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Date : 20180125


Dossier : IMM-3248-17

Référence : 2018 CF 75

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 25 janvier 2018

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

PASCAL UGOCHUKWU MADUEKWE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  APERÇU ET CONTEXTE

[1]  Il y a une seule question faisant l’objet du contrôle dans la présente demande. Il s’agit de la même question que celle qui a été déposée en vue de sa certification par monsieur le juge Fothergill dans la décision Bousaleh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 216, 281 ACWS (3d) 376 [Bousaleh] au titre de l’alinéa 117(1)h) :

Afin de décider si une personne est admissible à parrainer un membre de sa parenté au titre de l’alinéa 117(1)h) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, faut-il d’abord examiner si une demande de parrainage d’une personne énumérée à l’alinéa 117(1)h) a une chance raisonnable d’être accueillie?

[2]  Les faits s’apparentent à ceux de la décision Bousaleh. M. Maduekwe a présenté une demande en vue de parrainer son neveu au Nigéria pour l’obtention d’un visa de résident permanent, au titre de l’alinéa 117(1)h) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (RIPR). La mère de M. Maduekwe est vivante, mais, à son avis, elle est interdite de territoire au Canada pour des raisons médicales.

[3]  Le 25 août 2016, un agent travaillant au Centre de traitement des demandes à Mississauga a conclu que M. Maduekwe était inadmissible à parrainer son neveu, car sa mère était toujours vivante. M. Maduekwe avait indiqué qu’il souhaitait que sa demande soit traitée en dépit de la question de son admissibilité. La demande a donc été envoyée au bureau des visas à Accra, au Ghana, afin que des motifs d’ordre humanitaire puissent être examinés.

[4]  Au moyen de lettres datées du 15 et du 16 novembre 2016, adressées au neveu et à M. Maduekwe, respectivement, ces derniers ont appris que la demande de visa de résident permanent avait été refusée. Le neveu a été informé qu’il n’était pas un membre de la catégorie du regroupement familial puisque la mère de M. Maduekwe était toujours vivante. De la même façon, M. Maduekwe a appris qu’il était inadmissible à parrainer son neveu puisque sa mère était toujours vivante.

[5]  La question de l’admissibilité financière de M. Maduekwe à présenter une demande de parrainage ne se pose pas en l’espèce, contrairement à la décision Sendwa c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 216, 39 Imm LR (4th) 328 [Sendwa].

[6]  La journée suivant la date de réception de la lettre de refus, M. Maduekwe a interjeté appel auprès de la Section d’appel de l’immigration.

[7]  Dans ses observations écrites auprès de la Section d’appel de l’immigration, M. Maduekwe a indiqué qu’il n’a pas tenté de parrainer sa mère, car cette dernière serait interdite de territoire pour des raisons médicales. Il a indiqué qu’elle ne pouvait quitter sa ville de résidence pour se rendre à une ville où elle pourrait consulter un médecin désigné afin de subir un examen médical aux fins d’immigration au Canada. Plutôt, M. Maduekwe a présenté une lettre du médecin de la localité de sa mère ainsi que des photographies illustrant qu’elle avait besoin d’assistance physique en 2008. Il a également soutenu que la santé de sa mère constituerait un fardeau excessif pour les services sociaux au Canada. Il a estimé qu’elle aurait besoin de 8 heures par jour de soins à domicile et de services de soutien pendant qu’il serait au travail et que ces services coûteraient 41 600 $.

[8]  Le ministre a soutenu que même si M. Maduekwe aurait pu parrainer sa mère, il a décidé de ne pas le faire en se fondant sur sa propre évaluation de son état. Aucun élément de preuve documentaire n’a été présenté par M. Maduekwe pour appuyer la thèse qu’il a avancée dans son affidavit voulant sa mère était dans l’impossibilité de voyager et qu’elle était interdite de territoire pour des raisons médicales. De plus, elle n’a pas subi d’examen par un médecin désigné et un agent d’immigration n’a pas statué sur son admissibilité sur le plan médical. Si sa mère avait été déclarée interdite de territoire pour des raisons médicales, M. Maduekwe aurait pu invoquer des motifs d’ordre humanitaire dans le cadre d’un appel d’une telle décision.

II.  DISCUSSION

[9]  M. Maduekwe se représente lui-même. Il s’était entretenu avec un fonctionnaire judiciaire concernant la date de l’audience, il ne s’est toutefois pas présenté avant la fin de l’audience à 10 h 04 (l’affaire avait également été reportée de 9 h 30 à 9 h 50 pour donner à M. Maduekwe le temps d’arriver) et il n’a pas demandé d’ajournement avant l’audience. L’audience s’est déroulée en son absence, mais en se fondant sur des documents écrits qu’il avait déposés avec sa demande. Aucune nouvelle question n’a été soulevée à l’audience. Je suis d’avis que les documents écrits présentés par M. Maduekwe ont suffi à exposer sa thèse et que son absence n’a pas eu d’incidence sur la décision relative à la présente demande.

[10]  La norme de contrôle en l’espèce est celle de la décision raisonnable; la Section d’appel de l’immigration a interprété sa propre loi et la norme de contrôle a été établie par la jurisprudence antérieure : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 53 et 54, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir]; Bousaleh, au paragraphe 16 et Sendwa, au paragraphe 13.

[11]  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, au paragraphe 47. Les motifs répondent aux critères établis dans l’arrêt Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles et acceptables. Pour cette raison, la Cour peut, lorsque cela s’avère nécessaire, examiner le dossier afin d’évaluer le caractère raisonnable de la décision : Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 15 et 16, [2011] 3 RCS 708.

[12]  Était-il déraisonnable pour la Section d’appel de l’immigration de conclure que la mère de M. Maduekwe pouvait être parrainée, car celle-ci était toujours vivante? Comme il a été dit dans la question certifiée posée dans l’arrêt Bousaleh, en décidant que M. Maduekwe pouvait parrainer sa mère, une personne énumérée à l’alinéa 117(1)h), et donc qu’il ne pouvait parrainer un autre membre de la famille aux termes de l’alinéa 117(1)h), fallait-il d’abord que la Section d’appel de l’immigration examine si la demande de parrainage de la personne énumérée avait une chance raisonnable d’être accueillie?

[13]  Pour le moment, le poids de la jurisprudence de la Cour appuie la décision de la Section d’appel de l’immigration en l’espèce voulant qu’une personne peut parrainer un autre parent aux termes de l’alinéa 117(1)h) seulement s’il ne lui est pas possible de parrainer un autre membre de la famille énuméré à cet alinéa : Jordano c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1143, aux paragraphes 4 et 9, 442 FTR 221; Sendwa, aux paragraphes 3, 18 et 19; et Bousaleh, aux paragraphes 27 et 28.

[14]  Compte tenu de la jurisprudence existante, il était raisonnable pour la Section d’appel de l’immigration de conclure que le demandeur n’était pas admissible à parrainer son neveu au titre de l’alinéa 117(1)h), car il était admissible à parrainer sa mère toujours vivante.

[15]  Toutefois, si, dans l’affaire Bousaleh la Cour d’appel fédérale devait déterminer que la Section d’appel de l’immigration est tenue examiner si la demande de parrainage de M. Maduekwe a une chance raisonnable d’être accueillie, la décision de la Section d’appel de l’immigration en l’espèce serait tout de même raisonnable.

[16]  Les seuls éléments de preuve présentés par M. Maduekwe portant sur l’interdiction de territoire de sa mère et son incapacité de voyager afin de subir un examen effectué par un médecin désigné étaient ses propres déclarations, des photographies de sa mère et une lettre de son médecin rédigée ainsi :

[traduction]

Je vous écris afin de confirmer que Mme Geraldine Maduekwe est notre patiente. Mme Maduekwe souffre d’hypertension et a déjà eu un accident vasculaire cérébral (AVC).

L’endurance et la capacité de mouvement de Mme Maduekwe ont été atteintes, ce qui signifie qu’elle a besoin d’aide dans sa vie quotidienne.

[17]  Compte tenu de la jurisprudence actuelle, il était raisonnable pour la Section d’appel de l’immigration de conclure que la preuve de M. Maduekwe ne permettait pas de conclure que sa demande de parrainage de sa mère serait rejetée. Si la Cour d’appel fédérale répondait par l’affirmative à la question certifiée présentée dans la décision Bousaleh, la conclusion de la Section d’appel de l’immigration portant sur l’insuffisance de la preuve serait toujours raisonnable, compte tenu des faits de l’espèce. La conclusion de la Section d’appel de l’immigration, voulant que les photographies et les déclarations de M. Maduekwe et du médecin de sa mère, à elles seules, constituent une preuve insuffisante pour conclure que la demande de parrainage de sa mère présentée par le demandeur n’avait pas de chance raisonnable d’être accueillie, appartient aux issues possibles acceptables.

[18]  Pour les motifs qui précèdent, la demande est rejetée.

[19]  Compte tenu de ces faits, il n’y a aucune question à certifier et aucune n’a été proposée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« E. Susan Elliott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 12e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3248-17

 

INTITULÉ :

PASCAL UGOCHUKWU MADUEKWE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 janvier 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DES MOTIFS :

Le 25 janvier 2018

 

COMPARUTIONS :

Personne n’a comparu

 

Pour le demandeur

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Olivia Furlong

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

 

Pour le défendeur

 

 

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