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Date : 20180403

Dossier : IMM-4007-17

Référence : 2018 CF 358

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 avril 2018

En présence de monsieur le juge Annis

ENTRE :

YONG LI ET LINA RONG

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, d’une décision relative à un examen des risques avant renvoi défavorable (la décision) rendue par un agent chargé de ces examens (l’agent) le 28 juillet 2017, concluant que les demandeurs ne sont ni des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, étant donné qu’ils ne seraient pas en danger malgré leur violation de la politique de planification familiale chinoise (la politique) en ayant eu trois enfants « non planifiés ».

[2]  La Section de la protection des réfugiés a examiné et a rejeté les arguments des demandeurs, lesquels étaient essentiellement les mêmes que ceux présentés à l’agent. La Section de la protection des réfugiés a conclu que les éléments de preuve présentés par les demandeurs n’appuyaient pas leur demande d’asile, compte tenu d’importantes réserves portant sur la crédibilité. Il s’agissait notamment de la tentative délibérée des demandeurs d’induire la Section de la protection des réfugiés en erreur en lui fournissant des documents frauduleux, de nombreuses incohérences, d’invraisemblances et de mensonges flagrants.

[3]  Plus important encore, la Section de la protection des réfugiés a rejeté l’allégation des demandeurs selon laquelle ils avaient deux autres enfants en Chine. Après avoir examiné également la demande d’asile sur place des demandeurs invoquant la grossesse de la demanderesse, la Section de la protection des réfugiés a rejeté ladite demande, en concluant que les demandeurs ne seraient passibles que d’amendes. Dans la plupart des cas, la Cour a conclu que les amendes ne constituent pas un risque suffisant pour justifier l’asile. La Cour a rejeté la demande d’autorisation d’interjeter appel de la décision de la Section de la protection des réfugiés, présentée par les demandeurs.

[4]  Les demandeurs ont produit des éléments de preuve supplémentaires à l’appui de leur demande. L’agent a trouvé peu de nouveaux éléments de preuve concernant les allégations formulées antérieurement.

[5]  L’agent a insisté sur le fait qu’il a rendu sa décision indépendamment des conclusions de la Section de la protection des réfugiés, mais en précisant qu’un poids important doit être accordé aux conclusions de la Section de la protection des réfugiés concernant la crédibilité et les risques, lorsque lesdites conclusions portent sur les mêmes questions.

[6]  L’agent a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir que les demandeurs ont deux enfants en Chine. Il a également conclu que les nombreux rapports sur la Chine avaient souvent été préparés avant la décision de 2015 rendue par la Section de la protection des réfugiés et que peu d’éléments de preuve démontraient que les documents sur l’état du pays n’avaient pu être présentés au commissaire de la Section de la protection des réfugiés.

[7]  Lors de l’évaluation des risques sur place pour les demandeurs, la Section de la protection des réfugiés a conclu que la naissance de l’enfant au Canada contrevenait à la politique. Cependant, l’agent chargé de l’examen des risques avant renvoi a admis, après avoir examiné les nouveaux rapports sur l’état du pays qui lui ont été présentés, que la demanderesse (et peut-être le demandeur, si son nom figure sur le certificat de naissance canadien, lequel n’a pas été déposé en preuve) serait probablement passible d’une amende relative à l’enregistrement de son enfant en Chine, mais il a néanmoins conclu que les demandeurs n’avaient pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer qu’il existe une possibilité sérieuse qu’ils soient victimes de persécution en Chine.

[8]  En l’espèce, la question précise formulée par les demandeurs consiste à rechercher si les amendes, reconnues comme un risque généralisé, équivaudraient néanmoins à de la persécution. Plus précisément, les demandeurs ont affirmé que les [traduction] « frais de compensation sociale », aux termes de la politique, pourraient entraîner le refus par les autorités de délivrer certains documents juridiques, comme les documents de naissance et le certificat de résidence (le hukou), et que les amendes pourraient être exorbitantes selon la localité de résidence de la personne. Des éléments de preuve ont démontré que les amendes étaient habituellement plus élevées que le revenu annuel moyen et qu’elles étaient, à l’occasion, près de 10 fois plus élevées que le revenu annuel moyen.

[9]  Les demandeurs affirment que peu importe si la norme de contrôle est celle de la décision correcte (le défaut de la Section de la protection des réfugiés de tenir compte de la demande sur place) ou de la décision raisonnable (un examen de l’analyse faite par la Section de la protection des réfugiés de la demande d’asile sur place), selon la décision Hou c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 993, au paragraphe 11, dans les deux cas, la décision devrait être annulée.

[10]  La Cour n’est pas de cet avis. Les demandeurs n’ont fourni aucun élément de preuve concernant la façon dont la politique s’appliquerait à eux en fonction de leur localité de résidence ou concernant les moyens financiers dont ils disposent pour payer toute amende qui pourrait leur être imposée. Par conséquent, il n’a pas été possible de déterminer si la politique, comme appliquée aux demandeurs, constituerait une forme de persécution.

[11]  De plus, la documentation de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, citée par l’agent et les deux parties, concernant le traitement des enfants nés en violation de la politique renvoie à une note d’information publiée par le bureau fédéral pour la migration et les réfugiés de l’Allemagne et indique que des modifications à la politique annoncées en 2015 permettraient aux citoyens non inscrits de recevoir des certificats de résidence, autorisant ainsi les enfants à fréquenter l’école et accordant un libre accès aux services sociaux, y compris les soins médicaux. Certaines questions ont été soulevées concernant la mise en œuvre de ces mesures, mais les modifications indiquent une atténuation prospective de la sévérité de la politique.

[12]  Les demandeurs ont également omis de présenter des éléments de preuve pour démontrer l’application des amendes payables à la suite de la naissance d’un seul enfant né à l’extérieur de la Chine, dans le cadre d’une union de fait, et si le mariage des demandeurs entraînerait la réduction ou l’annulation des amendes.

[13]  Dans les circonstances, la Cour conclut que les demandeurs ne se sont pas acquittés du fardeau de démontrer que la décision de l’agent était déraisonnable parce qu’elle n’appartenait pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et qu’elle n’était pas suffisamment justifiée, transparente et intelligible, selon les motifs énoncés, pour permettre de rejeter la demande. Aucune question sérieuse n’a été posée aux fins de certification.

JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-4007-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire de la décision relative à l’examen des risques avant renvoi est rejetée.

  2. Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

« Peter Annis »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 8e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

IMM-4007-17

 

INTITULÉ :

YONG LI ET LINA RONG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 7 mars 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ANNIS

 

DATE DES MOTIFS :

Le 3 avril 2018

 

COMPARUTIONS :

Dov Maierovitz

POUR LES DEMANDEURS

 

Kevin Doyle

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dov Maierovitz

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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