de la jurisprudence qu’il faut accorder à la Commission une grande marge de manœuvre dans l’exercice de son jugement et dans l’appréciation des facteurs pertinents lorsqu’elle doit se prononcer sur l’application de l’alinéa 41(1)d) de la LCDP et qu’elle exécute cette “fonction d’examen préalable”. »

[25]  Au paragraphe 47 de l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada explique ce que doit faire une cour lorsqu’elle effectue une révision selon la norme de la décision raisonnable :

La question pour la cour de révision est de savoir si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[26]  Les questions d’équité procédurale sont susceptibles de révision selon la norme de la décision correcte : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43. Au paragraphe 50 de l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada explique ce que doit faire une cour lorsqu’elle effectue une révision selon la norme de la décision correcte :

Une cour de révision qui applique la norme de la décision correcte n’acquiesce pas au raisonnement du décideur; elle entreprend plutôt sa propre analyse au terme de laquelle elle décide si elle est d’accord ou non avec la conclusion du décideur. En cas de désaccord, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose. La cour de révision doit se demander dès le départ si la décision du tribunal administratif était la bonne.

[27]  La Cour suprême du Canada prescrit aussi que le contrôle judiciaire ne constitue pas une chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur; la décision doit être considérée comme un tout (Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c Pâtes & Papier Irving, Ltée, 2013 CSC 34). La cour de révision doit également déterminer si la décision, examinée dans son ensemble et son contexte au vu du dossier, est raisonnable (Construction Labour Relations c Driver Iron Inc., 2012 CSC 65; voir aussi Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62).

VI.  Dispositions pertinentes

[28]  Le paragraphe 40(1) de la LCDP permet à un individu « ayant des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire » de déposer une plainte devant la Commission. Aux termes de l’article 41 de la LCDP, la Commission doit statuer sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs énumérés aux alinéas 41(1)a) à e), auquel cas elle peut refuser d’examiner la plainte. En l’espèce, l’alinéa 41(1)d) est en litige, aux termes duquel la Commission peut refuser de régler une question au motif que la plainte est « frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi ». La conclusion de la Commission selon laquelle la plainte déposée par le demandeur était vexatoire est au cœur de l’espèce.

[29]  Il est acquis que la Commission peut refuser d’examiner une plainte [traduction] « si les allégations de discrimination ont déjà été examinées à l’occasion d’une autre plainte ou d’un autre grief ». De telles plaintes sont considérées comme [traduction] « vexatoires » dans l’économie de l’alinéa 41(1)d) de la LCDP.

[30]  Les dispositions prétendument discriminatoires de la LIR portant sur les frais de garde d’enfants (paragraphe 63(3)) et sur le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants (article 122.8) sont rédigées ainsi :

Frais de garde d’enfants

Child care expenses

63 ...

63 ...

Note marginale: Définitions

Marginal note: Definitions

(3) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

(3) In this section,

...

...

frais de garde d’enfants Frais engagés au cours d’une année d’imposition dans le but de faire assurer au Canada la garde de tout enfant admissible du contribuable, en le confiant à des services de garde d’enfants, y compris des services de gardienne d’enfants ou de garderie ou des services assurés dans un pensionnat ou dans une colonie de vacances, si les services étaient assurés :

child care expense means an expense incurred in a taxation year for the purpose of providing in Canada, for an eligible child of a taxpayer, child care services including baby sitting services, day nursery services or services provided at a boarding school or camp if the services were provided

a) d’une part, pour permettre au contribuable, ou à la personne assumant les frais d’entretien de l’enfant pour l’année, qui résidait avec l’enfant au moment où les frais ont été engagés d’exercer l’une des activités suivantes :

(a) to enable the taxpayer, or the supporting person of the child for the year, who resided with the child at the time the expense was incurred,

 

[soulignements ajoutés]

[emphasis added]

(EN BLANC)

(BLANK)

Crédit d’impôt pour la condition physique des enfants

Child Fitness Tax Credit

Note marginale : Définitions

Marginal note: Definitions

122.8 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

122.8 (1) The following definitions apply in this section.

dépense admissible pour activités physiques En ce qui concerne l’enfant admissible d’un particulier pour une année d’imposition, la somme versée à une entité admissible (sauf une somme versée à une personne qui, au moment du versement, est soit l’époux ou le conjoint de fait du particulier, soit un autre particulier âgé de moins de 18 ans), dans la mesure où elle est attribuable au coût d’inscription ou d’adhésion de l’enfant à un programme d’activités physiques visé par règlement. Pour l’application du présent article, ce coût :

eligible fitness expense in respect of a qualifying child of an individual for a taxation year means the amount of a fee paid to a qualifying entity (other than an amount paid to a person that is, at the time the amount is paid, the individual’s spouse or common-law partner or another individual who is under 18 years of age) to the extent that the fee is attributable to the cost of registration or membership of the qualifying child in a prescribed program of physical activity and, for the purposes of this section, that cost

a) comprend le coût du programme pour l’entité admissible, ayant trait à son administration, aux cours, à la location des installations nécessaires et aux uniformes et matériel que les participants au programme ne peuvent acquérir à un prix inférieur à leur juste valeur marchande au moment, s’il en est, où ils sont ainsi acquis;

(a) includes the cost to the qualifying entity of the program in respect of its administration, instruction, rental of required facilities, and uniforms and equipment that are not available to be acquired by a participant in the program for an amount less than their fair market value at the time, if any, they are so acquired; and

b) ne comprend pas les sommes suivantes :

(b) does not include

(i) le coût de l’hébergement, des déplacements, des aliments et des boissons,

(i) the cost of accommodation, travel, food or beverages, or

(ii) toute somme déductible en application de l’article 63 dans le calcul du revenu d’une personne pour une année d’imposition. (eligible fitness expense)

(ii) any amount deductible under section 63 in computing any person’s income for any taxation year. (dépense admissible pour activités physiques)

[31]  La LCDP interdit les [traduction] « actes discriminatoires » et confère à la Commission la compétence d’enquêter à cet égard. La plainte du demandeur a été déposée en application de l’article 5 de la LCDP, laquelle déclare ce qui suit :

Refus de biens, de services, d’installations ou d’hébergement

Denial of good service, facility or accommodation

5 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, pour le fournisseur de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public :

5 It is a discriminatory practice in the provision of goods, services, facilities or accommodation customarily available to the general public

a) d’en priver un individu;

(a) to deny, or to deny access to, any such good, service, facility or accommodation to any individual, or

b) de le défavoriser à l’occasion de leur fourniture.

(b) to differentiate adversely in relation to any individual,

(EN BLANC)

on a prohibited ground of discrimination.

[32]  Le demandeur affirme également que les articles précités de la LIR contreviennent au paragraphe 15(1) de la Charte, lequel déclare ce qui suit :

Droits à l’égalité

Equality Rights

Note marginale : Égalité devant la loi, égalité de bénéfice et protection égale de la loi

Marginal note: Equally before and under law and equal protection and benefit of law

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

15. (1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

[33]  Pour conclure à la violation des droits à l’égalité aux termes du paragraphe 15(1) de la Charte, un plaignant doit satisfaire au critère à deux volets établi par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kapp :

  1. La loi crée-t-elle une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue?

  2. La distinction crée-t-elle un désavantage par la perpétuation d’un préjugé ou l’application de stéréotypes?

VII.  Analyse

Question 1 : Certaines parties de l’affidavit du demandeur sont-elles inappropriées et devraient-elles être radiées?

[34]  Le demandeur a déposé un affidavit pour appuyer la demande de contrôle judiciaire. Toutefois, les affidavits contenant de nouveaux renseignements n’ayant pas été présentés au décideur administratif ne sont généralement pas admis lors d’un contrôle judiciaire. Lors d’un contrôle judiciaire, la Cour tranche l’affaire en se fondant sur les documents présentés au décideur (qualifiés de [traduction] « dossier »), qui était la Commission en l’espèce. En ce qui a trait aux nouveaux éléments de preuve présentés lors d’un contrôle judiciaire, la Cour d’appel fédérale a établi, dans l’arrêt Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright), 2012 CAF 22, les lignes directrices suivantes :

[18]  La Cour est saisie en l’espèce d’une demande de contrôle judiciaire de la décision sur le fond qui a ainsi été rendue. Dans le cas d’une telle demande, notre Cour ne dispose que de pouvoirs limités en vertu de la Loi sur les Cours fédérales en ce qui concerne le contrôle de la décision de la Commission du droit d’auteur. Notre Cour ne peut examiner que la légalité générale de ce que la Commission a fait et elle ne peut se pencher sur le bien-fondé de la décision de la Commission ou rendre une nouvelle décision sur le fond.

[19]  En raison des rôles bien distincts que jouent respectivement notre Cour et la Commission du droit d’auteur, notre Cour ne saurait se permettre de tirer des conclusions de fait sur le fond. Par conséquent, en principe, le dossier de la preuve qui est soumis à notre Cour lorsqu’elle est saisie d’une demande de contrôle judiciaire se limite au dossier de preuve dont disposait la Commission. En d’autres termes, les éléments de preuve qui n’ont pas été portés à la connaissance de la Commission et qui ont trait au fond de l’affaire soumise à la Commission ne sont pas admissibles dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire présentée à notre Cour. Ainsi que notre Cour l’a déclaré dans l’arrêt Gitxan Treaty Society c. Hospital Employees’ Union, [2000] 1 C.F. 135, aux pages 144 et 145 (C.A.F.), « [l]e but premier du contrôle judiciaire est de contrôler des décisions, et non pas de trancher, par un procès de novo, des questions qui n’ont pas été examinées de façon adéquate sur le plan de la preuve devant le tribunal ou la cour de première instance » (voir également les arrêts Kallies c. Canada, 2001 CAF 376, au paragraphe 3, et Bekker c. Canada, 2004 CAF 186, au paragraphe 11).

[20]  Le principe général interdisant à notre Cour d’admettre de nouveaux éléments de preuve dans le cadre d’une instance en contrôle judiciaire souffre quelques exceptions reconnues et la liste des exceptions n’est sans doute pas exhaustive. Ces exceptions ne jouent que dans les situations dans lesquelles l’admission, par notre Cour, d’éléments de preuve n’est pas incompatible avec le rôle différent joué par la juridiction de révision et par le tribunal administratif (nous avons déjà expliqué cette différence de rôle aux paragraphes 17 et 18). En fait, bon nombre de ces exceptions sont susceptibles de faciliter ou de favoriser la tâche de la juridiction de révision sans porter atteinte à la mission qui est confiée au tribunal administratif. Voici trois de ces exceptions :

a)  Parfois, notre Cour admettra en preuve un affidavit qui contient des informations générales qui sont susceptibles d’aider la Cour à comprendre les questions qui se rapportent au contrôle judiciaire (voir, par ex. Succession de Corinne Kelley c. Canada, 2011 CF 1335, aux paragraphes 26 et 27; Armstrong c. Canada (Procureur général), 2005 CF 1013, aux paragraphes 39 et 40; Chopra c. Canada (Conseil du Trésor) (1999), 168 F.T.R. 273, au paragraphe 9). On doit s’assurer que l’affidavit ne va pas plus loin en fournissant des éléments de preuve se rapportant au fond de la question déjà tranchée par le tribunal administratif, au risque de s’immiscer dans le rôle que joue le tribunal administratif en tant que juge des faits et juge du fond. En l’espèce, les demanderesses invoquent cette exception en ce qui concerne la plus grande partie de l’affidavit de M. Juliano.

b)  Parfois les affidavits sont nécessaires pour porter à l’attention de la juridiction de révision des vices de procédure qu’on ne peut déceler dans le dossier de la preuve du tribunal administratif, permettant ainsi à la juridiction de révision de remplir son rôle d’organe chargé de censurer les manquements à l’équité procédurale (voir, par ex. Keeprite Workers’ Independent Union c. Keeprite Products Ltd., (1980) 29 O.R. (2D) 513 (C.A.)). Ainsi, si l’on découvrait qu’une des parties a versé un pot-de-vin au tribunal administratif, on pourrait soumettre à notre Cour des éléments de preuve relatifs à ce pot-de-vin pour appuyer un argument fondé sur l’existence d’un parti pris.

c)  Parfois, un affidavit est admis en preuve dans le cadre d’un contrôle judiciaire pour faire ressortir l’absence totale de preuve dont disposait le tribunal administratif lorsqu’il a tiré une conclusion déterminée (Keeprite, précitée).

[35]  Il y a répétition de plusieurs numéros de paragraphes dans l’affidavit du demandeur. À mon avis, les paragraphes 1 à 7 et le premier groupe de paragraphes 8 et 9, ainsi que les paragraphes 23 à 38, devraient être radiés puisqu’ils contiennent des arguments, lesquels ne sont pas admissibles en tant que nouveaux éléments de preuve. Toutefois, le deuxième groupe de paragraphes 8 et 9, ainsi que les paragraphes 10 et 11, lesquels soulèvent l’allégation de partialité seront conservés.

Question 2 : Les conclusions de la Commission eu égard au crédit d’impôt pour la condition physique des enfants, ou à la déduction pour frais de garde d’enfants sont-elles raisonnables?

Crédit d’impôt pour la condition physique des enfants

[36]  À mon humble avis, la décision de la Commission eu égard au crédit d’impôt pour la condition physique des enfants n’est pas raisonnable. La Commission a ignoré, ou a omis de prendre en compte, le fait que le demandeur n’avait jamais antérieurement débattu de la question en litige du crédit d’impôt pour la condition physique des enfants. Le demandeur n’a jamais antérieurement soumis la question en litige du crédit d’impôt pour la condition physique des enfants, aux termes de l’article 122.8 de la LIR, à une cour ou à un tribunal afin d’obtenir une décision en ce qui a trait à sa validité aux termes de la Charte : ni la Cour de l’impôt, ni notre Cour, ni la Cour d’appel fédérale. De même, le demandeur n’a jamais débattu de son opposition relative au crédit d’impôt pour la condition physique des enfants au motif qu’il est discriminatoire, sur le plan de la situation familiale ou de l’état civil, à son égard et à l’égard d’autres parents de familles séparées, en contravention de l’article 5 de la LCDP. La défenderesse ne conteste pas cette situation. Par conséquent, la décision est indéfendable au regard du dossier présenté à la Commission et elle est, dans ces conditions, déraisonnable.

[37]  Je ne comprends pas très bien pourquoi la Commission a ignoré ce fait important, parce que le demandeur a précisément soutenu ce point dans sa lettre de réponse.

[38]  La défenderesse affirme que l’article 63 (frais de garde d’enfants) et l’article 122.8 (crédits d’impôt pour la condition physique des enfants) sont semblables et que, par conséquent, le fait de statuer sur la validité de la déduction pour frais de garde d’enfants au regard de la Charte tranche également les questions de validité au regard de la Charte et de la LCDP concernant les crédits d’impôt pour la condition physique des enfants [traduction] « dans leur ensemble ». Je ne suis pas d’accord. Bien que les deux articles portent sur l’allègement fiscal des parents qui ont la garde des enfants, ils sont loin d’être identiques. En fait, et de manière plutôt incohérente, la défenderesse affirme, par ailleurs, que les deux dispositions sont différentes : elle allègue que bien que les frais de garde d’enfants puissent être déduits uniquement par les personnes qui résident avec l’enfant, les crédits d’impôt pour la condition physique des enfants ne sont pas frappés d’une telle restriction. Il pourrait également y avoir d’autres distinctions. À titre d’exemple, les frais de garde d’enfants donnent ouverture à une déduction alors que l’allègement fiscal pour la condition physique des enfants donne ouverture à un crédit d’impôt. La suggestion selon laquelle le fait de trancher l’une de ces questions a pour effet de trancher l’autre [traduction] « dans son ensemble » est, à mon avis, déraisonnable en ce qui a trait à leur validité aux termes de la LCDP ou de la Charte, parce qu’une telle conclusion est, en l’espèce, indéfendable au regard du droit.

[39]  Ce qui compte est que le demandeur n’a jamais débattu du caractère discriminatoire du crédit d’impôt pour la condition physique des enfants, en contravention de la LCDP ou de la Charte, ou obtenu de décision sur le sujet. Pourtant, dans les faits, c’est la conclusion à laquelle la Commission est parvenue, conclusion non étayée par le dossier et contraire à ce dernier.

[40]  Si j’aborde la décision comme un tout et, plus important encore, si je l’examine dans le contexte du dossier en l’espèce, je suis d’avis, en toute déférence, qu’elle n’appartient pas aux issues pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Par conséquent, je dois conclure que la décision de la Commission concernant la plainte visant le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants, aux termes de l’article 122.8 de la LIR, est déraisonnable selon l’arrêt Dunsmuir. Il faut donc l’annuler.

Frais de garde d’enfants

[41]  Toutefois, je ne suis pas convaincu que la Commission a agi de manière déraisonnable lorsqu’elle a conclu que la demande du demandeur relative aux frais de garde d’enfants, aux termes de l’article 63 de la LIR, était vexatoire. Cette conclusion est justifiée par le dossier; la demande du demandeur avait déjà été examinée par notre Cour et par la Cour d’appel fédérale. Je reconnais que la Cour d’appel fédérale a fondé sa décision sur l’absence d’éléments de preuve, mais le demandeur a eu une occasion pleine et équitable de défendre ses allégations de discrimination devant les deux cours. De plus, indépendamment des motifs de la Cour d’appel fédérale soulignant la nécessité d’un fondement de preuve approprié pour appuyer une allégation de discrimination fondée sur la Charte, le demandeur n’a pas, pour ainsi dire, déposé d’éléments de preuve supplémentaires à ceux qu’il avait antérieurement déposés.

[42]  Alors que la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale, à l’occasion du litige précédent, ont examiné des demandes fondées sur le paragraphe 15(1) de la Charte, plutôt que des plaintes de discrimination aux termes de l’article 5 de la LCDP, la Cour d’appel fédérale fait le lien entre les deux dans l’arrêt Brown. Dans cet arrêt, la Cour d’appel fédérale a tranché qu’il serait injustifiable de conclure qu’une disposition jugée non discriminatoire aux termes de la Charte serait, malgré tout, discriminatoire aux termes de la LCDP. À mon avis, le même raisonnement s’applique en l’espèce. Par conséquent, étant donné que la Cour fédérale a conclu à l’absence de discrimination aux termes de la Charte en ce qui a trait aux allégations du plaignant en l’espèce, la justice n’exige pas que la Commission traite la plainte aux termes de la LCDP. Je reconnais que la Cour d’appel fédérale a choisi de rejeter l’appel du demandeur fondé sur la Charte en raison de l’absence d’éléments de preuve, mais le bien-fondé de l’affaire a été tranché par la Cour fédérale.

[43]  Une fois de plus, si j’examine globalement la décision sur la demande concernant les frais de garde d’enfants, et compte tenu du dossier présenté à la Commission, je conclus que la décision de cette dernière appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit, selon l’arrêt Dunsmuir. La demande de contrôle judiciaire doit donc être rejetée concernant la demande portant sur les frais de garde d’enfants.

[44]  Par conséquent, j’annulerais la décision de la Commission, mais seulement en ce qui a trait à la plainte du demandeur concernant à l’article 122.8 de la LIR portant sur le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants.

Question 3 : La décision de la Commission est-elle viciée en raison d’un manquement à l’équité procédurale, notamment la partialité du personnel d’intervention préventive de la Commission?

[45]  En l’espèce, la question d’équité procédurale est soulevée en lien avec une allégation de partialité du personnel de la Commission à l’encontre du demandeur. Comme je l’ai déjà noté, les questions d’équité procédurale sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte.

[46]  Les éléments de preuve incontestés du demandeur, comme exposé dans sa lettre de réponse à la Commission du 9 novembre 2015, démontrent qu’il a eu une conversation téléphonique avec le gestionnaire de la Direction générale des services de résolution précoce (le gestionnaire). Cette Direction générale examine et prépare des documents et des recommandations qu’elle achemine à la Commission, après avoir obtenu les commentaires des parties, et qui sont destinés à établir si une plainte doit être rejetée aux termes de l’article 41 de la LCDP.

[47]  Selon le dossier, le gestionnaire a tenu les propos suivants lors de son entretien avec le plaignant :

[traduction]

J’en ai assez, c’est terminé, en ce qui me concerne, votre démarche est terminée, il sera établi qu’elle est vexatoire, vous ne pouvez pas sans cesse revenir à la charge, et il y a longtemps que votre occasion d’interjeter appel de la décision de la cour est passée. Par conséquent, c’est la fin en ce qui vous concerne.

[48]  Cette allégation figure deux fois dans le dossier. Premièrement, elle se trouve dans la lettre de réponse du demandeur envoyée à la Commission, comme précitée. Deuxièmement, elle est répétée, moyennant certains changements, dans l’affidavit du demandeur déposé à l’occasion de la présente demande de contrôle judiciaire, lequel indique que le gestionnaire a tenu les propos suivants lors de son entretien avec le demandeur :

[traduction]

C’est fini pour vous, il n’y a plus rien à y faire, vous ne pouvez pas sans cesse revenir à la charge, et il y a longtemps que votre occasion d’interjeter appel de la décision de la cour est passée, c’est la fin en ce qui vous concerne.

[49]  Les deux versions, bien que ce soit encore plus vrai dans le cas de la déclaration non assermentée, font état de propos troublants de la part d’un fonctionnaire occupant un poste important au sein de la Commission.

[50]  Je reconnais que l’obligation d’équité qui incombait aux personnes chargées de mener les enquêtes préliminaires aux termes de l’article 41 de la LCDP est parmi les moins exigeantes. Comme l’indique le juge Evans (tel était alors son titre) :

[18]  Comme c’est le cas pour les droits de participation conférés par l’obligation d’agir équitablement, la norme d’impartialité applicable à un organisme administratif varie en fonction du contexte juridique, administratif et factuel dans lequel le litige a pris naissance. Ainsi, les organismes administratifs qui exercent des fonctions juridictionnelles, y compris les tribunaux des droits de la personne, sont assujettis à une norme d’impartialité exigeante qui s’apparente à celle que doivent observer les tribunaux : voir, par exemple, Great Atlantic & Pacific Co. of Canada v. Ontario (Human Rights Commission) (1993), 1993 CanLII 8616 (ON SC), 13 O.R. (3d) 824 (C. div.). Par contre, une norme beaucoup moins stricte a été appliquée à un conseil municipal qui a voté au sujet d’un règlement de zonage dans l’exercice de sa compétence législative : Save Richmond Farmland Society c. Richmond (Canton), 1990 CanLII 1132 (CSC), [1990] 3 R.C.S. 1213.

[19]  À mon avis, la norme d’impartialité applicable aux enquêteurs et aux membres de la Commission est parmi les moins sévères, du moins lorsque les allégations de partialité sont fondées sur le fait qu’ils ont exprimé des opinions qui témoignent d’un préjugement des questions à l’étude. Pour s’acquitter du fardeau qui lui incombe dans la présente affaire, le demandeur doit démontrer que Mme Falardeau-Ramsay avait l’esprit fermé lorsqu’elle a participé à la décision de la Commission de déférer les plaintes déposées contre lui à un Tribunal.

Zündel c Canada (Procureur général), [1999] 4 RCF 289, 1999 CanLII 9357 (CF) [Zündel]

[Non souligné dans l’original.]

[51]  Néanmoins, les allégations de partialité du demandeur n’ont d’aucune façon été contredites. Aucun élément de preuve contraire n’a été déposé, et le demandeur n’a pas été contre-interrogé. Je note également que, bien que cette allégation figurait dans la lettre de réponse que le demandeur a envoyée à la Commission, les auteurs du rapport 40-41 ont choisi de ne pas indiquer cette allégation de partialité, pour des motifs absents du dossier. La question de la partialité n’a pas été abordée dans le résumé de la thèse du plaignant dans le rapport 40-41 ni dans l’analyse de celle-ci. Aucune explication n’a été présentée pour expliquer ces omissions.

[52]  Je note que la lettre de réponse concrète du demandeur a été envoyée à la Commission avec le rapport 40-41. Toutefois, à mon humble avis, il faut porter à l’attention de la Commission directement une allégation de partialité concernant son personnel, lorsque cette partialité alléguée concerne les personnes qui préparent les documents aux fins d’examen par la Commission, comme en l’espèce. Si ce n’est pas fait, la Commission, elle-même, doit aborder une question aussi sérieuse, ou permettre à notre Cour de conclure que la Commission n’a aucunement tenu compte des observations du demandeur :

26  [...] Cependant, lorsque ces observations font état d’omissions importantes ou substantielles dans l’enquête et étayent ces affirmations, la Commission doit mentionner ces divergences et préciser pourquoi, à son avis, elles ne sont pas importantes ou ne suffisent pas à mettre en doute la recommandation de l’enquêteur; sinon, on ne peut que conclure que la Commission n’a pas du tout pris en considération ces observations. Telle était la situation dans Egan c. Canada (Procureur général), [2008] A.C.F. no 816; 2008 CF 649.

Herbert c Canada (Procureur général), 2008 CF 969, au paragraphe 26.

[53]  Cette situation n’est pas nouvelle non plus. Il y a dix ans, la juge Mactavish a conclu qu’un défaut du personnel de la Commission et de la Commission elle-même d’examiner la question de la partialité rendait dangereux de confirmer la décision de la Commission :

L’allégation de partialité

[73]  Je suis extrêmement troublée par le fait que la Commission n’ait apparemment pas répondu à l’allégation de Mme Sanderson selon laquelle l’enquêtrice à qui a été confiée sa plainte n’était pas suffisamment neutre.

[74]  Il ressort de l’examen des observations préparées par Mme Sanderson en réponse au rapport de l’enquêtrice de la Commission que Mme Sanderson a formulé des allégations très graves au sujet d’un risque de partialité de la part de l’enquêtrice.

[75]  Compte tenu de la nature non décisionnelle des responsabilités de la Commission, il a été statué que la norme d’impartialité exigée d’un enquêteur de la Commission est moins stricte que celle qui s’applique aux membres de la magistrature. Plus précisément, il ne s’agit pas de savoir s’il existe une crainte raisonnable de partialité de la part de l’enquêteur mais plutôt de savoir si l’enquêteur a abordé l’affaire avec un « esprit fermé » : voir Zündel c. Canada (Procureur général) (1999), 175 D.L.R. 512, aux par. 17 à 22.

[76]  Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de noter que, lorsque la Commission a décidé de rejeter la plainte de Mme Sanderson, elle disposait d’éléments de preuve non contestés indiquant que l’enquêtrice avait une relation personnelle avec un des principaux témoins, et que cette relation avait amené l’enquêtrice à aborder l’enquête avec un esprit fermé.

[77]  Il est possible que la Commission ait jugé non fondées les allégations de Mme Sanderson après les avoir examinées. Il n’existe toutefois aucun élément révélant que cela ait été le cas, étant donné que le dossier n’indique aucunement que la Commission ait jamais examiné les allégations de Mme Sanderson sur ce point avant de décider de rejeter sa plainte.

[78]  La Commission aurait dû examiner les allégations graves faites par Mme Sanderson. Le fait que la Commission n’ait pas abordé ces aspects est une autre raison pour laquelle j’estime qu’il serait dangereux de confirmer la décision de la Commission.

Sanderson c Canada (Procureur général), 2006 CF 447.

[54]  Pour conclure sur ce point, je ne suis pas convaincu que le demandeur a satisfait au critère relativement élevé pour démontrer la partialité énoncée dans la décision Zündel. Bien que je conclue, selon les éléments de preuve à ma disposition, que le fonctionnaire qui s’est adressé au demandeur avait l’esprit fermé concernant la plainte déposée par ce dernier, je ne suis pas en mesure de préciser quelle a été la participation de cette personne à la préparation du rapport 40-41 présenté à la Commission. Cela dit, étant donné que le contrôle judiciaire est autorisé, il y a lieu d’ordonner que tout autre rapport 40-41 postérieur soit préparé sans la participation du gestionnaire en question.

Question 4 : Quelle mesure la Cour doit-elle accorder?

[55]  Il y a lieu, à ce point, de tenir compte de l’argument de la défenderesse selon lequel la plainte du demandeur constitue une contestation directe de certaines dispositions de la LIR et, par conséquent, elle ne relève pas de la LCDP. Sur ce point, je suis d’accord avec la défenderesse. À mon humble avis, la plainte du demandeur constitue une contestation directe de certaines dispositions de la LIR et, par conséquent, elle ne relève pas de la LCDP parce qu’elle vise la loi en tant que telle, et rien d’autre. La LCDP ne prescrit pas le dépôt d’une plainte visant des lois du législateur : Alliance de la fonction publique du Canada c Canada (Agence du revenu), 2012 CAF 7 [Murphy], aux paragraphes 5 et 6, l’autorisation d’interjeter appel devant la CSC a été refusée, 34706 (le 8 novembre 2012). L’arrêt Murphy énonce ce qui suit :

[6]  Il s’agit là d’une attaque directe à l’encontre des articles 110.2 et 120.31 de la LIR, fondée sur des considérations entièrement extrinsèques à celle-ci. Or, ainsi qu’il a été conclu aux paragraphes 37 et 38 de la décision Forward c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 TCDP 5, à propos d’une plainte analogue mettant en cause des dispositions précises de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C-29, les contestations de cette nature échappent au champ d’application de la LCDP, parce qu’elles visent les dispositions législatives en soi et rien d’autre. Dans le même ordre d’idées, la Cour fédérale a fait observer en obiter dans Wignall c. Canada (Ministre du Revenu national), 2003 CF 1280, que l’opposition en vertu de la LCDP à l’application de l’alinéa 56(1)n) de la LIR était vouée à l’échec si elle se fondait seulement sur ses conséquences supposées discriminatoires pour le plaignant : seule une contestation de la constitutionnalité de cette disposition offrait des chances de succès. Nous souscrivons à l’opinion exprimée dans ces décisions, étant donné que la LCDP ne prévoit pas la possibilité de déposer de plaintes contre une loi fédérale (voir son paragraphe 40(1), qui autorise le dépôt de plaintes, et ses articles 5 à 14.1, qui définissent les « actes discriminatoires » pouvant faire l’objet de celles-ci).

[Non souligné dans l’original.]

[56]  La Cour d’appel fédérale a récemment confirmé l’arrêt Murphy : voir l’arrêt Canada (Commission des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2016 CAF 200 [Andrews]. Dans l’arrêt Andrews, la Cour d’appel fédérale, sous la plume de la juge Gleason, est parvenue aux conclusions suivantes :

[104]  Je conclus par conséquent que les décisions rendues par le Tribunal dans les affaires Matson et Andrews sont raisonnables, et qu’il n’existe aucune raison de conclure que la jurisprudence Murphy ne fait plus autorité.

[57]  La LCDP crée un régime législatif. L’article 5 de la LCDP énonce les [traduction] « actes discriminatoires » pouvant faire l’objet de plaintes :

Refus de biens, de services, d’installations ou d’hébergement

Denial of good service, facility or accommodation

5 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, pour le fournisseur de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public :

5 It is a discriminatory practice in the provision of goods, services, facilities or accommodation customarily available to the general public

a) d’en priver un individu;

(a) to deny, or to deny access to, any such good, service, facility or accommodation to any individual, or

b) de le défavoriser à l’occasion de leur fourniture.

(b) to differentiate adversely in relation to any individual,

(EN BLANC)

on a prohibited ground of discrimination.

[58]  Comme on peut le constater, une plainte visant une loi adoptée par le législateur canadien ne fait partie d’aucune des [traduction] « pratiques » pouvant faire l’objet d’une plainte pour pratique discriminatoire aux termes de la LCDP. Essentiellement, c’est pourquoi une attaque directe contre des dispositions de la LIR échappe au champ d’application de la LCDP.

[59]  Je note que la demande d’autorisation d’interjeter appel de l’arrêt Murphy à la Cour suprême du Canada a été refusée. L’arrêt Andrews, précité, fait actuellement l’objet d’une demande d’autorisation d’interjeter appel à la Cour suprême du Canada : Commission canadienne des droits de la personne c Procureur général du Canada, dossier de la CSC no 37208. Cela dit, je dois appliquer le droit dans son état actuel.

[60]  En l’espèce, j’ai conclu que la décision de la Commission était déraisonnable en ce qui a trait à la plainte concernant la validité des dispositions concernant le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants de l’article 122.8 de la LIR. Toutefois, j’ai également conclu que les plaintes du demandeur échappent au champ d’application de la LCDP au départ. Je note que l’alinéa 41(1)c) de la LCDP autorise la Commission à rejeter une plainte qui est hors de son ressort. Je suis d’avis qu’il incombe à la Commission de décider de ce qu’il faut faire avec la plainte du demandeur portant sur le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants. Par conséquent, à mon humble avis, la mesure appropriée consiste à accueillir la demande de contrôle judiciaire et à ordonner que la partie de la plainte du demandeur concernant le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants soit examinée de nouveau selon les modalités établies dans le jugement.

VIII.  Dépens

[61]  Le défendeur n’a demandé aucuns dépens et, par conséquent, aucuns dépens ne sont accordés.

IX.  Conclusions

[62]  La demande de contrôle judiciaire est accueillie en partie et la plainte du demandeur concernant le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants est renvoyée à la Commission pour nouvelle détermination suivant la directive contenue dans le jugement; la demande est rejetée en ce qui a trait aux autres éléments. Aucuns dépens ne sont adjugés.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. Les paragraphes 1 à 7 ainsi que le premier groupe de paragraphes 8 et 9, de même que les paragraphes 23 à 38, de l’affidavit du demandeur sont radiés.

  2. La demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission rendue le 14 janvier 2016 est accueillie en partie, dans la mesure où la décision porte sur la plainte du demandeur en ce qui a trait au crédit d’impôt pour la condition physique des enfants aux termes de l’article 122.8 de la Loi de l’impôt sur le revenu, mais elle est rejetée en ce qui a trait à la partie de la plainte portant sur la déduction pour frais de garde d’enfants aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

  3. Ladite décision est annulée en ce qui a trait à la plainte du demandeur concernant le crédit d’impôt pour la condition physique des enfants aux termes de l’article 122.8 de la Loi de l’impôt sur le revenu, mais elle n’est pas annulée en ce qui a trait à la déduction pour frais de garde d’enfants aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

  4. La plainte du demandeur concernant l’article 122.8 de la Loi de l’impôt sur le revenu est renvoyée à la Commission pour être examinée de nouveau en tenant compte de la directive selon laquelle aucun poids ne doit être accordé à toute section du rapport 40-41 préparée par le fonctionnaire mentionné aux paragraphes 46 à 48 des motifs, ou avec la participation de ce dernier.

  5. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce11e jour de juin 2020

Lionbridge


Annexe

Loi canadienne sur les droits de la personne LRC 1985, c H-6

Motifs de distinction illicite

Prohibited grounds of discrimination

3 (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

3 (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for an offence for which a pardon has been granted or in respect of which a record suspension has been ordered.

Actes discriminatoires

Discriminatory Practices

Note marginale : Refus de biens, de services, d’installations ou d’hébergement

Marginal note: Denial of good service, facility or accommodation

5 Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, pour le fournisseur de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public :

5 It is a discriminatory practice in the provision of goods, services, facilities or accommodation customarily available to the general public

a) d’en priver un individu;

(a) to deny, or to deny access to, any such good, service, facility or accommodation to any individual, or

b) de le défavoriser à l’occasion de leur fourniture.

(b) to differentiate adversely in relation to any individual,

(EN BLANC)

on a prohibited ground of discrimination.

Plaintes

Complaints

40 (1) Sous réserve des paragraphes (5) et (7), un individu ou un groupe d’individus ayant des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire peut déposer une plainte devant la Commission en la forme acceptable pour cette dernière.

40 (1) Subject to subsections (5) and (7), any individual or group of individuals having reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice may file with the Commission a complaint in a form acceptable to the Commission.

Irrecevabilité

Commission to deal with complaint

41 (1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs suivants :

41 (1) Subject to section 40, the Commission shall deal with any complaint filed with it unless in respect of that complaint it appears to the Commission that

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

(a) the alleged victim of the discriminatory practice to which the complaint relates ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available;

b) la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale;

(b) the complaint is one that could more appropriately be dealt with, initially or completely, according to a procedure provided for under an Act of Parliament other than this Act;

c) la plainte n’est pas de sa compétence;

(c) the complaint is beyond the jurisdiction of the Commission;

d) la plainte est frivole, vexatoire ou entachée

de mauvaise foi;

(d) the complaint is trivial, frivolous, vexatious or made in bad faith; or

e) la plainte a été déposée après l’expiration d’un délai d’un an après le dernier des faits sur lesquels elle est fondée, ou de tout délai supérieur que la Commission estime indiqué dans les circonstances.

(e) the complaint is based on acts or omissions the last of which occurred more than one year, or such longer period of time as the Commission considers appropriate in the circumstances, before receipt of the complaint.

 


Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl.)

Frais de garde d’enfants

Child care expenses

63 ...

63 ...

Note marginale : Définitions

Marginal note: Definitions

(3) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

(3) In this section,

...

...

frais de garde d’enfants Frais engagés au cours d’une année d’imposition dans le but de faire assurer au Canada la garde de tout enfant admissible du contribuable, en le confiant à des services de garde d’enfants, y compris des services de gardienne d’enfants ou de garderie ou des services assurés dans un pensionnat ou dans une colonie de vacances, si les services étaient assurés :

child care expense means an expense incurred in a taxation year for the purpose of providing in Canada, for an eligible child of a taxpayer, child care services including baby sitting services, day nursery services or services provided at a boarding school or camp if the services were provided

a) d’une part, pour permettre au contribuable, ou à la personne assumant les frais d’entretien de l’enfant pour l’année, qui résidait avec l’enfant au moment où les frais ont été engagés d’exercer l’une des activités suivantes :

(a) to enable the taxpayer, or the supporting person of the child for the year, who resided with the child at the time the expense was incurred,

(i) remplir les fonctions d’une charge ou d’un emploi,

(i) to perform the duties of an office or employment,

(ii) exploiter une entreprise, soit seul, soit comme associé participant activement à l’exploitation de l’entreprise,

(ii) to carry on a business either alone or as a partner actively engaged in the business,

(iii) [Abrogé, 1996, ch. 23, art. 173(1)]

(iii) [Repealed, 1996, c. 23, s. 173(1)]

(iv) mener des recherches ou des travaux similaires relativement auxquels il a reçu une subvention;

(iv) to carry on research or any similar work in respect of which the taxpayer or supporting person received a grant, or

(v) fréquenter un établissement d’enseignement agréé ou une école secondaire où il est inscrit à un programme d’une durée d’au moins trois semaines consécutives, selon le cas :

(v) to attend a designated educational institution or a secondary school, where the taxpayer is enrolled in a program of the institution or school of not less than three consecutive weeks duration that provides that each student in the program spend not less than

(A) aux cours ou aux travaux duquel chaque étudiant doit consacrer au moins dix heures par semaine,

(A) 10 hours per week on courses or work in the program, or

(B) aux cours duquel chaque étudiant doit consacrer au moins douze heures par mois;

(B) 12 hours per month on courses in the program, and

b) d’autre part, par une personne résidant au Canada autre qu’une personne :

(b) by a resident of Canada other than a person

(i) soit qui est le père ou la mère de l’enfant,

(i) who is the father or the mother of the child,

(ii) soit qui est la personne assumant les frais d’entretien de l’enfant ou était âgée de moins de 18 ans et liée au contribuable,

(ii) who is a supporting person of the child or is under 18 years of age and related to the taxpayer, or

(iii) soit pour laquelle un montant est déduit en application de l’article 118 dans le calcul de l’impôt payable en vertu de la présente partie pour l’année par le contribuable ou par la personne assumant les frais d’entretien de l’enfant;

(iii) in respect of whom an amount is deducted under section 118 in computing the tax payable under this Part for the year by the taxpayer or by a supporting person of the child,

toutefois ne constituent pas des frais de garde d’enfants

except that

c) tous frais de cette nature payés au cours de l’année pour un enfant qui fréquente un pensionnat ou une colonie de vacances, dans la mesure où leur total dépasse le produit de la multiplication du montant périodique de frais de garde d’enfants pour l’enfant pour l’année par le nombre de semaines de l’année pendant lesquelles l’enfant a fréquenté le pensionnat ou la colonie de vacances :

(c) any such expenses paid in the year for a child’s attendance at a boarding school or camp to the extent that the total of those expenses exceeds the product obtained when the periodic child care expense amount in respect of the child for the year is multiplied by the number of weeks in the year during which the child attended the school or camp, and

d) pour plus de précision, les frais médicaux visés au paragraphe 118.2(2) et les autres frais payés au titre des soins médicaux ou hospitaliers, de l’habillement, du transport, de l’éducation et de la pension et du logement, sauf dispositions contraires à la présente définition. (child care expense)

(d) for greater certainty, any expenses described in subsection 118.2(2) and any other expenses that are paid for medical or hospital care, clothing, transportation or education or for board and lodging, except as otherwise expressly provided in this definition,

(EN BLANC)

are not child care expenses; (frais de garde d’enfants)

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-184-16

 

INTITULÉ :

DAN FANNON c L'AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

LONDON (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 NOVEMBRE 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 19 JANVIER 2017

 

COMPARUTIONS :

Dan Fannon

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Debra L. Prupas

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour son propre compte

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

London (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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