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Date : 20170421


Dossier : IMM-4046-16

Référence : 2017 CF 390

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 21 avril 2017

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

KEYSI JAVIER MEJIA RAMOS

demandeur

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION,

DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                    Aperçu

[1]               Le demandeur, M. Mejia Ramos, sollicite, en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada datée du 7 septembre 2016. La SPR a conclu que M. Mejia Ramos n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention en vertu de l’article 96 de la LIPR, compte tenu de l’absence de lien avec les motifs prévus à la Convention. Elle a ensuite estimé qu’il n’avait pas établi qu’il était une personne à protéger en vertu de l’article 97, parce que le risque auquel il est exposé est le même que celui auquel la population du Salvador est généralement exposée.

[2]               M. Mejia Ramos est un citoyen du Salvador âgé de vingt ans. Il affirme craindre des membres de la Mara Salvatrucha, un gang qui a assassiné son ami Jaime en 2012, alors que M. Mejia Ramos avait 16 ans. Peu de temps après, le gang a commencé à extorquer de l’argent à M. Mejia Ramos, alors qu’il se rendait à l’école ou en revenait. Les membres du gang lui ont ordonné de ne rien dire au sujet des extorsions ou [traduction] « il finirait comme Jaime ». Même si M. Mejia Ramos n’a pas été témoin du meurtre, il en a déduit d’après cet avertissement que le gang avait assassiné Jaime et qu’il le tuerait s’il refusait de payer.

[3]               La SPR a reconnu que M. Mejia Ramos était citoyen du Salvador. Elle n’a tiré aucune conclusion défavorable quant à la crédibilité. L’absence de lien avec un motif prévu par la Convention et l’absence de risque personnalisé ont constitué des points déterminants. Ces deux conclusions reposaient sur la détermination faite par la SPR, selon laquelle M. Mejia Ramos était victime d’un crime qui ne le visait pas personnellement.

[4]               M. Mejia Ramos conteste seulement la conclusion de la SPR reposant sur l’article 97.

[5]               Pour les motifs suivants, je rejetterai la présente demande. Le processus décisionnel était transparent, intelligible et justifié. Il a permis à M. Mejia Ramos de savoir pourquoi la SPR est arrivée à la conclusion à laquelle elle est parvenue. À mon avis, cette conclusion appartient aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

II.                 Décision de la SPR

[6]               La SPR a souligné que l’article 97 reposait sur une évaluation objective du risque, et que la preuve devait permettre d’établir un risque spécifique visant personnellement le demandeur et non des violations généralisées des droits de la personne dans un pays. La SPR a également souligné que le fait qu’une personne soit victime d’un crime ne la qualifie pas automatiquement de personne à protéger en vertu de l’article 97. Il doit exister une preuve établissant, d’après la prépondérance des probabilités, que le demandeur est exposé à un risque de préjudice spécifique, personnalisé.

[7]               La SPR a estimé que les extorsions n’étaient pas un fait propre à M. Mejia Ramos; le gang lui a extorqué de l’argent parce qu’il avait de l’argent. Pour arriver à cette conclusion, la SPR s’est appuyée sur plusieurs faits :

-         M. Mejia Ramos ne connaissait pas les noms des membres du gang;

-         les membres du gang ne connaissaient pas le nom de M. Mejia Ramos;

-         la mère de M. Mejia Ramos, avec qui il vivait, n’avait pas été menacée puisque le gang ne savait pas où ils vivaient;

-         M. Mejia Ramos n’a pas été témoin du meurtre;

-         M. Mejia Ramos n’a jamais parlé de Jaime aux membres du gang;

-         M. Mejia Ramos n’a jamais rien signalé aux autorités;

-         le dernier contact que M. Mejia Ramos a eu avec un membre du gang remontait à juillet 2012.

[8]               Après avoir examiné les faits, la SPR a estimé que M. Mejia Ramos [traduction« n’avait pas établi qu’il était personnellement visé.  Le tribunal ne disposait d’aucun élément de preuve montrant que le demandeur a été pris pour cible pour une raison autre que le fait que le gang voulait son argent ». La SPR a conclu que, [traduction] « selon la prépondérance des probabilités, le risque auquel est exposé le demandeur est généralisé et est le même que celui auquel est généralement exposée la population du Salvador ».

III.               La question en litige

[9]               La seule question en litige est de savoir si la SPR a commis une erreur en concluant que M. Mejia Ramos n’était pas exposé à un risque personnalisé en vertu de l’article 97 de la LIPR : M. Mejia Ramos est-il exposé à un risque personnalisé ou à un risque généralisé? Les deux parties avancent que la question doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable. Je suis d’accord, puisqu’il s’agit d’une question mixte de fait et de droit : Correa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 252, au paragraphe 19 [Correa].

[10]           La décision est raisonnable si le processus décisionnel est justifié, intelligible et transparent et si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47.

IV.              La position des parties

A.                 M. Mejia Ramos

[11]           M. Mejia Ramos affirme que la SPR a commis une erreur en concluant qu’il ne serait pas exposé à un risque personnel s’il était renvoyé au Salvador. Il ne conteste pas l’évaluation faite par la SPR au titre de l’article 96. Il souligne des incohérences entre la décision et la preuve déposée devant la SPR. Par exemple, la SPR a dit que les demandes d’argent étaient faites par des membres inconnus de la Mara, alors que M. Mejia Ramos a témoigné que même s’il ne connaissait pas leurs noms, il connaissait les surnoms de deux membres du gang et il savait qu’ils étaient membres de la Mara à cause de leurs tatouages.

[12]           M. Mejia Ramos affirme que les membres de la Mara savaient qu’il était un ami de Jaime. Il a indiqué dans son témoignage devant la SPR et dans son exposé circonstancié contenu dans le formulaire Fondement de la demande d’asile (formulaire FDA) qu’il n’avait aucun problème dans sa communauté avant que Jaime ne soit assassiné. Des membres du gang lui ont par la suite demandé de l’argent six ou sept fois sur une période de plusieurs semaines alors qu’il se rendait à l’école ou qu’il en revenait. Il affirme qu’ils l’ont clairement associé à Jaime. Il craint de retourner au Salvador parce qu’il devrait alors vivre dans la même petite communauté qu’il a quittée, puisqu’il n’a pas de famille dans les autres parties du pays. Dans cette même petite communauté, il serait exposé aux mêmes problèmes causés par les membres de la Mara.

[13]           L’avocat de M. Mejia Ramos affirme que la SPR a jugé son histoire comme étant crédible, mais qu’elle en a ensuite écarté des aspects importants en concluant qu’il était seulement exposé à un risque généralisé, et qu’elle n’a pas fourni d’explication claire justifiant pourquoi certains éléments de preuve avaient été retenus et d’autres rejetés. Par exemple, M. Mejia Ramos a témoigné qu’il connaissait les surnoms de deux des membres du gang : « Sonpopo » et « Chilingo »; pourtant la SPR a affirmé que les demandes d’extorsion étaient faites par des membres inconnus de la Mara. De plus, M. Mejia Ramos a témoigné que les demandes d’extorsion avaient commencé après la mort de Jaime et que le gang l’avait [traduction] « clairement associé » à Jaime, en compagnie duquel il se trouvait la nuit précédant le meurtre, mais la SPR n’a fait aucune référence à ces éléments de preuve.

[14]           Dans son affidavit, M. Mejia Ramos a indiqué qu’il pensait que Sonpopo et ses amis étaient membres de la Mara et qu’ils lui avaient extorqué de l’argent parce qu’ils savaient qu’il aurait particulièrement peur d’eux, étant donné qu’il était un ami de Jaime. Fait important, il affirme que le gang lui a dit qu’il devait payer parce que s’il refusait, [traduction] « il pourrait lui arriver la même chose qu’à son ami Jaime ». L’avocat de M. Mejia Ramos prétend que cet avertissement personnalise la demande d’extorsion, non seulement en ajoutant une menace de mort mais également en établissant un lien direct avec Jaime. Le risque est dit personnalisé puisqu’aucun autre groupe n’est exposé à un risque découlant de liens avec un ami assassiné.

[15]           M. Mejia Ramos craint également de retourner au Salvador parce qu’il affirme que les membres du gang croiront qu’il les a dénoncés aux autorités.

[16]           L’avocat de M. Mejia Ramos affirme que la SPR n’a pas respecté la jurisprudence la plus récente traitant du risque personnalisé. Il s’appuie sur des affaires dans lesquelles la SPR a conclu que des demandeurs qui avaient fui leur pays en raison de menaces d’extorsion et de mort formulées par des membres d’un gang étaient uniquement exposés à un risque généralisé; après examen, la Cour a renversé dans ces affaires la décision de la SPR et accueilli les demandes de contrôle judiciaire : Correa; Barragan Gonzalez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 502; Mejia c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 434 et Puerto Rodriguez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1360.

[17]           En particulier, l’avocat mentionne la décision Correa, aux paragraphes 83 et 84, dans laquelle le juge Russell a souligné plusieurs principes dont il faut tenir compte lorsqu’il faut décider si un risque est généralisé ou personnalisé. Il souligne également que la décision Correa portait sur une crainte de persécution au Salvador.

B.                 Le ministre

[18]           Le ministre convient que les faits ne sont pas en litige et qu’aucune question de crédibilité n’est en jeu. Le ministre souligne, toutefois, qu’il incombe à M. Mejia Ramos de prouver qu’il est exposé à un risque personnalisé, et il ne l’a pas fait. Les faits sur lesquels s’est appuyée la SPR – notamment que le gang ne connaissait pas le nom de M. Mejia Ramos ou ne savait pas où il vivait et que son dernier contact avec un membre du gang remontait à juillet 2012 – l’a menée à la conclusion raisonnable que le risque ciblant M. Mejia Ramos n’était pas personnalisé. La preuve documentaire montre que le crime, y compris le vol, est très présent au Salvador et que le problème des gangs est répandu. Il n’y avait aucun élément de preuve convaincant montrant que M. Mejia Ramos a été pris pour cible pour une raison autre que le fait que le gang voulait son argent.

[19]           L’avocat du ministre affirme que la SPR a utilisé le bon critère et l’a appliqué comme il convenait aux faits. Reconnaissant que les décisions dans ce domaine dépendent en grande partie des faits, le ministre avance que les faits allégués par M. Mejia Ramos cadrent davantage avec la jurisprudence dans laquelle on a estimé que le risque était généralisé. Le gang en sait très peu au sujet de M. Mejia Ramos – il ne connaît pas son nom ni son adresse. Dans les affaires pour lesquelles il a été estimé qu’il existait un risque personnalisé, le ciblage personnalisé était très clair. En l’espèce, les faits ne sont pas aussi clairs. Dans son témoignage, M. Mejia Ramos a dit connaître les surnoms de deux membres du gang; cela n’équivaut pas à connaître leur identité. Il était raisonnable pour la SPR de conclure qu’il ne connaissait pas l’identité de ceux qui l’avaient attaqué.

[20]           Le ministre nous invite à comparer les faits en l’espèce avec les décisions dans lesquelles on a conclu à l’existence d’un risque personnalisé, affirmant que les faits en l’espèce ne sont pas suffisants pour conclure à l’existence d’un risque personnalisé; ils cadrent davantage avec les décisions où la SPR et notre Cour ont conclu à l’existence d’un risque généralisé.

C.                 Analyse

(1)               La décision de la SPR selon laquelle la demande d’asile faite en vertu de l’article 97 n’était pas valide était-elle raisonnable?

[21]           L’évaluation fondée sur l’article 97 est de nature prospective. La question est de savoir si le ciblage de M. Mejia Ramos était tel qu’il demeurerait une cible s’il était renvoyé au Salvador. En ce sens, la conclusion de la SPR selon laquelle M. Mejia Ramos était vulnérable à l’extorsion ne contredit pas l’idée qu’il a été pris pour cible simplement pour son argent. La question est de savoir si la conclusion de la SPR selon laquelle M. Mejia Ramos n’était pas personnellement ciblé était raisonnable.

[22]           Dans la décision Correa, le juge Russell a examiné la jurisprudence de notre Cour portant sur l’extorsion par des gangs, puisqu’on affirmait qu’il y existait une divergence. Il a souligné que dans le cas de M. Correa, ce dernier avait personnellement été pris pour cible. Le gang avait effectué une surveillance de la maison, avait des photos de M. Correa et de sa femme dans divers endroits et avait menacé de tuer M. Correa s’il allait voir la police. Ils savaient où il travaillait, ils l’ont appelé au téléphone et ont tenté de le kidnapper. Le gang a également continué de chercher M. Correa après qu’il eut fui le pays.

[23]           Le juge Russell a estimé que bien que le risque auquel était exposé M. Correa pouvait avoir commencé par de l’extorsion, il s’était fondamentalement muté en un risque que lui ou un membre de sa famille soit tué ou gravement blessé parce qu’il avait rejeté les demandes du gang et l’avait signalé à la police. Comme l’a dit le juge Russell, les faits démontraient que les actes de violence étaient de plus en plus graves, de sorte que la situation était devenue extrêmement dangereuse pour M. Correa et sa famille.

[24]           Aucun de ces éléments relatifs à un risque grave, personnalisé, n’est présent en l’espèce. En l’espèce, M. Mejia Ramos a versé l’argent demandé, il n’a pas dénoncé le gang à la police et le gang n’a jamais menacé sa famille. En fait, à l’exception de cet avertissement selon lequel il devrait payer pour ne pas finir comme son ami Jaime, il n’y a pas eu de menaces. La SPR a reconnu le fait que M. Mejia Ramos avait dit que la Mara avait assassiné Jaime, mais elle a mis ce fait en balance avec son témoignage, selon lequel il n’avait pas été témoin du meurtre ou n’avait pas mentionné le nom de Jaime au gang. Lorsque la SPR a demandé à M. Mejia Ramos s’il avait des raisons de croire que la Mara s’intéressait toujours à lui quatre ans après son dernier contact avec le gang, sa réponse a été que le gang pouvait toujours le reconnaître.

[25]           Dans la décision Portillo c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 678 [Portillo], la juge Gleason, qui était alors juge de notre Cour, a examiné un certain nombre de décisions portant sur des conclusions tirées en ce qui concerne l’article 97 de la LIPR. Elle a conclu que « le point de départ essentiel de l’analyse relative à l’article 97 de la LIPR consiste à définir correctement la nature du risque auquel le demandeur est exposé.  Pour ce faire, il faut déterminer si le demandeur est exposé à un risque persistant ou à venir ». Une fois la nature du risque déterminée, l’étape suivante consiste à comparer ce risque à celui auquel est exposée une partie importante de la population du pays, afin de déterminer si ces risques sont similaires de par leur nature et leur gravité (Portillo précité, aux paragraphes 40 et 41).

[26]           Dans la décision Correa, le juge Russell, dans son application du premier volet de ce critère, a examiné la nature du risque auquel était exposé M. Correa. Il a estimé qu’il n’était pas exposé à un risque d’extorsion, qui constituait la menace initiale, mais plutôt « à un risque en tant que personne qui avait été précisément et personnellement ciblée, dont la vie et la famille avaient été menacées et attaquées et qui avait refusé d’obtempérer aux demandes qui lui avaient été faites et qui avait dénoncé le gang à la police. ». Il a souligné que la Commission avait confondu les raisons pour lesquelles le demandeur avait été pris pour cible avec le risque lui-même. Au lieu d’examiner la raison initiale de l’extorsion, la Commission aurait dû examiner le risque auquel était exposé M. Correa à ce moment. Elle aurait alors constaté que les événements avaient transformé le risque initial d’extorsion que vivait la population en général en un risque très personnalisé, comme le montraient les photos de surveillance et les menaces de mort visant la famille de M. Correa.

[27]           En l’espèce, la SPR ne disposait d’aucun élément de preuve montrant que le risque auquel était exposé M. Mejia Ramos s’était aggravé ou transformé de quelque manière que ce soit; les demandes d’extorsion ont continué et M. Mejia Ramos a versé l’argent, jusqu’à ce qu’il fuie le pays. La SPR a souligné que la documentation sur la situation au pays montrait que le vol qualifié était chose commune au Salvador. Elle a conclu qu’une demande pour obtenir de l’argent faite par un gang criminalisé représente un risque généralisé similaire à celui auquel sont exposées d’autres personnes du Salvador qui pourraient avoir de l’argent. Sans autres éléments de preuve déposés par M. Mejia Ramos, la conclusion qu’a tirée la SPR était raisonnable. En clair, prendre pour cible un écolier vulnérable pour l’extorquer n’est pas comme prendre pour cible quelqu’un qui a été témoin d’un meurtre. Étant donné le peu de connaissances dont disposait le gang au sujet de M. Mejia Ramos, la SPR ne disposait d’aucun élément de preuve montrant que le gang avait un intérêt à le pourchasser. Après qu’il eut fui le pays, il ne semble pas qu’il y ait eu d’autres incidents. Sa mère n’a pas été menacée et il n’a jamais reçu d’appel téléphonique ou de lettres de menace pour lui demander de l’argent. La SPR pouvait raisonnablement conclure que, au moment de l’audience, M. Mejia Ramos n’était pas exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités plus que ne le sont généralement les résidents du Salvador.

(2)               M. Mejia Ramos aurait-il pu présenter une demande d’asile sur place?

[28]           Dans son mémoire écrit et à l’audience devant la SPR, M. Mejia Ramos a dit qu’il ne pouvait être renvoyé parce que le gang croirait avoir été dénoncé à la police pendant le séjour de M. Mejia Ramos à l’étranger et qu’il le tuerait. Cette crainte, qui pourrait faire l’objet d’une demande d’asile sur place, a été implicitement rejetée par la SPR. Étant donné l’importance accordée par la SPR au fait que M. Mejia Ramos n’a jamais été témoin du meurtre de Jaime ou n’a jamais parlé au gang au sujet de ce meurtre et n’est jamais allé voir la police, il semble qu’elle ait estimé que cette crainte était purement spéculative de la part de M. Mejia Ramos. Il n’existe pas de preuve selon laquelle le gang aurait pu croire qu’il avait dénoncé les extorsions ou le meurtre aux autorités. L’exposé circonstancié contenu dans le formulaire FDA fourni par M. Mejia Ramos ne faisait pas mention de cette crainte; il a dit qu’il avait peur que le gang lui extorque de l’argent s’il était renvoyé.

[29]           La SPR ne disposait d’aucun élément de preuve lui permettant de conclure, de manière objective, que M. Mejia Ramos serait pris pour cible pour avoir dénoncé le gang aux autorités. La preuve montre que M. Mejia Ramos n’a pas signalé les extorsions initiales à la police et qu’à l’exception de sa propre crainte, M. Mejia Ramos n’a déposé aucun élément de preuve pour étayer une demande d’asile faite en vertu de l’article 97.

V.                 Conclusion

[30]           La SPR en est arrivée à une décision qui était raisonnable étant donné la preuve. Elle appartenait aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Le processus décisionnel était justifié, transparent et intelligible, puisque les raisons expliquant pourquoi la SPR est arrivée à la conclusion à laquelle elle est parvenue étaient claires. M. Mejia Ramos n’a pas présenté d’éléments de preuve montrant que le gang voulait autre chose de lui que de l’argent. Le fait qu’il a été autrefois pris pour cible ne doit pas empêcher la SPR de conclure de manière raisonnable qu’il ne serait pas exposé à un risque plus grand que celui auquel est exposé le reste de la population s’il était renvoyé au Salvador.

[31]           La demande est rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification, et aucune question n’a été soulevée eu égard aux faits de l’espèce.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande. Aucune question à certifier n’a été proposée et la présente affaire n’en soulève aucune.

« E. Susan Elliott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-4046-16

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

KEYSI JAVIER MEJIA RAMOS c. LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa, Ontario

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 6 mars 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 21 avril 2017

 

COMPARUTIONS :

Francis Chaput

 

Pour le demandeur

 

Stephen Kurelek

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jacques Despatis

Avocat

Ottawa, Ontario

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général

du Canada

Ottawa, Ontario

 

Pour le défendeur

 

 

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